Depuis une vingtaine d'années, la structure de l'impôt sur les sociétés a profondément changé, puisque les lois de finances successivement votées depuis l'adoption de l'Acte unique européen ont conduit à la réduction progressive du prélèvement constitué par cet impôt.
L'impôt sur les sociétés a été corrigé, du point de vue tant de son taux général d'imposition, passé en vingt ans de 50 % à 33, 33 %, que de son assiette, celle-ci ayant été largement entamée par l'adoption de multiples dispositions dérogatoires, toutes plus coûteuses les unes que les autres pour les finances publiques.
Il n'est que de citer le régime des sociétés mères, le traitement fiscal des déficits et des provisions, la prise en compte des plus-values de cession d'actifs et d'un certain nombre de dépenses d'investissement spécifiques, l'avoir fiscal ou les mesures liées à l'aménagement du territoire.
De 1986 à nos jours, 2 781 000 emplois salariés ont été créés en France, mais 876 400 emplois industriels ont disparu.
Ce sont les secteurs des services aux entreprises - qui comprennent, entre autres, les emplois intérimaires -, avec près de 1, 7 million de postes créés, et celui des services aux particuliers, avec une hausse de 985 000 postes de travail, qui ont constitué l'essentiel de la progression observée.
En clair, vingt ans d'efforts imposés à tous pour réduire la fiscalité des entreprises n'ont conduit qu'à la destruction d'un sixième de nos emplois industriels et à l'explosion des emplois précaires ou précarisés du secteur des services !
Pendant que la TVA ou les taxes sur les produits pétroliers frappaient toujours plus lourdement les ménages modestes, des milliards étaient engloutis par les entreprises pour procéder à la mise en oeuvre de plans sociaux, à la réalisation de montages juridiques complexes fondés sur la sous-traitance et l'externalisation des coûts, à l'accroissement de la rentabilité du capital ainsi qu'aux délocalisations de capacités de production !
L'impôt sur les sociétés a manifestement perdu de sa substance depuis vingt ans, sans que rien ne vienne aujourd'hui conforter le choix alors réalisé.
Fondamentalement, une baisse de l'impôt sur les sociétés sans aucune contrepartie, que ce soit en termes d'emploi ou d'investissement progressif, constitue un cadeau à fonds perdus.
En effet, sans que l'on puisse savoir comment ils ont pu être utilisés, la suppression de la surtaxe temporaire de l'impôt sur les sociétés a constitué un cadeau de 450 millions d'euros, ajoutés aux cadeaux et aux concours budgétaires déjà existants apportés par l'État aux entreprises.
Ce sont les plus grandes entreprises, celles qui déclarent régulièrement des bénéfices importants et qui n'ont guère souffert des mouvements de ralentissement de l'activité économique, qui ont été les bénéficiaires principaux de la mesure.
Il n'est donc pas scandaleux que l'on puisse envisager, en adoptant cet amendement, de les mettre de nouveau à contribution sans que cette charge soit véritablement insupportable au regard de l'exceptionnelle vigueur des indices boursiers.