Monsieur le ministre, d'une manière générale, une loi fixe des objectifs et les moyens pour y parvenir. C'est donc dans cet esprit qu'il faut interpréter l'article 59 : l'objectif, c'est d'avoir une fiabilité de la sincérité des mariages ; les moyens pour y parvenir, ce sont, d'une part, des critères fondés sur un contrôle implicite et, d'autre part, le critère de la durée de vie commune.
Certes, vous n'avez pas l'intention de créer une discrimination à l'encontre des Français établis hors de France. Vous partez du principe que le contrôle des couples mixtes se fera plus aisément dans les communes de l'Hexagone qu'à l'étranger, ce qui expliquerait l'année supplémentaire que vous instaurez.
Malheureusement, monsieur le ministre, votre méthode n'est pas la bonne, et je vais vous expliquer pourquoi.
En effet, le critère de la durée ne permet pas de garantir la sincérité d'un mariage. L'allongement du délai à quatre ou cinq ans ne fera pas diminuer la fraude. Au contraire, les filières qui organisent des mariages blancs en vue d'une acquisition de la nationalité française par déclaration seront même incitées à augmenter leurs tarifs.
Si le critère du contrôle est beaucoup plus sérieux, il n'est pas normal de considérer qu'il suffit de porter le délai à cinq ans pour se prémunir contre les activités des passeurs et des fraudeurs. Dans votre logique, vous devriez plutôt fixer un délai beaucoup plus contraignant, par exemple dix ans.
En revanche, il existe une méthode beaucoup plus fiable, qui permet justement d'éviter tout ce qui peut apparaître comme une discrimination à l'encontre des Français établis hors de France : il faut assurer un contrôle implicite, à l'instar de ce qui se pratique dans nos communes, en prévoyant une obligation d'inscription au registre des Français établis hors de France. De cette manière, il y aura une déclaration officielle, un suivi et, donc, un contrôle.
Pour des situations équivalentes, les traitements doivent être identiques, faute de quoi il y a discrimination.
Sur ce point, je rejoins la position de mes collègues Monique Cerisier-ben Guiga et Joëlle Garriaud-Maylam. En effet, tel qu'il est rédigé, le texte laisse supposer qu'il y a discrimination. Or je suis sûr, monsieur le ministre, que telle n'est pas votre intention.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement, qui a pour objet de répondre à votre attente, de corriger les effets néfastes de la rédaction proposée et d'éliminer tout risque de dérapage, que votre texte n'empêchera pas.