Intervention de François Baroin

Réunion du 7 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Outre-mer

François Baroin, ministre de l'outre-mer :

L'Union européenne constitue un autre niveau d'échanges et de responsabilités. L'Union a reconnu l'obligation de conduire les départements d'outre-mer à un niveau égal ou supérieur à 75 % de la moyenne du PIB des régions européennes. Elle a, par ailleurs, conféré un statut particulier à ces départements, celui de région ultrapériphérique, ce qui valide bien le dispositif de la défiscalisation au regard du droit européen.

Il n'est pas si fréquent qu'une politique soit ainsi validée entre un État et l'Union européenne pour doter de moyens spécifiques des régions qui ont besoin d'être soutenues de manière exceptionnelle parce que la réalité du terrain l'exige.

Il était donc essentiel que la loi de finances 2006 épargne le dispositif de la défiscalisation, que la loi de programme pour l'outre-mer avait renforcé et pérennisé sur quinze ans.

Il fallait aussi montrer que l'outre-mer ne restait pas à l'écart de la réforme fiscale du Gouvernement : c'est pourquoi l'évaluation des impacts socioéconomiques prévue dans la loi de 2003 sera conduite, dès 2006, avec le Parlement et débouchera, le cas échéant, sur des adaptations.

De ce point de vue, le président de l'intergroupe, Simon Loueckhote, a accompli avec l'ensemble de ses collègues ultramarins, toutes sensibilités confondues, un travail tout à fait remarquable d'association à cette nécessaire évaluation. Il est vrai qu'il y a des effets d'aubaine. Mais ce qui doit l'emporter dans l'appréciation, c'est l'immensité des besoins en matière de production de logements sociaux et la difficulté de résoudre le problème de la maîtrise du foncier, singulièrement à la Réunion, du fait de l'augmentation du prix des terrains.

Cette évaluation est donc nécessaire dans ce secteur comme dans tous les autres, tout comme il est nécessaire que tous ceux qui s'interrogent, parfois avec une forte conviction, soient pleinement associés à cette commission d'évaluation. Elle permettra aux parlementaires ultramarins de faire oeuvre pédagogique et aux parlementaires membres des commissions des finances qui se posent des questions d'être pleinement associés à l'établissement d'un constat objectif : il s'agira de travailler « à livre ouvert ».

Je suis prêt à engager une communication extrêmement large, de manière à bien faire ressortir les avantages légitimes, les points qui suscitent des discussions, les correctifs à apporter, le tout dans une logique consensuelle. Car nous ne devons plus connaître des débats comme celui qui s'est déroulé ici samedi soir. Il est tout de même douloureux pour le Gouvernement de devoir demander un scrutin public pour que soit finalement obtenu un vote contre un amendement aux motifs parfaitement honorables, défendu par le président de la commission des finances, dont les interrogations étaient aussi légitimes que sincères. C'est là une méthode que nous devons laisser derrière nous.

La commission mise en place pour l'évaluation de la loi de programme devrait permettre d'aborder plus sereinement les débats, qu'il s'agisse du budget ou des mesures de rééquilibrage économique que nous serons amenés à prendre.

Je rappelle que l'effet de levier de la défiscalisation permet de drainer entre trois et quatre fois plus de flux financiers privés vers l'outre-mer que de déduction fiscale brute. C'est donc un moyen puissant de suppléer l'insuffisance de fonds propres des entreprises locales et de contourner leurs difficultés d'accès au crédit.

Concernant le logement social, ce levier vient conforter des ressources publiques moins disponibles. Vous regrettez, monsieur Torre, que les dépenses fiscales ne soient pas réorientées vers le logement social. L'amendement de votre collègue Mme Payet, qui a été adopté dans le cadre de la loi de programmation pour la cohésion sociale, est un premier élément de réponse à votre souhait.

