La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, je souhaite faire une mise au point concernant le scrutin public n° 16 sur l’article 6 du projet de loi portant réforme des retraites : M. Pierre Jarlier souhaitait voter contre et M. Denis Badré s’abstenir.
Acte vous est donné de cette mise au point, madame Morin-Desailly. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera à la suite de l’analyse politique du scrutin.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.
Mmes et MM. les sénateurs du groupe CRC-SPG, ceints de l’écharpe tricolore, se lèvent.
Monsieur le président, mes chers collègues, des millions de nos concitoyens descendent dans les rues de nos villes et notamment à Paris pour dire leur refus de voir leur retraite amputée de ses meilleures années. Qu’il me soit donc permis, ici, de saluer leur volonté et leur détermination et de leur exprimer la solidarité de notre groupe.
Si des manifestations aussi importantes sont rares, leur concomitance avec la discussion d’un projet de loi contesté l’est plus encore. Aussi, je souhaiterais, sous la forme d’un rappel au règlement fondé sur l’article 36, formuler une demande relative à l’organisation de nos débats.
Si cette requête est présentée par notre groupe CRC-SPG, je ne doute pas que de nombreux collègues y seront favorables. Nous savons en effet que beaucoup d’entre eux auraient souhaité être présents dans leurs circonscriptions pour participer aux manifestations qui s’y déroulent et pouvoir ainsi exprimer leur solidarité aux manifestants.
C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir suspendre nos travaux afin de permettre aux sénatrices et sénateurs qui le souhaitent d’être présents, dans la manifestation parisienne, aux côtés de nos concitoyens en lutte pour le retrait du projet de loi dont nous débattons. Tous les sondages montrent que, par-delà leur nombre, les manifestants expriment les préoccupations et les espoirs de près de 70 % de la population.
Continuer nos travaux comme si rien ne se passait dehors constituerait un manque de respect envers l’ensemble de notre peuple et tout particulièrement à l’égard des citoyennes et citoyens, engagés et actifs, qui n’hésitent pas à descendre dans la rue et à perdre une journée de salaire pour exprimer leurs craintes et leurs espoirs, leurs désaccords et leur colère, pour se faire entendre et être enfin écoutés.
À l’heure où de nombreux observateurs notent le divorce entre le peuple et ses représentants, une suspension de séance serait, selon nous, un geste dont la dimension démocratique n’échapperait à personne.
Monsieur le président, je souhaite que ma demande soit entendue comme l’avait été celle de notre collègue Gérard Longuet le 4 mai dernier.
Il obtenait alors une suspension de séance de plusieurs heures – nous ne vous en demandons pas autant ; nous souhaitons simplement une suspension de séance d’une heure – non pas pour manifester, vous vous en doutez, mais pour permettre aux sénateurs du groupe UMP de se rendre à la Présidence de la République.
Aussi, j’espère avoir la même réponse que celle qui avait été faite alors par le président de séance de l’époque, notre collègue Jean-Claude Gaudin, au président du groupe UMP : « Vous n’aurez pas de difficultés à me convaincre d’accéder à votre demande, monsieur Longuet. » La séance était alors suspendue à dix-sept heures, sans que le Sénat ait eu à se prononcer sur la modification de son ordre du jour.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Par conséquent, je vous demande solennellement de suspendre nos travaux pendant une heure. Il ne serait pas acceptable qu’il y ait deux poids deux mesures dans les décisions du président de séance : oui pour se rendre à l’Élysée, non pour rencontrer le peuple.
Applaudissements prolongés sur les travées du groupe CRC-SPG. – Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste ainsi que M. Mézard applaudissent également.
Monsieur le président, nous avons appris ce matin que M. le Président de la République aurait demandé le report de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, qui était prévue demain…
M. Jean-Pierre Sueur. … et à laquelle nous nous préparons avec assiduité depuis plusieurs jours. Cette information est surprenante. J’ai donc l’honneur de vous demander, au nom du groupe socialiste, si vous pouvez la confirmer. Si tel n’est pas le cas, comme nous connaissons la Constitution, nous aimerions que vous informiez le Sénat de l’autorité qui a décidé du report de cette commission mixte paritaire.
M. Alain Le Vern s’exclame.
Par ailleurs, vous n’ignorez pas que M. le président du Sénat a déclaré qu’il serait incompréhensible que cette réforme fût votée contre l’avis du Sénat.
Nous, nous considérons que, si la commission mixte paritaire est reportée, c’est peut-être en raison des difficultés à réunir une majorité en son sein.
Monsieur le président, nous pensons qu’il y aurait une autre solution, …
M. Jean-Pierre Sueur. … que vous-même et M. le président du Sénat, en vertu de votre influence, qui est grande
Marques d’approbation sur les travées de l ’ UMP.
Tout le monde le sait bien, dans les communes, les départements et les régions, cette réforme ne passe pas. Le conseiller territorial ne passe pas, …
Monsieur le président, nous aimerions également connaître les raisons du report de la commission mixte paritaire et les dispositions que vous comptez prendre pour que le projet de loi revienne devant le Sénat. Il serait très néfaste que cette réforme fût adoptée en l’état, ou contre l’avis exprimé par notre assemblée.
Par ailleurs, j’ai cru comprendre qu’il y avait quelque rapport entre la commission mixte paritaire et la question des retraites. Je souhaiterais savoir, monsieur le président, si tel est effectivement le cas.
Enfin, nous sommes plongés dans un abîme d’incompréhension et nous espérons que vous pourrez clarifier la situation, de façon que nous puissions comprendre ce qui se passe. En effet, concernant les retraites, nous avons assisté à des manœuvres, l’examen des articles 5 et 6 ayant été avancé.
Or, mes chers collègues, vous le savez, le résultat obtenu a été l’inverse de celui qui était recherché. En effet, je peux vous le dire, beaucoup de nos concitoyens ont été extrêmement fâchés d’apprendre ce matin que le Sénat avait voté le report à 67 ans de la retraite à taux plein ; ils sont d’ailleurs très nombreux à manifester cet après-midi.
Monsieur le président, l’histoire de la commission mixte paritaire sur les collectivités territoriales s’ajoutant à tout cela, nous voudrions vraiment y voir clair sur les intentions du Gouvernement et du Président de la République et, surtout, sur celles du président du Sénat que vous représentez en cet instant.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour un rappel au règlement.
