Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous demanderai tout d'abord de bien vouloir excuser Alain Vasselle, absent ce matin.
Dans son dernier rapport consacré au périmètre et au financement de la protection sociale, la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, qui est présidée par Alain Vasselle, a émis une série de propositions destinées à améliorer le pilotage des finances publiques.
Parmi celles-ci figure la possibilité pour la commission des affaires sociales de s'impliquer davantage dans le suivi des lois de finances initiales et rectificatives, afin de mieux coordonner les sphères budgétaire et sociale.
L'expérience nous a montré que trop d'éléments importants nous échappent dans les relations financières entre l'État et la sécurité sociale, car ils sont inscrits en loi de finances et plus encore en collectif budgétaire où des mesures peuvent être votées sans même que nous en ayons connaissance à temps.
L'idée est donc de permettre à notre commission, si cela s'avère nécessaire, de mettre l'accent et d'exercer son contrôle sur tel ou tel aspect de ces relations en fonction des arbitrages et décisions du Gouvernement tels qu'ils apparaissent dans les projets de loi de finances.
Le présent avis met en oeuvre cette préconisation pour la première fois. Le projet de loi de finances rectificative pour 2007 comporte plusieurs mesures ayant un impact direct sur les finances sociales.
De façon plus précise, trois séries de dispositions qui figurent dans le collectif motivent cette saisine : premièrement, un certain nombre d'ouvertures de crédits sur des lignes de dépenses destinées à la sécurité sociale et, hélas ! régulièrement sous-dotées en loi de finances initiale ; deuxièmement, le financement des sommes dues au titre de la compensation, d'une part, des allégements « Fillon », d'autre part, des allégements de charges au titre des heures supplémentaires ; enfin, la reprise par l'État de la dette ancienne du BAPSA, soit 620 millions d'euros.
Je commencerai par les ouvertures de crédits.
L'API, l'allocation de parent isolé, et l'AAH, l'allocation aux adultes handicapés, voient leurs dotations progresser respectivement de 100 millions d'euros et de 68 millions d'euros. Selon les informations que nous avons recueillies, c'est à peu de choses près ce qui était nécessaire. Acceptons l'augure !
En revanche, pour l'AME, l'aide médicale de l'État, aucun crédit supplémentaire n'est inscrit au titre de 2007. Cela est justifié par le fait que des mesures de meilleure maîtrise des dépenses doivent prochainement entrer en vigueur. Mais ces mesures ne sont toujours pas prises, monsieur le secrétaire d'État, et les réalisations des années antérieures ne peuvent que nous conduire à un certain scepticisme. C'est pourquoi, en recoupant diverses données, nous évaluons au moins à 200 millions d'euros la somme qui pourrait manquer.
Je reconnais que les crédits de l'AME ont été sensiblement revus à la hausse dans le budget pour 2008 et nous nous en sommes félicités, mais cela ne résout pas la question pour l'exercice 2007.
S'agissant de la compensation des exonérations de charges ciblées, qui est répartie entre les crédits de différentes missions, principalement les missions « Travail et emploi » et « Outre-mer », je rappelle que les exercices budgétaires précédents se sont terminés avec une insuffisance de crédits, soit environ 1 milliard d'euros en 2006.
Pour 2007, les dotations initiales ont été à nouveau sous-évaluées et, à ce stade, les sommes manquantes pour la sécurité sociale pourraient être de l'ordre de 1, 1 milliard à 1, 3 milliard d'euros, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas négligeable.
Le Gouvernement nous a affirmé sa volonté de ne pas permettre une reconstitution de la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale. Comment va-t-il remédier aux insuffisances que je viens de signaler en ce qui concerne, d'une part, les 200 millions d'euros pour l'AME et, d'autre part, les 1, 1 milliard d'euros pour la compensation des exonérations ciblées ?
