Intervention de Claude Bérit-Débat

Réunion du 9 juin 2010 à 14h30
Réseaux consulaires — Discussion d'un projet de loi

Photo de Claude Bérit-DébatClaude Bérit-Débat :

Autrement dit, les CCIT financeront un transfert de personnel censé permettre des économies globales au niveau régional : on complique, là où il faudrait faciliter ! Qu’on en juge : les agents publics, qui relevaient jusqu’à présent des CCIT, relèveront des chambres régionales, lesquelles les mettront à disposition des CCIT et sous leur responsabilité. Ce système est kafkaïen et, à mes yeux, il ne fera qu’étrangler les « petites » chambres de commerce et d’industrie. Ce n’est rien d’autre que le nouvel avatar de l’organisation institutionnelle de notre pays que le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d’État, met en place à marche forcée. Le rapport de la commission n’hésite d’ailleurs pas à affirmer que cette réforme préfigure la réforme des collectivités territoriales.

Le projet de loi lui-même ne fait que marteler l’idée selon laquelle l’échelon départemental n’a plus d’avenir, tant en termes économiques qu’en termes administratifs. Les dispositions relatives aux métropoles sont très explicites de ce point de vue : vous proposez la création de chambres consulaires métropolitaines, lesquelles absorberont l’activité au détriment des CCIT, à l’instar des départements qui seront, à terme, cantonnés à la gestion de l’action sociale. La proximité, le lien social et l’ancrage local, ces idées semblent perdre toute leur valeur.

Je ne suis pourtant pas convaincu que cette vision de la France constitue un progrès. Je crois surtout qu’elle ignore un élément fondamental, je parle bien sûr de l’intelligence territoriale. Vous nous dites que le mouvement de réorganisation du réseau engagé ces dernières années n’est pas suffisant. Pourtant, de 2000 à 2008, quarante chambres de commerce et d’industrie ont fusionné et, à terme, il n’en restera plus que cent vingt-six. Ce mouvement est donc loin d’être négligeable et ces fusions ont été décidées par les acteurs locaux concernés.

Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de citer une nouvelle fois l’exemple de mon département. La chambre de commerce et d’industrie de Dordogne est issue de la fusion réussie de deux chambres de commerce et d’industrie pourtant longtemps antagonistes, celle de Périgueux et celle de Bergerac. Après cette fusion, la chambre d’agriculture, la chambre de commerce et d’industrie et la chambre de métiers et de l’artisanat du département ont décidé de créer en commun un pôle interconsulaire, dans lequel elles se sont installées depuis le début de 2010 et que j’aurai l’honneur d’inaugurer ce mois-ci.

La création de ce pôle a permis une vraie mutualisation des moyens, dans un bâtiment construit en commun, dont ces trois chambres partagent l’utilisation, notamment en ce qui concerne les salles de réunion, de vidéoconférence, d’accueil, de réception, ainsi qu’un certain nombre de services de logistique, permettant de réaliser de substantielles économies d’échelle, au niveau de ce que l’on appelle le back office.

L’initiative va même plus loin, puisqu’elle s’inscrit dans une véritable politique d’aménagement et de valorisation du territoire. Ce pôle interconsulaire a été construit sur une zone d’activité économique aménagée par la communauté d’agglomération périgourdine, à proximité d’une pépinière d’entreprises, de l’Institut du goût du Périgord et de son laboratoire d’analyse sensorielle, créés également par la communauté d’agglomération. L’ensemble de ces réalisations est donc le fruit d’une étroite collaboration entre les collectivités locales et les acteurs économiques.

Au total, cette initiative pionnière est un puissant vecteur de synergies. J’ai l’audace de penser que cet exemple constitue la preuve indiscutable que l’échelon départemental peut être le vecteur d’un profond changement au profit du développement économique.

J’ajouterai que les chambres de métiers et de l’artisanat ont également fourni la preuve qu’elles savent préparer l’avenir, en se mettant largement d’accord, contrairement aux chambres de commerce et d’industrie, sur un projet de réforme. En Aquitaine, les chambres de métiers de la Gironde, de la Dordogne et du Lot-et-Garonne ont choisi de fusionner à l’échelon régional avec une représentation paritaire des élus de chaque chambre. Ces exemples montrent qu’il ne faut pas sous-estimer la capacité d’innovation du réseau consulaire à l’échelon local.

Vous l’aurez compris à travers les nombreux cas que j’ai cités, mes chers collègues, je défendrai dans ce débat une certaine conception des territoires. Pour moi, nos territoires ne sont pas un anachronisme, ni un facteur d’immobilisme, mais bien une chance et une richesse pour la France.

Nous vous ferons des propositions qui tiennent compte de cette réalité, monsieur le secrétaire d’État, et j’espère que vous les entendrez.

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