Intervention de Serge Lepeltier

Réunion du 14 avril 2005 à 10h00
Eau et milieux aquatiques — Articles additionnels après l'article 1er ou après l'article 7 ou avant l'article 42

Serge Lepeltier, ministre :

Cet amendement touche un sujet extrêmement sensible.

La législation de la pêche en eau douce s'applique de longue date aux cours d'eau, canaux, ruisseaux, ainsi qu'aux plans d'eau avec lesquels ils communiquent, communément appelés les « eaux libres ». En sont exclus les plans d'eau qui ne communiquent qu'exceptionnellement avec des cours d'eau, qu'on appelle les « eaux closes ».

Les conséquences de cette législation pour les propriétaires de plans d'eau sont importantes, en matière tant d'obligation de gestion piscicole que de propriété du poisson.

La loi du 29 juin 1984 sur la pêche avait étendu de façon considérable le champ des eaux libres, en y incluant tous les plans d'eau dès lors qu'une communication « même discontinue » était constatée.

La loi du 3 janvier 1991 a heureusement clarifié la situation et la jurisprudence exige désormais que cette communication soit « permanente, naturelle et directe ».

Cependant, les auteurs de cet amendement ont raison : trop de contentieux existent et encombrent de manière inutile les tribunaux. De sérieuses considérations de droit et de fait pourraient inciter à redéfinir le champ d'application de la législation sur la pêche et, partant, à donner une nouvelle définition des eaux libres et des eaux closes.

Cependant, il ne faut pas en ce domaine confondre vitesse et précipitation.

Cette question est éminemment complexe. Faut-il prendre en compte la circulation naturelle de l'eau ou le passage du poisson pour qualifier la communication entre un plan d'eau et le cours d'eau voisin, comme se le demandait tout à l'heure M. le rapporteur ?

Il est également nécessaire de distinguer les plans d'eau, isolés des cours d'eau par la configuration naturelle des lieux, et les piscicultures, autorisées par l'administration à s'isoler à l'aide de grilles fixes en vue de la production piscicole.

Il ne s'agit pas de permettre à quiconque de mettre en place des grilles sur un cours d'eau ou un plan d'eau et de se déclarer ainsi en « eaux closes ». L'impact sur la libre circulation du poisson issu du milieu naturel serait considérable et très préjudiciable au bon état écologique des eaux. Et je crains que votre proposition d'amendement ne satisfasse ni les pêcheurs à la ligne ni les propriétaires d'étangs.

Etant donné la complexité de cette question, j'ai demandé, sur le conseil de M. Jacques Oudin, qui s'est préoccupé toute sa vie d'élu des questions d'eau, à d'éminents juristes du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation et du monde universitaire, de faire un rapport sur ce problème des eaux libres et des eaux closes. Je viens de recevoir ce document et mes services l'analysent actuellement.

Vous comprendrez que je souhaite examiner en profondeur les conclusions de ce rapport, vis-à-vis tant de la protection des cours d'eau que des conséquences pour les propriétaires de plan d'eau, avant de vous proposer de les inscrire dans la loi.

Je m'engage à communiquer ce rapport à MM. les rapporteurs et aux parlementaires qui le souhaitent, dès que l'analyse en sera achevée.

Le Gouvernement est prêt à travailler avec vous sur ce dossier avant la deuxième lecture, afin d'examiner notamment ces propositions. En attendant, étant donné la complexité du sujet, je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.

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