Dans tous les journaux, le contenu du traité a été analysé. J'ai participé à de nombreux meetings et réunions publiques : les gens débattaient sur le fond. Dans les bars, dans les restaurants, dans les réunions, dans les dîners, ils parlaient de projets de société et, s'ils étaient partagés, ce n'était pas spécialement sur Jacques Chirac ! Il s'agissait bien de savoir quelle Europe construire. Et ce débat a traversé les familles, les entreprises, toute la société. Il a fait apparaître un doute, et ce n'est pas à 85 % que nous avons ratifié le traité, mais c'est à 54 % qu'il a été rejeté par le peuple français.
Encore une fois, quelles peuvent être les raisons de ce décalage ?
Peut-être y a-t-il des raisons fiscales et sociales ? Peut-être l'Europe n'est-elle pas simplement pour nos concitoyens une construction politique ? Peut-être doit-elle se préoccuper du pouvoir d'achat, de l'emploi, de la lutte contre l'exclusion ? Toutes questions qui sont absentes du traité, dans lequel il n'y a les conditions ni d'une Europe sociale ni d'une Europe fiscale !
Au contraire, l'Union européenne suscite la concurrence entre les salariés comme entre les États, et les Français l'ont bien compris.
Pourquoi donc cette différence entre le vote des citoyens et celui des parlementaires ? Le Parlement est-il vraiment représentatif de la société d'aujourd'hui ? Mes chers collègues, je suis obligé de vous dire que tel n'est pas le cas, et vous allez d'ailleurs le prouver ce soir ! Le Parlement ne représente pas suffisamment les ouvriers, les employés, la diversité ; il reflète les forces politiques majoritaires, mais il ne couvre pas l'ensemble du champ politique français.
Certains affirment que l'écart entre les 85 % de « oui » et les 54 % de « non » proviendrait du fait que le traité aurait fondamentalement changé entre le 19 mai 2005 et aujourd'hui. C'est à peu près la thèse de M. le rapporteur. Pour ma part, j'en doute ! Certains orateurs ont montré que les deux textes se ressemblaient étrangement ...
D'ailleurs, si le traité a fondamentalement changé, pourquoi les autres peuples européens n'organisent-ils pas de référendum ? Comme l'a souligné Mme Borvo Cohen-Seat tout à l'heure, si ce texte est tellement différent, pourquoi les peuples ne se prononcent-ils pas ?
Mes chers collègues, vous allez voter à 85 % la ratification de ce traité, mais je reste persuadé que si l'on avait soumis celui-ci au référendum le résultat aurait été le même que le 29 mai 2005, c'est-à-dire que la majorité du peuple français aurait rejeté le texte.
Le vote du 29 mai 2005 a eu cette particularité, très importante, d'être principalement de gauche.