Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 7 février 2008 à 15h00
Organismes génétiquement modifiés — Article 5

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

L'article 5 du projet de loi, qui prévoit la responsabilité des exploitants cultivant des OGM, organise la gestion des dommages qui ne manqueront pas de se multiplier au fur et à mesure que progresseront les cultures d'OGM en plein champ.

Le régime proposé par le texte ne nous satisfait pas, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, l'organisation du régime de responsabilité entre exploitants agricoles pour la seule réparation du préjudice économique est d'une précision telle qu'elle pourrait être interprétée comme une volonté de limiter la responsabilité des exploitants visés.

Notre amendement vise donc à prévoir la responsabilité de plein droit de l'ensemble de la filière OGM en cas de contamination : du détenteur de l'autorisation administrative, du distributeur et de l'utilisateur final.

Ensuite, si la réparation du préjudice économique est nécessaire, elle n'est pas suffisante. L'ensemble des préjudices résultant d'une contamination doivent être considérés.

La réparation du préjudice économique devra notamment prendre en compte les coûts induits par la traçabilité des produits : pour garantir que leur production ne contient pas d'OGM, les agriculteurs sont tenus d'effectuer des analyses et des contrôles onéreux, dont la charge devrait être supportée par les filières OGM.

Dans le cadre d'une procédure pénale, les frais d'expertise ne sont pas avancés par les parties. Ce n'est pas le cas dans les procédures civiles. Comme l'a dit avant-hier M. Borloo, ce n'est pas à la victime de payer. Notre amendement vise donc à renverser la charge de la preuve en faveur de la victime.

Pour finir, j'aimerais que chacun, ici, soit bien conscient que la victime n'est pas toujours celle que l'on croit. Nous devons tous avoir à l'esprit l'expérience américaine et ses dérives judiciaires, et ce d'autant plus que nous avons recours à des avocats américains pour défendre certains de nos paysans.

Un livre fort instructif, Le marché de la faim, écrit par Erwin Wagenhofer et Max Annas, relate le procès de Monsanto contre Percy Schmeiser, cultivateur de colza canadien.

Les détectives de l'entreprise Monsanto affirmaient avoir découvert parmi les semences de Percy Schmeiser des graines présentant les propriétés des graines de colza transgéniques de Monsanto. L'entreprise a alors intenté un procès au cultivateur en accusant ce dernier d'avoir volé les semences. Par la suite, les détectives avoueront qu'ils n'ont en fait trouvé que quelques plantes suspectes dans un fossé délimitant les terrains, arrivées là par pollinisation. Le juge canadien a pourtant donné raison à Monsanto et déclaré les parcelles du cultivateur propriété de Monsanto !

Nous le voyons, le droit n'est, hélas ! pas suffisant pour protéger les paysans des conséquences de la contamination de leurs champs par des cultures OGM. Il se retournera même parfois contre eux, au titre de la défense de la brevetabilité et de la propriété du vivant.

C'est pourquoi notre amendement, qui n'est qu'un amendement de repli, vise à améliorer le système proposé dans le projet de loi.

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