Séance en hémicycle du 12 mai 2009 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • hospitalière
  • l’hôpital
  • médecin
  • médecine

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Bernard Frimat.

Photo de Bernard Frimat

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.

Pour votre bonne information, mes chers collègues, je vous signale que la discussion générale, si tous les orateurs respectent leur temps de parole – je ne leur en tiendrai bien évidemment pas rigueur…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

–, devrait encore nous occuper deux heures et quarante-trois minutes. Aussi serons-nous amenés, madame la ministre, monsieur le président de la commission, à décider au fil de la séance comment et jusqu’à quelle heure nous poursuivrons nos travaux. Je rappelle en effet que le Sénat doit examiner demain, à neuf heures trente, un autre texte. Nous affinerons donc chemin faisant !

Mme la ministre et M. le président de la commission acquiescent.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Alain Vasselle.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Monsieur le président, madame le ministre, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite vous faire partager ma vision du texte en tant que rapporteur des volets consacrés aux équilibres généraux et à l’assurance maladie dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale.

J’aborderai quatre sujets : le premier, que j’évoquerai brièvement, est celui de la gouvernance hospitalière ; le deuxième, celui de la démographie médicale ; le troisième, celui de la coordination des soins de ville et des soins à l’hôpital, qui me paraît essentielle ; le quatrième, enfin, celui des agences régionales de santé, les ARS.

Avant toute chose, cependant, je voudrais souligner l’excellent travail – chacun ici en conviendra – réalisé par la commission des affaires sociales, son président et son rapporteur pour améliorer le texte et aboutir à la rédaction que nous examinerons en séance publique. Ce fut un véritable travail de titan, que nous risquons de devoir refaire dans l’hémicycle !

M. le rapporteur a rappelé tout à l’heure les principaux aspects sur lesquels la commission a travaillé, notamment dans le domaine de la gouvernance hospitalière, mon premier point. Je ne peux que soutenir la démarche entamée par la commission, qui souhaite associer les médecins à la gestion des établissements, en tout cas à sa dimension médicale. J’ai noté que plusieurs intervenants allaient dans le même sens, et je ne doute pas que le Sénat, dans sa sagesse, saura ne pas revenir sur les amendements que la commission a déjà adoptés.

De la même manière – j’aborde mon deuxième point –, il me semble pertinent d’avoir privilégié les mesures incitatives pour influencer l’installation des futurs médecins libéraux et de faire ainsi confiance, comme vous l’avez souligné, madame le ministre, aux partenaires conventionnels. Cela ne nous empêche pas de nous assurer qu’ils disposent de tous les outils nécessaires pour remplir les objectifs que nous leur avons fixés ni de contrôler que ceux-ci sont bien atteints, voire d’inciter à la conclusion de certaines négociations entamées de longue date. Je pense plus particulièrement à celle qui porte sur le secteur optionnel, dont il est question depuis suffisamment longtemps et qui n’a pas encore abouti.

Cela étant, la confiance n’est pas incompatible, à mon sens, avec la détermination par les pouvoirs publics de quelques lignes directrices claires destinées à préparer l’avenir. Voilà deux ans déjà, notre collègue Jean-Marc Juilhard, dans un rapport d’information intitulé Offre de soins : comment réduire la fracture territoriale ?, avait souligné deux éléments très utiles pour favoriser une meilleure répartition de l’offre de soins libérale.

Ainsi, il proposait la création d’un guichet unique destiné à apporter une meilleure information aux étudiants. J’ai d’ailleurs noté, madame le ministre, que c’était là une de vos préoccupations majeures, puisque vous l’avez rappelée devant la commission des affaires sociales. Les internes en médecine se plaignent en effet de ne pas être suffisamment bien informés sur le dispositif mis en œuvre, et je sais que vous souhaitez faire remplir à l’ARS un rôle déterminant dans ce domaine. J’espère donc que ces mesures permettront d’encourager les médecins à faire appel au dispositif incitatif et contribueront ainsi à résoudre cette question de la démographie médicale.

Notre collègue M. Juilhard avait développé une autre idée, celle du développement des maisons médicales de garde. Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, la commission des affaires sociales, suivant en cela une proposition que j’avais formulée, nous avait invités à introduire la notion de maison médicale dans le code de la santé, et il vous revenait, madame le ministre, de favoriser le lancement d’expérimentations. Je note que celles-ci ont un peu de mal à se mettre en place, mais je ne veux pas désespérer. Les ARS permettront-elles d’accélérer les choses ? Je le souhaite.

Il me semble, mes chers collègues, que le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires va dans le sens indiqué. Je voudrais toutefois vous rappeler, madame le ministre, les efforts financiers que les collectivités territoriales ont déjà fournis pour favoriser le maintien et l’installation des médecins, et insister sur la nécessité, à mon sens, de prévoir sur ce sujet une véritable collaboration avec les ARS.

Je vous rappelle aussi quelques dysfonctionnements en matière de zonages, également soulignés par M. Jean-Marc Juilhard, puisque les zonages qui concernent la densité médicale ne recoupent pas toujours ceux qui sont liés à l’aménagement du territoire ; je pense ici plus particulièrement aux zones de revitalisation rurale.

Mme Nathalie Goulet acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

J’en arrive à mon troisième point : la fluidité du parcours de soins entre la médecine de ville et l’hôpital, voire les établissements médico-sociaux.

Nous connaissons tous les défaillances de cette relation. Aucun débat, aucun rapport consacré à la santé publique n’élude la question ; le rapport de la commission de concertation relative aux missions de l’hôpital, qui était présidée par Gérard Larcher, l’a d’ailleurs rappelée avec force. Toutefois, lorsque je demande à mes interlocuteurs ce qu’il convient de faire concrètement, ils restent silencieux ; j’ai encore pu le constater à l’occasion de discussions que, à ma modeste échelle, j’ai menées récemment.

Or, à ma connaissance, le texte que nous allons examiner ne contient aucune disposition précise en la matière. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous proposerai un amendement qui me semble particulièrement important et qui vise à développer ce que les Anglo-Saxons appellent le case management. La démarche consiste à développer une fonction d’appui pour la prise en charge des situations les plus graves. Il s’agit, par exemple, d’assister les patients qui vont subir une hospitalisation afin de s’assurer qu’ils reçoivent les soins adéquats et que leur sortie est organisée. Cet appui ne se limite pas aux questions sanitaires ; il concerne également la prise en charge de problèmes administratifs ou sociaux. Dans le monde anglo-saxon, cette tâche est prise en charge par les assureurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

En France, certains assureurs complémentaires réfléchissent à l’opportunité de la mise en œuvre de ce type de système.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Il me semble indispensable que nous débattions de ce sujet et qu’éventuellement nous autorisions l’assureur public à développer ce type de service, notamment pour les assurés souffrant d’une affection de longue durée, qui, on le sait, pèsent lourdement sur les finances de la sécurité sociale. Ces malades font déjà l’objet d’un accompagnement particulier dans le cadre du programme Sophia, qui est destiné à la prise en charge des diabétiques mais qui, à mon sens, a vocation à voir son champ s’étendre à d’autres pathologies. De nouvelles prises en charge peuvent être proposées à cette population, à laquelle nous devons être attentifs.

Un tel choix devrait permettre de charger un acteur bien identifié de la mise en œuvre d’une meilleure articulation entre la ville et l’hôpital. Il aurait également l’avantage de favoriser l’émergence des bonnes pratiques développées localement et d’assurer ainsi une meilleure prise en charge des patients, au-delà de la transmission de l’information médicale, qui, à terme, sera assurée par l’intermédiaire du dossier médical personnel, le DMP. Je sais, madame le ministre, combien vous vous êtes investie, depuis que vous avez pris vos fonctions ministérielles, pour que ce DMP voie enfin le jour. L’attente a assez duré, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

… et j’espère que nous verrons bientôt le bout du tunnel.

Je voudrais maintenant aborder mon quatrième et dernier point : la question des agences régionales de santé, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

… les très attendues ARS, dont la création constitue une évolution importante de l’organisation de notre système de soins. Je ne serai pas aussi critique que l’a été notre collègue M. Autain ; j’ai cependant quelques interrogations sur lesquelles je me permettrai d’appeler l’attention de Mme le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Ces structures nouvelles seront dotées de compétences très larges. Mais prenons garde à ne pas en attendre trop et qu’elles ne soient pas source de désillusions !

Ma première remarque concernera les directeurs généraux des ARS. Ils auront à gérer des dossiers très lourds. Je ne vous cache pas, madame le ministre, que, à titre personnel, je crains – j’espère que ce ne sera pas fondé – qu’ils ne soient absorbés en quasi-totalité par la question hospitalière – Dieu sait s’il y a à faire à l’hôpital ! – en raison de l’importance des budgets et des négociations contractuelles à mener avec l’ensemble des établissements de santé publics et privés.

Ces directeurs généraux devront faire preuve de nombreuses qualités – je sais que vous faites tout pour cela – pour assurer la mise en oeuvre et la direction de ces agences.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

En outre, madame le ministre, j’ose espérer qu’ils auront la volonté, contrairement aux directeurs d’ARH qui en ont parfois été dépourvus, d’être en contact avec les élus locaux, et ce d’autant plus que les ARS devront intervenir dans le domaine médico-social – Valérie Létard l’a évoqué tout à l’heure –, en collaboration avec les départements.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Les élus locaux ne siégeront plus au conseil de surveillance !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

J’en viens au cœur de mon propos sur les ARS, à savoir le choix, au nom de la rationalisation administrative, de confier à une seule structure à la fois l’organisation de l’offre de soins, le contrôle de la dépense hospitalière…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

… et la gestion du risque assurantiel en santé ; c’est beaucoup.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je ne vous surprendrai pas en vous disant qu’il y a à mon sens des risques de conflit d’intérêts…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

… à confier à une même structure l’ensemble de ces missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Les ARH n’ont d’ailleurs pas su mener de front les missions d’organisation et de contrôle.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Elles n’en avaient pas la compétence !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Il suffit pour s’en convaincre de se reporter aux rapports de l’IGAS et de l’IGS sur ce sujet. Nos voisins européens choisissent souvent de dissocier ces fonctions sans pour autant remettre en cause le caractère régalien des politiques de santé.

Si cette argumentation sur le fond ne suffit pas à vous convaincre, madame le ministre, j’aborderai la question de façon plus pragmatique.

Dans quelques mois, ces directeurs généraux vont devoir mettre en place des structures rassemblant plusieurs centaines de personnes venant d’horizons variés, porteurs de cultures administratives différentes.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est ce qui fait leur richesse !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Il est difficile de croire que ces hommes et ces femmes, quelles que soient leurs qualités, pourront mener de front l’ensemble des compétences qui leur sont confiées.

D’ailleurs, M. le rapporteur avait proposé, plutôt qu’un transfert, une mise à disposition, ce qui, à mon sens, permettait, dans un premier temps, d’assurer la transition de manière un peu plus satisfaisante avant de passer directement au transfert.

Cela étant, la commission a tranché : un choix a été fait en accord avec le Gouvernement ; je n’y reviendrai pas et je ne déposerai pas d’amendement à ce sujet.

La priorité des ARS sera de travailler à une meilleure organisation de l’offre de soins avec les établissements de santé et à la création des communautés hospitalières de territoire, avec les établissements médico-sociaux, dans le domaine de la médecine ambulatoire, pour laquelle nos attentes sont grandes et le temps compté, comme mes collègues l’ont souvent souligné.

Mes chers collègues, comment, dans un tel contexte et une telle urgence, les directeurs généraux pourront-ils mener de front les missions d’organisation de soins et de gestion du risque ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ils auront une équipe !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Pouvons-nous prendre le risque que certaines compétences transférées vers les ARS ne soient pas exercées pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois ? Pouvons-nous interrompre des dynamiques que nous avons eues tant de mal à mettre en oeuvre et qui commencent à produire leurs effets ?

On ne peut pas faire le procès de la Caisse nationale d’assurance maladie à ce sujet. Les résultats en matière de soins de ville sont probants. Vous-même, madame le ministre, avez relayé les propos tenus par votre prédécesseur, Xavier Bertrand. La maîtrise médicalisée en soins de ville est une réalité. Elle a permis de contenir l’évolution du déficit de la branche maladie, et il nous faut absolument parvenir à ces mêmes résultats de maîtrise médicalisée des dépenses à l’hôpital. Nous attendons d’ailleurs à ce sujet la parution d’un décret sur l’identification des médecins hospitaliers, mais cela tarde un peu.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Voilà pourquoi, madame le ministre, nous avons proposé des modifications à l’architecture initialement retenue et voilà pourquoi je proposerai encore d’optimiser la place et le rôle des ARS par rapport aux autres acteurs du système.

Il s’agit de pragmatisme, et cette solution ne se traduira pas par une dépossession de compétences dont seraient victimes l’État ou les ARS. La politique de gestion du risque sera décidée au niveau national, dans le cadre du comité national. La convention d’objectifs et de gestion qui lie les caisses d’assurance maladie précisera les objectifs que l’État fixe aux caisses et permettra de suivre leur exécution.

Une telle solution est dans la continuité des amendements adoptés sur l’initiative de la commission : elle a pour avantage de faciliter la prise en compte d’une dimension régionale dans la gestion du risque sans obliger le directeur général de l’ARS à signer des conventions avec l’ensemble des caisses locales d’assurance maladie de sa région.

Les orientations souhaitées par l’ARS seraient ainsi mises en oeuvre. Cette convention pourrait, madame le ministre, comme l’a d’ailleurs évoqué dans un entretien le secrétaire général de votre ministère, contenir des dispositions plus larges, par exemple pour la mise en place d’actions de prévention ou de mesures destinées à favoriser l’offre de soins.

C’est bien une véritable complémentarité entre l’échelon régional et l’échelon national qui doit être mise en œuvre, et je pense que tel est votre souci, madame le ministre. Je ne doute pas que nous réussirons à nous entendre sur le texte qui réunira les ARS.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le président, madame le ministre, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, longtemps vanté comme l’un des meilleurs du monde, notre système de santé présente aujourd’hui de redoutables symptômes : un financement fragilisé, un pilotage contesté et éclaté, et, surtout, des inégalités très profondes d’accès aux soins.

Les avancées scientifiques et technologiques ont certes rendu la médecine plus fiable, mais les problèmes d’organisation des soins et de démographie médicale privent un grand nombre de Français du bénéfice de ces performances.

Dans certains territoires, en particulier ruraux, la permanence des soins est très approximative, les délais d’accès en cas d’urgence sont incompatibles avec l’efficacité des soins, les files d’attente pour les spécialistes s’allongent. En bref, le désert médical s’installe et gagne du terrain dans nos campagnes !

Les origines de ce problème sont évidemment diverses – manque d’attractivité ou enclavement des territoires, disparition des services publics, dévalorisation de la médecine générale, désintérêt pour certaines spécialités –, mais il faut dire aussi que les conditions brutales et souvent anarchiques dans lesquelles sont conduites depuis quelques années les restructurations hospitalières ont également un impact très fort. Elles démotivent les professionnels et désorganisent la coordination des soins.

À cela s’ajoutent pour les patients des difficultés financières liées aux déremboursements, aux franchises, aux coûts de transports et plus encore aux dépassements d’honoraires. Dans certains secteurs, il devient même difficile de trouver des médecins du secteur 1.

Face à cette situation, qui ne date pas d’hier, on ne peut plus se contenter de mesures isolées, de vœux pieux. Il est temps de décider et d’agir, d’autant que, en matière de santé plus encore que dans d’autres domaines de l’action publique, les fruits se récoltent à moyen et à long terme.

Madame la ministre, votre projet de loi était donc très attendu. Loin d’emporter l’adhésion de ceux qui font l’excellence de l’hôpital– je veux parler bien sûr des médecins –, il a plutôt provoqué leur grogne.

Le texte de la commission des affaires sociales du Sénat semble impliquer davantage les médecins dans la gouvernance de l’hôpital, mais on peut encore espérer mieux. Nous attendrons l’examen de nos amendements pour nous prononcer sur ce volet.

En ce qui concerne l’accès aux soins, certaines dispositions sont intéressantes : la gestion des effectifs médicaux par discipline et par région en fonction des besoins – cela a déjà été dit –, le rôle pivot du médecin généraliste dans les soins de premier recours, les stages permettant la connaissance de la médecine générale, y compris rurale, le contrat d’engagement de service public...

Les agences régionales de santé, dont nous approuvons le principe, permettront aussi une unité d’action, car l’émiettement de l’État dans le domaine sanitaire, le cloisonnement entre l’hôpital et la médecine de ville, le corporatisme, les concurrences excessives entre les établissements de santé figurent également parmi les raisons du désordre actuel.

Mais ces mesures seront-elles suffisantes pour réduire les inégalités d’accès aux soins ? Nous en doutons. Quoi qu’il en soit, elles ne trouveront leur plein impact que dans un délai de deux à quatre ans, voire dix ans pour certaines d’entre elles.

Or, il y a urgence. Le désert médical s’est déjà installé dans certains territoires. Aucune mesure immédiate n’est proposée, pas plus pour orienter l’installation dans les zones sous-dotées que pour garantir l’accès à des soins à tarifs opposables.

Les maisons de santé, les centres de santé, les réseaux permettent de rompre l’isolement, d’accueillir des praticiens habitant des zones urbaines et de partager les tâches. Mais ces projets ont du mal à émerger. Ces regroupements doivent être encouragés vigoureusement parce qu’ils sont aussi indispensables à la survie des hôpitaux.

Enfin, j’ai noté dans votre texte la disparition de l’hôpital local …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

… ce qui laisse augurer un certain nombre de problèmes eu égard aux décrets d’application de la médecine.

Le remaillage offensif des territoires exige une démocratie sanitaire participative. Or, le mode de gouvernance des ARS ne présage rien en ce sens.

La modernisation du réseau hospitalier doit être négociée et non imposée. Les ARS devront être garantes de la coopération hospitalière entre les grands centres hospitaliers et les hôpitaux de proximité, en évitant le « cannibalisme hospitalier ». Les hôpitaux locaux constituent, me semble-t-il, un renfort indispensable pour les médecins généralistes et un point d’appui pour de nombreuses spécialités.

Dans certains secteurs particulièrement isolés, il faut permettre leur maintien, même en dessous des seuils déjà engagés par les ARS et certaines directions départementales, qui procèdent déjà à des maillages ne correspondant pas aux besoins des populations. Ces petits hôpitaux doivent être maintenus – j’y insiste –, et il faut encourager leur regroupement par fusion volontaire.

Pour conclure, monsieur le président, madame la ministre, vous l’aurez compris, la grande majorité des membres du groupe RDSE n’est pas convaincue par ce projet de loi, même amélioré par la commission des affaires sociales dont nous saluons le travail. Nous serons donc attentifs aux suites qui seront données aux très nombreux amendements dont nous partageons la philosophie, qu’ils émanent ou pas de notre groupe ; c’est en fonction du sort qui leur sera réservé que nous déciderons de voter pour ou contre votre texte.

Applaudissements sur les travées du RDSE. –Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, lorsque j’ai pris connaissance du titre Ier de ce projet de réforme de l’hôpital sur lequel je souhaite intervenir ce soir, il m’est spontanément venu à l’esprit ce qu’écrivait récemment le sociologue Frédéric Pierru, chercheur au CNRS et enseignant à l’université Paris-Dauphine : « La réforme de l’hôpital n’est jamais qu’une illustration parmi d’autres des transformations plus fondamentales du politique. Des élites, délaissant de plus en plus les valeurs du public au profit (dans tous les sens du terme) du privé, avides d’indicateurs de gestion prétendument objectifs, sûres de la supériorité de leurs recettes et jargon passe-partout, coupées de la réalité de l’expérience vécue des citoyens ordinaires, profondément méfiantes à l’égard de toute forme de contre-pouvoirs [...] ». En l’occurrence, il s’agit ici de celui des élus et des médecins.