En matière d'emploi, il faut éviter les amalgames sur le coût de la défiscalisation : le nombre d'emplois créés par la défiscalisation est connu - près de 2 000 en 2004 - mais, monsieur Torre, avec l'honnêteté qui vous caractérise, vous avez souligné que cette défiscalisation ne concerne pas que les emplois créés : elle concerne aussi tous les emplois maintenus ou protégés dans le cadre d'opérations de restructuration, de modernisation ou de mises aux normes, qui permettent notamment aux entreprises d'améliorer leur compétitivité et de maintenir tant leur activité que leurs effectifs. C'est donc une approche globale qu'il nous faut avoir.

Il faut quand même, monsieur Torre, mettre au crédit des politiques publiques menées outre-mer l'accroissement significatif de l'emploi salarié dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon : 2, 4 % en 2004, contre 0, 3 % seulement en métropole.

Si l'on examine lucidement la situation, on est fondé à considérer que ce sont ces dispositifs de rattrapage économique qui ont permis une baisse du chômage et, dans le même mouvement, une augmentation du nombre de créations d'emplois dans le secteur marchand.

Enfin, la défiscalisation crée un effet vertueux, bénéfique à terme pour les finances publiques : encourager l'investissement et l'emploi privés ne peut que soulager in fine les transferts publics dans des économies encore souvent caractérisées par l'hypertrophie de l'emploi public et la dépendance vis-à-vis de la commande publique ; on en sait quelque chose en matière de bâtiment et de travaux publics. Les moyens dégagés peuvent ainsi être réorientés vers d'autres politiques publiques.

Les objectifs que s'est fixés le ministère de l'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 2006 reprennent clairement la feuille de route et les engagements du Président de la République, ainsi que l'a rappelé Gaston Flosse. N'en déplaise à certains, nous respectons totalement ces engagements pris devant les Français en 2002, y compris en termes de calendrier.

Vous soulignez, monsieur Cointat, que les crédits de la mission « Outre-mer » restent globalement stables dans un contexte budgétaire pourtant tendu. C'est tout le sens de l'engagement très fort du Gouvernement en direction de l'outre-mer. Ce fut également tout le sens des réunions que nous avons conduites, sous l'autorité du Premier ministre, pour permettre de lever les interrogations et maintenir ce haut niveau d'exigence d'accompagnement par des politiques publiques. Le constat que vous faites est en tout cas très utile pour éclairer la Haute Assemblée à l'occasion de l'examen de ce budget.

S'agissant de l'emploi, pour lequel il était également essentiel de maintenir le dispositif d'allégement de charges sociales prévu par la loi de programme, je vous confirme, madame Payet, que les mesures financées par le FEDOM seront complétées par les nouveaux dispositifs d'aide à l'embauche dans le secteur non marchand. Ainsi, 18 200 contrats d'avenir ont été signés - ou sont en voie de l'être - avec les conseils généraux des départements d'outre-mer.

Disant cela, je lance un regard amical et respectueux vers le président Claude Lise, puisque nous avons signé, ainsi que vous l'avez rappelé fort opportunément, monsieur le président, une convention lors de mon dernier déplacement en Martinique, en visant un objectif élevé, certes, mais qui correspond à la réalité des besoins des Martiniquais.

Ces emplois aidés ne seront pas soumis à des quotas. D'une certaine façon, la balle est dans le camp des collectivités territoriales. En fonction des propositions locales, l'État veillera naturellement à l'application pleine et entière des dispositifs de la loi Borloo.

Vous avez rappelé, monsieur Laufoaulu, que les résultats exemplaires en matière d'insertion professionnelle du service militaire adapté, le SMA, ont justifié l'extension de cette mesure à la métropole en 2005. C'est tout à l'honneur de l'outre-mer, sur ce point comme sur beaucoup d'autres, que de devenir un élément de référence dans le cadre du discours de politique générale du Premier ministre.

Le Président de la République a repris cette référence lors de l'annonce de la mise en place du service civile, qui répond à la même philosophie : offrir une deuxième chance à des jeunes en difficulté dans le cadre du cursus scolaire. Un encadrement de qualité, la vision d'une mission d'intérêt général partagé, une volonté sans faille, du discernement, une adaptation aux personnalités et aux caractères permettent aux responsables du SMA d'offrir à 80 % ou 85 % des jeunes qui suivent ce parcours une certitude d'insertion professionnelle.