Ah ! sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le secrétaire d'État, il suffit de regarder la télévision, de lire les dépêches ou tout simplement d’écouter ce que nos collègues nous font remonter de leurs départements : vous avez mis dans la rue la France qui souffre, la France qui se lève tôt, la France des plus démunis, la France des salariés, avec un nombre de manifestants quasi inégalé.
Le président Bel me rapportait que l’on dénombrait 15 000 manifestants à Foix, soit 20 % de la population de l’Ariège.
M. Mirassou me disait qu’il y avait, à Toulouse, autant de manifestants qu’en mai 2002, si vous voyez à quoi je fais allusion...
Mme Cartron me racontait qu’il y avait un monde fou à Bordeaux ce matin
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx s’exclame.
Monsieur le secrétaire d’État, nous vous le disons depuis des heures, jour et nuit, votre réforme ne passe pas auprès des Français. Vous n’avez pas su débattre avec eux, vous n’avez pas su négocier avec les syndicats, vous avez même bafoué le Parlement.
Au moment où je vous parle, nos concitoyens vous font une démonstration de force dans la rue. Or, pour que la République fonctionne bien, elle doit marcher sur ses deux jambes : la démocratie politique et la démocratie sociale. Aujourd’hui, c’est la démocratie sociale qui s’exprime !
Notre groupe s’associe à la demande de Mme la présidente Borvo Cohen-Seat.
M. Robert Hue applaudit.
M. Didier Guillaume. … afin de montrer que le Sénat ne siège pas dans une bulle et qu’il est en phase avec le peuple, avec la démocratie sociale. Cette sage décision permettrait à ceux qui nous regardent à la télévision ou à ceux qui sont dans la rue de se rendre compte que le Sénat travaille tranquillement sur des sujets de société importants.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Mes chers collègues, je vais d’abord répondre à notre collègue Jean-Pierre Sueur, qui a évoqué la commission mixte paritaire.
Je précise simplement que M. Warsmann, président de la commission des lois à l’Assemblée nationale et président de la commission mixte paritaire, a décidé de reporter la réunion de la commission mixte paritaire à début novembre.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
M. Warsmann n’est pas président de la commission mixte paritaire : celle-ci ne s’est pas réunie et il n’a donc pas encore été élu !
Aux termes de la Constitution, c’est le Gouvernement qui convoque la commission mixte paritaire, ce n’est pas le président de la CMP !
Et c’est la commission mixte paritaire, une fois réunie, qui élit son président !
Mes chers collègues, à la suite du rappel au règlement de M. Sueur, je donne l’information que j’ai en ma possession.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, d’après la Constitution, c’est le Gouvernement qui convoque la commission mixte paritaire, ce n’est pas le président de la commission des lois !
M. le président. Mme la présidente Borvo Cohen-Seat et M. Guillaume ont demandé une suspension de séance symbolique. Bien qu’il s’agisse d’un ordre du jour prioritaire fixé par le Gouvernement, le président Larcher, que j’ai consulté pendant les rappels au règlement, souhaite que le Sénat suspende ses travaux pendant trente minutes, par conséquent jusqu’à quinze heures quinze.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et sur quelques travées du groupe socialiste.
La séance, suspendue à quatorze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures vingt, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
La séance est reprise.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour un rappel au règlement.
Mon rappel au règlement est fondé sur les articles 69 ter et 70 du règlement du Sénat.
Je suis membre de la commission mixte paritaire sur la réforme des collectivités territoriales.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Or, pour ma part, je n’ai strictement rien reçu ! C’est également le cas, je pense, de mes collègues qui sont également membres de cette commission mixte paritaire. Le texte de l’article 70 du règlement du Sénat donnant pouvoir de convocation au doyen d’âge, je voudrais savoir, monsieur le président, comment se fait-il que les membres de cette commission mixte paritaire n’aient pas été informés. Quand serons-nous convoqués de nouveau et dans quelles conditions ?
Il est anormal d’apprendre le report de cette commission mixte paritaire par une dépêche AFP ou par des bruits de couloirs : nous sommes des parlementaires…
M. Jacques Mézard. … et en tant que tels nous devons être normalement informés !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe CRC-SPG.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant la suspension de cette séance, nous avons entendu une expression présidentielle concernant la suite de la procédure législative intéressant la réforme des collectivités territoriales. Notre collègue Jean-Pierre Sueur avait bien voulu questionner la présidence sur le sujet évoqué par notre ami Jacques Mézard.
Je dois dire que la réponse qui nous a été fournie sur le plan de la procédure m’a précipité dans la confusion car j’ai cru que l’article 89 de la Constitution intéressant la révision constitutionnelle avait été utilisé sans que je ne m’en sois personnellement aperçu.
Si j’évoque ce point, c’est parce que quand on parle de commission mixte paritaire, il faut se référer au texte constitutionnel, en l’occurrence l’article 45, deuxième alinéa. Celui-ci prévoit que, lorsque nous avons affaire à un projet de loi – ce qui est le cas – c’est le Premier ministre qui a la faculté de provoquer la réunion d’une telle commission. Ce n’est ni un président de commission, ni un doyen ! La mise en œuvre de cette faculté se fait de manière obligatoire par l’intermédiaire du doyen.
Nous avons donc, d’un côté, un Premier ministre titulaire d’une compétence discrétionnaire et, de l’autre, le doyen – cela figure à l’article 70 du règlement du Sénat – qui dispose d’une compétence obligatoire. Ce n’est pas la lecture qui a été proposée par l’expression présidentielle il y a quelques minutes et c’est pourquoi je me permets, monsieur le président, d’intervenir, au nom du règlement.
Nous voyons bien le pouvoir du Premier ministre : lorsqu’il s’agit d’un projet de loi, il a la faculté de provoquer – il n’en est pas obligé – la réunion de la commission mixte paritaire. Mais vous comprendrez, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que pour la sérénité de nos débats il est important qu’il y ait une transparence sur la procédure, car celle-ci est une condition fondamentale de la démocratie.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Au sujet de la transparence, je vous renvoie à l’article 45 de la Constitution : « le Premier ministre a – puisqu’il s’agit d’un projet de loi – la faculté de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion ». Ensuite, l’article 70 du règlement du Sénat, monsieur Mézard, dispose : « les commissions mixtes paritaires se réunissent, sur convocation de leur doyen, alternativement par affaire, dans les locaux de l’Assemblée nationale et du Sénat. Elles fixent elles-mêmes la composition de leur bureau. Elles suivent dans leurs travaux les règles ordinaires applicables aux commissions. En cas de divergence entre les règlements des deux assemblées, celui de l’assemblée où siège la commission prévaut » ; dans ce cas précis, ce sera l’Assemblée nationale. En l’occurrence, c’est bien de l’Assemblée nationale que nous avons reçu copie de la convocation signée dûment par le doyen d’âge à la fin de la matinée. Je souhaitais vous apporter ces éléments réglementaires.