Ensuite, je me suis posé une question : fallait-il de toute urgence initier une « nouvelle gouvernance » à l’hôpital ? La question mérite d’être posée. Cette « nouvelle gouvernance » intervenait dans un univers hospitalier déjà très fragilisé par une concentration de réformes récemment survenues sur une période très courte. Bref, il nous faut être conscient du fait que l’hôpital peine encore aujourd’hui à intégrer l’impact de ces différentes réformes qui, de plus, n’ont pas été évaluées.

Les professionnels médicaux et paramédicaux, les premiers visés par ces réformes, souhaitent du temps pour repenser leurs missions et leur organisation dans l’intérêt des malades ; l’accumulation accélérée de réformes ne le leur donnant pas, la perspective d’une nouvelle réforme de l’ampleur de celle qui est annoncée eut pour conséquence presque immédiate la cristallisation de la conflictualité sociale latente au sein de l’hôpital depuis de nombreux mois. Vous connaissez la suite : des manifestations, des grèves…

Quel est l’intérêt des malades dans tout cela ? Mais est-ce bien l’intérêt des malades qui guide la réforme proposée par le projet de loi touchant la « gouvernance » de l’hôpital ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Permettez-moi d’en douter, madame la ministre, l’intérêt des malades finissant par disparaître derrière une préoccupation centrale autre de vos services, à savoir la seule rentabilité de la structure hospitalière.

L’hôpital est victime d’un concept qui a lentement mûri, d’abord dans les têtes, puis dans les déclarations de quelques technocrates opiniâtres, économistes de la santé, gestionnaires hospitaliers qui tentent de le faire passer en force aujourd'hui dans la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

M. Jacky Le Menn. Ce concept est celui de « l’hôpital entreprise », n’en déplaise au Président de la République !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Cela ferait longtemps qu’il aurait déposé le bilan !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Je vous demande de bien réfléchir sur ce concept, mes chers collègues, si vous souhaitez réellement éviter la mort de l’hôpital public, ce dont je ne doute pas.

Regardons donc de plus près ce que recouvre ce concept mortifère pour l’hôpital public, dans ses déclinaisons inscrites dans le projet de loi portant réforme de l’hôpital, et relatif aux patients, à la santé et aux territoires tel qu’il nous est arrivé en commission des affaires sociales, et dont de grosses scories demeurent encore dans le texte qui nous est présenté aujourd’hui.

Premièrement, il recouvre une centralisation extrême du pouvoir dans la fonction directoriale tout entière incorporée, au sens bourdieusien du terme, dans un seul homme, à savoir « le directeur de l’hôpital », le « patron », selon le Président de la République, qui le qualifie ainsi dans une rhétorique empruntée à une vision bonapartiste de la « gouvernance » des institutions.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Ce directeur, rendu puissant en interne dans la structure hospitalière, est aussi, paradoxalement, un colosse aux pieds d’argile, dont on découvre rapidement qu’il n’est que le porte-voix du directeur général de l’agence régionale de santé, véritable préfet sanitaire, hyperpuissant, nouveau « maître Jacques » de la politique sanitaire régionalisée qui nous est annoncée, en fait le véritable patron de l’hôpital ou plutôt des hôpitaux de la région.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Auparavant, c’était le ministre de la santé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Nous voilà en pleine théâtralisation de « l’illusionnisme social » : celui que l’on croit être l’acteur principal ne l’est pas vraiment, alors que celui qui l’est, le directeur général de l’ARS, se tient hors dudit hôpital, haut fonctionnaire à la manœuvre, lui-même aux ordres, ayant parfaitement intégré sa mission prioritaire consistant à rechercher l’efficience financière, supposée, du système sanitaire français, quel qu’en soit le prix à payer pour les malades et les soignants de l’hôpital public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Le directeur de l’hôpital, promu président d’un « directoire miroir », dont il choisit les membres, pense sans doute, de bonne foi, pouvoir piloter son établissement. Certes, il le pilotera, mais sous contrôle étroit du directeur général de l’ARS, qui, l’évaluera, lui attribuera un budget pour son établissement à l’issue d’une caricature de négociation budgétaire, un budget dont il vaudra mieux qu’il se satisfasse et avec lequel il devra se débrouiller pour éviter de tomber dans l’ « enfer » de l’administration provisoire, promise à son hôpital s’il franchit la ligne blanche d’un déficit budgétaire auquel il sera pourtant, dans la majorité des cas, condamné. Il y sera condamné, compte tenu des conditions de calcul irréalistes du budget des hôpitaux soumis aux contraintes de la tarification à l’activité, doublé d’un enjeu pervers visant une convergence totale, à moyen terme, entre cliniques privées à but lucratif, ayant le choix de leurs malades, et hôpitaux publics, astreints à accueillir tous les malades.

On nous promettait cette convergence totale pour 2012. Mais, madame la ministre, la récente lettre que vous avez adressée au président de la Fédération hospitalière de France la renvoie à 2018, une sage et prudente décision que nous estimons encore, pour notre part, insuffisante, puisque nous voulons la suppression totale de cet objectif de convergence, un objectif meurtrier pour l’hôpital public, mais qui constitue, en revanche, une réelle aubaine pour les chaînes de cliniques privées à but lucratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Deuxièmement, ce concept mortifère fait apparaître un effacement renforcé du conseil d’administration de l’hôpital, qui détenait déjà bien peu de pouvoirs. Changement de terminologie – novlangue managériale propre à « l’hôpital entreprise » oblige –, le conseil d’administration devait devenir un simple conseil de surveillance anémié si nous n’y avions mis un frein en commission des affaires sociales, frein tout relatif, du reste, malgré quelques avancées, dont celle de se prononcer sur la stratégie de l’hôpital. On m’a assuré en commission que la stratégie financière y était incluse ; …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

… je reste cependant sceptique. Une avancée a également été consentie au niveau des communautés hospitalières de territoires, puisque le conseil de surveillance a désormais la possibilité d’émettre des avis dans quelques domaines, ce qui est satisfaisant.

Dans la même veine, on note l’effacement des élus politiques locaux. Heureusement, là aussi, la commission des affaires sociales, faisant écho à plusieurs amendements, dont de nombreux issus de nos rangs, a partiellement rectifié le projet gouvernemental.

Mais, madame la ministre, comment pouviez-vous souhaiter minorer l’influence, dans les conseils de surveillance, de ces « médiateurs naturels » que sont les élus locaux investis d’une forte légitimité aux yeux des populations – tous les sondages le soulignent –, alors même que les projets de restructuration accélérée que vous envisagez vont perturber tous les territoires de l’Hexagone, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mais les élus locaux n’ont jamais été aussi nombreux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

… avec notamment la mise en place des futures communautés hospitalières de territoires, des opérations à haut risque s’il en est et sur lesquelles je reviendrai ultérieurement ? En effet, les élus sont les seuls à pouvoir dire où se trouve l’intérêt de la population et des malades dans ces opérations de restructuration.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Les élus sont bien plus opérants pour mettre en mots des explications pertinentes lorsqu’elles sont fondées et les rendre audibles et crédibles pour nos concitoyens que toute la technocratie administrative locale, régionale et nationale réunie.

Troisièmement, ce concept recouvre également une mise à l’écart délibérée de la communauté médicale et soignante des processus de décisions essentiels de l’hôpital.

Du coup, cette communauté et, principalement, le corps médical hospitalier, qui va du médecin de base au professeur de médecine, s’apprêtait à vivre la « nouvelle gouvernance hospitalière » annoncée sur un mode catastrophique bien compréhensible.

Madame la ministre, vous le savez, s’agissant des médecins hospitaliers, l’immense majorité d’entre eux, qu’ils exercent en province ou à Paris, sont très loin des clichés complaisamment répandus, qui en font tous des « mandarins ».

Non, nos médecins hospitaliers sont des « médecins de terrain » fortement impliqués dans une approche moderne d’une gestion optimisée des moyens médicaux, en accord avec les progrès et innovations de la médecine qu’ils connaissent et maîtrisent et les besoins de la population en matière de santé auxquels ils s’attachent avec conscience, constance et détermination à apporter des réponses.

Oui, nos médecins hospitaliers travaillent avec le sens des responsabilités en matière économique et financière à l’égard de la structure de soins qui les emploie. En plus, ils font preuve d’un immense dévouement, et cette grande humanité est dégagée, pour la grande majorité d’entre eux, de tout esprit de lucre, ce qui n’est pas rien à une époque où, hélas ! l’argent et la richesse sont devenus la mesure obligée de l’excellence.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il y a aussi beaucoup d’humanité chez les ministres !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Or, que demandent ces médecins de l’hôpital public ? Contrairement à ce qui prévaut dans la conception de « l’hôpital entreprise », ils demandent que soit reconnue par le législateur l’évidente nécessité de médicaliser certaines décisions administratives essentielles concernant le pilotage de l’hôpital, son organisation et la nomination de ses responsables fonctionnels médicaux, et ce dans l’intérêt de l’hôpital qu’ils s’estiment, selon moi, à juste titre, être les plus à même de définir.

D’abord, il faut accepter que le projet médical, qui constitue l’épine dorsale du projet d’établissement d’un hôpital, soit élaboré, et non pas simplement préparé, par la communauté médicale. Il s’agit là non pas d’une banale affaire de sémantique, mais d’une conception de fond extrêmement importante, sur laquelle notre assemblée doit prendre parti dans l’intérêt des malades accueillis à l’hôpital.

Il faut bien comprendre que ce projet médical concernera tous les pôles d’activités médicales de l’établissement. Il sous-tendra la contractualisation interne relative aux pôles où se déploient les activités de soins et, dans les CHU, les activités d’enseignement et de recherche. Nous sommes bien là au cœur de la raison d’être de l’établissement hospitalier. Les réflexions menées par les pôles d’activités nourrissent le projet médical et le déclinent une fois établi. Il ne s’agit donc pas là d’une affaire subalterne.

Dans ces conditions, l’élaboration du projet médical doit pouvoir se faire sous l’autorité conjointe du directeur de l’hôpital et du président de la commission médicale d’établissement. Le président de la commission médicale doit pouvoir coordonner avec le directeur de l’hôpital la politique médicale mise en œuvre dans l’hôpital. Ce point est, à mes yeux, essentiel.

Ensuite, la commission médicale ne doit pas être exclue de la contractualisation interne concernant les pôles d’activités médicales. Cette contractualisation ne peut être réservée au seul directeur de l’hôpital, qui signerait des contrats avec des chefs de pôles, qu’il aurait par ailleurs souverainement nommés, ou presque. Là encore, un avis – pourquoi pas conforme ? – de la commission médicale d’établissement s’impose ; tout comme s’impose, par ailleurs, son implication non marginale ou, au moins, celle de son président, dans le choix des chefs de pôles d’activités cliniques ou médico-techniques par le directeur de l’hôpital, président du directoire.

Le texte issu des travaux de la commission des affaires sociales a permis d’apporter, sur ces sujets, un minimum de solutions qui peuvent être acceptables dans un souci de compromis.

Pourquoi prenons-nous toutes ces précautions, qui peuvent vous paraître, mes chers collègues, comme autant de contraintes lourdes, voire inutiles, imposées à l’action du directeur de l’hôpital ? Ce n’est nullement par défiance, mais tout simplement par prudence.

En effet, madame la ministre, le projet médical doit être arrêté en conformité avec le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, le CPOM, qui sera signé entre le seul directeur de l’hôpital, dont nous avons vu la faiblesse externe, et le puissant directeur de l’agence régionale de santé, dans des conditions de subordination que l’on peut imaginer, et, de plus, sans impact vraiment sensible du corps médical de l’établissement sur ledit CPOM et avec mise à l’écart de son conseil de surveillance.

L’économie d’ensemble de ce processus ne pouvait qu’alimenter les craintes non seulement du corps médical, mais aussi des soignants, ainsi que de l’ensemble du personnel hospitalier, sur les risques réels, notamment en période de crise, que la logique économico-financière – logique comptable que 74 % de nos concitoyens rejettent dans le dernier sondage mensuel BVA-Les Échos – soit systématiquement « priorisée » par rapport à la logique médico-soignante dans les choix à faire par le directeur de l’hôpital, sous influence forte du directeur général de l’ARS, pour permettre à l’hôpital d’assumer ses missions de service public.

Madame la ministre, l’hôpital n’est pas une entreprise accueillant des consommateurs éclairés. Comment penser pouvoir traiter de « consommateur éclairé » le patient hospitalisé en urgence, celui qui est terrassé par l’annonce d’une maladie grave, l’hypocondriaque tyrannisé par son angoisse, le malade chronique qui n’arrive pas à suivre son traitement de peur d’être réduit à sa maladie, ou encore le patient victime de son addiction et mettant sa vie en danger pour échapper à la souffrance du manque ?

Traiter les malades en clients avertis et libres de leurs choix est une imposture servant à justifier la transformation de la médecine en un commerce, le médecin en un producteur, le patient en un client et l’hôpital en une « usine à soins », ce qui est inadmissible pour le vieil hospitalier qui vous parle. §

L’hôpital est une organisation complexe dans laquelle les professionnels, médecins et soignants sont en première ligne. L’hôpital est le lieu où un « corps souffrant », et souvent socialement démuni ou exclu, vient d’abord à la rencontre d’un médecin et d’un soignant. C’est aussi le lieu où l’étudiant reçoit l’enseignement de ses maîtres, les CHU devant répondre à une triple mission, et où la recherche biomédicale s’élabore.

Le mode de fonctionnement de ce type d’organisation complexe requiert la mise en place de stratégies décisionnelles spécifiques où la valorisation du jeu coopératif entre les opérateurs – en l’occurrence les professionnels médicaux, soignants et administratifs – est capitale et où les processus de régulation conjointe des décisions majeures à prendre par l’organisation sont essentiels.

Nous avons présenté en commission des affaires sociales de nombreux amendements pour apporter notre contribution à la construction de ce type de fonctionnement.

Quatrièmement, dans la conception de l’« hôpital entreprise », il devient banal d’ériger la masse salariale en variable d’ajustement budgétaire. Mais hélas ! n’est-ce pas déjà ce qui se passe aujourd’hui ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Tout le personnel des hôpitaux français l’a bien compris depuis la montée en puissance de la tarification à l’activité, la fameuse T2A. Le personnel est devenu la principale variable d’ajustement budgétaire de l’hôpital.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

M. Jacky Le Menn. La suppression massive d’emplois dans les hôpitaux – 20 000 emplois, nous prédit-on ! – n’est plus un mythe. Pensez-vous, madame la ministre, que ce personnel va continuer à subir sans réagir ? Le personnel hospitalier est fatigué, épuisé même. De plus, il est mal payé !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

On aura beau « euphémiser », neutraliser « la violence potentielle » que porte en elle la T2A dans l’hôpital public, en convertissant la décision politique qu’elle dissimule en un mécanisme d’allocations de ressources aux atours techniques, voire automatiques, personne parmi le personnel hospitalier n’est dupe.

Chacun a bien compris que l’enjeu sous-jacent à ce mode de tarification est de parfaire la définition arbitraire d’un « produit » hospitalier qui soit mesurable et comparable, et ce dans la perspective d’une augmentation de la « productivité » de l’hôpital public jugée insuffisante par rapport à celle d’une clinique privée à but lucratif.

Sur la base d’hypothèses hautement discutables, sans qu’il y ait une discrimination pertinente entre traitements pour malades aigus et traitements pour malades chroniques, les malades sont d’abord considérés, dans la conception de l’« hôpital entreprise », comme des « centres de coûts » qu’il faut minimiser et/ou transférer à d’autres.

Vous allez de nouveau me dire, madame la ministre, que toutes les questions relatives à la T2A concernent le projet de loi de financement de la sécurité sociale et n’ont rien à voir avec la réforme qui nous est aujourd’hui proposée.

Mais ne nous laissons pas abuser, mes chers collègues ! Cette réforme est en profonde cohérence avec le nouveau mode de financement des hôpitaux et la stratégie de convergence entre ceux-ci et les cliniques privées commerciales. Il s’agit d’une cohérence globale idéologiquement connotée libérale, dans une période où l’on constate, dans d’autres secteurs de notre économie, les ravages que sa mise en œuvre a induits.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

En ce qui concerne notre discussion d’aujourd’hui, rappelons que cette sélection des patients en fonction d’une « rentabilité supérieure escomptée », cette « marchandisation de la santé », n’appartient pas à la culture hospitalière française.

Je tiens maintenant à vous rappeler, madame la ministre, que le groupe socialiste est farouchement opposé à l’objectif pernicieux de votre gouvernement d’introduire dans notre législation une conception des missions du service public de santé « à la carte », si ce n’est « à la découpe », pour être plus facilement vendues au privé commercial, qui n’acceptera de prendre en charge que ce qui est rentable à court et à moyen terme.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ce n’est pas lui qui décide !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Les cliniques privées commerciales sont prêtes à accueillir les internes de quatrième ou de cinquième année tout simplement pour utiliser leurs compétences acquises en fin de formation en CHU et embaucher ensuite ces jeunes professionnels pour leur propre compte. Ainsi la part belle sera faite aux cliniques privées à but lucratif, du reste souvent regroupées dans des chaînes à capitaux étrangers, dont les responsables ont prioritairement l’œil fixé sur un taux de rentabilité à deux chiffres, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

M. Jacky Le Menn. … et ce aux frais de notre sécurité sociale !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

On ne nous fera pas croire que ces cliniques privées choisiront parmi les treize missions de service public prévues dans le projet de loi, celles qui ne conforteront pas leurs intérêts.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ce ne sont pas elles qui choisissent !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Choisiront-elles la huitième, qui a trait à la lutte contre l’exclusion sociale, ou la sixième, qui concerne les actions d’éducation et de prévention, ou encore la neuvième, qui vise les actions de santé publique ? Pour ma part, j’en doute.

Monsieur le président, mes chers collègues, j’en appelle au refus de la politique hospitalière qu’on nous propose, et pour laquelle les maîtres mots sont productivisme, sélection des patients et concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

J’en appelle au refus de toute politique qui émiette les missions du service public de santé dans l’intérêt des établissements privés à but lucratif, écarte les élus du pilotage des hôpitaux sis sur leur territoire, démédicalise la prise de décision à l’hôpital, ignore la parole des soignants et dénie l’utilité indispensable du travail de tous les autres personnels de l’hôpital, car il s’agit là d’une politique suicidaire pour l’hôpital public.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Votre propos est tout en nuances…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Madame la ministre, mes chers collègues, je ne saurais terminer mon intervention sans vous faire part de la position du groupe socialiste sur les communautés hospitalières de territoires.

Pour nous, le principe qui doit guider ces regroupements d’établissements est le volontariat, à égalité de droits entre les établissements concernés, sans subordination d’une structure à une autre, assis sur des conventions claires et reflétant la volonté des conseils de surveillance des établissements en cause.

Ce n’est qu’exceptionnellement, dans les cas où la sécurité des malades est en jeu, que le représentant de l’État doit intervenir d’une manière régalienne par la voie de la fusion. Enfin, la définition des conventions de regroupement doit scrupuleusement tenir compte des situations géographique et/ou spécifique des établissements concernés.

Pour conclure, je dirai que l’habileté de ce projet de loi consiste à avoir noyé la réforme de la gouvernance hospitalière dans une série de propositions visant à donner à la population le sentiment que le Gouvernement agit pour la défense de l’accès à des soins de qualité pour tous sur tout le territoire, ce qui n’est pas le cas.

En fait, les objectifs sous-jacents à ce projet sont le démantèlement du service public de santé et une privatisation accélérée de l’offre sanitaire sur notre territoire…

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Comment peut-on dire cela ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

… et le renforcement d’une médecine à deux vitesses au détriment de nos concitoyens les plus démunis.

Bien évidemment, cet objectif est très éloigné de nos valeurs et de notre conception de la santé, en particulier des valeurs de solidarité tant au niveau humain qu’au niveau territorial.