Au vu de ce succès, nous allons renforcer les moyens affectés au SMA. Nous formerons ainsi 3 000 jeunes ultramarins en 2006 dans ce cadre. Naturellement, nous réserverons des places dans les unités du SMA pour les jeunes de Wallis et Futuna.

La lutte contre l'exclusion et la précarité, autre pilier de l'action gouvernementale, passe évidemment par la réduction du chômage, mais elle serait vaine si elle ne prenait pas en compte l'environnement spécifique de l'outre-mer.

L'État accentuera donc ses efforts pour favoriser l'accès au logement, renforcer la sécurité et assurer la protection sociale des ultramarins.

En ce qui concerne le logement, madame Michaux-Chevry, je partage votre conviction que nous devons faire preuve d'une particulière efficacité dans la définition de normes appropriées de construction et d'entretien des logements.

On peut toujours trouver, madame Hoarau, monsieur Lise, que la dotation consacrée à cet effet - 270 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 173 millions d'euros de crédits de paiement - est insuffisante. Elle représente néanmoins, rappelons-le, la parfaite reconduction des crédits inscrits en loi de finances pour 2005, alors même que le budget de l'État doit réduire son déficit. Les arbitrages témoignent d'une volonté de maintenir au niveau d'exigence de l'an passé le soutien et l'accompagnement à cette politique.

Grâce à votre amendement, madame Payet, monsieur Marsin, la Haute assemblée a voté le principe de la déclinaison du plan de cohésion sociale à l'outre-mer. Cela concerne aussi bien les emplois aidés que la programmation pluriannuelle du logement social que le Gouvernement s'est engagé à mettre à l'étude.

Cela devrait être de nature à répondre à votre préoccupation, monsieur Virapoullé. Avec les talents d'orateur et de tribun que l'on vous connaît, vous nous avez fait partager votre vision de la façon dont nous pouvions coordonner les politiques publiques de l'État et des collectivités territoriales, tant à la Réunion que de manière plus globale.

Vous m'avez posé une question précise, monsieur Virapoullé, au sujet du forfait « charges » lors de la mise en place des allocations de logement dans les DOM. Il avait été considéré que l'absence de chauffage dans la grande majorité des logements justifiait une différence de traitement quant au calcul du forfait « charges » versé aux bénéficiaires de l'allocation de logement.

L'amélioration constante, ces dernières années, des conditions de confort rend aujourd'hui nécessaire de s'interroger à nouveau sur les modalités de calcul de ce forfait ; je partage votre point de vue. C'est pourquoi j'ai demandé à mon collègue Xavier Bertrand, qui est chargé de ce dossier, qu'une réflexion soit entreprise dès 2006 pour réévaluer les paramètres de ce forfait.

Monsieur Giraud, comme les autres secteurs de la société mahoraise, la politique du logement doit évoluer progressivement vers le droit commun ; les instruments de la politique du logement social qui sont actuellement mis en oeuvre devront naturellement être évalués, et adaptés si nécessaire.

L'État soutient avec vigueur la démarche de redressement engagée par la SIM, qui va se concrétiser par l'adoption, avant la fin du mois de janvier, du plan de redressement de cette société par son conseil d'administration.

Vous avez évoqué, monsieur Lise, les difficultés créées par le gel des crédits de la ligne budgétaire unique et par les programmes interrompus. Les petites entreprises du BTP sont parfois en état de cessation de paiement et l'État en est directement ou indirectement responsable.

Le Gouvernement a été très attentif à vos préoccupations, monsieur le sénateur, comme à celles de l'ensemble des parlementaires qui nous ont alertés sur ce point.

Malgré le difficile contexte des finances publiques, le Premier ministre a accepté, sur ma proposition, de dégeler l'intégralité des crédits qui étaient bloqués, soit 40 millions d'euros. Je le redis avec force : il n'y a eu aucune annulation de crédits sur la ligne budgétaire unique.