Acte vous est donné, mes chers collègues, de vos deux rappels au règlement.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites [projet n° 713 (2009-2010), texte de la commission n° 734 (2009-2010), rapports n° 733, 727 et 721 (2009-2010)].
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’article 1er.
Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section 8 ainsi rédigée :
« Section 8
« Comité de pilotage des régimes de retraite
« Art. L. 114-4-2. – I. – Le Comité de pilotage des régimes de retraite veille au respect des objectifs du système de retraite par répartition définis au quatrième alinéa de l’article L. 161-17 A du code de la sécurité sociale.
« II. – Chaque année, au plus tard le 1er juillet, le comité rend un avis sur la situation financière des régimes de retraite, sur les conditions dans lesquelles s’effectue le retour à l’équilibre du système de retraite à l’horizon 2018 et sur les perspectives financières au-delà de cette date.
« Lorsque le comité considère qu’il existe un risque sérieux que la pérennité financière du système de retraite ne soit pas assurée, il propose au Gouvernement et au Parlement les mesures de redressement qu’il estime nécessaires.
« Art. L. 114-4-3. – Le Comité de pilotage des régimes de retraite est composé de représentants de l’État, des députés et des sénateurs membres du Conseil d’orientation des retraites, de représentants des régimes de retraite légalement obligatoires, de représentants des organisations d’employeurs les plus représentatives au plan national, de représentants des organisations syndicales de salariés représentatives au plan national interprofessionnel et de personnalités qualifiées.
« Un décret définit la composition et les modalités d’organisation de ce comité. Il précise les conditions dans lesquelles sont représentés les régimes de retraite dont le nombre de cotisants est inférieur à un seuil qu’il détermine.
« Le comité s’appuie sur les travaux du Conseil d’orientation des retraites. Les organismes chargés de la gestion d’un régime de retraite légalement obligatoire ou du régime d’assurance chômage communiquent au comité les éléments d’information et les études dont ils disposent et qui sont nécessaires au comité pour l’exercice de ses missions. »
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ferai une intervention très courte sur un point précis qui mérite une attention toute particulière dans le cadre du futur comité de pilotage des régimes de retraite que doit créer l’article 1er.
Les organisations syndicales ont joué un rôle en prenant part, quoi qu’on en dise, au débat sur l’avenir et la pérennité de notre système de retraite. Elles ont pris position et éclairé la représentation nationale.
Toutefois, il est dommageable que les régimes complémentaires, fédérés au sein du groupement d’intérêt public AGIRC-ARRCO depuis 2002, aient été passés sous silence. Quelque 30 millions de salariés cotisent à ces régimes dont 18, 5 millions à l’ARRCO. L’équilibre de ces régimes est vital pour les retraites : les pensions complémentaires versées représentent en moyenne un quart de la pension totale pour les non cadres et trois quarts ou plus pour les cadres.
Évidemment, d’un point de vue juridique, les caisses sont autonomes, ce qui explique la rigueur de leur gestion. Les comptes présentés sont assainis et encore en excédent en 2009, avec une réserve plus que confortable. Je vous ferai grâce des chiffres. Cette gestion est le fruit d’ajustements permanents et annuels. Elle est de nature paritaire puisque tous les syndicats, hormis la CGT, en font partie.
Avoir relevé l’âge de la retraite était une nécessité pour le régime de base, alors il conviendra que les organisations syndicales, présentes au comité de pilotage, agissent avec la rigueur dont elles ont déjà su faire preuve. D’ailleurs, elles ne s’opposent pas aujourd’hui aussi catégoriquement à la réforme du régime de base. Il y va d’un principe de cohérence, de réalisme et de responsabilité envers les générations à venir, et il vaudrait mieux éviter de les manipuler.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Guy Fischer. Nous laissons à Mme Bernadette Dupont la responsabilité de ses propos, que nous ne partageons pas
Marques d’ironie sur les travées de l ’ UMP.
L’article 1er, bien que considérablement modifié par rapport à sa version initiale, prévoit la création d’un comité de pilotage, dont les missions sont exclusivement – parlons clairement ! – financières.
Ce comité, dont on nous annonce qu’il sera présidé par le ministre en charge de la sécurité sociale – ce qui nous inquiète pour ce qui est de son indépendance –, devrait agir en fait sur les régimes de retraite comme les agences de notation agissent sur les comptes publics. Autant dire qu’il y a de quoi s’inquiéter !
En réalité, et les explications du Gouvernement sur la nécessité de créer ce comité nous le confirment, l’un de ses chantiers prioritaires sera de travailler à la fusion des 38 régimes différents qui existent aujourd’hui. Bien sûr, nous en sommes conscients, cela ne se passera pas du jour au lendemain, mais le but est bien fixé et je crois que nous devons nous en méfier. Cet alignement, nous le savons, se fera vers le bas puisque, dès qu’il s’agit de réformer, pour la majorité, pour l’UMP et pour le Président de la République, c’est toujours la règle de la régression qui s’applique !
M. Paul Blanc s’exclame.
Ce qui est surprenant, à la lecture de l’article 1er, c’est que les retraités, leurs conditions de vie, le montant de leurs pensions sont totalement éludés. Cela est d’autant plus choquant quand on le compare à l’article 1er bis A. Celui-ci se limite à un vœu pieu, manque de précision, n’a aucune portée contraignante, alors que l’article 1er, lui, est des plus clairs. Le comité de pilotage veille à l’équilibre du système sans se soucier des conséquences sur les assurés et les retraités.
En réalité, l’équilibre financier est votre seule préoccupation. Et cette recherche de l’équilibre n’a que deux objectifs : d’une part, éviter d’attirer l’attention des agences de notation et, d’autre part, satisfaire les plus libéraux, qui appellent de leurs vœux une privatisation de tout ce qui relève aujourd’hui de la solidarité.
