Intervention de Joëlle Garriaud-Maylam

Réunion du 1er février 2011 à 15h00
Défenseur des droits — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

Photo de Joëlle Garriaud-MaylamJoëlle Garriaud-Maylam :

Si ce dispositif doit sans aucun doute être pérennisé, il peut encore être amélioré.

C’est le responsable du secteur de la justice qui s’est vu confier, en plus de ses autres attributions, la compétence relative aux Français de l’étranger. Le nouveau projet de loi organique nous donne l’occasion de faire mieux, en créant un poste de délégué clairement identifié, ayant les mêmes compétences que les délégués territoriaux sur le sol français, plus proche de nos citoyens expatriés et, donc, plus efficace.

Une telle mesure paraît d’autant plus nécessaire que 90 000 dossiers, qui sont particulièrement complexes, auraient été traités l’an dernier.

Nous pourrions encore aller plus loin, en autorisant les conseillers élus à l’Assemblée des Français de l’étranger, l’AFE, à déposer une réclamation auprès du Défenseur des droits, au même titre que les parlementaires. En première lecture, l’Assemblée nationale a décidé d’étendre aux eurodéputés français cette capacité jusqu’alors réservée aux députés et aux sénateurs. Pour nos compatriotes de l’étranger, en particulier lorsqu’ils résident hors de l’Union européenne, le lien avec les sénateurs ne peut qu’être relativement ténu du fait de l’immensité de la circonscription unique. La plupart des onze futurs députés des Français de l’étranger seront élus de circonscriptions parfois si vastes et hétéroclites que le lien territorial avec leurs électeurs sera là aussi relativement faible.

Permettre une saisine du Défenseur des droits par des élus de l’AFE accroîtrait la rapidité du processus et améliorerait le suivi des dossiers. Cela permettrait également de désengorger les consulats, très sollicités par nos compatriotes et qui n’ont pas toujours les moyens, dans un contexte de restrictions budgétaires, d’assurer un véritable suivi.

Une telle mesure aurait aussi un autre effet positif : elle renforcerait la notoriété, la visibilité de ces représentants élus des expatriés, à l’heure où nous cherchons des solutions pour contrer l’abstention.

Je voudrais aussi souligner ici à quel point la question de l’information est cruciale. Nombre de nos compatriotes, en particulier à l’étranger, ne connaissent pas les possibilités de recours qui s’offrent à eux. En cela, la création d’une entité unique et facilement identifiable, le Défenseur des droits, ouvre de nouvelles perspectives.

J’attire par conséquent votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de tirer parti de cette opportunité nouvelle pour accroître la communication autour du Défenseur des droits et de l’étendue de ses compétences, notamment par le biais des médias, d’Internet et de nos réseaux à l’étranger – consulats et élus des Français de l’étranger.

Je terminerai mon intervention par un point spécifique, sur lequel je reviendrai lors de la discussion des amendements : celui des déplacements illicites d’enfants.

Vous le savez, j’aurais personnellement souhaité le maintien d’un poste spécifique de Défenseur des enfants, notamment parce qu’il aurait pu jouer, en liaison avec les entités équivalentes à l’étranger, un rôle de médiateur dans les dossiers de protection sociale et juridique d’enfants français à l’étranger, surtout dans les dossiers complexes de déplacements illicites d’enfants.

Il y a de plus en plus d’unions mixtes et, malheureusement, de plus en plus de séparations de parents de deux nationalités différentes. Les décisions autour de l’attribution de l’autorité parentale sont alors toujours très douloureuses. Le cadre juridique international ne permet souvent pas de régler ces problèmes de manière satisfaisante car, au-delà de l’arsenal juridique, c’est l’esprit dans lequel celui-ci est appliqué qui est déterminant. Et cela varie grandement d’un État à l’autre, certains favorisant l’intérêt national plutôt que, hélas ! l’intérêt supérieur de l’enfant.

Les juridictions françaises négligent parfois ce facteur et acceptent quelquefois un peu rapidement la compétence de juridictions étrangères n’offrant pas toutes les garanties en matière de procédure. Certains États comme l’Allemagne ou les États-Unis disposent d’institutions très efficaces pour épauler leurs ressortissants confrontés à de tels problèmes, alors que, en France, les parents ont parfois l’impression de manquer d’appui solide.

Dans le contexte de la suppression annoncée et attendue du Défenseur des enfants, il me semble que doter le Défenseur des droits d’un véritable dispositif lui donnant une réelle expertise en matière de suivi des dossiers de déplacements illicites d’enfants, pays par pays, constituerait un très bel acquis pour marquer la naissance de cette institution que nous appelons de nos vœux.

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