C’est pour cela, madame la ministre, mes chers collègues, que nous continuerons, tout au long de la discussion qui s’annonce, de nous battre avec détermination pour que ce projet de loi soit encore davantage modifié ou, ce qui serait mieux pour nos concitoyens malades, tout simplement retiré.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Mon collègue de l’Union centriste Jean-Marie Vanlerenberghe a conclu ses propos en parlant d’une réforme de la gouvernance territoriale et de l’hôpital qui reste à peaufiner.

Cependant, en matière d’organisation des soins ambulatoires, nous sommes encore loin du peaufinage.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Certes, ce projet de loi présente, surtout au sortir des travaux de notre commission des affaires sociales, de nouvelles avancées en matière de structuration et d’organisation des soins primaires.

Toutefois, par ses amendements, notre groupe avait souhaité aller plus loin dans ce processus de réorganisation du secteur ambulatoire, en accord avec ce que préconisent de nombreux chercheurs et observateurs et avec ce que réclament une grande majorité des professionnels de santé libéraux.

Quelles sont les avancées réelles ? Quelles avancées restent trop timides ?

Au nombre des éléments positifs de ce texte, citons tout d’abord une véritable coordination entre l’offre de soins hospitalière et l’offre de soins ambulatoire.

L’ensemble des acteurs du monde de la santé s’accordait, depuis plusieurs années, à dire que la réforme de l’assurance maladie de 2004 avait échoué sur ce point. Il était en effet urgent de sortir du schéma qui veut que l’assurance maladie s’occupe de la médecine de ville et l’État de l’hôpital. Un pilotage commun du système de soins, permettant d’en avoir une vision globale, avec, enfin, des priorités de santé publique clairement fixées, s’imposait. La création des agences régionales de santé atteint cet objectif.

On retrouve aussi une coordination ville-hôpital plus affirmée par le biais d’une permanence des soins qui ne reposera plus uniquement sur les seuls praticiens hospitaliers mais sera également assurée par les médecins libéraux. C’est un véritable service public de la permanence des soins que nous allons offrir à la population.

J’évoquerai également une meilleure articulation et une meilleure complémentarité, voire subsidiarité, entre les secteurs hospitalier et ambulatoire au travers des pôles de santé. Ces derniers permettront de véritables passerelles entre les différents acteurs de santé, pour une prise en charge globale et continue des patients.

Ce projet de loi pose, de même, les premiers jalons d’une véritable structuration de l’organisation des soins ambulatoires.

Ainsi que nous le rappelle une très récente étude de l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé, l’IRDES, cette organisation est encore largement déterminée par les principes de la charte de la médecine libérale de 1927, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

… à savoir le libre choix du médecin par son patient, le respect du secret professionnel, le droit à des honoraires pour tout malade soigné, le paiement à l’acte direct par l’assuré social, la liberté thérapeutique et de prescription et la liberté d’installation.

Cependant, la réforme instituant le médecin traitant et le parcours de soins, la reconnaissance de la médecine générale comme spécialité médicale et la dimension à la fois territoriale et populationnelle des politiques de santé ont ouvert, à partir de 2004, des perspectives nouvelles en termes d’organisation des soins ambulatoires.

La définition des soins de premiers recours, la reconnaissance des missions des médecins généralistes, la promotion d’actions de prévention en santé et le développement de l’éducation thérapeutique, tous sujets traités par ce projet de loi, sont de nouveaux témoins de ce processus de structuration de l’offre des soins primaires.

Cependant, madame la ministre, mes chers collègues, cette structuration ne sera pas aboutie sans une meilleure répartition territoriale des professionnels de santé libéraux que seules une adaptation de la formation et une évolution du mode d’exercice de ces derniers peuvent entraîner.

Nous cherchons à inciter ou à contraindre, plus ou moins, les médecins à exercer dans telle ou telle zone géographique, alors qu’il convient tout simplement – si je puis dire – de leur assurer des conditions adéquates pour exercer sur l’ensemble du territoire.

Les amendements présentés en commission par notre groupe proposaient d’aller en ce sens. Nous souhaitions agir sur trois axes essentiels.

Le premier était la promotion de la formation au métier de médecin généraliste de premier recours. Il est indispensable de faire connaître, au plus tôt, la médecine générale et d’en vanter les attraits à tous les étudiants engagés dans le cursus des études médicales.

Il convient aussi d’améliorer la lisibilité du métier de médecin généraliste de premier recours en organisant une véritable spécialité, dans le cadre d’une filière universitaire de médecine générale d’une durée – similaire à celle des autres filières de spécialités médicales – de quatre ans. Comment, en effet, valoriser une spécialité si on ne lui consacre que trois ans alors que l’on consacre quatre années aux autres spécialités ?

Le deuxième axe était celui de l’évolution des modalités d’exercice des professionnels de santé en médecine de ville.

Nous devons répondre à leurs aspirations, principalement à celles des plus jeunes, en mettant un terme à l’isolement, en faisant de l’exercice regroupé la nouvelle norme et en favorisant les approches pluridisciplinaires.

Selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, le taux de regroupement des médecins généralistes est estimé à 39 % ; or il atteignait déjà 30 % au début des années quatre-vingt. Il a donc peu évolué, et l’exercice isolé en cabinet reste la forme la plus répandue. De plus, la pratique en groupe est essentiellement mono-spécialisée et de petite taille.

Les maisons de santé pluridisciplinaires doivent devenir une réalité, en priorité dans les zones sous-dotées médicalement.

Elles apparaissent comme le moyen d’améliorer simultanément la productivité et les conditions de travail. Ce regroupement de professionnels médicaux et paramédicaux en un même lieu permettra la prise en charge d’une demande de soins primaires en augmentation.

En termes de conditions de travail, les médecins récemment installés y voient notamment la possibilité de mieux répartir les contraintes liées à la continuité et à la permanence des soins entre les membres du regroupement, ainsi que de nouveaux challenges en termes de coordination des soins. Les médecins déjà installés y voient une occasion de trouver, à terme, des remplaçants et d’envisager une cessation progressive d’activité.

Le regroupement des médecins, principalement au sein des maisons de santé, répond également aux évolutions sociologiques des professionnels de santé. Concilier vie de famille et vie professionnelle constitue une nouvelle exigence des jeunes médecins des deux sexes, qui les conduit à appréhender différemment leur exercice professionnel et son mode d’organisation.

Le troisième point, que nous souhaitions appuyer par voie d’amendements, est celui de la rénovation du cadre de la coopération entre professionnels de santé. La modification des missions de ces derniers, le partage de leurs rôles et l’articulation de leurs interventions dans le cadre de nouvelles formes de coopération sont des enjeux majeurs pour l’avenir de notre système de santé. Cela doit conduire à une nouvelle répartition des activités ou actes existants entre les différents professionnels de santé actuels et, surtout, à la répartition d’actes émergents entre de nouveaux métiers de soin. Il s’agit concrètement de transférer de nouvelles compétences médicales vers d’autres professionnels de santé.

Le professeur Yvon Berland, président de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé, parle de la nécessité de recentrer les médecins sur le cœur de leur métier ou encore de libérer du temps médical. Par exemple, la prise en charge du patient atteint d’une pathologie chronique ou de la personne âgée souffrant de polypathologies nécessite un suivi au long cours, des bilans médicaux réguliers et des rappels sur l’observance des traitements et l’hygiène de vie, au travers notamment de l’éducation thérapeutique. L’infirmière et le pharmacien peuvent à ce niveau se voir confier, chacun dans le cadre de ses compétences, le suivi quotidien de cette prise en charge.

Quant aux transferts de compétences vers de nouveaux métiers de soin, le rapport du professeur Berland, datant d’octobre 2003, en a identifié plusieurs, parmi lesquels je citerai les infirmières cliniciennes spécialistes, avec lesquelles pourrait être fait ce qui a déjà été fait avec les infirmières anesthésistes, les infirmières de bloc opératoire et les puéricultrices.

Ainsi des infirmières cliniciennes spécialistes de soins primaires pourraient-elles, au sein de structures pluridisciplinaires de médecine générale, prendre en charge les patients dans le cadre du conseil, de l’éducation, de la prévention, du suivi de traitements.

L’autre exemple de nouveau métier de soin que j’ai retenu est celui de coordonnateur du handicap, capable d’assurer l’encadrement polyvalent des personnes en situation de handicap.

Infirmières cliniciennes, spécialistes et coordonnateurs du handicap seraient des professionnels de niveau de formation master, un grade qui n’existe pas encore au sein des professions paramédicales.

Les trois axes que je viens de développer figurent dans le texte de ce projet de loi à doses homéopathiques. Notre groupe tentera, une nouvelle fois, lors de notre débat, de le faire évoluer.

Je n’ai noté nulle part dans cette loi une vraie question sociologique sur le temps de travail acceptable par les nouveaux médecins, sur le temps médical réel consacré à chaque patient et les répercussions évidentes de ces conséquences sur les numerus clausus à venir. À quand, madame la ministre, une réflexion sur ces sujets, qu’on ne pourra éviter d’aborder ?

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Avant toute chose, je voudrais me réjouir de l’adoption par la commission des affaires sociales de deux des amendements déposés par mon groupe. L’un précise que l’accès aux soins de premiers recours s’apprécie en termes de distance et de temps de parcours, précision importante pour les habitantes et habitants de nos territoires de campagne et de montagne. Le second précise, quant à lui, que les comités de massif reçoivent chaque année un rapport de l’agence régionale de santé sur l’organisation de la permanence des soins.

Ces deux amendements, aussi positifs soient-ils, ne sont toutefois pas de nature à modifier sur le fond votre projet de loi, dans lequel un absent ou, plutôt, des absents se font cruellement remarquer : les territoires.

Certes, on les retrouve dans l’intitulé de votre projet, mais, lorsqu’ils apparaissent dans le texte, c’est pour mieux asseoir l’autorité des agences régionales de santé ou pour organiser la participation de différents comités dont aucun ne dispose des pouvoirs suffisants : les avis, lorsqu’ils existent, sont consultatifs.

Ainsi, la conférence régionale de la santé et de l’autonomie participe par ses avis à la définition de la politique régionale de santé mais ne dispose d’aucun pouvoir réel pour satisfaire les besoins des populations. Les territoires appliquent donc des décisions prises ailleurs, dans des agences régionales de santé et de l’autonomie toutes puissantes, profondément anti-démocratiques, dirigées soit par les représentants de l’État dans les régions soit par des personnes qualifiées, pouvant elles-mêmes être nommées par l’État.

Dans ce rapport très hiérarchique, verticalisé à l’extrême et profondément technocratique, les territoires et leurs représentants n’ont pas voix au chapitre. Or la démocratie sanitaire ne consiste pas seulement à assurer la représentation des acteurs et des points de vue, elle consiste avant tout à répondre aux besoins des populations, dont les élus des territoires sont de bons relais.

Au groupe CRC-SPG, nous défendons une autre vision des agences régionales de santé et de l’autonomie et des établissements publics de santé, selon laquelle les conseils de surveillance des agences régionales de santé et de l’autonomie seraient dirigés par des représentants des conseils régionaux et les conseils de surveillance des établissements de santé par des élus des collectivités locales et territoriales, parmi lesquels les élus des villes, des régions et des départements disposant de réelles possibilités pour remplir partout la mission de service public de permanence des soins.

Nous proposons que ces élus soient plus associés qu’ils ne le sont aujourd’hui à la définition du projet régional de santé, particulièrement en ce qui concerne la lutte contre les déserts médicaux.

Aujourd’hui – et ce sera le cas demain encore plus tant votre projet de loi est indigent en la matière ! –, ce sont les maires qui recherchent partout, y compris en dehors de France, des médecins pour venir s’implanter dans leurs communes, notamment en mettant à leur disposition des logements et des cabinets flambant neufs, exonérés de loyers.

J’en veux pour exemple la démarche entreprise par mon ami Gérard Le Cam, sénateur des Côtes-d’Armor.

Ce sont les régions et les départements qui puisent dans leurs ressources pour financer des bourses destinées aux étudiants en médecine en échange de leur promesse d’installation sur un territoire déterminé. Et ce ne sont pas vos quelque deux cents bourses pour tout le territoire national qui suffiront à pourvoir ce que l’on appelle « les zones blanches » !

Disant cela, je ne voudrais pas stigmatiser les étudiants en médecine qui font le choix de s’installer dans des zones où l’offre est déjà très importante. Comment leur en vouloir quand l’État lui-même abandonne les quartiers difficiles, les zones de montagne et nos campagnes ? Comment en vouloir à des jeunes gens qui voient chaque jour l'État procéder à la fermeture d’une poste, d’une école, de l’ensemble des services publics, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et saccager les cabinets médicaux !

Souriressur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

... des jeunes gens à qui votre Gouvernement demande d’en pallier l’absence et d’être dans certains territoires, bien que relevant pourtant de l’organisation libérale, le dernier représentant de la puissance publique ?

Enfin, je voudrais vous faire part de notre totale opposition à la logique comptable qui gouverne ce projet de loi et qui aura pour effet de contraindre les hôpitaux en situation de déficit, c’est-à-dire l’immense majorité d’entre eux, à procéder à des suppressions massives d’emplois – vingt mille, a-t-on entendu – et à la fusion forcée d’établissements publics de santé, fusion décidée par le directeur général de l’Agence régionale de santé, sans attendre l’accord du conseil de surveillance de l’établissement ou des établissements concernés, ni celui du conseil de surveillance de cette agence, décision autoritaire, comme celles que prend votre Gouvernement de fermer plus d’un tiers des tribunaux des affaires de sécurité sociale, de réviser la carte judiciaire, la carte militaire, de fermer des postes de gendarmerie et de police, tout cela au nom de la révision générale des politiques publiques, ou RGPP, sans jamais en mesurer l’impact sur les territoires concernés.

Pourtant, nous savons, toutes et tous, combien la fermeture d’un hôpital de proximité peut avoir d’importantes conséquences pour la population qui perd un service public de plus, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

... pour les communes qui voient se déplacer un nombre important de salariées et de salariés, et pour les personnels eux-mêmes ! Autant de conséquences « impactant » le dynamisme des communes et leur économie locale environnante.

Madame la ministre, les hôpitaux publics, comme l’ensemble des services publics, participent activement à l’aménagement de nos territoires.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C’est pourquoi il est inacceptable que puissent s’opérer des fusions ou des regroupements sans que les élues ou élus locaux aient leur mot à dire.

Pour toutes ces raisons, qui sont complémentaires de celles de François Autain, notre groupe votera contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, madame le ministre, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord féliciter et surtout remercier le rapporteur, M. Alain Milon, pour la qualité du travail qu’il a fourni ces derniers mois.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Aucune réforme de la santé ne peut être conduite et aboutir sans une large concertation et une adhésion de l’ensemble des professionnels de santé. C’est grâce aux multiples auditions auxquelles il a procédé et à son écoute que le texte portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, dit HPST, a pu être recentré sur deux problématiques essentielles, à savoir la gouvernance à l’hôpital et la mise en place des agences régionales de santé.

Les établissements de santé, qu’ils soient publics ou privés, sont d’abord une communauté de soignants au service de « patients malades ». La qualité des soins est due à leur professionnalisme, à leur dévouement et à leurs qualités humaines. Leur efficacité procède de leur compétence. Cette compétence est acquise après de longues années d’étude et de pratique dans les CHU.

L’hôpital souffre de problèmes de management et avec ce projet de loi on nous propose une nouvelle gouvernance.

Il faut rééquilibrer les différents « pouvoirs » au sein de l’hôpital. La décision médicale aux côtés de l’administration est incontournable. Notre rapporteur, M. Alain Milon, a insisté sur les attributions de la commission médicale d’établissement, ou CME, auprès des directeurs pour une gouvernance plus équilibrée des hôpitaux.

Pour l’avoir constaté, il est selon moi également indispensable, dans le cadre du respect des missions des chefs de pôle, de préserver une identité et une autonomie des services spécialisés.

C’est dans le service que s’expriment la responsabilité et l’autorité du chef de service secondé par un cadre infirmier sur l’ensemble du service. Son autorité nécessaire et naturelle procède de son activité et de sa compétence exercées avec toute l’équipe dans le cadre de sa spécialité. C’est la meilleure garantie pour les patients d’un accueil et de soins de qualité qui répondent à leur attente légitime.

Je regrette qu’à l’occasion de l’examen du projet de loi dit HPST vous ayez exclu les CHU, sous le prétexte que nous devions attendre les conclusions, déjà connues, de la commission Marescaux. Nous aurions pu en débattre en commission.

Le CHU est avant tout un hôpital. L’excellence et la qualité des CHU sont indispensables à la vie de tous les établissements périphériques, qu’ils soient publics et privés. Par leur rayonnement et leur implication constante, ils structurent les territoires de santé.

Les CHU sont aussi la base de la formation pratique de tous les médecins de France, qu’elle que soit leur spécialité. Ils sont toujours couplés à une faculté de médecine.

Il est légitime de reconnaître la présence et la place indispensable des doyens de faculté de médecine dans la direction des CHU.

À ce propos, en tant que rapporteur de la branche vieillesse, madame le ministreje voudrais vous dire qu’il est inadmissible que la retraite des professeurs des universités praticiens hospitaliers, dits PUPH, médecins qui ont donc la double appartenance hospitalière et universitaire, porte essentiellement sur la partie universitaire de leur rémunération.

Au moment où nous voulons redonner plus d’attractivité à la carrière hospitalière publique, nous ne pouvons nous permettre d’occulter cette situation. Nous l’évoquerons à nouveau au moment de la discussion du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS pour 2010.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Redéfinir avec les ARS une meilleure coordination des soins de ville avec ceux qui sont dispensés à l’hôpital public, c’est organiser la complémentarité public/privé et non pas entretenir une rivalité préjudiciable à tous.

Dans les cliniques privées, comme dans les hôpitaux publics, le rôle de la CME doit être préservé à côté de la direction capitalistique et administrative.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

L’attribution de missions de service public à des établissements privés nous paraît souhaitable et cohérente dans les territoires de santé. Cela suppose des exigences raisonnables et compatibles avec les règles conventionnelles à l’égard des praticiens de ces établissements.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Madame le ministre, on le sait mais on veut souvent l’ignorer, la nomenclature des actes médicaux arrêtée par la sécurité sociale ne correspond plus, et ce depuis longtemps, à la réalité des actes chirurgicaux, à leur technicité et aux responsabilités assumées par les chirurgiens.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Je prendrai un simple exemple pour illustrer mon propos : une hernie discale est cotée actuellement 300 euros bruts. Lorsque l’on connaît la technicité de cet acte chirurgical, les compétences requises par l’équipe chirurgicale, sans parler des responsabilités, 300 euros bruts ne correspondent pas à une rétribution juste et acceptable.

Ce n’est pas en pointant du doigt un corps professionnel honorable, responsable et compétent que l’on rendra service à l’ensemble de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Nous devons, nous aussi, agir avec « tact et mesure » ! Les actes doivent tous être justement rémunérés et remboursés dans le cadre conventionnel, permettant un accès aux soins pour tous les patients, quelle que soit leur situation ; c’est essentiel.

Disons-le, ce n’est certainement pas le secteur optionnel qui, avec ses ratios et ses quotas, réglera à terme ces problèmes ; nous le savons bien. Si nous voulons conserver une chirurgie de qualité et des pratiques transparentes, il faut s’en donner les moyens dans le cadre conventionnel, en revalorisant certains actes médicaux et chirurgicaux à un « juste » prix.

Une autre remarque concerne la financiarisation des professions libérales de santé, plus particulièrement de la biologie médicale.

La Commission européenne voudrait considérer la santé comme une prestation de service, donc soumise à concurrence. Or l’article 152 du traité instituant la Communauté européenne garantit le principe de subsidiarité dans l’organisation des services de santé des États membres, n’en déplaise aux eurocrates de Bruxelles !