J'en viens maintenant à la compensation des allégements généraux de charges sociales dits « Fillon » et des allégements au titre des heures supplémentaires. Cette compensation, comme vous le savez, mes chers collègues, est réalisée non par des crédits budgétaires, mais par l'affectation d'un certain nombre de taxes et de recettes fiscales.
Les articles 5 et 6 du collectif mettent à niveau les deux paniers de recettes correspondants. Pour les allégements « Fillon », le panier est majoré de 1 milliard d'euros grâce à l'affectation, d'une part, de la fraction des droits tabacs, et, d'autre part, de la fraction de la taxe sur les salaires qui était encore affectée à l'État. Pour les exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires, la compensation pour 2007 est réalisée par l'affectation d'une fraction du produit de la taxe sur les véhicules de société pour un montant de 270 millions d'euros.
Dans les deux cas, les montants prévus paraissent conformes aux besoins et nous vous donnons acte, monsieur le secrétaire d'État, du respect de vos engagements sur ce point.
Enfin, l'article 30 du projet de loi de finances rectificative prévoit la reprise par l'État de 620 millions d'euros de dette vis-à-vis du FFIPSA. Il s'agit du reliquat de dette constaté au bilan de sortie du BAPSA au 31 décembre 2004.
Cette mesure était attendue depuis trois ans. Elle est bienvenue, car elle solde la dette ancienne du BAPSA, mais elle ne résout bien sûr en rien la question du déficit cumulé du FFIPSA, qui atteindra, je vous le rappelle, 5 milliards d'euros à la fin de l'année et 7, 7 milliards d'euros à la fin de 2008.
Au total, le collectif budgétaire pour 2007 comporte plusieurs mesures positives - on pourrait même dire vertueuses - qui témoignent véritablement du souci du Gouvernement d'améliorer les relations financières entre l'État et la sécurité sociale, ce que nous appelions de nos voeux et apprécions à sa juste valeur.
Nous resterons toutefois vigilants. En particulier, il nous semble indispensable que tous les montants qui resteront à payer au titre de l'exercice 2007 soient régularisés dès le début de l'exécution 2008. Il ne faut pas qu'une dette de l'État envers la sécurité sociale se reconstitue.
De même, il ne faudrait pas que les finances de la sécurité sociale redeviennent - nous l'avons souligné à maintes reprises par le passé - la variable d'ajustement du budget de l'État.
Pour terminer, je voudrais vous présenter deux amendements portant articles additionnels que la commission des affaires sociales a souhaité soumettre au Sénat.
Le premier résulte, une fois encore, d'une proposition du dernier rapport de la MECSS. Il vise à demander l'élaboration d'un document annuel récapitulant l'ensemble des dépenses publiques concourant à la politique de la famille. Les différentes composantes de la politique familiale sont actuellement éclatées entre les dépenses assumées par la branche famille de la sécurité sociale et celles qui sont financées par le budget de l'État, c'est-à-dire les dépenses budgétaires, les dépenses fiscales et le quotient familial.
Cette dispersion rend difficile une approche cohérente de ce secteur. Nous proposons donc d'instituer un document récapitulant l'ensemble de ces aides, qui pourrait être annexé simultanément au projet de loi de finances et au projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année.
Le second amendement vise à réduire le taux du prélèvement de l'État sur les sommes dues au titre des contributions sociales sur les revenus du patrimoine. Du fait des hausses successives de la CSG, de la création de la CRDS et de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, le montant de ce prélèvement a été multiplié par dix de 1991 à 2006, alors que le nombre d'avis d'imposition à gérer n'a augmenté que de 3 % par an et que les nouvelles procédures mises en place, telles que la télé-déclaration, ont permis d'importants gains de productivité.
On estime à 100 millions d'euros au moins l'avantage procuré à l'État par ce prélèvement. Nous vous proposons de le réduire, dans un premier temps, à 50 millions d'euros, ce qui permettrait dès à présent une recette supplémentaire de 50 millions pour la sécurité sociale.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les observations qu'a inspiré à la commission des affaires sociales le collectif budgétaire pour 2007.