Le ministère de l'outre-mer est probablement l'un des seuls, et je m'en félicite, à avoir obtenu ce dégel. Ne voyez là aucun orgueil inutile, aucune vanité déplacée : la situation l'exigeait. Sur ce point comme sur d'autres, on ne peut procéder de la même manière au ministère de l'outre-mer et dans les ministères sectoriels.

La lutte contre la précarité et l'exclusion passe aussi par la sécurité, que la République se doit d'assurer aux plus fragiles d'entre nous.

L'immigration clandestine touche plusieurs de nos collectivités, comme l'on souligné les représentants de la Guadeloupe, de Guyane et de Mayotte. Cette immigration a un effet particulièrement déstabilisant sur les sociétés d'outre-mer, aux dimensions géographiques et humaines réduites.

Je rappellerai que j'ai volontairement ouvert ce débat, dont peu de personnes avaient idée en métropole. J'ai proposé une méthode. Elle me semble être la meilleure, non parce que je l'ai proposée, mais parce que c'est la seule qui vaille dans un débat aussi sensible, dont le point de départ est une réflexion sur la condition humaine.

Ces hommes et ces femmes rejoignent les territoires français en s'attendant à trouver l'Eldorado : certains y trouvent leur tombeau. Plusieurs dizaines de corps sont découvertes chaque année sur les côtes guadeloupéenne ou mahoraises, sur les bords de l'Oyapock ou du fleuve Maroni, aux frontières de la Guyane.

Ces situations ne sont pas tolérables si l'image que l'on se fait de la France est celle d'une terre d'accueil, où l'on est capable de vivre ensemble un pacte républicain.

Sur cette base, c'est le Parlement qui doit avoir le dernier mot : vous aurez le dernier mot ! Je n'ai pas eu le premier mot : de nombreux parlementaires, depuis des années, m'ont alerté sur cette situation. Au final, le Sénat et l'Assemblée nationale trancheront.

Une mission d'information sur la situation de l'immigration à Mayotte a été engagée par la commission des lois de l'Assemblée nationale. Cette mission est complémentaire de la commission d'enquête parlementaire présidée par M. Othily, qui examinera dans sa globalité la question de l'immigration clandestine, en métropole comme en outre-mer.

La question se posera de savoir si l'on élaborera un texte spécifique à l'outre-mer ou si, au sein d'un texte de loi portant sur l'immigration clandestine, un chapitre sera consacré à l'outre-mer. Ce point sera soumis à l'arbitrage du Premier ministre. Mais la question du véhicule législatif importe moins que la possibilité de mener une politique équilibrée de maîtrise des flux migratoires et de disposer du temps nécessaire pour équilibrer non politiques publiques, afin de mieux faire vivre le pacte républicain.

Les trois piliers de cette action sont très simples.

Premier pilier : un dispositif répressif sera mis en place, car il faut aller plus loin et adresser des messages forts aux pays sources.

Deuxième pilier : une action diplomatique vigoureuse sera menée, car elle est nécessaire pour engager des accords de réadmission.

Le troisième pilier est évident : le Président de la République a proposé d'instaurer une taxe sur les billets d'avion, car nous souhaitons par-dessus tout que les gens qui viennent chez nous en pensant avoir un avenir meilleur et se retrouvent dans des filières clandestines, souvent exploités, puissent avoir les moyens de rester chez eux et de définir leur avenir par rapport à leur terre et à leurs racines.

L'aide au développement sera donc un élément important de la réussite d'une politique d'immigration choisie et non d'immigration subie.

Je voudrais apporter des éléments de réponse à Mme Michaux-Chevry quant aux moyens d'ores et déjà mis en oeuvre en Guadeloupe ou qui sont annoncés. Des instructions précises ont été données au préfet, à qui a été assigné un objectif de 2 000 reconduites à la frontière d'étrangers en situation irrégulière en 2006, contre 1 200 en 2004. Cette augmentation est liée à l'intensification des flux migratoire subis par l'archipel.