Une telle financiarisation de la santé serait préoccupante et ne serait pas sans conséquence au regard de notre politique de santé, avec notamment la disparition de certaines professions libérales dans des zones rurales moins attractives. De plus, que deviendront l’indépendance et le sens des valeurs du professionnel de santé face au pouvoir capitalistique et à ses exigences de rentabilité à court terme ?

La biologie médicale était concernée par le 7° de l’article 20 ; il a été heureusement retiré, garantissant le maintien d’une spécialité médicale exercée dans le cadre d’une médecine de proximité qui participe à la permanence de l’offre de soins.

Enfin, madame la ministre, je voudrais soulever un problème qui mérite réflexion.

S’il est légitime que les retraites soient contributives et donc essentiellement financées par les cotisations salariales et patronales sur le travail des actifs, la prestation maladie, en revanche, concerne l’ensemble de nos concitoyens, quelle que soit leur situation au regard du travail.

Les cotisations salariales et patronales ne représentent plus qu’environ 40% des prestations distribuées, alors qu’elles les recouvraient presque totalement lors de la création de la sécurité sociale.

Il me semble désormais anormal que le financement des prestations maladie reste assis sur les revenus des actifs. On pourrait imaginer un financement par l’impôt, type CSG. J’y vois au moins deux avantages.

Le premier est une diminution significative du coût du travail au moment où l’on recherche des dispositifs améliorant la compétitivité des entreprises et l’amélioration du pouvoir d’achat des Français qui travaillent.

Le second avantage est, dans le cadre de la future loi HPST, sous l’autorité des ARS, une cohérence de pilotage de l’offre de soins et de la gestion des risques.

Madame le ministre, au-delà de ces remarques, nous apprécions l’effort de cohérence globale de notre système de santé que représente la future loi HPST. Elle concerne l’ensemble des acteurs et privilégie l’intérêt des patients, et ce sur l’ensemble de notre territoire.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Merci !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Madame la ministre, la procédure d’urgence serait tout à fait justifiée si votre projet l’était lui-même. Or, si l’on entend réellement assurer la viabilité du service public de santé français, l’urgence n’est pas aujourd’hui de réformer – pour ne pas dire de chambarder ! – ses structures et son organisation, qui plus est pour la sixième fois en dix ans, alors que les pôles ne sont pas encore tous mis en place, ni a fortiori évalués. L’urgence est plutôt de pourvoir au financement de ce service public.

Dans un courrier en date du 29 avril dernier, il y a donc très peu, adressé au président de la Fédération hospitalière de France, la FHF, vous avez annoncé le report à 2018 de la convergence tarifaire publique/privée, initialement prévue pour 2012. Le renoncement, cela a été dit, est raisonnable, mais tardif !

De même aviez-vous attendu l’ouverture des débats parlementaires sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale en novembre dernier pour enfin reconnaître la sous-estimation du coût de la prise en charge de la précarité et des polypathologies par le service public, et donc de son sous-financement.

Cela fait des mois, en effet, que les professionnels de santé et nous-mêmes vous alertons sur la gravité de la situation financière des établissements publics et que nous plaidons en faveur d’un plan de résorption des déficits hospitaliers.

Nous demandons donc non pas simplement la levée de l’urgence sur ce texte, mais le retrait pur et simple de ce dernier ; nous aurons d’ailleurs l’occasion de défendre dans la suite du débat la motion que nous avons déposée tendant à opposer la question préalable.

Vous entendez garantir à tous, et partout, un égal accès aux soins et sauver l’hôpital. Mais les outils que vous proposez de mettre en place à cet effet ne sont qu’apparence et paradoxe.

Vous n’offrez que l’apparence d’une réorganisation des parcours de soins. En effet, menée avec un tel « tact » et une telle « mesure », l’offre ambulatoire ne s’en trouvera pas plus accessible, ni géographiquement ni financièrement, et n’en sera pas autrement perturbée. Ceux auxquels votre réforme prétend s’adresser, ceux qui n’ont plus accès aux soins, en sont, paradoxalement, les grands oubliés !

Vous n’installez que l’apparence de « patrons » tout-puissants à la tête de l’hôpital et de l’agence régionale de santé et de l’autonomie : c’est l’État qui prend la main et ils seront aux ordres. Mais cette étatisation évidente organise, dans le même temps, le désengagement de l'État du service public hospitalier, livré aux appétits du secteur privé commercial, et prépare l’abandon de la responsabilité politique et financière de l’organisation du système de santé lui-même.

Les valeurs qui fondent cette réforme sont claires ; les moyens mis à leur service, classiques ; l’objectif est transparent.

Vous vous appuyez sur un principe, pour ne pas dire un dogme : l’optimisation des coûts résultera d’une mise en concurrence. Il faut donc gommer tout ce qui pourrait encore distinguer le secteur public du secteur privé pour glisser le premier dans les habits du second.

C’est l’application des modes de gestion entrepreneuriaux à l’hôpital et à l’organisation du système de santé. C’est la tarification à l’acte déjà mise en place et le démantèlement du service public hospitalier, parcellisé en missions que l’on dispersera ainsi aisément au vent des marchés.

L’objectif, vous l’avez annoncé : des économies à hauteur de 93 millions d’euros doivent être réalisées, car la santé coûte trop cher à l’État. Tel est d’abord le souci comptable présidant à cette réforme et telle est bien la « feuille de route » fixée aux nouveaux « patrons » des agences régionales de santé et de l’autonomie et des hôpitaux publics, qui, sous une apparente liberté de moyens, seront révocables à merci et seront tenus au collet par cette obligation de résultat.

L’effet de l’annonce de cet impératif catégorique financier, déguisé en « maîtrise médicalisée », a d’ores et déjà tétanisé les personnels et gelé les sources de financements des réseaux de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Plusieurs associations de l’Aisne, qui assurent des prises en charge sanitaires et sociales, m’ont confirmé cette situation d’attente, qui met à mal leur travail et leur survie.

Les moyens mis au service de votre évangile concurrentiel et de son objectif comptable sont classiques : déprofessionnalisation et contractualisation.

C’est l’ouverture des principaux postes du système de santé à des gestionnaires et anciens dirigeants d’entreprises, qui pourront n’avoir aucune connaissance ni aucune expérience du monde de la santé – mais ne serait-ce pas là ce que l’on attend d’eux ? – et c’est l’instauration de relations de gré à gré à tous les niveaux : entre gestionnaires du système de santé entre eux et les « offreurs » de services en santé que deviennent indifféremment toutes les structures, publiques ou privées.

Clemenceau affirmait : « La guerre est une affaire trop sérieuse pour être confiée aux militaires ». Selon vous, la santé serait aussi une affaire trop sérieuse, ou trop coûteuse, pour être confiée aux médecins.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est vraiment honteux et absurde !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

À lire ce projet de réforme, que le Président de la République veut mettre en œuvre à tout prix, obsédé comme il l’est par l’image d’un patron tout-puissant et miraculeux, ainsi qu’il l’a réaffirmé hier publiquement, réforme que vous portez, madame la ministre, on ne peut tirer qu’une seule conclusion : les soignants, ceux grâce auxquels l’hôpital vit et souvent survit au quotidien, sont écartés au profit des gestionnaires ! Et c’est bien ainsi que l’ont compris les professionnels de santé.

Certes, le texte adopté par notre commission, qui est celui dont nous débattons – et il faut le redire constamment tant cette procédure est nouvelle –, redonne un peu de place aux médecins s’agissant des nominations et de la définition du projet médical, tandis que réapparaissent, bien timidement, les élus locaux au sein du conseil de surveillance.

Vous nous annonciez également en commission, madame la ministre, le 8 février dernier, que vous seriez favorable à l’ajout de deux vice-présidents au sein de la commission médicale d’établissement des CHU. Dans ses conclusions, la commission présidée par le professeur Marescaux se prononce comme vous.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Merci de le reconnaître !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Mais ces maigres avancées, dont vous obtiendrez peut-être la suppression partielle lors de leur examen, ne suffiront pas à rétablir une « gouvernance équilibrée », pas plus que la « démocratie sanitaire », auxquelles vous vous référez pourtant à profusion.

Entre « l’ère du mandarin et celle du PDG », il y a pourtant une marge, mais vous l’ignorez !

De nombreuses questions se posent et devront être évoquées au cours de ce débat, notamment au sujet des communautés hospitalières de territoire, des groupements de coopération sanitaire, des reconversions.

Mais je veux encore souligner deux réalités majeures :

La première concerne l’usager malade ou en perte d’autonomie, qui, malgré tous vos efforts, ne sera jamais rentable ! Il n’a pas sa place dans la configuration sanitaire que vous proposez.

La seconde réalité est celle du corps soignant : l’éthique et le sens de son exercice professionnel contredisent absolument les grilles d’évaluation et de performance dont vous vous acharnez à ériger partout le culte, y compris au sein des hôpitaux.

Pouvez-vous comprendre que la maladie et la perte d’autonomie forment autant de ruptures, dérangeant bien des ordres établis dans nos existences humaines ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Vous pensez être le seul à savoir cela ? C’est incroyable ! Quelle arrogance !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

C’est ce vrai changement de paradigme auquel nous confrontent toutes les épreuves de la vie ; c’est cette rupture-là qui nous conduit à vouloir penser autrement la politique publique que vous nous proposez.

J’en viens à la réorganisation territoriale de notre système de santé.

Le principe même du pilotage régional proposé n’est pas en cause. C’est même une idée maintenant assez ancienne, car la territorialisation s’inscrit de longue date dans les réformes engagées.

Mais le consensus s’arrête là !

L’objectif, l’organisation et les moyens des agences régionales de la santé et de l’autonomie qui seront mises en place subissent pareillement les conséquences de l’approche comptable appliquée à la gouvernance de l’hôpital : la régionalisation est simplement mise au service d’une recentralisation dont l’objectif est la maîtrise des dépenses de santé.

Ces agences régionales seront l’étage intermédiaire dans une véritable hiérarchie pyramidale, allant du Conseil des ministres au directeur de l’hôpital.

Notre assemblée décidera s’il doit ou non entrer dans la mission des Agences de « déterminer la politique régionale de santé » ou de « mettre en œuvre à l’échelon régional les objectifs de la politique nationale de santé ». L’enjeu est d’importance.

Je l’ai dit tout à l’heure, hormis l’obligation de résultats budgétaires à laquelle les directeurs généraux des agences régionales seront tenus, une grande liberté leur est laissée.

Leur structuration reproduit le schéma appliqué à l’hôpital, qui réduit tout autre acteur au rôle de figurant au sein d’un conseil de surveillance, lequel ne surveille plus grand-chose.

Nous reparlerons, madame la ministre, de cette phrase anodine, glissée à l’article L. 1432-3 du code de la santé publique, qui autoriserait « des membres » du conseil de surveillance à disposer de plusieurs voix.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Une autre question majeure se pose, celle du plus large périmètre de compétences retenu pour ces agences régionales. Pourvu qu’elles ne meurent pas d’indigestion, a-t-on parfois entendu dire ! Une telle disposition nécessite que les articulations entre les ARS et l’assurance maladie soient d’ores et déjà clairement déterminées. Or tel n’est pas le cas, s’agissant notamment de la gestion du risque.

Une seconde nécessité de coordination des compétences s’impose entre les agences régionales à l’égard, cette fois, des conseils généraux : les termes de « pilotage », « en association », « conjointement » ou « en collaboration » ne sont pas équivalents.

Nous vous proposerons, à l’évidence, de clarifier l’articulation de l’architecture de la planification et de la programmation médico-sociale en confirmant la position de chef de file du département en la matière.

Alors même que d’aucuns ont également réussi à faire planer l’incertitude sur l’avenir de l’organisation territoriale départementale, il n’en faut pas moins tabler sur l’expérience et l’expertise acquise par les départements dans ce domaine difficile qu’ils gèrent maintenant parfaitement.

Une modification positive adoptée par l’Assemblée nationale et maintenue, à juste titre, par la commission des affaires sociales du Sénat doit être saluée. Je pense, bien sûr, au mécanisme de fongibilité asymétrique, et même dynamique.

D’autres questions restent non résolues, telle celle de l’accueil temporaire.

Qu’en sera-t-il demain de la spécificité du secteur médico-social ? Prendre soin – le médico-social – et accompagner – le social – ne sont pas « soigner ». Faut-il nier le risque de voir, demain, le sanitaire supplanter et effacer le médico-social et le social ? La mise en place de l’agence nationale d’appui à la performance illustre ce risque.

Permettez-moi d’achever ce rapide survol du projet de loi en évoquant l’un des aspects qui me tient le plus à cœur, celui du droit fondamental à la santé, que le cumul des franchises, des déremboursements et des dépassements, et, pour beaucoup, la perte de leur emploi, remet en cause.

L’accès aux soins est, selon vous, l’objectif premier du projet de loi, alors qu’il devrait être le seul, le reste ne concernant que les moyens ! Vous affirmiez avec la plus grande fermeté, le 8 février dernier, devant notre commission, que, « en ce qui concerne l’accès aux soins, il faut combattre avec force les discriminations financières qui y feront obstacle, tant pour la médecine de ville que pour les établissements de santé ». De quels moyens armez-vous l’agence régionale pour mettre en œuvre ces solides intentions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Aucune, en effet !

L’Assemblée nationale et notre commission ont ajouté la prise en compte par les schémas régionaux d’organisation des soins, les SROS, aux côtés de l’exigence d’efficience, celle d’accessibilité, de maintien de tarifs « sécurité sociale », ainsi que, sur notre proposition, les temps de parcours. Mais rien qui ne soit opposable dans tout cela ! Disparaît même du texte adopté par nos collègues députés la maigre possibilité qu’avait l’agence régionale de fixer une proportion d’actes sans dépassements aux cliniques privées en situation de monopole, alors que, pour la majorité de nos concitoyens, selon le constat qui a été dressé, l’inégalité est avant tout financière. Ainsi, 32 % des Français reculent les prises de rendez-vous avec un médecin et 17 % l’excluent totalement par manque d’argent.

L’affichage des tarifs dans les salles d’attente rendu obligatoire, si tant est qu’il soit respecté, paraît bien dérisoire au regard des enjeux de santé dont ce projet de réforme prétendait se saisir.

De même, l’agence régionale de santé reste dénuée d’outils de régulation pour la médecine de ville, alors que l’agence aura à charge de coordonner les parcours de soins dont la segmentation génère des coûts supplémentaires et que toutes les mesures incitatives déjà expérimentées ont prouvé leur inefficacité.

S’agissant de la discrimination et du refus de soins, force est de constater là encore que les moyens propres à faire de l’accès aux soins une réalité sont refusés. Les pratiques, dites du testing, pourtant efficaces, car dissuasives, ont été supprimées, tandis que l’établissement de la preuve d’une discrimination ou d’un refus de soins injustifié est maintenue à charge du patient, ce qui, dans les faits et de manière certaine, met les médecins fautifs à l’abri de toute plainte.

Il est pour le moins malheureux d’être tenu de redire aujourd’hui que reconnaître un droit n’est rien s’il n’est pas assorti de moyens procéduraux pour y accéder. Prétendre vouloir lutter contre les discriminations fautives et les refus de soins injustifiés suppose de s’en donner les moyens.

Sur la forme, madame la ministre, trois raisons au moins justifiaient de remettre votre ouvrage sur le métier.

Les « amendements CHU », emblématiques d’une frénésie de réformes dont l’utilité est trop souvent démentie par la suite et, en tous cas, symptomatiques du peu de considération que le Gouvernement porte à la représentation nationale, constituent l’une des premières raisons, et non la moindre.

La deuxième raison réside dans le « saucissonnage » que vous opérez sur les questions de santé, en présentant des réformes successives, avec, notamment, l’annonce de textes distincts sur la santé mentale, la bioéthique, ou encore la santé publique.

L’ampleur que l’intitulé de votre projet de loi annonçait aurait mérité une vision d’ensemble, ce qu’un projet de loi d’orientation aurait permis.

La troisième raison tient à la réforme de la procédure législative dont votre projet fait les frais. Peut-être l’avez-vous d’ailleurs brièvement regrettée, madame la ministre !

Mais le plus grave, l’inacceptable, ce qui n’est pas négociable, se situe sur le fond de ce projet. La logique n’en est pas inversée.

Madame la ministre, vous faites constamment état de la très large concertation qui a précédé le dépôt du projet de loi. Vous arguez de votre volonté de « préserver et renforcer les valeurs de service public », celles « qui fondent notre système de santé » ; vos discours résonnent de « démocratie sanitaire », de « principes de qualité, de solidarité et de justice ».

Mes chers collègues, laisserons-nous disparaître les principes fondamentaux et les mécanismes de solidarité que l’État abandonne sous nos yeux ? Accepterons-nous d’être les fossoyeurs du service public hospitalier §reconnu par ailleurs comme étant l’un des meilleurs au monde, mais qui ne rapporte pas, ou pas assez d’argent ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il ne rapporte pas du tout ; il coûte, c’est tout ! C’est normal d’ailleurs ! Pourquoi voulez-vous qu’il rapporte de l’argent ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

M. Yves Daudigny. Un système de santé livre une image de la solidarité d’une société. La santé, touchant chaque individu jusque dans son intégrité et sa dignité, est le miroir de la société. L’image de la société que votre projet de loi laisse transparaître n’est pas la nôtre !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un projet de loi portant l’ambition de réformer l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires est forcément un texte très attendu, suscitant beaucoup d’espoir et, inévitablement, un certain nombre de craintes.

La santé demeure, en effet, l’une des premières préoccupations de nos concitoyens. Ils sont très attachés à notre système « à la française » que nous envient beaucoup de pays étrangers.

Réformer le système de santé demande donc du courage, madame la ministre, car vouloir le réorganiser, c’est immédiatement se retrouver au cœur d’une contradiction majeure, une contradiction entre, d’une part, l’idée partagée par l’ensemble de nos concitoyens que la vie n’a pas de prix et, d’autre part, la responsabilité d’assumer le coût de la santé. Or notre pays vieillit et voit naturellement ses dépenses de santé augmenter.

D’ailleurs, la progression des dépenses d’assurance maladie pour les hôpitaux et les cliniques de plus 50 % depuis 1998 comme les moyens consacrés au plan « Hôpital 2007 » et au plan « Hôpital 2012 » montrent combien la collectivité nationale ne ménage pas ses efforts budgétaires en la matière.

Pour autant, nous ne pouvons nous permettre de suivre la seule logique du « toujours plus de moyens ».

Ce courage, nous le devons à nos enfants. Selon un mot bien connu de Saint-Exupéry, « nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

En matière de santé, c’est à nos enfants que nous empruntons le règlement de nos dépenses actuelles de santé …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

… en leur léguant, via la CADES, la charge du remboursement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Une telle attitude, injuste et désinvolte envers les générations futures, ne saurait perdurer.

Elle nous interpelle sur les modes de financement – c’est l’objet du projet de loi de financement de la sécurité sociale –, mais aussi sur l’efficience de nos dépenses, et donc sur l’organisation du système. C’est bien l’objet du présent projet de loi.

Ce courage, nous le devons également à nos concitoyens, car les crédits supplémentaires, tout comme les nombreuses réformes et les plans successifs n’ont pas permis jusqu’alors de garantir un égal accès de tous à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire et l’accueil dans les hôpitaux ne répond pas toujours aux attentes.

Sur le terrain, il n’est pas simple de trouver un médecin le soir ou la nuit, sans parler de certains territoires ruraux qui pourraient devenir de véritables déserts médicaux.

Ce courage, nous le devons enfin aux professionnels de santé, aux médecins, aux personnels soignants, en particulier dans nos hôpitaux, dont les personnels méritent toute notre reconnaissance, car ils ne ménagent pas leur peine.

Au quotidien, ils font preuve de beaucoup de compétences, de dévouement, d’attachement à leur travail, de résistance à la fatigue et au stress, et ce malgré des conditions d’exercice parfois difficiles.

