Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 14 avril 2005 à 15h00
Pouvoirs de police en mer — Adoption définitive d'un projet de loi

Michèle Alliot-Marie, ministre :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à saluer l'excellent travail qui a été accompli par les rapporteurs, ainsi que la qualité de la réflexion et de la contribution de chacun des intervenants, qui tous connaissent bien les problèmes de la mer.

Le présent projet de loi étend une capacité juridique. En effet, quels que soient les moyens mis à la disposition des personnels qui travaillent en haute mer, s'ils n'ont pas le droit d'agir, ces moyens ne leur servent à rien. Nous donnons donc une capacité juridique à ces personnels, qu'ils soient militaires ou douaniers.

Vous avez posé, les uns et les autres, un certain nombre de questions auxquelles je voudrais répondre.

Tout d'abord, M. le rapporteur a insisté sur la coopération entre les administrations. J'ai moi-même effectivement souligné l'importance de cette coopération, car c'est d'elle aussi que résulte l'efficacité. Il faut additionner, mais aussi diversifier les moyens ; c'est ce qui nous permettra d'envisager tous les cas de figure et de faire face à toutes les situations.

Vous avez évoqué ensuite, monsieur le rapporteur, ainsi que d'autres intervenants, la nécessité d'une coopération renforcée avec les pays européens. C'est l'un des rôles de l'Europe - rappelé dans le projet de traité constitutionnel - que de pouvoir renforcer notre capacité commune à nous protéger contre les intrusions d'un certain nombre de trafics. Cette problématique est au coeur même des dispositifs européens matérialisés dans le projet de traité constitutionnel qui sera soumis à référendum le 29 mai prochain.

S'agissant de la coopération avec les pays du sud de la Méditerranée, j'ai été conduite, au mois de décembre 2004, à réunir au ministère de la défense cinq des pays du sud de l'Europe - la France, l'Italie, l'Espagne, le Portugal et Malte -, et cinq pays du Maghreb - la Mauritanie, le Maroc, la Tunisie, l'Algérie et la Libye -, dans une perspective de réflexion et de travail en commun pour protéger les approches maritimes, en particulier contre les trafics de stupéfiants et les trafics de migrants illégaux, ainsi que contre le risque terroriste.

Vous avez également insisté, avec d'autres intervenants, sur l'importance du renseignement en matière maritime.

Le besoin de coopération est évident en la matière. Très souvent, nous intervenons sur des renseignements qui nous sont fournis non seulement par d'autres services que les nôtres, mais aussi par d'autres pays. Et c'est souvent dans le pays d'origine que nos propres services dans ce pays, voire les services de ce pays, nous fournissent l'indication que tel ou tel navire est suspect et contient probablement une cargaison suspecte. Cette coopération doit être entretenue, voire développée, parce qu'il est toujours plus facile de contrôler si l'on a des indications sur ce que l'on cherche et sur l'endroit où chercher.

M. Nogrix a souhaité que la ratification de la convention de San Jose puisse intervenir rapidement. C'est une nécessité, et je souhaite, pour ma part, que cette ratification puisse être soumise le plus tôt possible au vote des deux assemblées.

M. Nogrix a également souligné le besoin de coopération à la fois entre pays européens - la réponse que je viens de donner à M. le rapporteur devrait le rassurer à ce propos - et avec les pays où naissent les trafics. Je partage son sentiment : sur ce dernier point, je le répète, le renseignement est l'un des éléments qu'il nous faut développer.

Dans ce domaine, la coopération avec un très grand nombre de pays est de plus en plus grande. Je pense, par exemple, à certains pays d'Amérique latine, qui sont conscients que les trafics non seulement fondent leur développement sur des situations instables, mais également accompagnent et entretiennent des crises. Je pense également à l'Afghanistan, où, j'ai eu l'occasion de le dire ici même, le trafic de drogue est l'une des causes qui entretiennent, dans certaines régions, un système complètement autonome et indépendant du gouvernement central.

Une aide réciproque se développe donc en la matière et les gouvernements prennent de mieux en mieux la mesure de ces problèmes.

M. Nogrix a ensuite évoqué les moyens budgétaires, de même que MM. Le Cam et Trémel. Sur ce sujet, je voudrais apporter un certain nombre de précisions.

En ce qui concerne le budget du ministère de la défense, je suis parfaitement consciente que des moyens sont nécessaires lorsque l'on souhaite confier des missions supplémentaires aux personnels ou en renforcer l'efficacité. Tel est l'objet de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008, qui vise à rattraper les insuffisances budgétaires résultant en particulier des cinq années précédentes, qui avaient fait prendre du retard à un certain nombre de programmes, notamment dans le domaine maritime, et qui avaient empêché que soit assuré le maintien en condition opérationnelle, le MCO.

La marine est certainement l'une des armes qui ont le plus souffert de l'insuffisante réalisation de la loi de programmation militaire 1997-2002.

C'est la raison pour laquelle je veille à l'application stricte de la loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008. Ainsi, la loi de finances initiale pour 2005 sera totalement respectée, conformément à l'intention du Gouvernement. Je me réjouis d'ailleurs que le Premier ministre ait eu l'occasion de le rappeler très brillamment la semaine dernière : cela devrait ôter tout doute en la matière, puisque les arbitrages sont déjà rendus.

M. Le Cam s'est inquiété à la fois de la baisse des moyens financiers accordés aux douanes françaises et de la restructuration de cette administration.

Je rappelle, même si ce dossier est traité par un autre ministère que le mien - mais la solidarité gouvernementale m'autorise à en parler -, que le déploiement des moyens aériens et maritimes des douanes n'a pas été modifié depuis trente ans. Avouez que la situation a tout de même évolué durant cette période ! Peut-être eût-il été bon, dans les années passées, de se prononcer sur l'adaptation des moyens aux besoins qui s'exprimaient !

Un projet de réforme est aujourd'hui en cours. MM. André Boyer et Jean-Guy Branger ont été chargés de préparer un rapport d'information sur l'action de l'Etat en mer, qui devrait notamment apporter des réponses en ce qui concerne la réforme des moyens maritimes de la douane. En la matière, il convient d'apprécier la présence à la mer effective des bâtiments des douanes et non le seul nombre des unités affectées à ces missions : il faut faire le départ entre la théorie et la mise en oeuvre.

Le premier projet de schéma directeur est aujourd'hui axé sur la réforme des douanes et sur une meilleure efficacité opérationnelle. Il a été présenté aux représentants syndicaux par les directeurs régionaux des douanes. Nous sommes donc dans une phase de concertation, mais il serait anormal d'affirmer que les négociations sont achevées ou de se réfugier dans le passé. En trente ans, la situation a changé, et des adaptations s'imposent certainement.

J'ai déjà répondu aux interrogations de M. Trémel en ce qui concerne les prétendues incertitudes sur la loi de programmation militaire et sur la loi de finances initiale pour 2005. J'espère l'avoir rassuré. Je retiens d'ailleurs de son intervention, comme peut-être de celle de M. Le Cam, que le projet de loi de finances initiale pour 2006 - puisqu'il sera, lui aussi, en parfaite conformité avec la loi de programmation militaire - recueillera sans doute son approbation !

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