Des moyens militaires et de l'ensemble des administrations - douanes, police aux frontières, gendarmeries maritimes - sont mobilisés en Guadeloupe dans les zones maritimes de passage.

Le dispositif à terre sera également adapté : la capacité du centre de rétention administrative sera augmentée, l'OFPRA installera à compter du 1er janvier 2006 une antenne permanente à la Guadeloupe pour accélérer le traitement des demandes d'asile, car le délai est trop important. Enfin, au sein du conseil interministériel de contrôle de l'immigration sont envisagées des dispositions législatives pour permettre de pratiquer des contrôles d'identité et des interpellations dans la bande littorale.

Enfin, un accord de réadmission est négocié avec le gouvernement de Roseau, pour supprimer le passage des Haïtiens par la Dominique.

En ce qui concerne Mayotte, je partage votre approche et votre analyse, monsieur Giraud. Les chiffres parlent d'eux-mêmes ; je n'y reviens pas.

La commission présidée par M. Othily et qui m'a auditionné la semaine dernière a toute latitude : elle peut mettre en oeuvre tout moyen juridique pour mener les investigations nécessaires, s'entendre sur la réalité des statistiques et proposer des dispositifs qui seront soumis à l'examen de la représentation nationale.

Par ailleurs, il faut mesurer la réalité de l'isolement et les retards structurels des collectivités d'outre-mer et essayer d'y répondre en rapprochant progressivement l'outre-mer du standard métropolitain.

L'action du ministère de l'outre-mer en faveur de la continuité territoriale sera poursuivie. Il est prévu de consacrer 53 millions d'euros à cet effet, contre 49 millions d'euros en 2005.

Vous souhaitez, madame Payet, que soit étudiée la possibilité de rationaliser l'emploi de cette dotation en négociant avec les compagnies aériennes des prix plafonds applicables aux seuls bénéficiaires du système.

Cette problématique va être étudiée avec précision et volontarisme dans le cadre d'une mission d'étude que le Gouvernement vient de confier à l'inspection générale des finances, au conseil général des ponts et chaussées et à l'inspection générale de l'administration. Dès que je disposerai des conclusions de cette mission, nous en reparlerons, et je prendrai probablement une initiative, en associant naturellement à cette démarche la représentation nationale.

Vous m'avez interrogé, monsieur Othily, sur la spécificité du plan de solidarité nationale pour la Guyane, qui doit permettre d'aider cette région à compenser les handicaps qui la pénalisent fortement.

Le plan proposé fait actuellement l'objet d'une concertation interministérielle qui est en cours de finalisation ; il sera présenté aux élus dans quelques jours. Il devrait être mobilisé pour les années 2006 et 2007 et ciblé sur des thèmes présentés comme prioritaires par les élus locaux, comme le logement, la santé, l'éducation ou, naturellement, la lutte contre l'immigration irrégulière.

Ce plan a pour objet de prévoir des compensations par rapport aux retards structurels : il s'agit d'un complément de crédits qui ne doit pas se situer dans une logique de « refléchage » de crédits de droit commun vers des politiques prioritaires. Ces nouveaux crédits permettront d'irriguer l'économie guyanaise ou les politiques publiques guyanaises, afin de procéder à un rattrapage.

La maquette de ce plan est chiffrée à 153 millions d'euros. Les crédits de paiement seront étalés sur trois ans.

Il est encore un peu tôt pour formaliser cette annonce, puisque nous attendons la fin des arbitrages. À l'évidence, vous serez les premiers informés quant aux résultats de ces arbitrages.

La création du parc national du sud de la Guyane constituera également un axe fort pour le rattrapage, le rééquilibrage et le développement de votre belle région, monsieur Othily.

Votre préoccupation, monsieur Loueckhote, d'une meilleure répartition de l'activité en Nouvelle-Calédonie est prise en compte dans les contrats de développement. Ainsi, dans le contrat de développement en voie de finalisation pour 2006-2010, la province Nord bénéficiera de 116 millions d'euros de crédits d'État, soit près du tiers du contrat global.