Toute évolution du système ne saurait être possible sans leur motivation et leur adhésion.

Eh bien, ce courage, madame la ministre, vous l’avez en nous présentant un projet de loi ambitieux, cohérent et volontaire.

À nos yeux, il a le grand mérite de rendre notre système de santé plus efficace en réorganisant globalement la prise en charge des malades par les différents acteurs, qu’il s’agisse des établissements hospitaliers ou des professionnels de santé.

Le décloisonnement de son organisation, le développement des coopérations entre médecine de ville et médecine hospitalière, le renforcement de la coopération entre secteur public et secteur privé, sont indispensables.

De plus, le texte donne toute sa place à la prévention, restée le parent pauvre de notre système de santé.

Bien sûr, le texte initial a beaucoup évolué à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale. À son tour, la commission des affaires sociales du Sénat l’a amendé.

Qu’il me soit permis d’en profiter pour dire quelques mots sur les conditions dans lesquelles nous avons étudié ce projet de loi en commission, conformément à la nouvelle procédure prévue par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Reconnaissons que les désagréments rencontrés ces derniers jours nous font espérer un certain nombre d’ajustements futurs susceptibles de rendre nos travaux plus sereins.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Quoi qu’il en soit, ces difficultés d’adaptation ne sauraient affaiblir l’intérêt que nous procure désormais la possibilité d’examiner en séance le texte résultant de nos travaux en commission.

En cet instant, je salue naturellement le travail extraordinaire réalisé par M. le rapporteur, notre collègue Alain Milon, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

… qui s’est totalement investi pour rester à l’écoute du terrain, des patients et des professionnels, mais aussi pour rapprocher nos points de vue, et ce afin de proposer un texte enrichi, amendé et certainement plus équilibré.

Je remercie également le président de la commission, qui a su organiser au mieux notre travail. Je n’oublie pas tous les services de la commission, qui ont travaillé dans des conditions extrêmement délicates, et qui ont toute notre gratitude.

Sans revenir sur l’ensemble du texte et sur toutes les modifications que nous avons soutenues en commission, puisque les orateurs précédents viennent de le faire, j’évoquerai cinq points qui me tiennent à cœur.

Tout d’abord, je parlerai de la gouvernance hospitalière.

Les rapports Larcher et Couanau ont bien diagnostiqué le problème de la gouvernance à l’hôpital. Vous nous proposez donc de dynamiser son fonctionnement en réformant le conseil d’administration, en renforçant le pouvoir et l’autonomie du directeur, qui devra faire tandem avec le président de la commission médicale d’établissement, la CME, qui devient vice-président du directoire.

Cette relation entre le directeur et le président de la CME nous semble tout à fait essentielle afin qu’aux impératifs de saine gestion observés par le directeur soit associée la compétence des praticiens. Cette relation a d’ailleurs été renforcée et clarifiée dans la nouvelle version du texte.

Je vous rejoins tout à fait, madame la ministre, lorsque vous rappelez que le pouvoir du directeur « est à l’aune de sa responsabilité, qui est forte. » Mais pourquoi penser qu’il ne pourrait pas y avoir de parfaite relation entre un directeur et un président de CME ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il sera jugé là-dessus !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Comment, d’ailleurs, un directeur pourrait-il mettre en application un projet médical d’établissement sans l’accord de son corps médical ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Ce cas de figure est tellement aberrant que la question ne se pose même pas !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

S’il est fâché avec ses médecins, il sera viré !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Sur d’autres points, la commission des affaires sociales a également remanié les règles de la gouvernance des établissements.

Les nouveaux pouvoirs donnés au conseil de surveillance me semblent tout à fait légitimes : délibération sur la participation à toute opération de coopération ou de communauté hospitalière de territoire ; consultation sur le budget prévisionnel de l’établissement ainsi que sur le programme d’investissements, les opérations immobilières et le règlement intérieur de l’établissement ; renforcement de ses moyens de contrôle.

Je note également avec satisfaction que la nomination des personnalités qualifiées membres du troisième collège sera assurée par les exécutifs des collectivités territoriales pour trois d’entre eux et par le représentant de l’État pour les deux autres.

Néanmoins, je regrette un peu la suppression de la présidence de droit du maire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

L’hôpital est, en général, le premier employeur de la ville ou de l’agglomération sur laquelle il est implanté. C’est un enjeu majeur pour les élus parce que c’est un enjeu majeur pour les populations.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Il me paraît évident que le maire doive être impliqué.

Madame la ministre, je ne serai pas étonné que, dans quelques années, beaucoup, y compris dans votre ministère, ne regrettent le rôle que jouait le maire à la tête du conseil d’administration, en tandem avec son directeur, pour apaiser les tensions et faciliter les évolutions nécessaires.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Enfin, en ce qui concerne l’organisation des communautés hospitalières de territoire, les CHT, je me réjouis, là aussi, des modifications de la commission, qui a affirmé, suivant l’inspiration du rapport Larcher, la nature conventionnelle de la CHT, au nom du principe de volontariat qui interdit d’imposer la création d’une CHT.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

La deuxième remarque particulière de ma part porte sur la création des agences régionales de santé, les ARS.

Le pilotage trop fragmenté et mal coordonné de notre organisation sanitaire constituait une faiblesse manifeste de notre système de santé.

L’objectif consistant à décloisonner à l’échelon régional les compétences relevant des différents aspects de la politique de santé et à déconcentrer le pilotage à l’échelon des régions et des territoires nous semble donc louable.

Nous espérons que chaque agence régionale de santé va ainsi permettre d’additionner les forces.

Bien évidemment, la politique de la santé est et doit rester une politique nationale. Les ARS n’en seront qu’un échelon déconcentré.

Cependant, là aussi, nous attendons que cette nouvelle gouvernance instaurée par les ARS nous offre une vraie démocratie sanitaire, à même de susciter les échanges entre l’État, les professionnels de santé, les représentants des associations et des usagers, et les collectivités territoriales, qui se sont déjà très largement investies dans ce domaine, souvent pour pallier certaines insuffisances.

Ma troisième remarque porte sur la lutte nécessaire contre les déserts médicaux.

Ce texte vise aussi à offrir à tous les Français, sur tout le territoire, un égal accès aux soins. Il s’agit là d’une réelle préoccupation à l’heure où nombre de territoires voient les praticiens partir en retraite sans être remplacés.

Le conseil général de l’Allier dont je fais partie a été l’un des tout premiers à proposer des bourses d’études pour des étudiants en médecine qui s’engagent à s’installer dans les zones déficitaires.

Servie par une campagne de promotion assez musclée, cette initiative visant à enrayer la désertification médicale porte ses fruits aujourd'hui. Les contrats que nous avons signés il y a quelques années sont remplis et commencent petit à petit à favoriser l’installation de jeunes médecins dans les zones en déficit.

Je me réjouis donc de voir notre exemple suivi au niveau national, avec l’instauration du contrat d’engagement de service public pour les étudiants en médecine, créé à l’article 15 bis du projet de loi.

Comme d’autres mesures, tel le développement de maisons de santé pluridisciplinaires, cette allocation mensuelle ne peut que renforcer l’attractivité du métier de médecin généraliste, même en zone rurale où l’exercice de ce métier est peut-être le plus intéressant.

Je suis bien d’accord avec vous, madame la ministre, toutes les mesures coercitives que nous pourrions imaginer ne feront que détourner un peu plus les médecins de cette spécialité.

Ma quatrième remarque concerne la lutte contre l’obésité et le titre III, « Prévention et santé publique », du projet de loi. Le problème de l’obésité m’est particulièrement cher pour avoir rédigé un rapport sur le sujet avec l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, l’OPEPS. Nous en reparlerons, bien sûr, lors de l’examen d’un projet de loi ultérieur qui sera spécifiquement consacré à la santé publique.

Enfin, le dernier sujet qui me tient particulièrement à cœur est la réforme par ordonnance de la biologie médicale, que j’ai pratiquée pendant vingt-cinq ans.

Aux termes de l’article 20, le projet de loi autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à une réforme d’ensemble de la biologie médicale en France.

Cette réforme, particulièrement complexe et technique, a été préparée grâce à des consultations larges et fructueuses menées par le ministère auprès des professionnels, et après un processus d’expertise de grande qualité, je pense notamment au rapport Ballereau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Ces travaux ont permis de préparer la rédaction de l’ordonnance sous le signe de l’amélioration de la qualité et de la sécurité pour les patients.

Afin de lever toute ambiguïté, vous avez, madame la ministre, remis à la commission des affaires sociales le projet d’ordonnance qui paraît tout à fait correspondre à nos attentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Il permettra ainsi de répondre aux progrès techniques importants que le secteur a accomplis, en même temps qu’il rejette l’ouverture du capital des laboratoires à des organismes financiers. Il recueille donc tout notre soutien.

C’est donc bien, madame la ministre, le courage et l’opportunité de ce projet de loi que nous soutenons aujourd’hui, mais aussi le courage et l’intelligence que vous avez eus d’accepter un certain nombre d’ouvertures et d’améliorations.

Ainsi, espérons-nous garantir à nos concitoyens de continuer à bénéficier du meilleur système de santé au monde, avec une meilleure permanence des soins, moins d’attente aux urgences, une meilleure prise en charge thérapeutique des malades et davantage de prévention.

Tels sont, en tous les cas les vœux que je forme aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ce fut une première : à l’occasion de ce projet de loi, nous avons expérimenté la réforme du fonctionnement du Parlement qui permet aux ministres de participer aux débats de la commission.

Pendant quatre jours, installée derrière une petite table, dans la petite salle de la commission des affaires sociales, Mme la ministre a donc participé aux débats et a donné son avis lorsque cela semblait nécessaire.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il paraît que cela renforce le pouvoir du Parlement !

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Pour ce qui est des droits de l’opposition, nous n’avons pas l’impression qu’ils aient été renforcés : les réponses positives du rapporteur ont toujours été aussi rares, les débats ne sont pas publics, nous parlons dans le vide !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Puisque vous faites une réforme, autant vous donner les moyens de faire en sorte que les choses se passent bien !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est votre affaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Que de temps perdu ! Le président Larcher, en réponse à Jean-Pierre Bel, a fait valoir que le vendredi, à dix heures quarante-cinq, le compte rendu des débats sur le titre Ier avait été publié. Trois heures plus tard, c’était au tour du titre II… Puis, le reste vint le lundi, le mardi… Mais enfin, il ne s’agissait pas de résultats sportifs !

Rires et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Si vous n’êtes pas prêts, ne soumettez pas le projet de loi au Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Attendez d’avoir les moyens et de pouvoir travailler dans de bonnes conditions ! Tout cela n’a rien de sérieux.

Le président Larcher, au lieu de défendre ce mode de fonctionnement, aurait mieux fait de reconnaître la difficulté de la situation et d’admettre qu’il avait été pris un peu au dépourvu !

Madame la ministre, y avait-il urgence ?

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est votre interprétation !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Mais non, je vous le dis ! J’ai réfléchi, moi !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ce projet de loi pouvait attendre. Il doit être replacé dans un contexte plus général. Qui est le patron de Mme Bachelot ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Voilà !

Quel est le triptyque qui caractérise la pensée de M. le Président de la République ?

Premier point : faire sauter les blocages de la société française, faire sauter les résistances, faire sauter les acquis sociaux ! Deuxième point : contrôler, tout contrôler et encore tout contrôler ! Troisième point : s’enrichir vite et sans honte !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Madame la ministre, vous nous proposez une nouvelle réforme pour répondre à la frénésie réformatrice du Président de la République, qui souhaite placer tous les services publics sous les ordres de « patrons » à son service : l’audiovisuel, la justice, avec la fin des juges d’instruction, les universités et, aujourd’hui, la santé.

Cette réforme, cela a été dit à plusieurs reprises, ne vise qu’un seul objectif : réduire les dépenses de l’hôpital public pour le rendre rentable. Mes chers collègues, je vois bien que vous pensez que je rabâche…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

J’entends d’ici vos réflexions ! Mais qui rabâche vraiment, mes chers collègues ?

Au journal télévisé, il ne se passe pas un soir sans que l’on nous annonce le licenciement d’ouvriers qui gagnent 1 500 euros par mois…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

… et partent avec six ou sept mois d’indemnité de licenciement. À côté de cela, les patrons qui ont mal géré partent avec des dizaines de millions d’euros de retraite chapeau ou de parachute doré !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ce n’est pas moi qui rabâche, c’est le système qui rabâche, et c’est ce système que vous voulez adapter à la santé !

Oui, l’hôpital est en crise, mais cette crise est d’abord d’ordre financier : l’hôpital doit obtenir des moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

La colère des professionnels hospitaliers, médecins, internes, infirmières et aides-soignants – qui se mobiliseront de nouveau jeudi prochain, madame la ministre ! – exprime un désaveu quant à la méthode employée, caractérisée par l’absence de concertation.

M. le rapporteur nous dit qu’il a rencontré les professionnels. Bravo ! Il en a rencontré deux cents ! Deux cents fois bravo ! Mais la concertation ne se limite pas à l’audition. Nous savons très bien que la démocratie, ce peut être parfois : « Cause toujours ! ». Monsieur le rapporteur, vous rencontrez ces personnes, vous les écoutez et vous continuez d’appliquer les décisions du président Sarkozy. Je n’appelle pas cela de la concertation !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les professionnels du secteur public veulent être reconnus, voir leur travail respecté !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ils défendent l’esprit du service public, ils veulent continuer à travailler dans le service public ! Mais pour cela, il faudrait leur en accorder les moyens ! Ils voient des collègues avec lesquels ils ont fait leurs études gagner quatre ou cinq fois plus dans le secteur privé !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Ils ne gagnent pas toujours moins que dans le privé ! Vous ne connaissez pas le secteur privé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ils restent dans le secteur public parce qu’ils y croient, mais il faut leur donner les moyens d’y croire et les reconnaître ! Voilà pourquoi nous parlons d’absence de concertation !

Sur le fond, ils refusent un directeur super-intendant chargé de rationaliser les dépenses. Rationaliser les dépenses, il faut bien voir ce que cela veut dire. Si on va jusqu’au bout, cela signifie supprimer des emplois ou diminuer l’offre de soins.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il n’y a pas d’autre alternative.

À la fin de l’année 2008, l’ensemble des établissements de santé publics cumulait un déficit avoisinant un milliard d’euros…

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

… et 90 % des CHU étaient dans le rouge. Dans le même temps, la Générale de santé, qui réalise plus de 16 % des hospitalisations privées en France, dégageait un résultat net de 87, 2 millions d’euros, en hausse de 91 % par rapport à 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

La Mutualité française ne fait pas de bénéfices !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les esprits simplistes diront qu’il faut adapter les méthodes du privé au public ! Mais, pour nous, l’origine de la crise se trouve dans la généralisation de la tarification à l’activité, établie sans tenir compte de la réalité complexe de la prise en charge des patients à l’hôpital.

En effet, les cliniques et les hôpitaux ne font pas le même travail. Les cliniques se sont spécialisées sur des actes répétitifs, programmables à l’avance et, surtout, bien remboursés par l’assurance maladie, du fait d’une tarification avantageuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Ce n’est pas toujours vrai ! J’ai traité des urgences en clinique privée !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ainsi, en Île-de-France, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris réalise plus de 700 types d’actes chirurgicaux, alors que l’ensemble des cliniques de la région en réalisent dix fois moins.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est caricatural !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Autre exemple : 84 % des ablations des amygdales sont opérées dans le privé, car ce sont des actes rentables.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En revanche, la quasi-totalité des personnes malades du SIDA sont soignées dans le public, or ces soins coûtent très cher.

Selon la Fédération hospitalière de France, le nombre d’accouchements par césarienne en France a presque doublé en vingt ans, représentant près de 20 % du total des naissances, lorsque l’Organisation mondiale de la santé estime que le taux devrait se situer entre 5 % et 15 %. Cette augmentation a surtout été constatée dans les cliniques privées !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cette dérive inquiétante relève moins de raisons médicales que de facteurs liés à la rentabilité économique, puisque les césariennes sont plus faciles à programmer et permettent de limiter les gardes de nuit et de week-end dans ces maternités.

Nous ne partageons pas la même logique, nous voulons garantir à l’hôpital public les ressources nécessaires à la réalisation de ses multiples missions de service public.

L’ouverture au privé ne vise pas, à terme, la privatisation du secteur de la santé. En effet, la droite privatise en général les entreprises qui marchent bien, comme EDF ou les autoroutes, que les péages ont déjà remboursées…

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est n’importe quoi !

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

C’est un peu schématique, mais il a raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Madame la ministre, votre projet aurait pu être mobilisateur ! Non pas parce que des milliers de manifestants seront dans la rue jeudi prochain

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les Verts ont toujours été favorables à la transformation des agences régionales de l’hospitalisation en agences régionales de santé, pour mettre fin au cloisonnement entre hôpital et médecine de ville, entre service public et exercice libéral, entre médical et médico-social, pour tenir compte de l’ensemble des paramètres sociaux et environnementaux.

Ces agences auraient pu être de véritables instances de démocratie sanitaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

… associant les professionnels de santé, les élus locaux, les usagers et l’assurance maladie. Elles auraient ainsi pu constituer le socle d’une grande réforme du système de santé, en passant d’une logique de soins à une logique de santé et en rapprochant les lieux de décision des acteurs de terrain. Elles pourraient être le lien indispensable entre des objectifs nationaux – exprimés par le Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale –, et leur traduction concrète sur les territoires, en collaboration avec les acteurs locaux.

Mais la mise en place des ARS, telle qu’elle est prévue dans cette loi, avec à leur tête des « superpréfets de la santé », directement aux ordres du Gouvernement et de qui vous savez

Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cette réforme conduit à une étatisation technocratique, dont le seul but est de réformer la carte hospitalière pour réduire les dépenses, et démanteler le service public au profit du secteur privé !

Madame la ministre, je dois conclure…

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il est temps !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cette réforme représente une occasion manquée de faire entrer notre système de santé dans le xxie siècle et de mettre en place un véritable plan de relance pour la santé. Vous allez sûrement me répondre qu’un plan de relance est irréaliste ! Pourtant c’est ce que Barack Obama est en train de mettre en œuvre aux États-Unis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Sur les 727 milliards de dollars de son plan de relance, 150 milliards sont consacrés à la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

On n’attendait pas cela des Américains, il n’y a pas si longtemps !

Au lieu de cela, vous mettez à la tête des hôpitaux des directeurs-superintendants, chargés d’appliquer votre politique de rigueur budgétaire. Vous confiez des missions de service public aux cliniques privées qui continueront de s’enrichir, sans subir les mêmes contraintes que les hôpitaux publics en matière de gardes ou de dépassements d’honoraires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Votre politique ne prend pas en compte les nouveaux risques liés à l’évolution des modes de vie et de consommation et à la multiplication des pollutions. Votre projet de loi ne prend pas non plus la mesure des besoins nouveaux d’accompagnement liés au vieillissement de la population.

Bref, les sénatrices et les sénateurs Verts ne se reconnaissent pas dans l’esprit de cette réforme qui, comme les précédentes, leur semble vouée à un échec certain, puisqu’elle se borne à une analyse comptable à court terme de la santé.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Les sénateurs Verts voient tout en noir !

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens à féliciter, pour commencer, le président de la commission des affaires sociales, Nicolas About, et notre rapporteur, Alain Milon, pour le travail accompli dans des conditions difficiles, dues aux arcanes d’une réforme de la procédure inappropriée dont le mieux que l’on puisse faire est de n’en rien dire ! Cette réforme montre que la revalorisation du rôle du Parlement est un combat qui n’a pas encore commencé, sans parler des difficiles conditions de travail imposées aux services du Sénat, et notamment au secrétariat de la commission.

Cela étant, ce projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, fort complexe, certes, car rendu trop touffu par les nombreux ajouts dus au débat parlementaire, comporte trois éléments essentiels qui doivent conduire à son adoption.

