Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 7 février 2008 à 21h30
Traité de lisbonne — Exception d'irrecevabilité

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Nous avons démontré qu'il ne l'était pas. En effet, en vertu d'une jurisprudence constante, exposée notamment dans une décision du 23 septembre 1992, le Conseil constitutionnel ne peut pas se prononcer sur les choix directement exprimés par le peuple.

Le Conseil constitutionnel aurait dû estimer qu'il ne pouvait être saisi de telles dispositions, le traité de Lisbonne reprenant point par point le traité constitutionnel refusé par le peuple.

Vous n'avez pas répondu sur cet aspect important, car la référence à la décision du Conseil constitutionnel du 20 décembre 2007 fonde la procédure accélérée à laquelle nous assistons aujourd'hui.

Certains nous demandent comment nous pouvons affirmer l'irrecevabilité constitutionnelle du présent projet de loi, alors qu'une révision de la Constitution est intervenue précisément pour rendre le traité de Lisbonne compatible avec notre loi fondamentale.

Pour mémoire, je rappellerai que soixante-dix sénateurs avaient saisi le Conseil constitutionnel le 14 août 1992 en vue de contester la constitutionnalité du traité de Maastricht, et ce après la révision constitutionnelle préalable à sa ratification.

Depuis sa décision du 2 septembre 1992, le Conseil constitutionnel admet la recevabilité d'une telle saisine et considère que la procédure de contrôle de constitutionnalité peut de nouveau être mise en oeuvre « s'il apparaît que la Constitution, une fois révisée, demeure contraire à une ou plusieurs stipulations du traité ».

Comme je l'ai souligné en présentant la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi constitutionnelle préalable à la ratification, plusieurs points du traité demeurent contraires à la Constitution. Ainsi, la soumission à l'OTAN, le pouvoir absolu de la BCE, l'ouverture à la concurrence des services publics et la remise en cause du principe de laïcité n'ont pas été abordés par la révision constitutionnelle.

Certains observateurs notent d'ailleurs que nous assistons à l'instauration de deux normes constitutionnelles de référence dans notre pays : d'un côté, la Constitution française, qui renvoie explicitement aux principes définis par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ; de l'autre, les normes européennes, qui les contredisent en plusieurs points.

Notre exception d'irrecevabilité est donc parfaitement fondée. Du reste, en 1992, on avait tout à fait admis que des sénateurs, parmi lesquels d'éminents présidents d'aujourd'hui - je veux parler de MM. de Raincourt, Poncelet, Valade -, ainsi que M. Pasqua, puissent contester la constitutionnalité d'un projet de loi autorisant une ratification, et ce même après la révision constitutionnelle s'y rapportant.

Mes chers collègues, vous vous apprêtez à autoriser la ratification d'un traité identique à celui qui a été repoussé par le peuple. C'est la première fois dans notre histoire constitutionnelle qu'un référendum est ainsi contourné par un gouvernement et une majorité parlementaire.

Cet acte grave aurait pu être empêché par le refus de la révision constitutionnelle. En effet, au Congrès, le Président de la République avait besoin des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Pour ma part, je regrette profondément que la gauche ne se soit pas rassemblée

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