Intervention de Michel Mercier

Réunion du 1er février 2011 à 15h00
Défenseur des droits — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

Michel Mercier, garde des sceaux :

Le Défenseur des droits est également une autorité aux prérogatives fortes, pour une protection plus efficace des droits et des libertés. Son mode de nomination, par décret en conseil des ministres, après avis des commissions compétentes des deux assemblées, selon les dispositions de l’article 13 de la Constitution, les immunités dont il bénéficiera ainsi que les incompatibilités auxquelles il sera soumis participent d’un renforcement de son statut.

Le Défenseur des droits disposera de pouvoirs étendus par rapport aux autorités administratives indépendantes qu’il remplace.

Ainsi, il bénéficiera de pouvoirs d’investigation et de contrôle par le biais de vérifications sur place, de visites inopinées. Des sanctions pénales sont prévues à l’égard de quiconque s’opposerait, sans raison valable, à ses pouvoirs d’investigation.

Il disposera également d’un pouvoir d’injonction. Si ses recommandations restent sans effet, il pourra définir les mesures nécessaires.

Il pourra, en outre, proposer à l’auteur de la réclamation et à la personne mise en cause de conclure une transaction pour mettre fin au litige qui les oppose.

Il aura, par ailleurs, la possibilité de présenter des observations dans les procédures juridictionnelles en cours.

De plus, la saisine du Conseil d’État afin de faire trancher une question sur l’interprétation des textes applicables lui sera ouverte. Il sera aussi force de proposition pour améliorer la réglementation.

Il aura, par ailleurs, d’importants moyens d’expertise : les collèges et ses adjoints lui apporteront leurs compétences dans ses différents domaines d’intervention ; une attention toute particulière sera apportée à la protection des mineurs : conformément à une disposition introduite par le Sénat, un adjoint portera le titre de Défenseur des enfants et sera chargé de seconder le Défenseur des droits dans ses missions.

Lors de l’examen du projet de loi organique et du projet de loi en deuxième lecture, la commission des lois du Sénat s’est attachée à améliorer les textes issus des débats ayant eu lieu à l’Assemblée nationale. Néanmoins, quelques points de désaccord subsistent, en particulier sur le fonctionnement interne du Défenseur des droits.

Tout d’abord, la commission des lois a rétabli l’obligation pour le Défenseur des droits de transmettre une réclamation dont il est saisi lorsque celle-ci entre dans le champ de compétence d’une autre autorité indépendante.

Ce dispositif soulève quelques difficultés. En effet, son statut d’autorité de niveau constitutionnel chargée de la protection de tous les droits devrait permettre au Défenseur des droits d’adopter une approche de la situation de l’intéressé globale et non parcellaire, cette dernière ne prenant en compte qu’une partie du problème. Il faut laisser le Défenseur des droits décider, au cas par cas, de la meilleure manière de répondre à la situation qui lui est soumise, ce qui n’exclut évidemment pas une collaboration avec les autres autorités administratives indépendantes.

Ensuite, pour ce qui concerne les adjoints, la commission des lois a souhaité rétablir en grande partie le dispositif que le Sénat avait adopté en première lecture.

Rien ne semble s’opposer à ce que les adjoints soient membres des collèges en qualité de vice-présidents. Cependant, la consultation des commissions parlementaires compétentes, avant leur nomination par le Premier ministre, ne peut être conservée. En effet, la nomination des adjoints n’entre pas dans le cadre des emplois et fonctions visés à l’article 13 de la Constitution. Je rappelle que cet article vise les pouvoirs propres du Président de la République et non ceux du Premier ministre. Placés sous l’autorité du Défenseur, les adjoints ne disposeront d’aucun pouvoir propre. La désignation par le Premier ministre, sur proposition du Défenseur des droits, est à même de leur conférer une autorité suffisante.

Enfin, s’agissant des collèges, il est nécessaire de revenir à la lettre de l’article 71-1 de la Constitution, qui dispose que les collèges assistent le Défenseur des droits.

Vous souhaitez une saisine systématique des collèges. Or le Défenseur des droits n’a pas été envisagé comme une autorité collégiale. C’est lui qui doit décider, en liaison avec ses adjoints, des dossiers sur lesquels il est souhaitable et utile de consulter les collèges. Je rappelle, par exemple, que de très nombreux dossiers soumis à la HALDE ne passent pas devant le collège et font l’objet d’une décision directe. Il faut en effet éviter tout blocage du système.

Je souhaite que nous puissions avoir une discussion efficace sur ce point.

Vous avez prévu l’obligation pour le Défenseur des droits d’exposer aux collèges les motifs pour lesquels il s’écarte d’un avis que ces derniers auraient rendu. Ce dispositif, qui vise également la faculté pour le Défenseur des droits de demander aux collèges une seconde délibération, est contraire à la Constitution, car il confère aux collèges un pouvoir de contrôle de l’action du Défenseur des droits.

Enfin, je souhaite évoquer les dispositions du projet de loi ordinaire qui concernent la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.

Elles tendent à mettre en conformité l’organisation de la CNIL, notamment dans l’exercice de son pouvoir de sanction et d’enquête, avec la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Le Gouvernement, afin d’écarter toute suspicion de « préjugement », propose de clarifier la composition de la formation restreinte, afin que l’autorité qui décide de la mise en demeure – le président – ne soit pas celle qui prononce la sanction – la formation restreinte. En outre, pour donner plus de poids aux sanctions, celles-ci pourront désormais être rendues publiques.

Pour conclure, à tous ceux qui craignent une régression en matière de droits et de libertés fondamentales, …

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