Nous considérons d’ailleurs qu’une telle disposition constitue une étape supplémentaire vers l’instauration d’un régime par points. Et si nous en sommes convaincus, c’est parce que Robert Holzmann, expert de la Banque mondiale, s’en est fait depuis de longues années l’ardent propagandiste dans son article intitulé Les promesses et les perspectives offertes par les systèmes de comptes individuels.
À l’opposé de votre démarche, nous proposons, pour notre part, la création d’une maison commune des régimes de retraites, qui réaffirmerait la propriété collective des retraites aux assurés et aurait pour mission de garantir un financement stable et solidaire des régimes de retraites, afin de permettre de doter tous les régimes d’un socle commun de droits, naturellement supérieurs aux dispositions qui existent déjà.
Mais, par-dessus tout, alors que votre comité de pilotage créera de l’anxiété, notamment au regard de la place que vous accordez aux marchés financiers, notre proposition, partagée avec la CGT, redonne confiance aux salariés, qui sauront alors qu’ils disposent enfin d’un outil leur garantissant le droit à la retraite.
Là où votre projet prévoit d’offrir une place importante à ce que vous appelez des « personnalités qualifiées », notre proposition vise à redonner une place fondamentale aux représentants des salariés. Il s’agit de faire de cette « maison commune » l’institution au service des salariés et des assurés pour leur garantir ce dont ils manquent aujourd’hui, c'est-à-dire de pensions à la hauteur de leurs besoins.
Ce qui vous chagrine avant tout dans notre proposition, c’est qu’elle revient à l’origine de la création de la sécurité sociale.
C’est que la maison commune des retraites, c’est la maison des salariés pour les salariés !
C’est la maison qui décide de l’orientation de la partie des cotisations sociales destinées à l’assurance vieillesse, ce qui prive le patronat de la possibilité que vous lui donnez depuis des années de jouer avec celles-ci, comme si elles lui appartenaient. Mais cette posture est fausse.
M. Guy Fischer. Et c’est bien parce que les cotisations sociales appartiennent aux salariés qu’il leur faut un outil pour les gérer et en décider l’orientation !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
; je parle évidemment de celui qui a été imaginé par René Goscinny et dessiné par Jean-Jacques Sempé.
Voilà une réflexion qui se vérifie parfaitement à la lecture de l’article 1er du présent projet de loi, qui prévoit la création d’un nouveau comité, cette fois de pilotage des régimes de retraite. J’ai en tête la création d’autres comités, comme le dernier en date, le Comité national de pilotage des agences régionales de santé, le COPIL, institué au mois de janvier 2009.
Nul ne conteste la relative complexité de notre système de retraite, que la proportion importante de polypensionnés parmi les retraités, 38 % en 2004, et sa tendance à la hausse confirment, tout comme le fait qu’un retraité liquide sa pension auprès, en moyenne, de trois organismes différents.
L’unification du système et des régimes est dans tous les esprits. Telles sont les raisons présentées à l’appui de la proposition de création de ce comité de pilotage des régimes de retraite.
De la part d’un gouvernement qui annonce à tout bout de champ vouloir tout simplifier – on ne compte plus les projets de loi portant simplification de ceci ou de cela, au point que l’on ne s’y retrouve pas aisément ! – et limiter les dépenses, il est pour le moins paradoxal de proposer d’ajouter une nouvelle structure à toutes celles, nombreuses et compétentes, qui existent déjà en la matière.
Ce comité viendrait s’ajouter au Conseil d’orientation des retraites, le COR, à la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, à la Cour des comptes, à la Commission des comptes de la sécurité sociale, qui fournit l’ensemble des données des trente-huit caisses de retraites, à la Commission de garantie des retraites, créée en 2003, même si elle n’a rendu qu’un seul rapport public au mois d’octobre 2007, ou au GIP Info Retraite...
On s’interroge donc sur son utilité. S’il s’agit d’un comité technique d’expertise et de débats, qu’en est-il alors du COR, dont c’est déjà le rôle ?
M. le ministre a qualifié cet organisme d’« outil important » pour les objectifs qu’il veut lui assigner ; un outil important auquel un gouvernement assigne des objectifs est un outil politique !
Et tel est bien son rôle ! En effet, selon ce qui est prévu, c’est sur la base d’un rapport du COR que le comité serait consulté par le Gouvernement sur un projet de réforme destiné à maintenir l’équilibre des régimes au-delà de 2020. Ce rôle proprement politique, celui de se prononcer sur un projet de loi, qui figurait au deuxième alinéa du III de l’article 1er a simplement été dissocié et repris presque in extenso sous l’article 1er bis A nouveau. Il subsiste donc dans le texte qui nous est soumis, et nos interrogations avec…
Quelle légitimité ce comité a-t-il pour que puisse lui être attribué un tel pouvoir, qui relève clairement et exclusivement des prérogatives constitutionnelles de l’exécutif et du législatif ?
Doter un simple comité d’un tel rôle n’est rien de moins que procéder à un démembrement du processus politique normal et revient à départir les institutions légitimes de leur rôle décisionnel. C’est un déni de l’action politique !
Les modifications adoptées par notre commission ont le mérite de clarifier ce rôle en inscrivant d’abord les objectifs généraux du système de retraite, sur lesquels le projet donnait mission au comité de veiller, au titre de ceux de l’assurance vieillesse.
Sans aborder maintenant l’examen de ces objectifs – je pense notamment à celui qui vise le « maintien » et non l’« amélioration » du niveau de vie des assurés –, ils trouvent effectivement mieux leur place au niveau déclaratif des principes généraux. On voyait d’ailleurs mal de quels moyens ce comité de pilotage pouvait disposer pour faire respecter ces objectifs.
Mais la rédaction adoptée par notre commission, qui conforte clairement le rôle d’alerte de ce comité de pilotage, souligne plus encore par contrecoup son absence de légitimité, particulièrement à l’égard de la présence de « personnalités qualifiées » dont on ne sait pas à quel titre particulier elles seront habilitées à siéger dans ce comité politique.
Quant à imaginer qu’un tel comité – comme il sera apparemment présidé par le ministre chargé de la sécurité sociale, on aboutira à l’aberration selon laquelle le Gouvernement se consultera lui-même – aurait pour seul objet de servir d’alibi à qui ne souhaiterait pas assumer pleinement la responsabilité d’une réforme dont on imagine le projet, il n’y a qu’un pas !
Aussi, parce ce comité est inutile et, surtout, illégitime au regard des pouvoirs qui lui seraient reconnus, nous demanderons la suppression de l’article 1er.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.
