Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi privilégie le dialogue social entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. Mais pourquoi oublie-t-il le dialogue au sein de l'entreprise, qui est loin d'être négligeable si l'on veut sortir de la logique des conflits ?
Je voudrais à cet égard formuler une observation, qui n'a pas encore été faite, sur la qualité des personnes que l'on appelle les partenaires sociaux. Qui sont-ils ? Ce sont ceux qui ont été désignés en vertu de la loi du 23 décembre 1946 et qualifiés alors de « représentatifs ». Mais le sont-ils encore aujourd'hui ? En réalité, ils le sont de moins en moins dans la mesure où le nombre de salariés syndiqués est de plus en plus faible.
Il faudra donc revenir sur la qualité de ceux que l'on appelle les partenaires sociaux et faciliter, comme certains le proposent, l'élection de représentants des salariés n'appartenant à aucun de ces syndicats dès le premier tour. Ces mesures favoriseraient la démocratie et le contact direct au sein des entreprises. À ce propos, je tiens à rappeler que les partenaires sociaux ne représentent pas uniquement les syndicats, mais qu'ils expriment aussi la voix des salariés, qui sont directement impliqués dans le fonctionnement de l'entreprise.
Il est nécessaire qu'un dialogue social direct puisse s'instaurer entre les salariés et les responsables de l'entreprise, avec ou sans les syndicats. En effet, la paix sociale dans l'entreprise dépend beaucoup plus des salariés que des syndicats, puisque les premiers participent directement à la vie de l'entreprise, qui est leur travail, leur emploi, contrairement aux seconds.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que les salariés soient plus largement et directement informés par le chef d'entreprise de tout ce qui concerne cette dernière, notamment sa situation financière, l'état de ses outils industriels et technologiques, la position de ses concurrents et les difficultés qu'elle rencontre.
Chaque année, le chef d'entreprise ou son représentant devrait réunir l'ensemble de son personnel pour lui fournir les mêmes informations que celles qu'il adresse aux actionnaires lors des assemblées générales. C'est précisément ce que j'ai fait lorsque j'étais président de Dassault Électronique, et tout se passait très bien ! Plusieurs centaines de salariés étaient présents qui écoutaient, posaient des questions et étaient informés de la réalité de l'entreprise : le bilan, le compte d'exploitation, le plan de charges, les commandes obtenues, car tout cela intéresse les salariés.
Il faudrait aussi expliquer les raisons pour lesquelles l'entreprise a échoué dans la négociation de certains contrats ou dans l'exécution de commandes spécifiques, qu'il s'agisse d'un manque de compétitivité, de performances insuffisantes ou de coûts trop élevés.
Cette pratique montre aussi la considération dont fait preuve le chef d'entreprise à l'égard des salariés, qui constatent qu'il se déplace lui-même dans le but de leur expliquer directement la situation exacte de l'entreprise et les mesures à prendre pour l'améliorer.
Mais, pour cela, il faudrait aussi que les salariés soient formés, comme les syndicats, au fonctionnement des entreprises et qu'ils en connaissent les objectifs. Ils devraient être initiés à la gestion financière et à la promotion commerciale. Surtout, ils devraient comprendre que l'entreprise travaille pour satisfaire des clients et pas uniquement pour les actionnaires, les salariés ou les syndicats. En effet, ce sont en fait les clients qui dirigent l'entreprise, puisque ce sont eux qui décident ou non d'acheter les produits mis sur le marché.
Ainsi, tout doit être fait, dans l'entreprise, pour que les salariés, les syndicats et la direction travaillent ensemble à la satisfaction des besoins des clients. En cas d'échec, les salariés perdent leur emploi et se retrouvent au chômage, et, à terme, l'entreprise disparaît.
Je vous proposerai en ce sens un amendement visant à rendre obligatoires, d'une part, l'information directe des salariés sur la situation financière de l'entreprise par les responsables de l'entreprise au moins une fois par an, comme cela se fait dans les assemblées générales pour les actionnaires, et, d'autre part, une formation économique suffisante pour que les salariés comprennent les données qui leur sont communiquées ainsi que le fonctionnement de l'entreprise. Il faut donc informer les employés, mais également les former, pour qu'ils soient encore mieux informés !