Le traité de Lisbonne apporte une réponse à ces deux critiques. En associant les parlements nationaux à la vie de l'Union, il introduit un relais entre l'Europe et les citoyens. En instaurant un contrôle du respect de la subsidiarité, il tend à recentrer l'action de l'Union vers ses vraies missions.
Il ne s'agit pas, cela va de soi, de jouer les nations contre l'Europe. Il faut en finir avec cette suspicion à laquelle j'ai souvent été confronté, lorsque j'étais membre de la convention. Il n'y a pas d'un côté, les « bons Européens » à Bruxelles et, de l'autre côté, les « mauvais Européens » dans les capitales ! Ce doit être l'objectif de tous, parce que c'est l'intérêt de l'Europe de partager les responsabilités d'une manière qui rende les politiques plus efficaces, plus légitimes, plus proches des citoyens.
Le contrôle de subsidiarité permettra aux parlements nationaux de se faire entendre directement auprès des institutions de l'Union, y compris, le cas échéant, auprès de la Cour de justice dite « de Luxembourg ».
Si l'on considère le rôle important que nous jouons déjà et le rôle nouveau qui va s'y ajouter, on peut dire que les parlements nationaux feront désormais pleinement partie des acteurs de la construction européenne. D'ailleurs, le traité de Lisbonne en prend acte puisque, pour la première fois, un article relatif aux parlements nationaux figure dans le corps même des traités.
Cette situation nouvelle constituera également pour nous tous une responsabilité à assumer. Nous ne pourrons plus nous défausser, comme nous le faisons souvent les uns et les autres, sur Bruxelles. Devant telle ou telle décision européenne qui nous déplaît, on pourra nous demander ce que nous avons fait. C'est pourquoi nous devrons nous doter, ici même, au Sénat, le moment venu, d'un dispositif d'examen des questions européennes qui soit pleinement opérationnel.
Je n'entends pas anticiper sur le futur débat constitutionnel. Je ne suis pas non plus ici pour prêcher pour ma paroisse, comme on dit dans nos campagnes : au contraire, je crois que le bon dispositif sera celui qui fera participer l'ensemble des organes du Sénat, et par là l'ensemble des sénateurs, à l'examen des questions européennes.
Ce que je souhaite souligner, c'est qu'il sera absolument nécessaire d'adapter notre fonctionnement à la nouvelle donne. J'ai d'ailleurs bon espoir : avec les propositions du comité Balladur, nous sommes, à mon avis, sur la bonne voie. Un « comité des affaires européennes », inscrit au titre XV de la Constitution, ne serait pas concurrent, mais bien complémentaire des commissions permanentes, dont les compétences seraient préservées, voire amplifiées dans ce domaine. Notre assemblée disposerait alors de tous les instruments nécessaires pour faire face aux différents aspects de son rôle européen.
Je terminerai cependant mon propos par un regret. Malgré les avancées qu'il contient, le traité de Lisbonne ne règle pas toutes les questions concernant le contrôle parlementaire. En particulier, dès lors que l'Europe de la défense commence à s'affirmer, nous devons trouver une formule pour que les parlementaires nationaux et européens puissent en assurer un suivi régulier, sinon personne ne contrôlera démocratiquement cette Europe de la défense.