Sur l’article 1er, je constate que nous repartons sur les mêmes bases que naguère, en 2003.
En effet, ce qui est extraordinaire dans notre débat, c’est que ce qui devrait être considéré comme une avancée, à savoir l’allongement de l’espérance de vie, devient avec le présent projet de loi la justification à une régression délibérée de la qualité de la vie de nos concitoyens.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Assurément, la réforme aurait dû être une occasion de corriger de criantes inégalités, qui sont aujourd’hui insupportables, s’agissant de l’épuisement des travailleurs manuels, des pensions squelettiques des agriculteurs et des conséquences dommageables pour les femmes de l’arrêt d’activité pour cause de maternité dans le calcul de leurs allocations, malgré les quelques miettes attribuées jusqu’ici.
Au lieu de tout cela, nous avons encore une fois un texte sans ambition, qui ne fait qu’effleurer les grandes questions sans les traiter véritablement.
En effet, ce projet de loi passe à côté du problème fondamental. L’avenir de notre système de retraite nous invite à engager une réflexion globale, afin de réduire la pauvreté, de développer les possibilités de choix individuels et de pérenniser le système par répartition. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut dépenser sans compter ni réformer.
Or vous imposez une solution uniforme, sans distinguer les différentes catégories de retraités, qui n’ont pas forcément les mêmes trajectoires de vie. En réalité, il y a ici une disparition de la décision politique au profit d’une pensée bureaucratique.
L’article 1er en est ainsi le meilleur exemple. Il s’agit, une fois de plus, d’instituer un comité, en l’occurrence de pilotage des retraites. Sa création correspond à une manie paresseuse : ajouter un organisme en pensant résoudre les problèmes. Une question se pose alors. Quelles seront les fonctions ou les missions respectives des ministères, de la MECSS, mais aussi du COR et des conseils de surveillance des caisses d’assurance vieillesse, qui ne se réunissent d’ailleurs plus ? On ne le sait pas...
À cet égard, vous ensemencez régulièrement des agences, des instituts ou des observatoires divers. Vous définissez leurs missions, leur organisation, puis vous vous désintéressez progressivement de leurs rapports, dont les conclusions sont souvent dérangeantes pour vous. Il en sera d’ailleurs de même avec ce comité de pilotage des régimes de retraite sans réel pouvoir décisionnel.
C’est pourquoi nous demanderons évidemment la suppression de l’article 1er.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le comité de pilotage, créé par l’article 1er du projet de loi et dont la commission des affaires sociales a appelé à renforcer le caractère opérationnel et stratégique, aura un rôle crucial pour guider la réforme de notre système de retraite. Il devra veiller au bon respect de ses objectifs en termes tant d’équité, de solidarité intergénérationnelle et de niveau de vie des retraités que de pérennité financière.
La question de sa composition est importante, car il s’agit de créer une enceinte commune pour les partenaires sociaux, parlementaires et personnalités qualifiées. Leur rôle sera bien sûr de représenter la variété des intérêts de nos concitoyens, mais aussi, et surtout, d’apporter une expertise affinée pour piloter sur le long terme un système de retraite très complexe.
À cet égard, la comparaison internationale est un outil très riche dont nous ne devrions surtout pas nous priver. Elle a déjà été en partie mobilisée dans les travaux préparatoires. La délégation aux droits des femmes s’est ainsi intéressée à la pratique du splitting en Allemagne. Mais nous devons aller plus loin. Le benchmarking et l’étude des « meilleures pratiques » peuvent apporter des éléments nouveaux, qui ne seront réellement utiles que s’ils sont rapportés à notre culture française de la protection sociale.
Pour faire ce pont entre l’international et notre régime de retraite, les représentants des Français de l’étranger me semblent particulièrement bien placés, du fait de leur expérience quotidienne sur le terrain. Tel est le sens d’un amendement que je défendrai devant vous tout à l’heure.
Par ailleurs, l’enjeu d’une meilleure prise en compte des Français de l’étranger dans la réforme du système de retraite va bien au-delà d’une expertise spécifique. Je souhaiterais que nous gardions cet élément à l’esprit : les Français qui vivent hors de nos frontières, de manière transitoire ou permanente, ne peuvent pas être exclus de notre système de protection sociale. Il y va non seulement de leurs droits les plus élémentaires, mais aussi de l’intérêt financier de notre système de retraite à élargir sa base d’actifs cotisants.
Actuellement, leur adhésion au système de retraite sur la base du volontariat soulève des difficultés administratives parfois considérables. Je pense notamment à la nécessité de produire de manière périodique des certificats de vie, certes légitime dans un objectif de lutte contre la fraude, mais qui pourrait faire l’objet de simplifications.
Je songe aussi au fait que certaines catégories aient à passer par la Caisse des Français de l’étranger et que d’autres aient pour interlocuteur direct la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, lors de l’affiliation au système de retraite. J’ai d’ailleurs déposé un amendement en ce sens, et nous en discuterons dans les prochains jours.
Une meilleure information des expatriés est indispensable, pour se repérer dans un système aussi complexe, et pour comprendre les conséquences d’une expatriation, même de courte durée, sur la future pension de ces expatriés et adapter leur comportement en conséquence.
Nous devons aussi en être conscients, l’expatriation introduit une asymétrie au sein des familles. La délégation aux droits des femmes a analysé les difficultés auxquelles les femmes sont confrontées sur le plan de la retraite. Pour ma part, j’y ai évoqué la question des conjoints d’expatriés, qui sont certes majoritairement des femmes, mais aussi de plus en plus souvent des hommes.
Ces conjoints rencontrent souvent d’importantes difficultés pour trouver un poste dans le pays de résidence et sont parfois même confrontés à l’interdiction d’y exercer une activité professionnelle. Durant l’expatriation, l’un des parents est appelé à jouer, plus encore qu’en métropole, un rôle essentiel auprès des enfants, qui sont parfois confrontés à la difficulté de suivre une scolarisation à la française. Cet élément contribue aussi à expliquer le faible taux d’activité professionnelle parmi les conjoints d’expatriés.
De retour en France, la réinsertion professionnelle est souvent difficile après une interruption de carrière de plusieurs années. Bien évidemment, ces carrières fragmentées ont une incidence non négligeable sur les retraites.
