Avant même d’envisager les conditions générales de fonctionnement de notre système de retraite par répartition, le projet de loi prévoit la mise en place d’une nouvelle structure, que l’on peut présumer technocratique, pour le pilotage des régimes de retraite.
Comme la commission, je m’interroge sur le choix d’instaurer d’un tel comité de pilotage dont la composition est très proche de celle du COR, et alors que, notre collègue Yves Daudigny l’a rappelé, de nombreuses institutions existent déjà dans ce domaine. Je pense notamment à la MECSS.
En quoi les travaux et les initiatives de ce comité de pilotage pourront-ils aller jusqu’à imposer au Gouvernement de prendre toute mesure tendant à assurer, dans la plus pure logique comptable, l’équilibre financier des régimes de retraite ?
Ce comité interviendra dans ce que vous nommez le « pilotage », c'est-à-dire dans la gestion financière, des régimes de retraite singulièrement pour exiger du Gouvernement qu’il mette en œuvre, en cas de besoin, les mesures nécessaires au redressement financier. Quelle vision technicienne de l’évolution du système de retraite ! Et, surtout, quelle vision étroitement comptable de cette évolution ! Comme si tout n’était qu’affaire d’équilibre !
Mes chers collègues, mes propos choqueront sans doute certains d’entre vous, notamment ceux qui croient qu’il faut, en matière de protection sociale, tenir absolument les équilibres financiers : ce qui fait le déficit de l’assurance vieillesse, lequel n’a rien à voir avec celui de l’État et a fortiori encore moins avec la dette de l’État, c’est la distribution de revenus aux retraités. Ce que vous appelez des « dépenses », je le nomme, pour ma part, « revenus ». Je vous invite, mes chers collègues, à méditer ce point !
Oublier que les retraites constituent un revenu, c’est comme si l’on effaçait d’un trait de plume plus du cinquième de l’assiette de l’impôt sur le revenu et sans doute 15 % à 20 % de son rendement ! Autrement dit, pour peu que les retraites versées soient supérieures aux cotisations perçues, cela n’empêchera aucunement l’État d’encaisser, par la voie fiscale notamment, quelques compléments de recettes sur ce prétendu déficit.
Cela conduit bien sûr à s’interroger sur la raison d’être du comité de pilotage. Ce comité n’aura-t-il comme unique finalité, comme seul objectif, que de recommander des mesures d’économie ? Si tel est le cas, nous débattons d’un carcan de plus pour la protection sociale et les garanties collectives qu’elle offre.
En revanche, si ce comité est capable de prendre en compte l’ensemble des paramètres de la situation, c’est-à-dire d’être à la confluence des débats d’idées et ouvert aux propositions exprimées par l’ensemble des parties, alors il pourra peut-être servir à quelque chose.
Quoi qu’il en soit, de notre point de vue, rien ne peut remplacer la gestion démocratique du devenir des régimes de retraite. L’instauration d’un comité de pilotage des régimes de retraite n’œuvre pas en ce sens.