Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 14 avril 2005 à 15h00
Création du registre international français — Question préalable

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Nous ne nous résignons pas à cette perspective.

Nous ne voulons pas que notre pays, dont la situation géographique et l'existence de plusieurs milliers de kilomètres de côtes ont permis la création de nombreux ports, devienne un lieu de dumping social en matière d'armement naval et d'embauche d'équipages.

Nous avons déjà été instruits par l'expérience et l'instauration d'un pavillon bis, un pavillon qui, pour éviter d'être qualifié de complaisant, a été dénommé le « registre Kerguelen ».

Quelle en a été la conséquence ? Les marins français y sont largement minoritaires, la règle de 35 % de personnel n'étant pas écrite alors qu'il le faudrait. Il en résulte une hétérogénéité des droits et des salaires.

Mais cela n'est pas encore suffisant pour les armateurs, pour le MEDEF de la mer dont vous êtes, mesdames, messieurs de la majorité, les porte-parole dans cette enceinte

Pour eux, les charges salariales seraient encore trop importantes.D'où la pression qu'ils ont exercée pour qu'on en arrive à la création d'un RIF, lequel avait déjà été précédé de la taxe sur le tonnage, qui réduit considérablement la fiscalité des armements sans aucune contrepartie, en particulier en termes d'emplois. Tout cela s'est fait au nom de la concurrence, qui justifie toujours plus.

Il faut, par l'entremise du texte qui nous est proposé, accepter le laminage des droits des marins, la disparition de leurs organisations syndicales et des instances élues qui les représentent.

Quoi de mieux, au nom de la compétitivité, que des personnels corvéables, sans aucun droit, d'autant qu'ils seraient recrutés par l'entremise de sociétés de « marchands d'hommes » élevées pour l'occasion au rang d'entreprises de travail maritime ?

On sait bien évidemment qu'il sera aisé de trouver, dans des pays extra- communautaires, des hommes prêts à travailler pour moins cher, dans des conditions toujours plus difficiles, tout simplement parce qu'il faut subvenir aux besoins de la famille. En face, il existera toujours des armateurs qui y verront une aubaine leur permettant de dépenser toujours moins.

Ce sont donc les hommes qui seront mis en concurrence alors que le travail dans les transports maritimes est particulièrement pénible et devrait donc être rémunéré à sa juste valeur, comme le permet le statut des marins acquis de haute lutte par les intéressés.

Comment ne pas évoquer également tout ce qui est le corollaire du registre international français.

Je pense aux filières de formation dispensée par les écoles nationales de la marine marchande, qui se verraient de fait condamnées par ce texte, tout comme le seraient le savoir français et les formations de haut niveau aux métiers de la mer.

Quid, en même temps, de la sécurité maritime ? Il est, en effet, de notoriété publique que la sécurité en ce domaine est indissociable de la formation des personnels et des conditions de travail. Une telle proposition de loi ne nous prémunit donc pas contre l'existence de « navires poubelles » et la survenance de catastrophes écologiques, contrairement à ce qu'a répondu M. le secrétaire d'Etat à Mme Boyer.

Ces dernières années, certains de nos ports ont eu à subir la présence de navires abandonnés avec, à leur bord, des marins étrangers engagés sous pavillons de complaisance et non payés depuis des mois.

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