Intervention de Nicole Bonnefoy

Réunion du 27 octobre 2010 à 14h30
Représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance — Suite de la discussion de deux propositions de loi et adoption du texte de la commission modifié

Photo de Nicole BonnefoyNicole Bonnefoy :

Il y va d’une meilleure gouvernance de nos entreprises. Cet aspect ayant été parfaitement développé par ma collègue Nicole Bricq, je ne m’y attarderai pas.

J’insisterai davantage sur l’objectif commun de ces propositions de loi, à savoir assurer une meilleure représentation des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises en décidant que la proportion d’administrateurs de chaque sexe ne puisse être inférieure à 40 %.

En 2003, les femmes représentaient seulement 5 % des membres des conseils d’administration ou de surveillance des plus grandes sociétés cotées françaises. Aujourd’hui, cette proportion atteint péniblement 10 %. Les récentes études confirment cette tendance et démontrent l’absence de réels progrès dans ce domaine. La France occupe la dixième position européenne en matière de mixité des conseils d’administration. Quant aux postes de présidents, ils sont encore moins féminisés : 4 % des présidents de conseil administration, 12 % des présidents de conseil de surveillance et seulement 2 % des directeurs généraux sont des femmes.

Les femmes sont donc gravement sous-représentées dans nos instances décisionnelles économiques et nous savons tous que ce n’est pas une question de capacité ou de formation. Face à ce constat, et pour respecter l’article 1er de la Constitution qui dispose que « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales », il est devenu indispensable de légiférer.

La représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances de décision, quelles qu’elles soient, est un préalable pour toute société démocratique qui se veut en phase avec son temps.

Il faut donc apporter des solutions législatives et juridiques pour remédier à des mœurs qui laissent encore, bien souvent, la femme au second plan, car la situation ne changera pas d’elle-même. La charte de bonne conduite du Mouvement des entreprises de France, le MEDEF, sur la gouvernance d’entreprise le prouve : elle n’a pas été suivie d’effets significatifs. Ce n’est que par la loi, et par des politiques ambitieuses, que nous pourrons engager un mouvement de fond débouchant sur une évolution, voire une révolution.

Mettre fin à la forte endogamie des conseils d’administration français passe par la féminisation des instances dirigeantes. C’est seulement en élargissant socialement leur composition que nous mettrons à mal les « petits arrangements entre amis ou proches », qui sont fréquents entre des administrateurs se côtoyant dans plusieurs sociétés ! Cette « oligarchie de fait » est le fruit d’une longue tradition dont les femmes ont toujours été exclues. C’est donc presque mécaniquement que les mœurs sexistes d’antan se reproduisent aujourd’hui par le biais d’une consanguinité des détenteurs du pouvoir.

Voilà pourquoi nous proposons d’ouvrir les conseils d’administration aux femmes, à une hauteur minimale de 40 %, dans un délai de six ans. Cette mesure aura deux effets : d’une part, elle remédiera à une situation incompréhensible pour toutes ces femmes écartées des postes hiérarchiquement les plus élevés et, d’autre part, elle permettra une réorganisation profonde du système actuel, en mettant fin à son opacité et en favorisant une plus grande diversité de la composition des conseils d’administration, qui seront ainsi plus en phase avec la société actuelle.

La proposition de loi de mes collègues Nicole Bricq et Richard Yung est plus ambitieuse que celle de Mme Zimmerman puisqu’elle limite le cumul des mandats sociaux, étend le périmètre d’application de la loi aux entreprises qui emploient plus de 250 salariés et qui réalisent un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros, renforce les sanctions pouvant être appliquées en cas de non-respect des règles édictées.

Nous ne pouvons pas attendre que la société mute d’elle-même, surtout lorsque les milieux économiques ou financiers sont concernés. J’appelle donc l’ensemble des membres de notre Haute Assemblée à ne pas remettre à demain ce que nous pouvons faire aujourd’hui, c’est-à-dire à voter un texte ambitieux, mettant en place un cadre réellement contraignant pour lutter tout à la fois contre le cumul des mandats sociaux et pour une meilleure représentation des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises. Sinon, la situation ne changera jamais !

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