Le premier est la modernisation de la gouvernance des établissements de santé. Il fallait franchir ce premier pas : il était en effet souhaitable que la conduite des missions de service public ne soit pas liée au statut juridique des établissements, mais à la satisfaction des besoins de la population. Le Gouvernement propose cette avancée, qui relève d’une gestion raisonnable.

Le renforcement des prérogatives du chef d’établissement est bienvenu : chaque établissement doit avoir un pilote responsable, capable d’exercer ses prérogatives sans pour autant être un autocrate refusant la concertation. Il faudra que ce pilote soit de qualité et éviter que le statut ne lui permette de s’abriter derrière des règles qui rendraient inefficace son évaluation, laquelle doit être suivie soit d’une revalorisation de sa situation, soit de sanctions éventuelles.

La durée de son mandat devra, me semble-t-il, être suffisante pour qu’il fasse ses preuves et atteigne les objectifs fixés, mais pas trop longue, pour qu’il ne s’encroûte pas et ne devienne pas complice ou prisonnier des enjeux locaux, pas toujours compatibles avec les orientations nationales, et parfois contraires au bien commun. Il devra être capable d’établir des relations de confiance avec le corps médical ; à cet égard, il serait bon de clarifier le sens des appellations et d’éviter la confusion entretenue sciemment à propos du projet médical, avec des arrière-pensées peu bienveillantes…

Le projet de communauté hospitalière de territoire est intéressant, de même que le développement de la coopération entre secteurs public et privé.

La séparation entre le conseil de surveillance et le directoire va dans le bon sens, en distinguant ce qui relève de l’orientation et du contrôle de ce qui relève du pilotage et de la gestion des établissements. Que le président du conseil de surveillance ne soit pas systématiquement le maire de la commune ne me choque pas personnellement : en effet, le président de ce conseil ne devrait être ni juge ni partie en la matière. Trop souvent sont mis en avant des arguments, certes humainement compréhensibles, mais pas toujours en adéquation avec la qualité du service, les intérêts des patients ou les moyens du contribuable ou du cotisant.

Il faudrait aussi éviter que ce président ne soit que le porte-parole du directeur de l’ARS. On peut se demander si, étant donné les pouvoirs dont il dispose par ailleurs, celui-ci doit être le seul à nommer toutes les personnalités qualifiées membres du conseil de surveillance. Il serait à mon sens raisonnable que plus de la moitié d’entre elles soit nommée par l’État.

Le second élément concerne la création des agences régionales de santé.

En effet, la situation actuelle n’est pas satisfaisante. On a du mal, surtout quand on est un simple citoyen, à savoir qui fait quoi, entre les ARH, les DRAS, les DASS, les URCAM, les CRAM, les CPAM, la MSA, la RSI, la MRS

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Aussi, s’il y a désormais un organisme unique, l’ARS, couvrant l’ensemble du fonctionnement du système de santé, ce serait une bonne chose. À cet égard, je regrette l’adjonction du mot « autonomie » qui m’apparaît comme une décision maladroite et malheureuse.

Il faudra veiller à ce que les directeurs des ARS, qui vont avoir un rôle central, soient à la fois de grande qualité, capables de s’exonérer des contingences politiques locales, tout en sachant coopérer avec les différentes autorités au lieu de les ignorer, comme cela a souvent été le cas pour les ARH. On attend de ces personnes qu’elles aient les qualités et les compétences des meilleurs serviteurs de l’État sans être tenues par des solidarités politiques présentes ou passées.

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Pour cette raison, la durée de leur mandat ne devra être ni trop brève ni trop longue.

Se pose aussi la question de l’association des professions de santé dans le fonctionnement des ARS. Les tenir à l’écart serait regrettable ; aussi faut-il prévoir une place à un niveau suffisant pour assurer leur participation. On ne peut pas faire fonctionner le système sans l’adhésion des professions de santé et il semble prudent de ne pas en faire des opposants. J’ai en effet perçu, lors des rencontres que j’ai faites il y a quelques jours, des interrogations insistantes sur la parole et la signature de l’État.

Il faudra éviter que les ARS ne soient de trop lourdes machines engluées dans les règlements et dans la paperasse, ce qui est l’une des causes des difficultés présentes. Aussi, plutôt que de rassembler tout ce qui existe et de voir ensuite ce qui va se passer, il serait utile de remettre d’ores et déjà en cause certains services pour éventuellement en modifier le format.

Le troisième élément concerne la démographie médicale et les modalités d’installation des médecins.

L’accord passé avec les représentants des infirmiers et infirmières est un précédent intéressant et utile, qui peut servir de modèle.

Il est souhaitable pour tous - pouvoirs publics, médecins et patients - que le dispositif prévu, auquel j’adhère, fonctionne ; sinon, lors de la prochaine réforme, on ne pourra que recourir à la méthode coercitive d’installation, avec les inconvénients que cela pourrait engendrer.

L’action sur le numerus clausus en fin de première année d’études est essentielle. Il est tout à fait fondé de prévoir sa révision annuelle, car il faut être très réactif. Cela suppose une augmentation sensible des postes dans les zones sous-médicalisées et une réduction drastique dans les zones surmédicalisées. Je compte sur le ministère pour tenir bon face aux innombrables pressions qu’il ne manquera pas de subir.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

L’arrivée des médecins étrangers rendra ce dispositif inopérant puisqu’ils seront libres de s’installer où ils voudront. Seuls les étudiants français seront pénalisés !

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Pour ce qui est de l’internat, les mesures proposées vont aussi dans le bon sens puisqu’elles visent à prendre en compte les besoins des patients et non pas seulement ceux de l’université.

Les dispositions qui ont été les plus médiatisées, notamment celles qui concernent l’alcool, sont, à l’issue du vote de l’Assemblée nationale, parvenues à un point d’équilibre qu’il ne faudrait pas trop modifier.

En dehors de ces éléments qui entraînent mon adhésion au texte, j’ai aussi quelques bémols à formuler.

Comme je l’ai déjà dit, je déplore le caractère quelque peu touffu du texte qui nuit à sa lisibilité globale, même s’il faut reconnaître en toute justice que ce n’est pas de la responsabilité essentielle du Gouvernement si le texte compte plus de cent articles au sortir de l’Assemblée nationale.

Le deuxième bémol a trait aux articles L.6161-4 et L.6161-4-1 du code de la santé publique concernant les contrats des médecins dans le cadre de l’hospitalisation privée.

J’ai l’impression que le passage par la voie conventionnelle était plus approprié qu’un texte législatif. Dans le cadre des établissements gérés par les associations, cela n’entraîne pas d’inconvénient majeur ; il n’en est pas de même pour les établissements à but lucratif. Cela donnait tout pouvoir aux représentants des intérêts financiers et cela entraînait un déséquilibre difficile à justifier. Je ne pense pas que notre politique a pour but de favoriser les entreprises dont les intérêts ne concordent pas toujours avec les objectifs de santé publique.

De plus, les médecins qui s’inquiètent de cela ne sont pas forcément ceux qui ont livré ces établissements aux financiers et les modifications apportées par la commission vont dans le bon sens.

Le troisième bémol concernait l’article 18. Le rapporteur s’en est expliqué et j’adhère totalement à son point de vue. Le texte auquel on est parvenu me semble beaucoup plus raisonnable.

Personnellement, je ne crois pas du tout au testing parce que c’est un risque d’atteinte à la liberté dans la mesure où ceux qui s’y livrent ne sont pas de bonne foi. Par ailleurs, une incitation à commettre un délit ne me paraît pas être une démarche très civique.

À ce propos, je veux attirer l’attention sur le fonctionnement de la CMU.

Certes, je désapprouve totalement les praticiens qui refusent dans leur cabinet les bénéficiaires de la CMU. Toutefois, il faut savoir que certains bénéficiaires ne présentent pas les documents nécessaires, que d’autres, tout en ayant la carte CMU, n’en sont plus bénéficiaires et, dans ce cas, c’est le praticien qui n’est pas payé par la sécurité sociale. Cela peut expliquer un certain nombre de problèmes.

Cela m’amène, de façon annexe, à évoquer certains tarifs. Les dentistes ont souvent, sur ce sujet, été pointés du doigt. Si l’on revoyait le niveau de rémunération de certains actes qui n’ont pas évolué depuis plus de vingt ans, peut-être les dentistes pourraient-ils pratiquer des tarifs un peu différents sur d’autres.

Un autre bémol concerne l’article 22 ter, ajouté par l’Assemblée nationale. Vous connaissez mon opposition à la prise en charge de la pilule abortive. Cela pourrait suffire, mais, dans ce cas, je ne vois pas pourquoi les étudiants se verraient appliquer un traitement différent des autres jeunes majeurs. De plus, la médecine universitaire est loin d’être assez efficace pour que cette disposition soit mise en œuvre.

Pour conclure, je dirai que cette réforme va dans le bon sens mais que ce n’est qu’une étape. En effet, de grands défis nous attendent.

Il n’est pas sûr que les cadres institutionnels des établissements publics et privés puissent être suffisamment performants à l’avenir. Si les CHU peuvent garder un statut public avec une autonomie relative, le rapprochement des autres structures doit conduire à un rapprochement institutionnel avec de nouvelles formes juridiques qui pourraient s’inspirer, par exemple, des fondations hollandaises.

Le second défi, qui apparaîtra bien sûr dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est celui du financement. Si ce texte peut introduire plus de rationalité et de rigueur, il ne résout pas encore la question des coûts et des ressources. Celles-ci sont d’ailleurs obérées par la crise économique actuelle. Mais quand celle-ci sera passée, plus rien ne sera comme avant. Nous serons confrontés à des choix : soit une diminution des prestations prises en charge par l’assurance obligatoire en privilégiant les soins les plus coûteux, soit une augmentation nette des cotisations payées par l’assuré, ce qui serait fort injuste pour les jeunes générations et les familles nombreuses. En aucun cas, on ne pourra faire croire qu’on rasera gratis et qu’un retour à la croissance résoudra la question.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, on comprendra facilement qu’en intervenant dans ce débat en seizième position je prenne le risque de répéter ce qui a déjà évoqué par les orateurs qui m’ont précédé.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il ne vaudrait mieux pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Je fais le pari des vertus pédagogiques de la répétitivité, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Si c’est pour répéter les bêtises qu’ont déjà dites vos amis…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

M. Jean-Jacques Mirassou. … afin de vous inciter, au moins dans un premier temps, à partager un diagnostic sur lequel s’accordent bon nombre des membres de la communauté hospitalière, qui se manifesteront du reste dans les heures à venir, et à partir duquel, d’une manière un peu lapidaire, on peut affirmer que votre projet de loi n’est pas bon.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

En effet, ce texte privilégie des considérations économiques, qui sont posées comme de véritables postulats, au détriment, malheureusement, de ce qui devrait être au cœur du débat qui s’engage, c’est-à-dire la pérennité et l’amélioration du fonctionnement de l’hôpital public.

Pourtant, la réforme de l’hôpital est un enjeu dont personne ne saurait nier la nécessité. L’évolution des techniques de soins, la nouvelle prise en charge des malades, les exigences en matière de sécurité sont autant de questions auxquelles il faut répondre, sans oublier la spécificité et la mission essentielle de l’hôpital, que vous avez évoquée tout à l'heure : l’hôpital doit rester le garant - pour tous - de l’égal accès à des soins de qualité tout en assurant la polyvalence de l’offre.

Il s’agit d’une mission qui, là plus qu’ailleurs, s’accommode difficilement d’une approche budgétaire qualifiée d’ « exagérément comptable » - le mot est faible - dont les effets pervers ont été révélés, dans un premier temps, à l’occasion de l’instauration de la tarification à l’activité.

C’est pourtant cette même approche budgétaire que vous avez retenue et confirmée dans ce projet de loi, madame la ministre, pour réformer l’hôpital. Cela, vous en conviendrez, disqualifie, au moins en partie, les bonnes intentions que vous avez affichées tout à l'heure dans ce registre.

D'ailleurs, dans ces conditions, ce n’est pas un hasard si, comme d’autres orateurs l’ont évoqué avant moi, le mot « hôpital » est le grand absent de ce texte.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il figure dans l’intitulé du projet !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

J’ai parlé du texte. Manifestement, il a disparu de votre lexique médical.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Vous me faites là un mauvais procès !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Nous sommes confrontés à un enjeu de société, et les débats qui vont se tenir dans les jours à venir sont de la plus grande importance ; ils révéleront inévitablement, une fois de plus, les clivages qui séparent la gauche et la droite sur ce sujet comme sur d’autres.

De notre point de vue, la politique de santé doit être l’affaire de tous et sa définition procède d’une responsabilité collective disqualifiant de fait toute tentative de passage en force qui consisterait à faire basculer la santé dans le secteur marchand.

Tout au contraire, notre attitude dans ce débat entend privilégier une démarche citoyenne au service d’une ambition plaçant l’hôpital public au cœur d’un projet politique où la démocratie sanitaire, sans être pour le coup galvaudée, deviendrait une réalité dans notre pays.

En cinquante ans, notre système sanitaire est devenu l’un des meilleurs au monde, et l’hôpital public, encore et toujours, en constitue la figure de proue incontestable. Aujourd’hui, je le répète, il ne peut, pour les raisons que j’ai évoquées précédemment, échapper à l’évolution de la société ; il doit donc se réformer.

L’évolution socio-économique, l’augmentation de l’espérance de vie, les nouvelles techniques de soin et leur coût plaident en faveur d’une réforme. Faut-il pour autant, comme le prévoit votre projet de loi, madame la ministre, passer d’un extrême à l’autre en faisant le choix, comme cela a été écrit par ailleurs, du quantitatif au détriment du qualitatif ?

Dans un tel contexte, les mots employés ne sont jamais neutres et ceux qui ont été choisis dans votre projet de loi sont très démonstratifs malheureusement de votre volonté de créer – d’autres l’ont dit avant moi - l’hôpital-entreprise.

Mme la ministre s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

L’ancien conseil d’administration est remplacé par un conseil de surveillance défini dans le dictionnaire comme étant « un organe permanent de société anonyme composé d’actionnaires ».

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il y a aussi des conseils d’administration !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

M. Jean-Jacques Mirassou. Le conseil exécutif, quant à lui, est remplacé par le directoire. On comprendra facilement notre malaise face à l’irruption de deux structures jusqu’à présent spécifiquement dédiées aux secteurs bancaire ou industriel, et qui sont complètement décalées pour ne pas dire indécentes dans le cadre d’un service public de santé.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

On entend de plus en plus souvent parler, dans les couloirs hospitaliers, s’agissant de l’étude budgétaire, de gains de productivité.

Par ailleurs, et c’est au moins aussi important, votre texte initial entendait limiter considérablement le rôle des élus locaux dans l’administration des hôpitaux, surtout dans le troisième collège.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ils n’ont jamais été aussi nombreux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Malgré les quelques amendements qui ont pu être imposés, votre détermination demeure. En cela, elle répond à l’impatience - j’ai failli dire : « aux pulsions réformatrices » - du Président de la République à l’égard des élus locaux qui, manifestement, à l’Élysée, ne sont pas actuellement en odeur de sainteté.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Surtout lorsque l’on est un laïc !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Il s’agit d’une rupture avec la tradition, doublée d’un contresens. En effet, cela a été dit, l’implication des élus locaux dans les décisions définissant la vie quotidienne des hôpitaux et de leurs patients garantit une cohérence avec la réalité d’un territoire d’implantation qu’ils connaissent par la force des choses parfaitement.

L’élu local reste donc incontestablement à l’interface des préoccupations relatives au fonctionnement de l’hôpital car, tout en participant à sa gestion, il représente également le citoyen qui en est aussi l’usager ; il en a l’entière légitimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Pour terminer, je voudrais dire que, dans la période difficile que nous traversons, il est indispensable que les personnes les plus fragilisées puissent s’appuyer sur un service public fort.

Vous avez évoqué tout à l’heure, madame la ministre, l’esprit du CNR, qui a présidé à l’élaboration d’un service public fort, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mes deux parents étaient résistants, je connais un peu le sujet !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

… qui devrait permettre aux plus fragiles d’entre nous de continuer à bénéficier de l’un des droits les plus fondamentaux, je veux parler du droit à la santé !

Tous les mythes du volontarisme et de l’activisme acharné sont destinés à demeurer impuissants si la société engendre des laissés-pour-compte.

L’hôpital public, le service public d’une manière générale, permet aux plus démunis de se prémunir contre ce risque.

Madame le ministre, au moment où je parle, votre projet de loi n’apporte aucune garantie en ce sens, bien au contraire ! Nous le combattrons donc avec détermination.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

Monsieur le président, mes chers collègues, la réforme hospitalière est dans l’air depuis fort longtemps déjà. Aujourd’hui, avec vous, madame la ministre, elle devient une réalité.

Il nous faut en effet refonder le cœur même du dispositif hospitalier. Longtemps, l’édifice institutionnel a assuré les principales régulations du fonctionnement de l’hôpital : le médecin et les soignants y occupaient un rôle premier, et l’administration suivait. Mais, depuis de nombreuses années, un processus de déconstruction est en cours, le médecin n’étant plus systématiquement considéré comme le pilier central de l’institution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

M. Jean-Claude Etienne. Par tout le monde, et pas qu’un peu !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

De leur côté, les administrations n’acceptent plus que la dimension économique du fonctionnement hospitalier soit occultée. Nous ne pouvons pas leur en vouloir !

En lieu et place du patient docile et largement muet, se dessine un usager parfois revendicatif, susceptible de devenir, s’il n’est pas satisfait, un plaignant devant les tribunaux, prêt à transformer le médecin, l’infirmier, l’aide-soignant, le directeur, ou tout acteur professionnel de l’hôpital, en simple justiciable, voire en condamné désigné.

Dans un tel contexte, il est évident que les repères d’autrefois ne peuvent plus fonctionner. Les modes de régulation qui avaient toujours eu cours s’effondrent.

Madame le ministre, madame le secrétaire d’État, vous cherchez à mettre en place de nouveaux équilibres. L’œuvre est d’une extrême importance. On m’a rapporté combien vous avez su vous montrer à l’écoute de la commission des affaires sociales, essuyant, en la matière, les plâtres de la nouvelle procédure.

Sous l’impulsion de son président, Nicolas About, avec Alain Milon, rapporteur clinicien émérite

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

La gouvernance des hôpitaux, cette subtile et singulière alchimie entre la responsabilité des soignants et celle des gestionnaires, doit connaître un nouveau souffle. Qu’il me soit simplement permis, à partir de ma longue expérience à la tête de la conférence des présidents de CME, de dire qu’une véritable décision prometteuse pour l’hôpital passe par une stratégie arrêtée de façon concertée entre les soignants et les gestionnaires, les uns étant responsables des nécessaires propositions à faire, les autres des décisions indispensables à arrêter.

Si on observe les quelques rares cas d’établissements de soins publics où le budget réussit à être « bouclé », on remarque que ce sont ceux qui ont choisi des axes de développement en phase avec la problématique environnementale des populations concernées et avec l’offre de soins déjà existante sur le territoire.

Ici, c’est la mise en place d’un centre de sénologie ; là, c’est une technique de traitement par chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale ; là encore, c’est un centre d’accueil pour des jeunes en déshérence, sujet sur lequel je vous proposerai un amendement, dont l’initiative revient à la mission commune d’information sur la politique en faveur des jeunes.

Ajuster en permanence l’offre de soin à la typologie de la demande, c’est bien l’objectif du projet médical d’établissement, qui est la pierre angulaire du dispositif. Il ne peut être construit que dans une parfaite congruence entre tous les soignants et les gestionnaires. De ce point de vue, les modalités de réalisation du projet médical d’établissement, tout comme la liste d’aptitude des médecins arrêtée par leurs pairs – que vous avez proposée à la commission, madame la ministre –, sont des mesures qui définissent au mieux ces nécessaires équilibres opérationnels et qui sont prometteuses pour la pérennité du nouveau système. Sans elles, nous aurions des raisons de nous inquiéter.