Dans le cadre de l'accompagnement du nouveau site industriel, j'envisage de mettre en place dès 2006, avec l'ensemble des partenaires, un comité de pilotage qui sera chargé de suivre les dépenses d'accompagnement pour les logements, la formation ou les infrastructures et de prévoir, le cas échéant, des crédits complémentaires pour prendre en compte l'ensemble des besoins qui viendraient s'ajouter à ceux que prévoit le contrat de développement.

Je voudrais revenir sur le dossier du nickel en Nouvelle-Calédonie, évoqué par MM. Torre et Loueckhote. Pour une bonne compréhension de ce dossier, il convient de procéder à un bref rappel historique.

Les accords de Bercy de 1998 ont prévu un rééquilibrage économique en faveur de la province Nord par la construction d'une usine, qui repose sur deux principes : d'une part, un échange de massifs miniers en faveur de la société d'économie mixte de la province Nord, la SMSP, et le dédommagement, à hauteur de 1 milliard de francs, de la SLN par l'État ; d'autre part, la création d'une société d'exploitation dans laquelle la province Nord et/ou la SMSP resteraient majoritaires aux côtés d'un opérateur industriel choisi par elles.

Cet opérateur est Falconbridge. À l'origine, il devait financer seul le projet, mais le renchérissement des coûts l'a conduit à demander, en 2003, un soutien à l'État sous la forme d'une défiscalisation et d'une garantie d'emprunt, ce qui lui a été accordé.

Falconbridge a ensuite estimé cette offre insuffisante. En réponse, l'État a amélioré sa proposition au mois de juillet dernier, mais n'a pas reçu de confirmation de la part de la société. Une nouvelle demande et une nouvelle proposition ont été formulées en septembre. Falconbridge a finalement décidé de décliner le soutien de l'État et de financer seul le projet. Il appartiendra à l'entité chargée de l'application du protocole de Bercy d'apprécier si les conditions qu'il contient sont remplies et si les titres miniers peuvent être échangés.

L'État reste naturellement très attentif à la réalisation de ce projet dans la province Nord, car c'est l'une de ses priorités. Il respectera son engagement, conformément à ce que souhaitent les représentants de la province Nord. Nous travaillons tous main dans la main, en privilégiant un circuit d'information très court avec M. Loueckhote, le tout dans une logique de discussions « à livre ouvert ». Nous sommes ainsi informés en temps et en heure, grâce à un partenariat total dont nous ne pouvons que nous féliciter. Sur ce dossier, comme sur d'autres, nous pouvons continuer d'avancer dans un esprit de consensus, que vous incarnez si bien, monsieur Loueckhote.

Je répondrai maintenant aux préoccupations exprimées par MM. Ibrahim et Giraud. Je vous prie d'ailleurs de m'excuser, mesdames, messieurs les sénateurs, pour ces transitions rapides, mais je tiens à être le plus précis possible dans mes réponses à vos questions. C'est une forme de respect à votre égard !

L'aérodrome de Dzaoudzi-Pamandzi représente effectivement un élément important pour le développement de Mayotte. Depuis le début de l'année, les travaux réalisés ont déjà permis d'améliorer grandement la desserte actuelle de ce territoire. Vous le savez, une seconde phase de travaux est prévue, ce qui permettra d'établir une liaison directe entre Mayotte et la métropole, sans escale intermédiaire. Des financements ont été inscrits à ce titre dans le cadre de la convention État-Mayotte pour la période 2003-2007.

Des études complémentaires sont en cours de réalisation, en vue de l'élaboration d'un avant-projet d'ici à la fin de 2006. Nous avons donc un an pour trouver un accord. Le financement sera assuré par l'État, pour un montant de 4, 5 millions d'euros. Les travaux pourraient démarrer ensuite en 2007, pour une mise en service en 2010.

