Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 20 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 32 quinquies

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

L’article 32 quinquies, que nous proposerons de supprimer, ne manque ni d’ironie ni de cynisme. Il tend en effet à légitimer la pratique des retraites chapeaux, dont chacun sait qu’elle profite à une poignée de dirigeants, en prévoyant explicitement qu’elle ne pourra exister, à l’avenir, que dans les entreprises ayant instauré un plan de retraite complémentaire collectif de type PERCO.

Prendre une telle mesure revient, ni plus ni moins, à justifier l’intolérable, les parachutes dorés, et l’inacceptable, l’atteinte au principe de la répartition.

Si nous sommes opposés aux systèmes de retraite par capitalisation, nous refusons tout autant les parachutes dorés, ces avantages exorbitants consentis à une poignée de cadres dirigeants, pour des montants sans mesure commune avec les salaires et éléments complémentaires de rémunération perçus par l’ensemble du personnel.

Le constat est clair : que vous cherchiez à augmenter le nombre de bénéficiaires des mécanismes de retraite complémentaires ou à légitimer les parachutes dorés, c’est toujours au détriment des régimes de retraite par répartition.

Les premiers à être alléchés par de tels dispositifs, nous le savons tous, ne sont pas les salariés ; ce sont les banquiers, les assureurs, les actionnaires, car ils savent que, avec le présent texte, les retraites seront appelées à baisser, à tel point que les salariés n’auront plus, espèrent-ils, d’autre choix que d’épargner, c’est-à-dire de capitaliser.

D’ailleurs, selon Aviva, sixième assureur mondial, les vingt-sept pays de l’Union européenne devront trouver 1 900 milliards d’euros afin d’assurer une retraite décente aux citoyens qui prendront leur retraite entre 2011 et 2051.

Toujours d’après Aviva, la France devra mobiliser 243 milliards d’euros à cette fin et le Français moyen sera tenu d’épargner 8 000 euros par an pour compléter sa retraite future. Cela représente une aubaine, certes, pour les assureurs, à condition que les salariés, ceux qui travaillent dans les usines, dans les entreprises, dans le secteur des services à la personne, puissent épargner autant : ce sera bien difficile…

En la matière, on ne peut pas compter sur la générosité des employeurs, puisque, comme vous le savez, les fonds de pension investis en bourse sont abondés par les salariés, selon leurs moyens, et par l’employeur, selon son bon vouloir. J’ajoute que les employeurs considèrent que l’abondement occasionnel par leurs soins du plan d’épargne retraite qu’ils imposent à leurs salariés suffit à justifier le gel des salaires, c’est-à-dire la baisse du pouvoir d’achat.

Si recourir à ce mécanisme est une façon discrète de transférer des fonds du système par répartition vers la capitalisation individuelle, cela constitue également un moyen de faire supporter aux salariés les risques des entreprises.

Selon une récente étude américaine, il manque 6 600 milliards de dollars aux Américains pour maintenir leur niveau de vie pendant leur retraite, soit 45 % du PIB des États-Unis. Les fonds de pension américains sont donc proches de l’abîme ; ceux des cent premières entreprises américaines accusent un déficit de 460 milliards de dollars. À ce jour, les retraités américains ne sont pas sûrs de recevoir le fruit de leur épargne. Que cela nous serve de leçon !

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