L’enjeu est, bien sûr, celui de l’inégalité entre les femmes et les hommes. J’ai souligné devant la délégation aux droits des femmes, qui a repris cet élément dans ses recommandations, la nécessité d’améliorer l’information des candidats à l’expatriation et de leurs conjoints afin que ceux-ci prennent leurs décisions en connaissance de cause et pensent à souscrire aux dispositifs leur permettant d’assurer leur future retraite.
C’est aussi le dynamisme de notre commerce extérieur et celui de notre diplomatie d’influence qui sont en jeu. Donner aux expatriés les moyens de partir sans déchirer leur couple et leur famille, c’est donner à la France les moyens de ses ambitions internationales. Le système de retraite peut y contribuer.
Alors que de plus en plus de Français, notamment parmi les jeunes qui rencontrent des difficultés à trouver un emploi en adéquation avec leur formation en France, choisissent l’expatriation, il est essentiel que leurs intérêts soient pris en compte par la présente réforme des retraites. La présence de l’un de leurs représentants au sein du comité de pilotage irait dans ce sens.
Je tenais à vous rappeler ces nécessités.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Il est difficile de revenir à l’article 1er comme si nous débutions la discussion du projet de loi alors que le Gouvernement a fait passer en force les articles 5 et 6, qui sont emblématiques des reculs que vous souhaitez imposer à toutes les générations pour qui la retraire à 60 ans, après une vie de labeur, était une aspiration forte.
L’article 1er est à l’image de cette réforme : il est une vaste mascarade pour dissimuler votre volonté de remettre en cause un siècle de conquêtes !
Les grèves de 1995 contre le plan Juppé ou celles de 2003 contre la réforme Balladur, de même que le mouvement social actuel dont vous vous efforcez de ne pas entendre les revendications, montrent le fort attachement de nos compatriotes à la sécurité sociale et à notre système de retraite.
À juste titre, ces solidarités leur apparaissent comme un des fondements de notre société qui doit être sauvegardé. Un socle commun pour l’ensemble de notre société, affirmé en 1945, mais dont les fondations ont été posées deux siècles plus tôt pour certaines professions : marins, mineurs, cheminots, fonctionnaires. Un système général a été progressivement mis en place au travers de trois lois : celle de 1910 sur les retraites ouvrières et paysannes, celle de 1930 sur les assurances sociales et, enfin, celle sur la sécurité sociale.
Je vous livre ces précisions historiques, mes chers collègues, pour vous montrer que la réforme gouvernementale va à l’encontre de tous les progrès réalisés depuis un siècle en matière de retraite. Ce n’est pas seulement un système et des conquêtes ouvrières que ce projet de loi attaque : il remet en cause toute l’histoire sociale de notre pays !
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
J’en veux pour preuve – mes collègues de la majorité si prolixes en citations lors de la discussion générale me pardonneront de faire à mon tour une citation – cet extrait du Conseil national de la Résistance qui prévoyait « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés », autrement dit une couverture de l’ensemble des risques sociaux pour tous !
Laissons l’histoire pour nous préoccuper du présent. Je tiens à vous dire, monsieur le secrétaire d'État, que les énoncés du projet de loi et de l’article 1er me heurtent profondément.
Au fil des alinéas, vous égrenez les expressions d’équité du système de retraite, de pérennité, d’annulation des écarts de pensions entre les hommes et les femmes ou encore de retour à un équilibre financier, garanti jusqu’en 2018 seulement. Ce sont de belles perspectives, mais, malheureusement, vous n’apportez aucune solution ! Je pense notamment à tous les jeunes inquiets pour leur avenir, plus particulièrement aux jeunes filles, qui observent déjà les inégalités subies par leurs mères et qui savent que rien ne changera avec ce texte et même que la situation s’aggravera.
Monsieur le secrétaire d'État, cette nouvelle réforme est une occasion perdue de donner confiance à nos concitoyennes, de leur donner une espérance dans l’avenir, de leur permettre de connaître l’âge auquel elles pourront partir à la retraite et le niveau de pension auquel elles auront droit. C’est une occasion perdue de les rassurer sur le futur réservé à un régime de retraite jusqu’à présent fondé sur la solidarité intergénérationnelle et non sur la capitalisation.
L’article 1er témoigne de votre volonté comptable de faire des économies, d’envoyer, pour reprendre les termes employés par la ministre de l’économie, « aux marchés financiers les bons signaux » et de faire toujours et encore payer les seuls salariés.
Dès cet article 1er, vous fixez une nouvelle échéance en 2018 pour revoir les bornes d’âge. Doit-on comprendre qu’en 2018 un nouveau recul de l’âge de départ à la retraite attend l’ensemble de la société, à un moment où il serait indispensable de rétablir la confiance en notre système de retraite par répartition ?
Que dire du comité de pilotage que vous souhaitez créer ? Ce comité sera en fait un simulacre, là encore, de concertation ou de sauvegarde du système par répartition !
À la lecture des différents alinéas de la section 8, nous décelons les intentions cachées dans la création de ce comité, certains mots masquant les mauvais coups à venir. Pour s’en persuader, il suffit de regarder les missions confiées à ce comité, notamment à l’alinéa 6 sur « les risques sérieux pour la situation financière des régimes de retraite ».
Comment ne pas percevoir vos funestes desseins derrière ces termes ?
Ce faisant, vous nous montrez encore une fois combien la solidarité est mise à mal dans notre pays, et combien vous méprisez les solidarités sociales et les revendications des citoyens. Cette réforme ne garantit pas à long terme le financement et la pérennité des retraites. En revanche, elle aggrave les inégalités en faisant peser sur les salariés l’essentiel des efforts et en pénalisant encore plus les femmes.
Ces valeurs d’injustice sociale et de profits pour les plus riches ne sont pas les nôtres.
Les membres du groupe CRC-SPG et moi-même réaffirmons que le droit à la retraite est un droit fondamental et que notre système de retraite, fondé sur la solidarité entre les générations, est un élément constitutif du pacte social qui ne saurait être remis en cause !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.
Avant même d’envisager les conditions générales de fonctionnement de notre système de retraite par répartition, le projet de loi prévoit la mise en place d’une nouvelle structure, que l’on peut présumer technocratique, pour le pilotage des régimes de retraite.
Comme la commission, je m’interroge sur le choix d’instaurer d’un tel comité de pilotage dont la composition est très proche de celle du COR, et alors que, notre collègue Yves Daudigny l’a rappelé, de nombreuses institutions existent déjà dans ce domaine. Je pense notamment à la MECSS.
