Intervention de Bernard Vera

Réunion du 17 décembre 2007 à 21h45
Loi de finances rectificative pour 2007 — Article 21

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

L'article 21 vise à rendre « eurocompatibles » un certain nombre de dispositions dérogatoires de notre droit.

Ce ne sont en effet pas moins de quarante-neuf dispositions dérogatoires qui sont ainsi rendues compatibles avec les termes de la législation européenne en matière de respect des principes de « concurrence libre et non faussée » et d'aides publiques aux entreprises.

Cette actualisation soulève un certain nombre de questions.

La première est de savoir si nous sommes fondés à traduire dans les faits une orientation des politiques européennes qui est de plus en plus discutable et qui demeure discutée tant que nous n'avons pas ratifié le traité de Lisbonne.

Deuxième question : l'outil de la dépense fiscale et, plus généralement, de la concurrence fiscale est-il le plus adapté pour favoriser le développement de l'activité économique ?

La pertinence de nombre des dispositions visées par l'article 21 est en question.

Quelle évaluation peut-on faire, notamment, de tel ou tel dispositif en termes d'activité, d'emploi, au-delà même des questions de respect ou non des règles de concurrence équilibrée entre acteurs économiques ?

La concurrence fiscale s'avère-t-elle, dans tous les cas, la meilleure solution pour mener à bien les politiques de soutien à l'activité économique ?

Ainsi, voici ce qu'on peut lire dans un rapport d'information du Sénat publié voilà quelques jours à peine par nos collègues Joël Bourdin et Yvon Collin :

« Au total, la concurrence fiscale aboutit à une déconnexion patente entre le niveau des recettes fiscales des impôts sur le capital et la répartition de l'activité économique dans l'espace européen. Cette discordance touche aussi les perspectives de croissance économique en Europe.

« Plus globalement, on doit relever un grand nombre de phénomènes fiscaux témoignant d'une volonté nationale d'améliorer la compétitivité-coût et l'attractivité de chaque pays. La déformation des structures fiscales en Europe vers plus d'impôts indirects et moins de prélèvements directs sur les revenus du travail en est la manifestation la plus globale. Par certaines de ses dimensions - la hausse de la TVA compensée par les baisses de cotisation -, elle conduit à restaurer les dévaluations compétitives entre nations européennes d'avant l'euro.

Les rapporteurs poursuivent leur analyse en précisant, à propos des politiques de désinflation compétitive qui accompagnent en général la concurrence fiscale : « Ces politiques de déflation salariale ont même l'effet inverse sur la productivité des pays qui les choisissent : en amenuisant la demande domestique, elles privent l'investissement des perspectives qui lui sont nécessaires [...] ; en réduisant les gains salariaux, elles altèrent une des incitations essentielles au travail ; en privant les États de bases fiscales, elles les conduisent à sacrifier les dépenses les plus porteuses d'avenir - éducation, recherche, infrastructures... - et réduisent la portée des assurances collectives pourtant si nécessaires pour accompagner les mutations économiques dans un monde en transition. »

Nous devons donc procéder sans plus tarder à la mise en question des dispositions dérogatoires visées par les dispositifs de l'article 21, comme nous devrons sans doute porter au niveau européen les contours d'une nouvelle politique de développement économique, fondée sur d'autres outils que la dépense fiscale ou l'abaissement exténuant du coût du travail.

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