Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes appelés, comme chaque année, à autoriser la contribution de la France au budget des Communautés européennes, soit 18, 4 milliards d'euros pour 2008.
La France reste le deuxième État membre contributeur au budget communautaire, dont elle assure 16, 9 % des recettes, après l'Allemagne, avec 19, 7 %. Toutefois, si la part de notre voisin d'outre-Rhin reste stable par rapport à 2007, la nôtre progresse de 0, 9 point, en rupture avec la tendance observée depuis 2002. Il est vrai que la « générosité » française est largement payée de retour, puisque notre pays était, en 2006, le premier bénéficiaire des dépenses du budget communautaire, avec 13, 9 % du total des versements, devant l'Espagne. Cette situation est toutefois appelée à se détériorer compte tenu des derniers élargissements et de la mise en oeuvre des nouveaux programmes.
Je ne souhaitais pas évoquer ici le projet de budget des Communautés européennes pour 2008, mais la question de Galileo m'y contraint.
Les éléments du dossier sont connus : pour que le programme européen de navigation par satellite puisse concurrencer le GPS américain à partir de 2013 - avec trois ans de retard sur le calendrier initial ! -, il manquait 2, 4 milliards d'euros dans l'actuel cadre financier 2007-2013. Or les États membres paraissaient incapables de s'entendre sur la façon de dégager ce besoin de financement. Ce n'est que vendredi soir qu'une lueur d'optimisme est apparue puisque les ministres des Vingt-sept et les représentants du Parlement européen se sont entendus.
L'essentiel du financement proviendra des fonds de la politique agricole commune qui n'ont pas été dépensés en 2007, tandis que le reliquat sera prélevé sur les programmes de recherche prévus pour 2008. Nous ne pouvons que nous réjouir qu'un accord soit intervenu, car nos compatriotes auraient mal compris que les Européens ne puissent arriver à une solution pour un projet d'une telle importance. Nous sommes vraiment là dans un domaine où les Français pensent que l'Europe doit agir davantage.
Pour ma part, je me permettrai toutefois de regretter que l'on ait dû réduire les marges de manoeuvre pour 2008. Mais, encore une fois, l'essentiel était de trouver une solution.
Notre débat, qui concerne à la fois le budget et l'Europe, se déroule dans un contexte profondément renouvelé par le succès que constitue, après le blocage de la construction européenne consécutif à l'interruption du processus de ratification du traité constitutionnel, la conclusion du traité de Lisbonne, le 19 octobre dernier. On sait la part importante que la France a prise dans ce succès.
Le traité de Lisbonne, qui doit être signé le 13 décembre prochain, puis ratifié très rapidement pour entrer en vigueur, nous l'espérons, au 1er janvier 2009, renforce sensiblement les pouvoirs du Parlement européen en matière budgétaire. Il reprend d'ailleurs les dispositions du traité constitutionnel en la matière.
La distinction entre dépenses obligatoires et dépenses non obligatoires disparaît. Or le Parlement européen n'a actuellement qu'un pouvoir d'amendement très limité sur les dépenses obligatoires, qui comprennent essentiellement les dépenses agricoles. Le traité de Lisbonne place le Conseil européen et le Parlement européen sur un pied d'égalité en matière budgétaire. Il donne également un fondement juridique à la procédure des perspectives financières, dénommée cadre financier pluriannuel. Cette pratique s'était en effet développée en marge des traités, sous la forme d'accords interinstitutionnels, le dernier datant du 17 mai 2006.
Le traité de Lisbonne ratifié et les problèmes institutionnels réglés, l'Europe pourra passer à autre chose. La France peut désormais concentrer son attention sur d'autres dossiers et, naturellement, sur sa présidence de l'Union européenne au second semestre 2008.
Le Gouvernement propose de créer dans le projet de loi de finances pour 2008 un programme ad hoc destiné à financer les dépenses induites par la présidence française de l'Union, dont les quatre priorités ont été présentées : la lutte contre le changement climatique, l'énergie, l'immigration et l'Europe de la défense. Nous sommes d'ailleurs appelés, dès demain, lors de l'examen de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », à voter les crédits de ce programme.
Mais un autre dossier important attend la présidence française, celui du réexamen des politiques européennes et leur financement après 2013, en particulier avec la refondation de la politique agricole commune, la PAC, et la réforme du système des ressources financières de l'Union européenne.
À ce titre, je rappelle que l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 a prévu que la Commission européenne entreprenne un réexamen complet et global, couvrant tous les aspects des dépenses de l'Union européenne, y compris la PAC, ainsi que des ressources, y compris la compensation en faveur du Royaume-Uni, et présente un rapport en 2008-2009. Le 12 septembre dernier, la Commission européenne a publié un document de consultation publique, ouverte jusqu'au 15 avril prochain, intitulé « Réformer le budget, changer l'Europe », engageant ainsi la première étape de ce réexamen qui participe de la réflexion sur l'avenir de l'Europe.
Il s'agit de répondre à deux questions fondamentales.
Premièrement, quels devraient être le schéma et l'orientation des priorités de dépenses de l'Union européenne pour relever les défis de la mondialisation au cours de la prochaine décennie et au-delà ?
Deuxièmement, quelle est la meilleure façon de dégager les ressources nécessaires pour financer les politiques de l'Union européenne ?
Nous ne disposons pour l'instant que d'informations très générales. C'est pourquoi la délégation pour l'Union européenne souhaiterait que le Gouvernement informe rapidement le Parlement de la méthode selon laquelle il entend préparer la présidence française sur le réexamen du cadre financier, et de la manière dont il associera le plus en amont possible le Parlement. Nous pensons que les parlements nationaux devront s'exprimer sur ce sujet très sensible, qui concerne à la fois les finances publiques des États membres et la question du consentement de l'impôt.
Sur ce sujet, je me limiterai à formuler quelques considérations générales.
Compte tenu de l'importance des enjeux, il est souhaitable que le débat ne soit pas réduit à la question de la PAC et du rabais britannique.
Un réexamen global nécessite cependant une information budgétaire complète. Il doit donc prendre appui sur une analyse intégrant l'ensemble des dépenses publiques européennes par secteur. La prise en compte d'une vision agrégée des financements publics européens paraît indispensable au cours des négociations, afin d'avoir du recul sur les questions les plus « médiatiques ».
De même, il me semble que, sur la nature du budget communautaire, il serait fortement souhaitable de dépasser le débat sur le « juste retour ».