En quoi les travaux et les initiatives de ce comité de pilotage pourront-ils aller jusqu’à imposer au Gouvernement de prendre toute mesure tendant à assurer, dans la plus pure logique comptable, l’équilibre financier des régimes de retraite ?
Ce comité interviendra dans ce que vous nommez le « pilotage », c'est-à-dire dans la gestion financière, des régimes de retraite singulièrement pour exiger du Gouvernement qu’il mette en œuvre, en cas de besoin, les mesures nécessaires au redressement financier. Quelle vision technicienne de l’évolution du système de retraite ! Et, surtout, quelle vision étroitement comptable de cette évolution ! Comme si tout n’était qu’affaire d’équilibre !
Mes chers collègues, mes propos choqueront sans doute certains d’entre vous, notamment ceux qui croient qu’il faut, en matière de protection sociale, tenir absolument les équilibres financiers : ce qui fait le déficit de l’assurance vieillesse, lequel n’a rien à voir avec celui de l’État et a fortiori encore moins avec la dette de l’État, c’est la distribution de revenus aux retraités. Ce que vous appelez des « dépenses », je le nomme, pour ma part, « revenus ». Je vous invite, mes chers collègues, à méditer ce point !
Oublier que les retraites constituent un revenu, c’est comme si l’on effaçait d’un trait de plume plus du cinquième de l’assiette de l’impôt sur le revenu et sans doute 15 % à 20 % de son rendement ! Autrement dit, pour peu que les retraites versées soient supérieures aux cotisations perçues, cela n’empêchera aucunement l’État d’encaisser, par la voie fiscale notamment, quelques compléments de recettes sur ce prétendu déficit.
Cela conduit bien sûr à s’interroger sur la raison d’être du comité de pilotage. Ce comité n’aura-t-il comme unique finalité, comme seul objectif, que de recommander des mesures d’économie ? Si tel est le cas, nous débattons d’un carcan de plus pour la protection sociale et les garanties collectives qu’elle offre.
En revanche, si ce comité est capable de prendre en compte l’ensemble des paramètres de la situation, c’est-à-dire d’être à la confluence des débats d’idées et ouvert aux propositions exprimées par l’ensemble des parties, alors il pourra peut-être servir à quelque chose.
Quoi qu’il en soit, de notre point de vue, rien ne peut remplacer la gestion démocratique du devenir des régimes de retraite. L’instauration d’un comité de pilotage des régimes de retraite n’œuvre pas en ce sens.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 1er du projet de loi forme un ensemble cohérent avec les démarches engagées pour priver le Parlement de ses prérogatives.
Avec ce gouvernement, nous ne vivons qu’au rythme de la procédure accélérée qui oblige à limiter et à précipiter les travaux des deux assemblées.
Soumettre des textes au Parlement constitue pour vous non pas un obstacle – vous avez une majorité de droite et des centristes obéissants –, mais un exercice que vous méprisez, c’est du moins ainsi que je ressens les choses.
Dernier exemple en date : en appelant en priorité les articles 5 et 6, cœur symbolique de la réforme, vous avez méprisé notre institution afin que le vote de ces articles – qui n’est en rien définitif, je vous le rappelle – précède les grandes manifestations. Pour votre information, on dénombre aujourd'hui, selon les syndicats, entre 4 millions et 5 millions de manifestants !
Cet article 1er, qui s’inscrit dans le droit fil du mépris que vous témoignez aux représentants du peuple, a pour objet de créer un comité de pilotage des régimes de retraite afin de veiller au respect des objectifs du système de retraite par répartition
Or, selon moi, le Gouvernement et le Parlement sont déjà chargés de ces missions. Nous n’avons pas besoin d’un tel comité. Nous devons en effet prendre les décisions permettant de garantir la pérennité financière et l’équité des régimes de retraite par répartition, ce que ne parvient d’ailleurs pas à faire ce texte.
Je suis favorable au contrôle législatif des mesures correctrices concernant les régimes de retraite, d’autant plus que nous disposons déjà de plusieurs organismes d’appui à la réflexion, comme le Conseil d’orientation des retraites.
La structure supplémentaire que vous proposez de créer n’a qu’un seul objet : créer le brouillard, instrumentaliser l’illisibilité, brouiller les pistes et donner une apparence d’objectivité à des mesures partisanes et idéologiques.
C’est pourquoi je m’oppose à cet article 1er, comme à l’ensemble du projet de loi, et je voterai, avec mon groupe, l’ensemble des amendements de suppression.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jacques Mézard applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la lecture des textes relatifs à l’article 1er, qu’il s’agisse du projet de loi ou du rapport de M. Leclerc, nous apprend que le comité de pilotage des régimes de retraite aura une double fonction.
D’une part, il devra suivre la mise en œuvre de la réforme en assurant la pérennité financière du système de retraite. D’autre part, il devra veiller à l’équité en maintenant un niveau de vie satisfaisant.
Or ce rôle important fait déjà partie des missions du COR. On crée donc une organisation doublon, qui empiétera sur les fonctions d’une autre structure.
Par ailleurs, veiller à l’équité et à la pérennité financière est, à mes yeux, la fonction première du Parlement. Veut-on par la présente structure nous dessaisir de nos prérogatives ? Il fallait sans doute adjoindre des parlementaires à cette structure. Mais pourquoi ne pas purement et simplement la supprimer puisque son intérêt n’est pas prouvé ? J’ai tenté de démontrer que la création d’un tel comité est inutile et que, concernant sa fonction, il ferait double emploi, et ce dans un contexte d’économies budgétaires. Il serait donc souhaitable de supprimer cette instance.
Au final, j’attire votre attention sur le caractère très imprécis de la mission de ce comité. Il devra veiller « au maintien du niveau de vie des retraités à un niveau satisfaisant ». Je suis surprise du caractère peu clair de cette formulation. Qui déterminera le caractère satisfaisant du niveau de vie des retraités et sur quels critères se fondera-t-on ? Le niveau de vie sera-t-il jugé satisfaisant par rapport à l’équilibre comptable ou eu égard à ce que pourront s’offrir les retraités ? S’agira-t-il d’une moyenne ou bien se concentrera-t-on sur les retraites les plus basses ? Quitte à faire du réglementaire, autant aller jusqu’au bout !
Nous souhaitons que ce comité ne voie pas le jour. C’est au Gouvernement de prendre ses responsabilités et de répondre devant la représentation nationale de ses choix.