Toujours en ce qui concerne le développement des infrastructures aéroportuaires, vous m'avez interrogé, monsieur Laufoaulu, sur le projet d'aménagement de la piste d'aviation à Futuna. Le Premier ministre m'a demandé de prévoir les modalités de financement les mieux adaptées à la réalisation de ce projet, en envisageant, en complément du financement par l'État et par le territoire, un appel au fonds européen de développement. L'engagement de l'État sera tenu et, dès 2006, je débloquerai 3 millions d'euros sur mes crédits.

Madame Michaux-Chevry, messieurs Lise et Larcher, vous avez soulevé la question, bien légitime, de l'avenir de notre filière banane. À la demande de la France, la Commission européenne s'est engagée à rechercher le traitement tarifaire le plus favorable lors des négociations menées dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, en veillant à maintenir l'équilibre économique et social de la filière banane, notamment celui de la banane antillaise. Ces négociations doivent intégrer le paramètre historique, qui n'est pas négligeable.

À l'occasion d'un déplacement à Bruxelles lundi dernier, j'ai évoqué le destin des pays et territoires d'outre-mer. D'après vos informations, mes propos ont reçu un accueil favorable, ce dont je me félicite. À l'issue de cet échange, j'ai rencontré deux commissaires européens : M. Louis Michel et Mme Mariann Fischer Boel.

J'ai discuté avec M. Michel de l'avenir de la coopération, du développement des RUP et de la place des PTOM dans le dispositif de partage Europe-États. Par ailleurs, j'ai rappelé à Mme Fischer Boel l'urgence de revoir, sur la base du mémorandum proposé par les ministres français, espagnol et portugais, le régime d'aides compensatoires institué en faveur des producteurs communautaires. J'ai notamment souligné l'urgence de supprimer les dysfonctionnements qui pénalisent actuellement les producteurs de Martinique et de Guadeloupe.

Dans ce domaine, la position française est claire : « Tout le mémorandum, rien que le mémorandum ! » Je veux saluer la méthode retenue, car ce qui s'est passé est important : les professionnels de la filière et les ministères de l'agriculture et de l'outre-mer ont travaillé main dans la main. J'ai beaucoup insisté sur ce point auprès de Mme la commissaire, car les professionnels de la Guadeloupe et de la Martinique ont accompli un effort considérable, alors qu'il n'était pas si simple de s'entendre au sein de cette filière. Ils ont accepté de faire le geste nécessaire pour permettre une avancée, et ils méritent donc d'être soutenus et encouragés. Ce faisant, ils ont aussi envoyé un message aux professionnels des autres filières qui sont actuellement dans une logique de restructuration. Je veux croire que Mme la commissaire prendra conscience de cet effort des professionnels.

La définition du mémorandum a été réalisée sur la base des propositions des professionnels de la filière. Nous n'avons en effet rien eu à redire sur le rôle dévolu à l'État dans l'accompagnement de ces négociations. L'enjeu n'est pas neutre, car il faut parvenir à concilier deux objectifs : d'un côté, poursuivre l'aide au développement et le soutien légitime à des productions venues de pays qui n'ont pas d'autres richesses ; de l'autre, assurer la protection, par le biais de la préférence communautaire, des bananes européennes produites selon les règles de l'art, mais, surtout, conformément au droit international, notamment en matière de droit social et de protection de l'enfance. Les efforts supplémentaires consentis ainsi par les professionnels de la filière doivent être reconnus comme un paramètre pertinent du soutien au développement de la banane européenne, notamment antillaise.

Monsieur Flosse, vous avez évoqué les difficultés des communes polynésiennes. Vous avez parfaitement raison : celles-ci ne bénéficient pas de ressources fiscales propres. Je rappelle que l'État a accru, en 2005, sa participation au profit des communes de Polynésie française, avec une hausse de plus de 10 % de la dotation globale de fonctionnement. Il a également augmenté sa participation au fonds intercommunal de péréquation, laquelle est désormais indexée sur l'évolution de l'enveloppe DGF. Cet effort supplémentaire sera bien entendu prolongé en 2006, avec une nouvelle augmentation de la DGF.

Au demeurant, si ces difficultés perduraient, j'examinerais la possibilité de redéployer, au profit des communes, des crédits affectés actuellement à la Polynésie française.

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