Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les discriminations, qu'elles soient liées à la race, au sexe ou à l'orientation sexuelle, ne sont en rien des formes atténuées de violence. Elles en sont au contraire et malheureusement trop souvent l'expression ordinaire. C'est dire l'importance de ces amendements qui visent aujourd'hui à réaffirmer, avec la force du droit, les valeurs fondamentales de respect, de dignité auxquelles nous sommes particulièrement attachés.
La lutte contre les violences est une responsabilité collective, et il fallait réussir ce que, depuis vingt ans, les femmes de France et les associations attendaient particulièrement, c'est-à-dire refonder la société sur les valeurs fondamentales.
Alors que se crée aujourd'hui la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, l'extension à l'homophobie et au sexisme des dispositions relatives au racisme constitue donc une étape particulièrement décisive, essentielle, dans la lutte contre les discriminations et dans l'affirmation des valeurs de respect et de dignité.
Ce projet de loi, qui a été enrichi grâce au dialogue souhaité et entretenu par M. le garde des sceaux et moi-même, constitue une avancée considérable parce qu'il comble aussi un vide juridique. Les propos incitatifs à la discrimination, à la haine et à la violence à raison de l'orientation sexuelle ou du sexe sont restés jusqu'à présent impunis. Peut-on raisonnablement concevoir qu'au XXIe siècle, en 2004, nous puissions encore accepter de voir évoquer la lapidation des femmes en France ? C'est probablement là que se situe l'avancée principale de ce texte, qui réprime les propos les plus dangereux, les plus outranciers, puisqu'ils peuvent eux-mêmes induire des comportements violents, y compris des agressions physiques.
En faisant le choix d'aligner les dispositions relatives à l'injure et à la diffamation sur celles qui sont relatives à l'homophobie, le Gouvernement répond à la demande qui a été très largement formulée non seulement par les associations, mais également par un certain nombre d'élus, et qui est conforme à l'avis de la Commission nationale consultative des droits de l'homme.
Ainsi, les associations qui portent la défense des droits des femmes et la lutte contre les violences pourront désormais ester en justice. C'est une avancée majeure qui permettra au corps social d'exprimer ce qui lui semble constituer une atteinte caractérisée et intolérable au respect de la dignité des personnes.
Toutefois, il importait de conserver un équilibre entre les principes constitutionnels de la liberté de la presse et du respect de la dignité de la personne humaine. La délimitation stricte, qui a été effectivement évoquée, de la notion de discrimination par le renvoi à la définition qu'en donne l'article 225-2 du code pénal répond à cet objectif.
J'ajoute que la prise en compte de la déontologie professionnelle permet des progrès tout à fait significatifs. Je pense en particulier au BVP, le bureau de vérification de la publicité, qui a conclu une convention avec le ministère chargé de la parité et de l'égalité professionnelle sur la prise en compte de la dignité de la personne dans les messages et les concepts publicitaires. Cette notion est donc préservée.
La France tient enfin aujourd'hui, aux côtés d'autres pays, telle l'Espagne, à fonder sa société sur les valeurs fondamentales de respect et de dignité et à adopter une attitude exemplaire à cet égard en Europe et dans le monde ; c'est donc avec fierté, mesdames, messieurs les sénateurs, que je vous présente ces dispositions, qui me semblent vraiment traduire, en matière d'égalité, un engagement de la France tout entière sur le plan tant intérieur qu'extérieur.