Intervention de Philippe Marini

Réunion du 28 novembre 2007 à 10h20
Loi de finances pour 2008 — Participation de la france au budget des communautés européennes

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

Lorsque nous évoquons, par exemple, les questions des collectivités locales, d'excellents collègues nous disent qu'il faut créer un impôt sur le revenu en faveur des collectivités locales. Même tentation, même fausse solution ! Ce n'est pas avec de nouveaux impôts que l'on répondra à des défis, qui sont des défis de cohérence, aux différents niveaux où l'on se place.

Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de proposer maintenant quelques pistes de réflexion dans le contexte de la présidence française, et vous ne serez pas surpris que j'évoque en premier lieu les marchés financiers, puisque la commission des finances s'est efforcée de développer son expertise dans ce domaine.

Nous avons récemment publié un rapport d'information que j'ai eu le plaisir de présenter et qui traite du « droit mou » communautaire.

Ce « droit mou » peut avoir un grand intérêt, car il peut faire converger les systèmes juridiques. Mais nous avons besoin de faire progresser les procédures. Nous n'y voyons pas suffisamment clair dans les mécanismes issus du processus Lamfalussy. Nous aurions besoin, au contraire, d'une véritable législation déléguée communautaire, qui ressemblerait peut-être aux lois d'habilitation et aux ordonnances de notre droit français.

Nous devons aussi, me semble-t-il, être particulièrement attentifs aux relations bilatérales et aux coopérations renforcées. Nous devons, notamment dans ces domaines techniques, être très attentifs aux intérêts de tous les États de l'Union européenne. Un petit État a, dans le processus de décision, autant d'importance qu'un État plus grand, et cette redécouverte des relations bilatérales doit s'exprimer dans tous les domaines, mais plus spécialement dans les domaines qui relèvent de la compétence de la commission des finances : le marché intérieur, la concurrence, la fiscalité.

Dans ce domaine de la fiscalité, monsieur le secrétaire d'État, nous soutenons le processus ACCIS, afin d'aller vers une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés. Ce sera un « instrument de référence commun », un compteur commun, pour « étalonner » les politiques fiscales nationales et évaluer la compétitivité relative de nos différents comportements.

Allons dans ce sens, favorisons cette initiative communautaire, et la présidence française, je l'espère, lui permettra de franchir de nouvelles étapes !

De même, en matière de gouvernance des marchés financiers, dans la relation, si délicate, avec la Banque centrale européenne, la présidence française pourrait aider l'Union européenne à tirer les conséquences de la diffusion des risques sur les marchés, notamment à l'heure où l'on ne voit pas s'achever l'onde de choc issue des mauvais crédits immobiliers américains.

Mais la même démarche d'approfondissement doit certainement prévaloir dans certains domaines, par lesquels je terminerai ce bref exposé.

Il s'agit, en premier lieu, de la politique européenne de la concurrence et de la conception des aides de l'État.

À cet égard, soulignons l'ambiguïté dans laquelle nous nous trouvons face à cette règle communautaire « de minimis », si souvent invoquée et que nous avons d'ailleurs retrouvée lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances : de minimis non curat praetor, de minimis non curat Europa.

Cette règle de minimis est, sans doute, un principe de bon sens et de bonne gouvernance, mais encore faut-il savoir comment on l'applique. Elle est un compteur, c'est-à-dire que l'entreprise qui bénéficie de ces différents régimes privilégiés se doit de vérifier que les conséquences sur ses comptes ne dépassent pas 200 000 euros sur trois ans.

Monsieur le secrétaire d'État, j'ai tendance à dire que tout cela comporte une large part d'illusion. Qui relève le compteur ? Qui est chargé de la vérification et du suivi des engagements que les entreprises sont censées prendre ?

Il est assez difficile de répondre à cette question ; nous l'avons bien vu lorsque nous avons évoqué le capital risque, l'investissement des particuliers, des investisseurs providentiels, personnes physiques, redevables de l'impôt sur le patrimoine dans le capital des petites et moyennes entreprises, notamment les nouvelles entreprises qui ont une valeur technologique.

M. le ministre du budget nous a donné des informations intéressantes sur ces sujets, mais nous aimerions connaître votre opinion.

J'en viens, enfin, aux secteurs de l'énergie et des transports.

L'énergie a souvent fait l'objet de débats au sein de la Haute Assemblée au cours des derniers mois. D'une manière générale, nous sommes attachés aux tarifs régulés reflétant les coûts complets de l'électricité.

Nous sommes tout à fait attentifs aux risques considérables que représenterait l'application littérale des actuelles directives sur le marché européen de l'énergie, car nous pouvons avoir le sentiment que notre pays, qui a investi des sommes très importantes dans la filière électronucléaire, et provenant pour une large part d'argent public, perdrait le bénéfice de la rente que ces efforts de long terme devraient, logiquement et équitablement, lui apporter.

Dès lors que le prix de l'énergie sur le marché est fixé par référence au coût de production de la centrale la plus classique et la plus polluante, pardonnez-moi de le répéter, monsieur le secrétaire d'État, il y a quelque chose de pourri dans le royaume européen. Il conviendrait de retrouver une logique conforme aux objectifs du développement durable.

J'en terminerai d'ailleurs par ce sujet, car on ne peut actuellement conclure son propos que sur le développement durable !

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