Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, certains d’entre nous se sont interrogés sur l’ambition politique portée par ce texte. Cette ambition est en réalité très simple et se résume en deux idées.
La première est bien évidemment l’application de la révision générale des politiques publiques, ou RGPP, au réseau consulaire, conformément aux orientations du conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008.
La seconde concerne l’application des principes posés par la réforme des collectivités, notamment le principe de compétence exclusive de la région en matière économique.
Il s’agit ainsi, par le biais de cette réforme, de régionaliser les chambres de commerce et d’industrie et de permettre, en conséquence, une réduction du coût de l’ensemble du réseau.
Le Gouvernement propose donc une réforme idéologique des chambres de commerce et d’industrie, réforme qui n’est pas une bagatelle puisque l’on compte aujourd’hui près de 150 chambres de commerce et d’industrie réparties sur l’ensemble du territoire, ainsi que 21 chambres régionales. Leur budget global annuel s’élève à environ 4 milliards d’euros. Ces établissements sont des acteurs majeurs du développement économique local, puisqu’ils gèrent de nombreuses installations, notamment 90 aéroports, soit plus de 64 millions de passagers, 121 ports commerciaux, plus de 120 zones d’activité économique, de nombreux centres routiers, près de 20 palais des congrès et parcs d’exposition, ou encore plus de 50 pépinières et incubateurs d’entreprises.
Les chambres de commerce et d’industrie sont également très investies dans la formation professionnelle, qui constitue l’une de leurs missions prioritaires : les CCI assurent chaque année, au sein de leurs 500 établissements, la formation de plus de 600 000 élèves, apprentis, salariés ou demandeurs d’emploi.
Une véritable concertation aurait donc été particulièrement nécessaire sur une réforme d’une telle ampleur. Pourtant, force est de constater que, aujourd’hui, aucun consensus ne se dégage sur ce thème, comme l’a souligné M. Doligé dans son rapport pour avis !
Le conseil des présidents de chambres de commerce et d’industrie voit notamment dans cette réforme une centralisation administrative régionale supplémentaire, qui oublie les spécificités de terrain ainsi que les atouts territoriaux qui doivent être valorisés. Il déplore ainsi une perte totale d’autonomie d’initiative et de budget de leur structure et, au final, une réforme conduite « dans la précipitation et dans l’incohérence ».
Un ancien président de l’ACFCI a également publié, voilà pratiquement un an, une tribune dans le quotidien Les Échos, tribune qui dénonçait cette réforme et concluait qu’« elle ne vise pas à moderniser le réseau consulaire, mais bien à le tuer, faisant disparaître des outils de proximité, animés par des chefs d’entreprise dévoués à leur territoire ».
Les syndicats sont également très critiques et soulèvent de véritables difficultés quant à l’avenir des personnels.
Pour en finir avec la cacophonie qui entoure ce projet de loi, la commission des finances a émis un avis particulièrement réservé – c’est le moins que l’on puisse dire – sur le présent projet de loi, déplorant notamment que les modes de financement liés aux transferts de charges soient insuffisants. Elle a estimé que, en l’état, ce texte ne pouvait être débattu par notre assemblée.
Une telle levée de boucliers devrait vous faire réfléchir et vous inciter à revoir votre copie !
Et je ne vous parle même pas de l’absence de cohérence ! Si le titre Ier du projet de loi traite, comme son nom l’indique, de la réforme des réseaux consulaires, le titre II a pour unique objet la transposition de la directive Services pour certaines professions réglementées. Ce simple fait justifie de notre part le dépôt d’une motion tendant à opposer la question préalable, motion qui sera défendue par Michel Billout.
Dans cette intervention, je souhaite faire la démonstration que la réforme du réseau consulaire, telle qu’elle nous est proposée, n’est pas pertinente.
Le projet de loi qui nous est soumis prévoit une nouvelle architecture du réseau – sa régionalisation totale –, plaçant ainsi sous tutelle les anciennes CCI.
Il s’agit, tout d’abord, d’une tutelle politique, puisque les assemblées locales de chefs d’entreprise élus pour administrer les chambres territoriales seraient dans l’obligation d’élire comme président l’un des membres de l’assemblée régionale.
Il s’agit, ensuite, d’une tutelle financière, puisque les ressources publiques des chambres de commerce et d’industrie seront également centralisées à l’échelon régional, qui seul répartira cette ressource entre les territoires, inévitablement au détriment des bassins d’emploi les moins favorisés, compte tenu de la pondération économique retenue pour la composition de l’assemblée régionale.
Il s’agit, enfin, d’une tutelle sociale, puisque l’ensemble des personnels actuels des chambres de commerce et d’industrie sera transféré à un employeur régional, puis mis à disposition de l’échelon local pour assurer le service administratif de proximité.
Le rattachement proposé s’apparente ainsi à une démarche autoritaire et centralisatrice, que nous jugeons inacceptable.
Plus pernicieux encore, un dispositif spécifique est créé pour l’Île-de-France, où les chambres départementales perdraient non seulement leur autonomie de gestion et leur autonomie financière, mais également leur statut juridique.
Nous pouvons ainsi voir la volonté de ce gouvernement de réduire les chambres de commerce et d’industrie des départements franciliens à de simples annexes de la chambre régionale, alors que la situation des bassins d’emploi en Île-de-France est extraordinairement variée.
La précipitation n’est pas facteur d’efficacité et nous estimons qu’il faut laisser aux actuelles chambres de commerce et d’industrie le choix d’être rattachées ou non à la chambre régionale, et ce selon un calendrier qu’elles auront elles-mêmes défini.
Comme une obsession, au fil de vos lois, l’échelon départemental est ainsi systématiquement dépecé de son organisation administrative et institutionnelle. Nous contestons cela. En effet, d’une part, la disparition du département entraîne, de fait, la suppression d’un espace de démocratie. D’autre part, il est utile de garantir un fort pouvoir d’initiative aux CCI à l’échelon départemental, au plus près des besoins comme des réalités.
Dans le droit fil de la réforme territoriale, vous créez un dispositif spécifique pour les chambres de commerce et d’industrie métropolitaines, alors même que la réforme des collectivités n’a pas été adoptée de manière définitive par les assemblées parlementaires. Il s’agit bien de précipitation, et nous ne savons même pas quelles compétences seront accordées aux métropoles !
Par ailleurs, alors que le principe de subsidiarité est un principe fondateur des institutions européennes, que vous vénérez par ailleurs, …