Madame la ministre, je me permets de vous le dire mais je ne voudrais pas que vous vous en formalisiez, les textes en l’état font peu de cas de la singularité hospitalo-universitaire. Je voudrais insister sur ce point, car, quoi qu’on en dise, c’est bien sûr les mandarins, les chercheurs, en grande partie sur les CHU que reposent, qu’on le veuille ou non, la performance et la notoriété internationale de la médecine française.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

L’ordonnance de décembre 1958 a fait la démonstration de sa pertinence.

Notre récent prix Nobel de médecine, Françoise Barré-Sinoussi, m’a encore demandé, il y a quelques semaines, de vous dire, mes chers collègues, que c’est la trilogie soins-enseignement-recherche qui est le moteur du progrès médical.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

C’est dit, mais ma mission ne s’arrête pas là.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

En ce qui concerne la recherche, je ne voudrais pas manquer de souligner que ce n’est pas seulement une affaire de CHU et que nous avons à diffuser sur tout l’ensemble des établissements de soins, mêmes les plus modestes, la préoccupation de recherche clinique.

De ce point de vue, le rapport de Jacques Marescaux arrive à point nommé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

M. Jean-Claude Etienne. Je vous félicite, madame la ministre, l’orchestration est impeccable !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

Le Premier ministre s’est engagé, cet après midi, à l’Assemblée nationale, à ce que le Gouvernement dépose au Sénat un amendement tendant à placer aux côtés du directeur, pour l’assister dans les décisions qu’il prend, un représentant de chacune des communautés que constituent dans l’hôpital les soins, l’université et la recherche.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je l’avais proposé dès le 8 avril !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

Effectivement, cette mesure figure déjà dans le texte, la commission ayant anticipé le rapport Marescaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

M. Jean-Claude Etienne. Madame la ministre, si je me suis inscrit pour intervenir dans cette discussion générale, c’est d’abord pour vous demander de ne pas scotomiser du tissu hospitalier français ces références que sont, à des titres divers, les CHU. Vous vous apprêtez maintenant à compléter la partition. Nous y tenons. La commission Marescaux l’a demandé, le Président de la République l’a entendu hier, le Premier ministre s’y est engagé tout à l’heure, mais c’est le ministre de la santé qui est ce soir au Sénat : nous comptons donc sur vous !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera essentiellement sur le titre III du projet de loi, c’est-à-dire sur la prévention et la santé publique. Certaines avancées ont été réalisées à l’Assemblée nationale, mais nous sommes loin de la politique de prévention ambitieuse à laquelle on pouvait s’attendre pour lutter contre les problèmes de santé publique. Parent pauvre de la santé en France, la prévention, qui représente à peine 3 % des dépenses, est réduite à quelques mesures.

Le développement des politiques de prévention reste aujourd’hui très insuffisant en France. En effet, on assiste au développement de fortes inégalités territoriales, mais également sociales, pour certains soins, notamment buccodentaires, ou pour certaines catégories de populations, comme les jeunes adultes ou les personnes âgées. L’état de santé est lié aux revenus, aux modes d’alimentation et de vie, aux pratiques et à l’appartenance sociale. Les écarts se creusent parfois dès la petite enfance.

Les politiques de santé ont peu de chances d’avoir la moindre efficacité si la dimension sociale, ou bien plutôt celle des inégalités sociales, n’est pas prise en compte. Aujourd’hui, on le sait bien, la prévention et le dépistage sont beaucoup moins répandus parmi les personnes les plus pauvres.

En matière de dépistage, le texte ne comporte aucune mesure relative au dépistage précoce du cancer, des maladies mentales, des maladies génétiques et métaboliques.

Les questions de santé publique englobent de nombreux domaines comme la santé au travail, la santé environnementale ou l’éducation pour la santé. Il est important de bien cerner les principales d’entre elles pour arrêter un programme global de prévention et de lutte contre les atteintes à la santé. Or, il n’en est rien dans ce texte.

Si nous souhaitons respecter la définition de la santé retenue par l’OMS, c'est-à-dire « un état de complet bien-être physique, mental et social », qui « ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité », nous devons développer une réelle promotion de la santé publique. Nous ne pouvons plus nous contenter d’un morcellement des initiatives et d’un émiettement des responsabilités, comme c’est le cas actuellement.

On peut se réjouir que le projet de loi reconnaisse l’éducation thérapeutique, mais il ne définit ni les programmes d’éducation thérapeutique ni les financements. Il conviendrait également d’intégrer cette éducation thérapeutique dans le cursus de formation des professionnels de santé.

Il est regrettable que le texte n’évoque pas les moyens qu’il faudrait consacrer à une politique de santé publique. La question de la santé à l’école et sur le lieu du travail n’y est pas évoquée, alors qu’un ouvrier a aujourd'hui sept ans d’espérance de vie de moins qu’un cadre supérieur. Une réforme du système de santé devrait avoir la volonté de mettre fin à ces inégalités, ou tout du moins de les réduire, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Notre défi majeur est de réduire les inégalités de santé, ce qui passe essentiellement par le développement de la prévention, dans les lieux de vie que sont l’entreprise et l’école, et par celui de l’éducation de la santé. On parle de l’alcool en prévoyant la répression sans réelle prévention. Comme l’obésité, l’alcoolisme est évoqué sans que de réelles actions de prévention soient menées.

Dans le titre consacré à la prévention et à la santé publique, on ne parle ni de priorités de santé publique, telles que les accidents de la vie courante, les allergies, l’asthme ou les cancers, ni des douleurs, telles que le mal de dos et les céphalées.

On ne parle pas non plus des maladies professionnelles et des accidents du travail. On oublie aussi les maladies cardiovasculaires, les maladies sexuellement transmissibles, le papillomavirus, les affections liées à la périnatalité, les affections bucco-dentaires et les problèmes de santé mentale que sont la dépression, le suicide et les pathologies mentales.

Rappelons-le, la santé mentale concerne le cinquième de la population et les troubles psychiatriques constituent la première cause d’invalidité et la deuxième cause d’arrêt de travail. La santé mentale devrait donc être l’affaire de tous.

L’État, en tant que garant de la protection de la santé, doit déterminer des objectifs de santé publique. Les professionnels ont un rôle primordial en termes de prévention. Ils doivent donc recevoir une formation adaptée. Quand aura-t-elle enfin lieu ?

Il est important de cerner les principales questions de santé publique afin d’arrêter un programme global de prévention et de lutte contre les atteintes à la santé. C’est par une véritable politique de santé publique que l’on réduira les inégalités sociales et territoriales en matière de santé. Il faut une politique volontariste. Malheureusement, elle est quasiment absente dans ce texte !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre système de santé – que je ne me hasarderai pas, contrairement à M. Desessard, à comparer au système de santé des États-Unis, qui a vingt ans de retard par rapport au nôtre – est reconnu comme l’un des plus efficaces du monde. Cependant, il est confronté à un certain nombre de difficultés, comme cela a été évoqué.

La France est aujourd’hui l’un des premiers pays d’Europe en matière de dépenses sociales : elle consacre 11 % de son PIB aux seules dépenses de santé. Notre espérance de vie est supérieure à la moyenne de celle mesurée dans les pays de l’OCDE et le taux de prise en charge par le régime général de l’assurance maladie s’élève à 77 %, ce qui est l’un des plus importants des grandes démocraties. Pourtant, l’accès à des soins de qualité reste inégal sur notre territoire et les disparités sociales ou régionales en matière d’espérance de vie demeurent préoccupantes.

L’accès aux soins de proximité est en effet devenu une grande préoccupation pour nos compatriotes, notamment ceux qui vivent en zone rurale et dans certaines banlieues. Comment faire bénéficier chacun d’eux des meilleurs soins et le plus près possible de leur domicile ? Cette question est devenue un vrai défi d’aménagement du territoire et une forte préoccupation pour les collectivités territoriales.

L’organisation de la chaîne du soin entre la prévention et les soins de ville ou en établissements et le suivi médico-social doit être revue. Il faut préciser que, en France, les dépenses de santé sont caractérisées par une proportion très importante des dépenses hospitalières : 64 %, contre 48 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. Dans le même temps, nos dépenses dans le domaine de la prévention sont plus faibles que dans les autres pays.

Face à ce constat, une réforme de l’organisation de notre système de santé s’imposait afin d’améliorer la sécurité et la qualité des soins pour tous sur l’ensemble du territoire. C’est ce à quoi s’attelle ce projet de loi.

À mon tour, je voudrais saluer le travail accompli par la commission des affaires sociales, par son président et par son rapporteur, et ce en liaison avec les professionnels de santé, en particulier les médecins. À cet égard, je tiens à rendre hommage à tous ces professionnels de santé, qui, chaque jour, exercent leur métier dans des conditions très difficiles et avec un dévouement sans pareil.

Je concentrai mon propos autour de trois points : la nouvelle gouvernance de l’hôpital, les communautés hospitalières de territoire et la démographie médicale.

Le projet de loi rénove la gouvernance hospitalière en remplaçant le « traditionnel » conseil d’administration de l’hôpital public par une formule duale, bien connue des privatistes, à savoir un conseil de surveillance et un directoire, présidé par un « patron » doté d’un véritable pouvoir. Si le renforcement des pouvoirs de ce directeur peut se justifier pour simplifier et améliorer le pilotage de l’hôpital, il est pour le moins indispensable que le corps médical participe avec responsabilité aux décisions.

Si je partage l’objectif de la réforme, qui est, selon les propres termes du Président de la République, de « mieux organiser pour dépenser moins et apporter plus aux patients », je considère que la logique gestionnaire ne peut tout emporter sur son passage et qu’il faut associer au fonctionnement de l’hôpital ceux qui le font au quotidien, à savoir les médecins. En effet, un hôpital ne peut être une entreprise comme une autre. Un hôpital, c’est de la santé, de l’humain, de l’éthique. Or les médecins sont les garants de l’éthique et de la pensée médicale.

La gouvernance actuelle a largement fait ses preuves – pas de conflit entre directeur et commission médicale d’établissement –, si bien que, dans le nouveau système, les médecins doivent non seulement être consultés, mais également être des partenaires essentiels. Il est indispensable que la gestion soit imprégnée de la réflexion médicale.

Le système doit garantir une qualité des soins. Dans le même temps, il est essentiel que certaines disciplines, en particulier celles qui ne généreront pas de bénéfices, ne disparaissent pas. À titre d’exemple, je citerai le CHU de Poitiers, dans mon département, où le service de cancérologie pédiatrique n’a dû son maintien qu’à la mobilisation des médecins.

C’est dans cet esprit et certain de cette indispensable complémentarité entre l’administratif et le médical que, avec plusieurs de mes collègues, j’ai déposé des amendements visant à rétablir le rôle central du président de la commission médicale d’établissement afin de lui faire jouer un rôle plus important encore dans la nomination des chefs de pôle et dans celle des membres du personnel médical au directoire. Cela devrait nous permettre de revenir à l’équilibre institutionnel que proposait le rapport Larcher.

La même réflexion s’applique d’ailleurs aux communautés hospitalières de territoire au sujet desquelles la commission des affaires sociales a renoué avec la souplesse contractuelle et les « rapprochements consentis ». Ainsi, toute ambiguïté sera désormais levée et la nature conventionnelle de cette nouvelle forme de coopération sera pleinement établie.

Cette approche conventionnelle exclut la notion d’établissement siège destiné à devenir le « chef de file » de la communauté hospitalière de territoire et monopolisant tous les pouvoirs de décision. Aussi, je me félicite de cette orientation, car il y avait fort à craindre de voir le CHU devenir l’établissement siège et les autres hôpitaux totalement en dépendre.

Enfin, la même solution équilibrée prévaudra pour répondre au problème de la géographie médicale auquel notre pays est confronté, problème qui est intimement lié à celui de la démographie médicale.

À l’image d’un dispositif évoqué par Gérard Dériot tout à l’heure et mis en œuvre par certains conseils généraux, le projet de loi crée une allocation mensuelle en faveur des étudiants en médecine qui s’engagent, par contrat, à exercer la médecine en zone de sous-densité médicale. Ce contrat d’engagement de service public favorisera sans nul doute l’orientation de jeunes praticiens vers les zones du territoire sous-dotées en ressources médicales.

La constitution de déserts médicaux et l’allongement des files d’attente sont néanmoins le résultat d’une gestion peu clairvoyante de la démographie des professions de santé. Vous n’en êtes aucunement responsable, madame la ministre. En effet, je le rappelle, les pouvoirs publics ont réduit le numerus clausus à l’issue de la première année d’études de 8 500, dans les années 1970, à 3 500, en 1993, avant de le rehausser progressivement, dans les années 2000, jusqu’à ce qu’il atteigne 7 400 aujourd’hui.

Compte tenu de la durée des études médicales, la hausse du numerus clausus depuis 2002 ne produira ses effets sur la démographie médicale qu’avec un décalage de dix ans environ. Pour l’heure, les promotions actuelles de médecins et de chirurgiens-dentistes ne suffisent plus à remplacer les médecins qui arrivent à l’âge de la retraite.

Qui plus est, certaines spécialités, historiquement valorisantes et valorisées, comme la chirurgie ou la gynécologie obstétrique posent désormais problème, car elles sont délaissées à la sortie de l’internat. Cette désaffection s’explique notamment par des raisons d’assurance.

Madame la ministre, quelles dispositions entendez-vous prendre pour remédier à cette situation ?

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Madame la ministre, dans votre propos liminaire, vous avez dit qu’il était absurde d’opposer patients et impératifs de gestion. Comment ne pas vous donner pleinement raison ?

L’intitulé de votre texte pouvait d’ailleurs légitimement nous faire espérer que le patient serait vraiment au centre de votre projet de loi. A minima, nous étions en droit d’attendre un réel équilibre entre patients et exigences de gestion. Or il n’en est rien ! Tel est le fondement même de notre critique.

Dans votre texte, le malade a quelque peu disparu. Le travail réalisé par la commission a certes permis des corrections allant dans le sens d’un meilleur équilibre, mais il convient d’aller plus loin.

En définitive, ce texte parle d’organisation, de gouvernance. Mais où est le patient ? Quelle est l’ambition en matière de santé ? Quels sont les moyens nécessaires au service de cette ambition ? Seules les réponses à ces questions peuvent donner un sens au choix d’organisation que vous proposez.

Donnons-nous une véritable loi fondatrice de droits nouveaux pour nos concitoyens. Il en est peut-être encore temps !

Cela étant, regardons le contexte dans lequel surgit ce projet de loi.

Il faut replacer le mouvement de protestation suscité par le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires dans la suite des réformes précédentes qui ont créé un climat de tension et de mécontentement général chez les acteurs de la santé. Du point de vue des hospitaliers de terrain, le projet de loi HPST, dans son contenu, c’est un peu la réforme de trop !

Depuis le milieu des années 1990, l’hôpital est en réforme permanente : création des agences régionales de l’hospitalisation, introduction de la tarification à l’activité, création des pôles, etc. Ces réformes se succèdent sans que l’on ait pris le temps de les évaluer ou même de mesurer tous leurs effets. C’est un peu comme un Meccano dont les pièces auraient été progressivement mises en place sans que le plan d’ensemble ait été dévoilé aux acteurs.

Ainsi, vous proposez un nouveau mode de gouvernance. Qu’en est-il ?

La gouvernance de l’hôpital sera calquée sur celle des cliniques privées avec un directeur, un directoire et un conseil de surveillance. Le projet de loi HPST achève en quelque sorte de « verticaliser » le système de santé en instaurant des lignes hiérarchiques sans rupture : la chaîne de pouvoir, qui va du ministère de la santé au directeur d’hôpital, en passant par le directeur des agences régionales de santé et d’autonomie, gagnera peut-être en rapidité de commandement – j’utilise ce terme à dessein –, mais elle aura pour effet d’ignorer les hommes et les femmes ancrés dans leur territoire, qui sont pourtant la justification ultime d’une politique de santé. Au bout du compte, l’efficience même des soins risque bien d’être remise en cause.

Jusqu’à présent, les lignes médicales et administratives, même si elles étaient séparées, savaient le plus souvent trouver les complémentarités nécessaires à l’action. Or la réforme remet en cause ce Yalta implicite en tentant d’hybrider ces deux logiques en une gestion médico-économique. Le projet de loi ne se préoccupe pas de la mise en œuvre des missions de service public et ne s’attaque pas à ce qui nous semble être les véritables problèmes de l’hôpital, à savoir un déficit de moyens dû au mode de financement, un empilement administratif résultant de cinq réformes successives en vingt ans, un « trou démographique » du nombre de médecins et d’infirmières et des inégalités géographiques d’accès aux soins évidentes.

Aujourd’hui, vous le dites vous-même, le projet de loi ne répond pas à ces objectifs. On entre, comme les intervenants précédents l’ont dit à plusieurs reprises, dans une véritable logique de productivisme. Les objectifs économiques prennent le pas sur les enjeux de santé publique et d’accès aux soins. Pour autant, je le crains, l’équilibre économique global ne sera même pas réalisé.

En filigrane de ce passage à un hôpital comptable

Mme la ministre proteste

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Mais, mes chers collègues, voilà que le texte évolue sous nos yeux : hier, dans son discours devant le CHU de Nancy, le Président de la République a infléchi votre position, madame la ministre ; je n’insisterai pas sur le choix de la méthode … Ainsi, les directeurs généraux seront désormais entourés d’un directeur et de trois vice-présidents.

En commission, la semaine dernière, nous avons réussi à renforcer les contre-pouvoirs des médecins. Nous souhaitons aller plus loin tout au long de l’examen de ce texte en séance publique.

Optimiser les organisations et fluidifier les modes de management : ces objectifs ne sont certes pas méprisables et font même partie des conditions de réussite d’un système de santé, mais en aucun cas ils ne sauraient constituer l’essentiel.

Pour ma part, mes chers collègues, j’aurais rêvé d’un projet de loi qui, dans ses attendus mais surtout dans ses choix d’actions, garantisse pour chacun de nos concitoyens un droit effectif, équitable et solidaire à des soins de qualité. Mais peut-être est-il encore temps de progresser sur cette voie !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après avoir salué le travail approfondi de tous ceux qui se sont investis dans l’étude et l’amélioration de ce projet de loi, au premier rang desquels je veux citer notre collègue Alain Milon, je souhaite rappeler que les deux objectifs qui ressortent du rapport Larcher sont : moderniser l’hôpital public et assurer l’accès de tous à une offre de soins de qualité.

Dans cette deuxième direction, je m’étonne qu’aucune piste ne soit ouverte sur le problème pourtant bien réel des « urgentistes », souvent tout premiers acteurs à intervenir dans l’accès aux soins.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Et le décloisonnement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

Le sujet que j’aborde concerne chaque thème du projet de loi HPST : l’hôpital, les patients, la santé et les territoires.

À l’heure actuelle, on assiste à une concurrence entre « les rouges », les sapeurs-pompiers, et « les blancs », le SAMU, dans le domaine de l’urgence, à laquelle le Président de la République souhaite mettre un terme. Au congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, il a sollicité les ministres de l’intérieur et de la santé afin de clarifier la collaboration entre les intervenants de l’urgence pour une meilleure répartition des compétences dans le respect de chacun.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Cela a été fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

En février 2008, les ministères concernés mettent en place un comité dit « quadripartite » censé regrouper les représentants des services d’aide médicale urgente, les SAMU, et les services d’incendie et de secours, mais excluant, de façon surprenante, les quatre fédérations d’ambulanciers et les présidents des conseils d’administration des SDIS, les services départementaux d’incendie et de secours.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

C’est réglé !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

Ce comité quadripartite est donc chargé de faire des préconisations visant l’amélioration des coordinations fonctionnelles entre les missions de secours à la personne – prompt secours ou permanence des soins – et la prise en charge des urgences médicales.

