Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 28 novembre 2007 à 10h20
Loi de finances pour 2008 — Participation de la france au budget des communautés européennes

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais saisir l'opportunité née de ce débat sur la contribution financière de la France au budget des Communautés européennes pour saluer l'accord historique auquel sont parvenus, le 19 octobre dernier, les vingt-sept chefs d'État et de gouvernement sur le traité simplifié.

La crise institutionnelle, née en 2005 du double « non » français et néerlandais au traité établissant une Constitution pour l'Europe, avait plongé tous les partisans de l'intégration européenne dans la stupeur et la consternation. L'extraordinaire projet de construction européenne, indispensable à l'équilibre du monde et au futur de nos concitoyens, allait-il mourir ?

L'accord de Lisbonne met fin à cette période d'immobilisme et d'interrogations. Il ouvre de nouvelles perspectives pour l'Union, avec des institutions rénovées, une présidence stable, des procédures de décision plus efficaces et de nouvelles politiques communes, notamment dans le domaine de l'énergie et de la lutte contre le réchauffement climatique. Je me réjouis d'autant plus de la rapidité avec laquelle ce texte a été adopté qu'il permettra de dépasser le médiocre traité de Nice, simple accord a minima qui avait figé les positions conservatrices et protectionnistes des uns et des autres.

À mon sens, il serait hautement symbolique que la France, qui avait rejeté le texte de 2005, s'honore en étant le premier État membre à ratifier le nouveau texte. La responsabilité de notre pays dans la mise en oeuvre du nouveau traité sera grande, puisqu'il assurera la présidence de l'Union au second trimestre 2008.

Permettez-moi de vous donner quelques chiffres. Ligne budgétaire classique, le projet de loi de finances pour 2008 prévoit que l'État prélèvera sur ses recettes 18, 4 milliards d'euros, soit 6, 8 % des recettes fiscales nettes, en augmentation de 9, 3 % par rapport à la prévision d'exécution pour 2007. Dégrevé des frais de perception, ce prélèvement atteindra le montant net de 17, 834 milliards d'euros.

Toutefois, ce montant ne correspond pas à la contribution qui sera versée en définitive. D'une part, pour des raisons techniques, il existe toujours - c'est surprenant ! - des écarts entre la prévision et l'exécution. D'autre part, nous ne connaissons pas encore à ce jour le montant exact du budget communautaire de 2008 qui sera adopté à la mi-décembre.

L'avant-projet présenté par la Commission fait état de 129, 2 milliards d'euros de crédits d'engagement, en augmentation de 2 %, et de 121, 6 milliards d'euros de crédits de paiement, en augmentation de 5, 2 %, soit 0, 97 % du revenu national brut de l'Union européenne.

Les dispositions de l'accord interinstitutionnel sur les perspectives financières s'appliqueront pleinement, pour l'exercice 2008, en ce qui concerne les dépenses. En revanche, les conséquences de cet accord sur les recettes du budget, juridiquement traduites dans la nouvelle décision relative au système des ressources propres des Communautés européennes, ne s'appliqueront pas.

La contribution de la France sera majorée en 2008 de 1, 6 milliard d'euros par rapport à 2007, en raison de la surévaluation opérée dans la loi de finances initiale pour 2007. La France financera ainsi l'année prochaine 16, 9 % du budget de l'Union européenne, c'est-à-dire une augmentation qui rompt avec les baisses constatées depuis 2002.

À n'en pas douter, notre pays va devoir supporter dans les années qui viennent les conséquences financières des élargissements massifs opérés depuis 2004. La France reste le deuxième contributeur derrière l'Allemagne et devient, certes, le premier bénéficiaire en volume de dépenses, à savoir 13, 9 %. Mais l'encadrement des dépenses agricoles arrêté pour la période 2007-2013 ainsi que les perspectives d'évolution de la PAC pour l'après-2013 sont de nature à faire diminuer les transferts de ressources vers notre pays.

L'année 2008 sera cruciale pour trois enjeux européens : la réforme du financement de l'Union européenne, la réforme de la PAC et la clause de rendez-vous des perspectives financières 2008-2009.

La Commission a d'ores et déjà lancé la procédure de révision du budget 2008-2009 par une communication intitulée « Réformer le budget, changer l'Europe » et par l'ouverture d'une consultation publique qui durera jusqu'en avril 2008. La PAC et le rabais du chèque britannique en constitueront les éléments principaux.

Il est bien entendu nécessaire de réfléchir en profondeur à la meilleure façon de réformer la PAC, sans qu'il y ait de perdants : ni la grande Europe, qui doit devenir exportatrice et en tout cas autosuffisante, ni la France, premier pays agricole de l'Union. Les deux doivent être gagnants !

Il semble que la Commission envisage également de revoir le mode de calcul des contributions nationales pour demander à chaque État une contribution unique de 1 % du RNB. Une telle règle aurait pour conséquence une légère augmentation de notre contribution. La montée en charge de ressources propres - TVA, droits de douane, impôt sur les sociétés après harmonisation, taxes sur l'énergie - qui tendent à se substituer aux contributions nationales permettrait de doter l'Union européenne de ressources plus dynamiques, plus transparentes et moins dépendantes du seul bon vouloir des États.

Certes, le système de financement communautaire doit évoluer. Les défis qui se présentent sont de taille : émergence de nouveaux pays exportateurs, hausse des cours, maîtrise de la ressource aquatique, développement des biocarburants, changement climatique, exode rural.

En réaction à ces éléments, la Commission vient de rendre publique une série de propositions aux airs de révolution culturelle : réduction des aides les plus élevées, fin des mises en jachère, abandon d'ici à 2014 des quotas laitiers, suppression des instruments de soutien du marché. L'ironie veut qu'il revienne à la France d'en assurer la montée en charge à partir de juillet 2008 !

Nos agriculteurs sont prêts à relever ces défis avec l'envie de vivre du fruit de leur travail, mais pas à n'importe quel prix. Ils ne veulent pas rester passifs ; ils veulent, au contraire, participer à la construction d'une agriculture européenne parfaitement insérée dans un marché mondial assurant des équilibres entre le Nord et le Sud, et garantissant son autosuffisance alimentaire.

Monsieur le secrétaire d'État, cette digression avait pour objet d'éclairer les enjeux financiers à venir, et ils ne sont pas des moindres ! Voilà deux ans, la France avait plongé l'Union européenne dans l'immobilisme. Elle a réussi à l'en sortir grâce à l'initiative du président de la République pour ouvrir, espérons-le, des perspectives bien plus exaltantes.

Le groupe du RDSE, fidèle à ses convictions européennes et à son engagement résolu en faveur de l'Europe, votera naturellement cet article 31.

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