Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il y a quelques jours, le Congrès, réuni à Versailles, a modifié notre Constitution, afin de rendre possible la ratification par le Parlement du traité de Lisbonne. Il s'agissait d'une révision a minima, strictement limitée aux points de contradiction relevés par le Conseil constitutionnel et adoptée à une très large majorité. En quinze ans, la Constitution a été modifiée à six reprises pour permettre l'approfondissement du projet européen.
La voie est donc ouverte aujourd'hui à la ratification de cet important traité, et par conséquent à son entrée en vigueur lorsque nos partenaires européens auront accompli le même processus que nous. Cela doit permettre à l'Union européenne de sortir par le haut de la crise de confiance dans laquelle elle était plongée depuis les référendums français et néerlandais.
Il s'agit d'un accord politique de premier plan, qui marque non seulement la fin d'une période d'incertitude institutionnelle, mais également des avancées démocratiques importantes et nouvelles au bénéfice des citoyens et des parlements nationaux.
Le nouveau traité, « modificatif » pour les uns, « simplifié » pour les autres, apporte des amendements aux traités antérieurs que la France a ratifiés depuis 1957 : je pense bien sûr au traité de Rome, à l'Acte unique européen, aux traités de Maastricht, d'Amsterdam ou de Nice. En procédant ainsi, le Conseil européen a choisi de recourir de nouveau à la méthode traditionnelle des avancées européennes.
Il ne s'agit donc pas d'un texte nouveau qui définit tous les équilibres institutionnels et toutes les politiques de l'Union européenne en les gravant dans le marbre constitutionnel ; il s'agit d'apporter les modifications indispensables pour que l'Union européenne puisse mieux décider et agir.
Le traité de Lisbonne est d'abord un outil avant d'être un projet européen à long terme. Il n'est pas de même nature que le « traité constitutionnel », qui tendait à changer la nature même de la construction européenne, faisait table rase des anciens traités et présentait une constitution pour l'Europe. Ce n'est pas le cas ici, et cela justifie en grande partie le choix de le ratifier par la voie parlementaire. Ce choix correspond aussi à une promesse du Président de la République faite aux Français lors de la campagne présidentielle, promesse que nous tenons aujourd'hui.
Pour entrer en vigueur le 1er janvier 2009, et s'appliquer ainsi aux élections européennes de juin 2009 et à l'investiture de la future Commission européenne, le traité devra être ratifié d'ici là par les vingt-sept États membres. Il faut donc faire vite ; c'est pourquoi le Président de la République a engagé la procédure de ratification le jour même de la signature du traité, en saisissant immédiatement le Conseil constitutionnel.
Il nous faut donc aujourd'hui franchir une nouvelle étape, après avoir inscrit dans notre Constitution les avancées du traité de Lisbonne. Je ne reviendrai pas sur les principaux éléments de ce traité, largement commentés par notre excellent rapporteur, M. Jean François-Poncet, et par le président de la délégation pour l'Union européenne, M. Hubert Haenel.
Cependant, je crois qu'il faut insister sur les mesures qui donnent de nouveaux droits au Parlement européen comme aux parlements nationaux. Les prérogatives du Parlement européen seront accrues, dans la procédure législative européenne, par le renforcement de la codécision et l'extension du champ du vote à la majorité qualifiée.
Je rappelle que le Parlement européen est l'organe d'expression démocratique et de contrôle politique de l'Union européenne. Le renforcement de ses pouvoirs en fait l'institution la plus sensible aux intérêts des collectivités locales.
Depuis l'Acte unique européen de 1987, les compétences de cette assemblée n'ont cessé de s'étendre. Avec le traité de Maastricht, la procédure de codécision l'élève réellement au rang de colégislateur, à égalité avec le Conseil des ministres de l'Union européenne, et nous savons que les domaines régis par la procédure de codécision touchent souvent de près les collectivités territoriales.
Après l'entrée en vigueur du traité de Maastricht, cette procédure concernait, entre autres domaines, l'établissement et la prestation des services, les réseaux transeuropéens, l'environnement, la culture, ou encore la santé.
Le traité d'Amsterdam a, quant à lui, élargi l'application de cette procédure au Fonds européen de développement régional, le FEDER, à l'emploi, à la politique sociale...
Le traité de Lisbonne, pour sa part, étend encore le champ de la procédure de codécision. Celle-ci devient la procédure ordinaire. Elle élargit ainsi les compétences du Parlement européen et favorise donc indirectement la prise en compte des intérêts des collectivités locales dans le processus décisionnel communautaire.
Il ne serait peut-être pas inutile qu'à l'avenir le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, entretienne de façon plus institutionnelle des relations avec le Parlement européen ; M. Haenel a très clairement souligné ce point tout à l'heure.