L'article 36 nous éloigne des procédures actuelles, qui offraient aux étrangers un minimum de garanties en leur permettant de présenter deux recours distincts et de voir leur situation personnelle réellement étudiée.
Il est indubitable que les tribunaux administratifs sont débordés par l'explosion des contentieux liés aux refus de séjour et aux reconduites à la frontière. Le contentieux du droit des étrangers représentait 10 % des requêtes présentées aux tribunaux administratifs voilà dix ans, contre 25 % aujourd'hui. Une forte pression s'exerce donc sur les juges du fait du poids de ce contentieux.
Pour autant, la solution à cet engorgement des tribunaux ne doit absolument pas être la remise en cause des recours telle que vous la proposez.
Monsieur le ministre, vous subordonnez l'équité du procès et les droits de la défense à l'efficacité administrative.
Les tribunaux administratifs ont besoin d'une augmentation substantielle de leurs moyens et de leurs effectifs pour mener à bien leurs missions et pour que la qualité du jugement soit préservée. Vous ne pouvez prétendre réformer la justice et la rendre plus efficace en supprimant les contentieux et en ne permettant pas aux personnes de se défendre contre des décisions administratives trop souvent arbitraires.
Alors que vous prétendez apporter de la clarté et de la cohérence aux procédures de recours juridictionnel, vous ne faites que les obscurcir et les rendre encore plus difficilement applicables dans les faits.
Cette réforme des procédures de recours vise en fait à détourner ces procédures de leur objectif initial, qui est de permettre aux étrangers de contester lors d'un procès équitable les décisions qui ont été prises à leur détriment.
Cette réforme des procédures de recours, destinée en fait à priver les étrangers de leurs droits, n'est pas sans rappeler les méthodes prescrites par votre circulaire de février 2006.
Cette circulaire, adressée aux préfets et procureurs, organise en effet une véritable « traque » des étrangers irréguliers, avec, une nouvelle fois, l'efficacité administrative comme objectif affiché. Elle précise par exemple, avec un cynisme certain, la procédure à suivre pour piéger les requérants au droit d'asile ou à un titre de séjour dans les préfectures : il suffit de les y faire venir grâce à une convocation qui doit exclure, bien entendu, « toutes indications relatives à l'éventualité d'un placement en rétention, tout descriptif [étant] à proscrire ».
Ces méthodes montrent que l'on aurait bien tort de manquer de vigilance quant aux droits fondamentaux et aux libertés publiques.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter la suppression de l'article 36.