Toutefois, je reste également convaincu de l'impératif qui s'attache à l'édification d'une Europe politique. Vous connaissez, mieux que moi, monsieur le secrétaire d'État, les raisons de cette conviction. J'en ajouterai une autre, chère aux Français de l'étranger.
La moitié des Français établis hors de France, soit un million de personnes, ont choisi de tenter leur chance en Europe. L'intégration européenne, c'est aussi eux ! C'est pourquoi je souhaite relayer ici une initiative qui, venant de l'Assemblée des Français de l'étranger, me tient particulièrement à coeur.
Le président de la commission de l'Union européenne de cette assemblée, Jean-Pierre Villaescusa, et son rapporteur, Anne Monseu Ducarne, ont formé le projet d'organiser, pendant la présidence française de l'Union européenne, une rencontre qui doit rassembler, à Paris, des élus et les différents représentants des citoyens européens établis hors de leur pays.
La présidence française est, en effet, une opportunité pour que puissent se rencontrer, dans la capitale, des représentants de ce que j'appellerai la « diaspora européenne », afin de porter ensemble des projets communs.
Mes chers collègues, permettez-moi d'attirer votre attention sur un fait un peu ancien, certes, mais qui devrait être source d'inspiration pour nous.
Lors de l'unification - je ne dis pas réunification - de l'Allemagne, 3, 5 millions d'Allemands étaient expatriés. Vous comprenez le poids qu'ils ont eu dans l'unification de leur pays. En effet, loin des divisions internes qui les opposaient en Allemagne, ces expatriés, notamment Prussiens, Bavarois ou Rhénans, étaient perçus et se percevaient comme des Allemands venus d'un même pays. Ils représentaient, aux yeux de leurs compatriotes, l'unité d'un pays neuf qui, comme l'Italie, a fait de ses émigrés un symbole unificateur.
Il serait intéressant de comparer aujourd'hui la proportion des Français qui se sentent européens, selon qu'ils résident en France ou à l'étranger.
Force est de constater que les Français de l'étranger, et plus particulièrement le million d'entre eux qui réside dans l'un des vingt-six pays européens, se sentent beaucoup plus européens que leurs compatriotes restés en France. C'est ce que confirment les résultats des consultations référendaires sur l'Europe, qu'il s'agisse du traité de Maastricht ou de la Constitution européenne : à chaque scrutin, les Français de l'étranger ont voté à 82% pour la poursuite de la construction européenne.
Cet état de fait me conduit à soulever deux points.
Premièrement, organiser une journée des Européens de l'étranger à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne, en partenariat avec l'Assemblée des Français de l'étranger, nécessite un financement adéquat pris sur le budget prévu pour cette présidence française. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous me confirmer votre soutien à cet événement et, bien sûr, à son financement ?
Je rassure tout de suite le président de la commission des finances : il s'agit non pas de milliards, ni même de centaines ou de dizaines de millions d'euros, mais seulement de 5 à 6 dizaines de milliers d'euros ! C'est donc un montant très modeste, vous en conviendrez, mais ce petit rien dans le budget représente un soutien symbolique très fort, monsieur le secrétaire d'État.
Deuxièmement, il me semble important de poser la question de la représentation de nos compatriotes expatriés au Parlement européen.
La faculté de voter dans les centres de vote ouverts à l'étranger pour les élections des représentants français au Parlement européen a disparu avec la réforme de ce scrutin. En l'absence d'une circonscription et de représentants propres, les Français établis hors de France ont été rattachés à leur commune d'origine, en France. Ils doivent donc être inscrits dans une commune française, où ils sont soumis à l'obligation de voter en personne. S'ils ne peuvent faire le déplacement, qui les oblige parfois à venir de très loin, ils peuvent voter par procuration.
Parlons des procurations ! Le 13 juin 2004, lors des dernières élections européennes, sur 385 000 Français inscrits dans les centres de vote à l'étranger, moins de 14 000 procurations ont été transmises par les autorités consulaires. En clair, 4 % des Français établis hors de France ont participé au scrutin. Pourtant, on ne peut pas douter de leur intérêt pour cette élection !
Selon les récentes négociations et le nouveau mode de pondération des voix, la France devrait pouvoir détenir deux sièges supplémentaires, soit au total soixante-seize sièges, au lieu des soixante-quatorze sièges prévus par le traité de Nice.
Une redistribution des sièges français devant être opérée au sein de huit super-régions, je souhaite que les 2 millions de Français établis hors de France - plus de la moitié d'entre eux, je le répète, le sont en Europe - ne soient pas oubliés dans cette redistribution, qui sera le fruit d'une consultation nationale.
Pourquoi ne pas donner ces deux sièges, « sauvés » pour la France, aux meilleurs ambassadeurs de la construction et de l'intégration européenne, qui, eux, votent à 82 % pour l'Europe ? Pourquoi ne pas permettre aux Français établis hors de France, premiers concernés par la réglementation européenne, de participer à l'élaboration de cette dernière ?
Telle est ma proposition, monsieur le secrétaire d'État. Je reste à votre disposition pour l'expliciter à vos services et, le cas échéant, en définir les modalités techniques de mise en oeuvre. Je dirais, à l'instar de M. le rapporteur général, qu'il s'agit du développement durable du soutien des Français de l'étranger à l'Europe !