Cet amendement pose le principe de l'interdiction de placer un mineur en centre de rétention. Il se situe dans la continuité du précédent amendement tout en abordant un autre aspect du traitement réservé aux mineurs étrangers dans notre pays.
Il ne nous paraît pas tolérable de laisser perdurer la situation existante. D'ailleurs, lequel d'entre nous, dans cet hémicycle, peut se satisfaire de la présence de jeunes mineurs, voire de bébés, en centre de rétention ? Ils n'y ont pas leur place et les justifications avancées nous semblent très légères.
Nous ne pouvons nous satisfaire de la réponse consistant à dire que du matériel spécifique est prévu ou qu'un espace spécifique est réservé aux familles avec enfants. La réalité, nous le savons, est tout autre.
Quant aux fonctionnaires qui accomplissent un travail difficile dans ces centres de rétention, ils gèrent la présence des enfants comme ils le peuvent et, souvent, sans moyens spécifiques.
Dans son rapport annuel de 2005, la commission nationale de déontologie de la sécurité mentionnait le cas d'un nourrisson d'un mois né en France en août 2005 et placé au centre de rétention d'Oissel en Seine-Maritime avec sa mère d'origine somalienne. Or le centre n'était pas équipé pour recevoir des enfants en bas âge. Il a ainsi été constaté « une absence de présentation au service médical et une éviction des professionnels des services sociaux qui désiraient intervenir. Ni la mère ni l'enfant n'ont reçu de nourriture adaptée. Ils ont été retenus dans un véhicule de la police aux frontières, la PAF, pendant près de huit heures sans eau ni nourriture. »
Lors de nos différents déplacements dans le cadre de la commission d'enquête, nous avons pu constater de visu la présence de très jeunes enfants dans des situations de précarité.
Ces situations constituent pour nous, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, une violence intolérable qui vient s'ajouter au choc déjà incontournable lié au voyage pour parvenir jusqu'à nos frontières.
Ces enfants ne méritent pas cela, au seul motif que leurs parents ne possèdent pas les papiers nécessaires pour être admis en France. Cette situation est, selon nous, en contradiction totale avec notre tradition d'accueil et les valeurs de notre République. Je ne sais s'il s'agit là d'un outrage, mais, pour nous, cela est insupportable.
Les valeurs de la République ne sont pas à géométrie variable.
Le placement des mineurs en centre de rétention met notre pays en contradiction avec les engagements internationaux, notamment la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, ratifiée par de nombreux pays, mais pas par les États-Unis.
En conclusion, je dirai que le fait de maintenir un enfant dans un milieu privatif de liberté du seul fait de ses liens familiaux, alors qu'il n'a commis aucun délit - son âge le mettant à l'abri de tout cela - est en contradiction avec les dispositions de cette convention, notamment les articles 2 et 3, dont je vous épargnerai la lecture, mes chers collègues.
Vous nous parlez souvent du message que la France doit ou ne doit pas envoyer. En ce qui me concerne, je demande à chacun, s'agissant d'un tel sujet et au-delà de ce qui peut nous diviser, de se poser simplement en conscience la question : le message que la France doit envoyer est-il celui de la présence de bébés et de jeunes mineurs en centre de rétention ?
Pour toutes ces raisons, je vous demande de voter notre amendement.