Le projet de référentiel commun affirme le caractère exclusif de l’intervention des soins en départ réflexe. Le principe est simple : le déclenchement des secours se fait par l’appel du 15 ou du 18. Le 15 arrive au centre de réception de régulation des appels du SAMU – le CRRA – et le 18 au centre de traitement des appels du service d’incendie et de secours.

Les deux centres de réception sont interconnectés ; le service du CRRA dispose d’un médecin régulateur chargé d’apprécier la situation et de confier l’intervention de prompt secours. Dans la grande majorité des cas, ce sont les services d’incendie et de secours qui sont sollicités. Or le référentiel ne soulève pas ce point. Il faut préciser que l’on doit distinguer les missions propres des services d’incendie et de secours des missions d’appui logistique. Les deux sont possibles mais posent un réel problème au plan financier.

C’est pourquoi il est nécessaire de définir une meilleure répartition des rôles. La première mission des sapeurs-pompiers est celle de la sécurité sur la voie publique. Les missions propres des services d’incendie et de secours sont définies dans un article du code général des collectivités territoriales qui précise que le SDIS n’est tenu de procéder qu’aux seules interventions qui se rattachent directement à des missions de service public.

Selon les dernières statistiques nationales datant de 2008, depuis l’achèvement de la départementalisation des SDIS, en 2001, le nombre d’interventions des sapeurs-pompiers sur des incendies est de seulement 8 %, contre 65 % pour le secours à la victime et l’aide à la personne. Or cette situation implique un coût, compte tenu de la répartition des missions entre sapeurs-pompiers professionnels et sapeurs-pompiers volontaires.

Quant au SAMU, sa mission revient à intervenir dans le cadre des accidents domestiques, avec, si nécessaire, l’appui logistique des sapeurs-pompiers, et non l’inverse !

Ne faisons pas l’amalgame entre la nature de la profession d’origine et une réalité de terrain bien différente, entraînant une requalification des missions, notamment en ce qui concerne les sapeurs-pompiers.

De « soldats du feu », les sapeurs-pompiers sont devenus les premiers engagés dans les secours et les soins d’urgence à la personne, conjointement – ou concurremment – à la mission du SAMU. Ces missions sont d’ailleurs précisées par la loi. Je plaide donc pour une meilleure répartition des rôles afin d’assainir une situation tendue par les déséquilibres financiers qui en découlent et qui cristallisent les blocages.

Je tiens à rappeler que les missions des services d’incendie et de secours sont financées à titre principal par les collectivités territoriales et celles du SAMU par l’assurance maladie.

En ce qui concerne les SDIS, leurs missions propres sont prises en charge financièrement par le département et les communes, leurs quotes-parts respectives variant selon les collectivités territoriales.

La question du financement se pose à propos des interventions hors missions propres qui peuvent être demandées aux services d’incendie et de secours par la régulation médicale du SAMU. Si le service d’incendie et de secours effectue une mission en appui logistique, il doit pouvoir demander une participation aux frais dans les conditions déterminées par la convention signée avec le SAMU, ce qui n’est pas toujours le cas.

Quant aux ambulanciers privés, ils ont été simplement écartés par le référentiel commun du comité quadripartite du champ d’intervention de l’urgence pour en réserver l’exclusivité aux sapeurs-pompiers. Or, depuis 2000, ils effectuent une véritable révolution sur la voie de la professionnalisation, avec l’appui des SAMU, à la demande et avec le soutien de la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins.

À la suite de l’arrêté du 23 juillet 2003, les ambulanciers s’organisent autour d’une garde départementale professionnalisée dédiée au SAMU pour répondre à l’urgence pré-hospitalière. Les sapeurs-pompiers professionnels semblent apprécier la complémentarité avec les ambulanciers. En revanche, les sapeurs-pompiers volontaires font plutôt pression pour une exclusivité de l’urgence réservée aux sapeurs-pompiers.

C’est pourquoi le référentiel commun initié en 2007 a surpris et inquiété à juste titre les ambulanciers. Le référentiel va même jusqu’à obliger le SAMU à missionner par réflexe les seuls sapeurs-pompiers avant régulation médicale pour tout appel de détresse. Même lors de son arbitrage, le médecin régulateur désigne quasi automatiquement les sapeurs-pompiers, ce qui revient à une négation de la régulation médicale elle-même.

Certains sapeurs-pompiers professionnels prennent prétexte de l’augmentation du secours à la personne pour demander une augmentation de leurs effectifs alors que, dans le même temps, les ambulanciers privés ont mis en place et financé un système de garde qui n’est pas sollicité.

Pour les ambulanciers, les conséquences de la disparition de l’urgence sont dramatiques tant sur le plan de l’efficacité sanitaire que sur le plan économique et financier, avec une perte de l’activité moyenne de 15 % à 20 % et une non-rentabilité des moyens investis.

Le coût de l’ensemble des moyens ambulanciers mis en œuvre semble plutôt compétitif si l’organisation est optimisée et la complémentarité des moyens effective, tandis que le coût des moyens « SDIS » nécessaires pour se substituer aux ambulanciers privés n’est pas évident à définir.

Pour en revenir au sujet principal qui me préoccupe, j’évoquerai les deux amendements que quelques collègues, dont Éric Doligé, Louis Pinton, et moi-même avons cosigné.

Hors de ses missions propres, toute intervention d’un service d’incendie et de secours doit faire l’objet d’une convention financière signée entre le conseil d’administration du service d’incendie et de secours et celui de l’établissement de santé concerné. Or certains établissements hospitaliers rechignent à honorer les conventions signées pour cause d’insuffisance budgétaire, ce qui conduit le SDIS à supporter le coût sur son budget propre.

En conséquence, ces amendements ont pour objectif de s’assurer que les établissements publics de santé concernés puissent disposer des crédits suffisants pour honorer les conventions.

Je souhaite, pour finir, évoquer le problème de l’homologation des diplômes de médecins de nationalité étrangère ayant acquis leurs diplômes à l’étranger mais ayant exercé en France en structure hospitalière publique au même titre que nos médecins nationaux, souvent en équipe et souvent en poste à responsabilité à part entière, depuis de nombreuses années.

Les médecins de nationalité étrangère qui ont obtenu un diplôme interuniversitaire de spécialisation s’appuient sur la loi de 2004 qui leur permet, sous certaines conditions, d’être inscrits à l’ordre des médecins. Mais nombre de dossiers sont refusés au motif d’un manque d’exercice malgré toutes leurs années de travail. Cette situation me semble anormale et mérite d’être dénoncée.

Je regrette que, lors du dernier débat à l’Assemblée nationale, Mme la ministre de la santé ait donné un avis défavorable sur l’amendement présenté par notre collègue Jean-Marie Rolland. Cet amendement a d’ailleurs été repris en commission par notre collègue Mme Procaccia.

Je rappelle enfin que la HALDE, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, qui avait émis un avis favorable, ainsi que le Conseil national de l’ordre des médecins et une grande majorité des syndicats de santé ont approuvé le fait de passer directement devant la commission d’autorisation.

Je souhaite donc que l’on sorte ces médecins de la situation précaire dans laquelle ils se trouvent encore de façon injuste et injustifiée, notamment si l’on songe à une situation en décalage avec la réalité du fait de la démographie médicale en France, et à la contribution de ces praticiens au bon fonctionnement des hôpitaux et à la permanence de soins.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

M. Jacques Blanc. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je soulignerai d’abord que nous apportons une fois de plus, avec ce texte, la preuve de l’importance du bicaméralisme. À ceux qui se demandent ce que fait le Sénat, nous montrons clairement qu’il a un rôle à jouer et qu’il le joue pleinement, notamment grâce au travail remarquable de la commission des affaires sociales, de son rapporteur et de son président, en liaison avec vous, madame la ministre, fussiez-vous installée sur une petite table...

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Quoi qu'il en soit, ces travaux de qualité nous permettent aujourd’hui d’aborder le texte avec sérénité, dans une situation apaisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Et c’est naturel ! Il ne s’agit pas de faire un procès à qui que ce soit ! Sur certains points, le projet a été amélioré, sans être dénaturé, par l’Assemblée nationale ; il ressort maintenant très enrichi des travaux de la commission des affaires sociales du Sénat.

Vous avez su, monsieur le rapporteur, être à l’écoute de l’ensemble des professionnels, médecins, sages-femmes, radiologues, biologistes, etc., mais aussi des territoires, en vous souciant de l’exigence de proximité, notamment dans les zones de montagne. En tant que président du groupe « Montagne », je tenais à vous en remercier.

Le dialogue, l’échange, l’écoute débouchent sur des réponses adaptées. Je me bornerai, dans le temps qui m’est imparti, à le démontrer sur quelques points.

En ce qui concerne les médecins, il était effectivement indispensable d’en finir avec la caricature injuste consistant à ne jamais voir en eux que des mandarins. Même si certains peuvent prêter le flanc à une telle critique, ils sont, dans leur immense majorité, au service des populations.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ce sont des saints !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Qui l’a dit ? Pas moi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Justement, il faut clairement l’affirmer et faire litière des faux procès.

Puisque nous sommes d’accord, madame la ministre, j’espère que vous soutiendrez nos initiatives visant à aller un peu plus loin.

Ce n’est pas dénaturer le rôle de manager du directeur que de préciser que, tout en conservant son pouvoir de nomination, il exercera celui-ci sur proposition du président de la commission médicale d’établissement. Il est prévu actuellement qu’il choisisse parmi trois noms, ce qui crée une ambiguïté et des risques d’interprétation aléatoire. Il est préférable que le président de la CME propose un nom, puis un deuxième si le directeur le refuse, enfin un troisième si c’est encore nécessaire. Je vois là non pas une mise en cause de l’autorité du directeur, mais le moyen d’établir un climat de confiance et de reconnaître le rôle de chacun. Tout le monde s’y retrouvera et le fonctionnement de l’hôpital n’en sera que meilleur.

Voilà pourquoi j’aimerais que les amendements que nous avons déposés sur ce point capital soient retenus.

De même, je souhaiterais que puisse être conforté dans le texte le rôle de la commission médicale d’établissement en ce qui concerne les cliniques privées.

Je vous félicite, madame la ministre, d’avoir su résister à ceux qui entendaient imposer l’installation des médecins dans telle ou telle zone. Vous avez choisi l’incitation plutôt que la contrainte pour lutter contre les déserts médicaux. Vous avez ainsi consacré l’exercice libéral de la médecine.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Vous avez néanmoins pris en compte la nécessité de faire en sorte que le plus possible de médecins s’installent dans les zones du territoire sous-dotées sur le plan médical – les territoires de montagne, par exemple, mais aussi certaines zones urbaines – en créant les contrats d’engagement de service public.

Je souhaite que les engagements pris par les bénéficiaires de ces bourses concernent non seulement leur installation, mais également les remplacements dont ils seront chargés ; cela permettrait de répondre à l’attente des nombreux médecins qui sont à la recherche de remplaçants, les jeunes praticiens acceptant plus volontiers les remplacements dans les villes universitaires que dans les zones excentrées.

Bien entendu, la réussite du dispositif suppose que des contrats en nombre suffisant soient signés, et nous serons très vigilants sur ce point.

Permettez-moi, avant de conclure, de vous adresser une supplique, madame la ministre.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Sur votre initiative, le nombre d’étudiants en deuxième année de médecine est passé, me semble-t-il, de 3 400 à 7 400.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

C’est bien, mais il faut aller encore plus loin, afin d’atteindre un effectif d’au moins 10 000 étudiants !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Il n’y a pas suffisamment de lieux de stage !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Des milliers de jeunes qui auraient fait de remarquables médecins en ont été empêchés. Dans le même temps, nous sommes obligés d’aller chercher des praticiens étrangers, certes très compétents, mais qui seraient plus utiles dans leurs pays ! Ne pensez-vous pas, madame la ministre, qu’il y a là une folie collective, dont la droite comme la gauche sont responsables ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Arrêtons d’écouter ceux qui n’ont jamais pris la mesure des besoins de notre pays !

En France, nous avons besoin de plus de médecins qu’ailleurs, et cela pour plusieurs raisons. D’abord, dans les services d’urgence, la durée légale du travail est de 35 heures, alors que cette règle ne s’applique pas dans les autres pays.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

Vous reconnaissez donc que les 35 heures sont très positives ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Ensuite, nous avons beaucoup plus de femmes médecins. Enfin, on s’installe moins dans certaines zones.

Par conséquent, les besoins en personnel médical sont réels et importants.

De grâce, relevons le numerus clausus ! Plus de médecins, cela ne signifie pas nécessairement plus de dépenses !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

J’ose le dire, c’est une erreur fondamentale qui a été commise !

Par ailleurs, tout comme M. le rapporteur, je crois qu’il faut répondre à l’exigence de formation. Ainsi, la reconnaissance de la formation universitaire pour les sages-femmes constitue, me semble-t-il, une réelle avancée.

Enfin, madame la ministre, en ce qui concerne l’élaboration des schémas régionaux d’organisation des soins, je voudrais insister sur la nécessité de prendre en compte la population saisonnière, outre les personnels permanents de santé, ainsi que les capacités spécifiques d’accueil sanitaire et social de certains territoires. Nous devons en être conscients, les établissements de santé qui sont situés dans des zones à faible densité de population ont une activité plus faible. Cette situation doit être compensée par des crédits spécifiques pérennes, par exemple au titre des actions de contractualisation ou des missions d’intérêt général.

Je conclurai en évoquant le volet médico-social.

Madame la secrétaire d’État, vous avez rassuré les acteurs du monde médico-social en précisant que l’approche transversale et globale ne s’effectuerait pas à leurs dépens. À cet égard, vous avez annoncé des mesures de fongibilité asymétrique.

M. François Autain s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Les appels d’offres doivent s’appliquer aux créations, mais il ne faut pas, me semble-t-il, les mettre en œuvre pour les renouvellements, afin de laisser toute leur place aux appréciations émanant des audits externes.

Il va de soi que, sous le bénéfice de ces différentes remarques, nous soutenons le présent projet de loi. À mon sens, chacun, et notamment la Haute Assemblée, a fait son travail ; nous ne pouvons que nous en féliciter.

Je me réjouis également que votre politique, madame la ministre, rompe avec de vieux tabous et place l’hôpital dans une nouvelle perspective de partenariat, où chacun jouera son rôle, au service des patients !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l ’ Union centriste. – M. Yves Daudigny applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Dumas

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, beaucoup a déjà été dit à propos du présent projet de loi.

En cette fin de discussion générale, je voudrais, pour ma part, insister sur le volet « patients ». En effet, toutes les évolutions dans l’organisation territoriale de la santé ou des hôpitaux ne doivent répondre qu’à une seule véritable préoccupation : le patient.

Mieux informé, plus exigeant aussi, le patient souhaite être un acteur à part entière de sa santé. Mon collègue Jean-Claude Etienne a même employé le terme d’« usager ».

L’objectif d’une meilleure autonomie, ou plutôt d’une autonomie renforcée des patients, notamment de ceux qui sont atteints de maladies chroniques, est un progrès attendu grâce à une meilleure connaissance de leur pathologie.

Une telle autonomisation du patient doit se faire grâce au développement de l’éducation thérapeutique, dans le cadre d’un plan coordonné de soins.

Par conséquent, oui à un plan et à des objectifs proposés au niveau national, mais oui également à une mise en œuvre au plus près des patients et des acteurs concernés !

Les ARS, instituées dans ce projet de loi, peuvent jouer un rôle important dans la définition et la coordination des moyens dévolus à un tel plan. Elles pourraient notamment labelliser les équipes et les structures des établissements de santé pour les prises en charge en ambulatoire. De même, elles pourraient organiser l’évaluation des programmes d’éducation thérapeutique du patient.

L’éducation thérapeutique n’est la propriété de personne en particulier : cela va de soi mais je tiens néanmoins à le souligner avec la plus grande énergie.

Sa réussite ne pourra être effective qu’en associant tous les acteurs – je dis bien : « tous les acteurs » –, et à tous les niveaux, autour du patient. Cela suppose également que la formation des futurs médecins, mais aussi celles des autres professionnels de soins puissent intégrer un chapitre spécifique.

De même, pour les professionnels actuellement en exercice, l’idée d’une formation spécifique et agréée, voire validée dans le cadre des programmes de formation continue – pourquoi pas ? – doit pouvoir faire son chemin.

Il restera à résoudre effectivement et concrètement la question du financement des activités et des programmes d’éducation thérapeutique pour le patient. Là encore, il me paraît souhaitable d’éviter toute exclusive.

Dans le rapport, il est proposé d’asseoir le financement sur une tarification spécifique, en ambulatoire comme à l’hôpital, sur un fonds national réparti au niveau régional sur les ARS et sur l’intégration dans la T2A.

De telles propositions me paraissent intéressantes, et elles n’excluent pas les financements en provenance des industries de santé, dont la participation ne saurait être ramenée à une pure et simple taxation supplémentaire, comme le souhaiteraient certains.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nos concitoyens seront attentifs aux aspects les plus concrets de ce projet de loi.

Certes, la prévention et les aspects d’information ne se résument pas à l’éducation thérapeutique et nous avons enregistré avec satisfaction le fait que des avancées significatives seraient proposées dans un futur texte législatif entièrement consacré à la santé publique.

En attendant, madame la ministre, permettez-moi de conclure par une citation de Louis Pasteur : « Le hasard ne favorise que les esprits préparés. »

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à une prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

J’informe le Sénat que M. le président du Sénat a été saisi de la question orale avec débat suivante :

N° 38 - Le 14 mai 2009 - M. Charles Revet demande à M. le secrétaire d’État chargé des transports de dresser un premier bilan de l’application de la loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire. Dans ce cadre, une présentation des projets stratégiques adoptés par les grands ports maritimes indiquera les objectifs de développement portuaire pour les années à venir et les perspectives en matière de transfert d’outillage et de personnel. En outre, une attention particulière sera accordée aux problématiques liées au zonage Natura 2000 dans les circonscriptions portuaires et au prix du transport de marchandises dans les ports ultra-marins.

Déposée le 11 mai 2009 – annoncée en séance publique le 12 mai 2009

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 395, distribué et renvoyé à la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu de M. Xavier Pintat une proposition de loi relative à la lutte contre la fracture numérique.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 394, distribuée et renvoyée à la commission des affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

M. le président du Sénat a reçu de M. Jean Arthuis une proposition de loi visant à renforcer l’efficacité de la réduction d’impôt de solidarité sur la fortune au profit de la consolidation du capital des petites et moyennes entreprises.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 398, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre les textes suivants, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l’article 88-4 de la Constitution :

- Recommandation de la Commission au Conseil autorisant la commission à entamer des négociations en vue de modifier les concessions prévues pour les viandes de volaille ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4452 ;

- Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) nº 1717/2006 instituant un instrument de stabilité ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4453 ;

- Proposition de Règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1255/96 portant suspension temporaire des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits industriels, agricoles et de la pêche ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4454 ;

- Proposition de virement de crédits n° DEC17/2009 - Section III- Commission - Budget général - Exercice 2009 (DNO) ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4455 ;

- Proposition de virement de crédits n° DEC16/2009 - Section III- Commission - Budget général - Exercice 2009 (DNO) ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4456 ;

- CDE - Centre pour le développement de l’entreprise - Renouvellement des membres du conseil d’administration ; ce texte sera imprimé et distribué sous le n° E-4457.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu de M. Michel Thiollière un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet (395, 2008-2009).

Le rapport sera imprimé sous le n° 396 et distribué.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu le texte de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet (395, 2008-2009).

Le texte sera imprimé sous le n° 397 et distribué.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 13 mai 2009 :

À neuf heures quarante-cinq :

1. Nouvelle lecture du projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet.

À quatorze heures trente et le soir :

2. Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (290, 2008-2009).

Rapport de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales (380, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 381, 2008-2009).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 13 mai 2009, à zéro heure quarante.