Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 17 mai 2011 à 22h15
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 1er

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Ces deux amendements soulèvent une nouvelle fois la question de la disponibilité des citoyens assesseurs. La commission a partiellement tenté de pallier cette difficulté en abaissant de vingt-trois ans à dix-huit ans l’âge à partir duquel on peut être tiré au sort. Il n’est cependant pas certain que cette modification soit suffisante. D’abord, parce que ne peut être citoyen assesseur celui qui a exercé cette fonction durant les cinq années précédentes. Ensuite, parce que peuvent prétendre à une dispense les personnes de plus de soixante-dix ans. Or les retraités sont en général les personnes les plus disponibles.

Plus généralement, tout donne l’impression que, à aucun moment de la rédaction de ce projet de loi, n’a été posée la question de l’essence même de la notion de jury populaire. Cet acquis, dont il est possible de discuter, peut difficilement être remis en cause s’agissant des assises. Néanmoins, juger son prochain n’est pas une tâche anodine qui relèverait d’un simple devoir citoyen. L’impact psychologique peut être éprouvant. Il suffit d’avoir assisté à des audiences de cour d’assises pour se convaincre de leur dureté, notamment lorsqu’un juré est appelé à connaître d’une affaire ayant pour lui une résonance très personnelle. On sort rarement indemne d’une telle expérience, qu’il s’agisse de juger un crime aujourd’hui ou de juger un crime demain.

Dès lors, prévoir la possibilité de passer du statut de juré populaire à celui de citoyen assesseur fait disparaître tout ce qui fait l’essence même du juré d’assises, à savoir l’intime conviction. Si les citoyens assesseurs doivent connaître demain entre six et dix dossiers par audience – on nous dit qu’ils en traiteront plutôt quatre –, c’est-à-dire siéger au moins huit heures d’affilée, il est évident que l’avis des magistrats sera prééminent, a fortiori sur les matières les plus techniques.

Tout concourt donc à enrayer la sérénité de la justice. Celle-ci est certes imparfaite, mais rien ne nous oblige à aller encore davantage vers l’imperfection !

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