Nous ne voulons pas d’un comité qui serve de paravent aux débats et aux discussions. Nous voulons un exécutif assumant ses décisions et ne créant pas d’écran de fumée en instituant un énième comité Théodule. Nous voulons également un Parlement respecté et actif.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de l’article 1er.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également.
Cet article 1er crée un comité de pilotage des régimes de retraite, chargé apparemment d’un certain nombre de missions, dont l’objectif est de garantir la pérennité financière des régimes et de parvenir à l’équilibre en 2018. Tout un programme, alors que, nous vous le disons depuis la semaine dernière, votre réforme n’est pas équilibrée financièrement !
L’intérêt de cet article reste à démontrer, tant la création d’un énième comité semble pour le moins surprenante. La majorité et le Gouvernement ne nous avaient pourtant pas habitués à créer des comités… Notre pays dispose déjà d’organismes qui travaillent quotidiennement sur la question des retraites, le COR en étant le meilleur exemple. Nous ne comprenons donc vraiment pas quelle peut être l’utilité de ce nouveau comité, car c’est au Gouvernement et au Parlement, comme l’ont dit fort justement les orateurs qui m’ont précédé, qu’il revient de prendre les décisions garantissant la pérennité financière et l’équité des régimes de retraite par répartition, et non à un comité Théodule, même s’il est composé, sans aucun doute, de personnalités qualifiées.
C’est à la représentation nationale qu’il appartient de prendre ses responsabilités !
Cette année déjà, vous vous êtes abrités derrière un rapport alarmiste du COR pour justifier votre réforme. Qui sait si ce comité de pilotage ne vous permettra pas, dans quelques années, de légitimer une nouvelle réforme, marquée à nouveau du sceau de l’injustice et même de l’iniquité ? Se retrancher derrière l’urgence pour réformer n’autorise pas à faire toujours peser l’effort sur les plus faibles !
J’aimerais revenir sur le nom que vous avez choisi : « comité de pilotage ». À l’heure où la communication prévaut souvent sur l’action – nous y sommes maintenant habitués ! –, je suis certain que ce choix n’a rien d’anodin.
Le choix de ce nom est révélateur de la politique que vous menez. Vous me faites penser au capitaine d’un bateau qui dériverait inéluctablement vers un iceberg sans pouvoir agir sur le gouvernail. Un capitaine sans gouvernail, un avion sans pilote, une réforme sans orientation logique, voilà la vérité ! Créer un comité de pilotage, c’est reconnaître implicitement que la réforme que vous nous présentez va à la dérive : tout juste met-elle le cap sur l’injustice ! §
Cette réforme aurait dû engager toutes les générations, elle aurait dû créer un pacte des générations. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le seul pacte qu’ont conclu les générations a consisté à s’opposer à votre réforme !
D’ailleurs, lorsque nous vous expliquons point par point notre projet, vous vous obstinez à nous répondre que les jeunes devront payer les conséquences de la réforme que nous proposons : c’est une erreur et le président de notre groupe vous démontrera l’inverse dans un instant.
En revanche, vous occultez de manière volontaire un fait majeur des années 2000 : si vous n’aviez pas drainé le Fonds de réserve pour les retraites, si vous ne l’aviez pas asséché, nous n’en serions pas là où nous en sommes aujourd’hui.
Les jeunes seront spoliés des sommes qui avaient été mises de côté pour leur permettre de ne pas subir trop lourdement le pic démographique de 2020.
À l’heure où les manifestants déferlent sur la France, où toutes les générations manifestent, vous n’avez rien d’autre à nous présenter que la création d’un comité de pilotage. Or les Français ont besoin non pas d’un comité de pilotage, mais d’un pilote habile et talentueux qui leur montre le cap à suivre !
Il faut rassurer les Français et non les inquiéter ! Il faut rassembler les Français et non les diviser ! Il faut rassembler toutes les générations avec un seul objectif : la pérennité du régime de retraite par répartition !
Au moment où, sur tous les Google – puisque tout le monde a un iPhone –, le journal Le Monde annonce que le Président de la République s’apprête à supprimer le bouclier fiscal et l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, contrairement à tout ce qui était affirmé jusqu’à présent, vous n’êtes plus à un reniement près : alors, renoncez à cette réforme des retraites, reprenons le dialogue à son point de départ, cela vaudra mieux pour l’ensemble de nos concitoyens !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Guy Fischer et Robert Tropeano applaudissent également.
M. Jean-Louis Carrère applaudit
Les problèmes que vient d’évoquer Didier Guillaume concernant le financement de cette réforme des retraites sont importants et intéressants. Hier, au terme d’une discussion riche sur l’article 6, j’ai noté que l’intervention de M. le ministre a consisté à reprendre le projet d’une autre réforme possible des retraites défendu par le parti socialiste – pour nous, c’était un élément de satisfaction –, pour le tourner en dérision et contester les modalités de son financement.
Je souhaiterais y revenir, si vous me le permettez, car un peu d’interactivité ne ferait pas de mal à nos débats : l’intervention assez longue de M. le ministre mérite en effet que nous précisions nos arguments.
Oui, nous voulons mettre à contribution les revenus du capital !
Nous voulons augmenter les prélèvements sur les bonus et les stock-options, je le confirme, en portant le taux de 5 % à 38 %.
Oui, – et nous l’assumons ! – nous voulons multiplier par cinq les prélèvements sur l’intéressement.
M. Jean-Louis Carrère applaudit
Oui, nous voulons créer une surtaxe de 15 % à l’impôt sur les sociétés acquitté par les banques et je demande à M. Woerth s’il trouve surprenant de taxer les banques, qui ont été sauvées de la faillite par l’argent du contribuable. N’aurait-on pas le droit de leur demander un effort de solidarité ?
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.
Nous voulons également supprimer ce que l’on a appelé la « niche Copé ». Vous nous dites qu’elle évite l’évasion fiscale, mais nous nous souvenons que le même argument nous avait été servi pour défendre le bouclier fiscal. Or, aucun chiffre, aucune étude sérieuse n’ont démontré que le moindre exilé fiscal était revenu…
… grâce à des dispositifs qui instaurent en fait, purement et simplement, de nouveaux privilèges !
M. le ministre feint d’être surpris en découvrant ces chiffres : c’est tout simplement que la philosophie de notre projet est radicalement différente de la sienne.
Oui, nous proposons de mettre les revenus du capital à contribution pour des montants dix fois supérieurs à ce que propose le Gouvernement : ainsi, nous souhaiterions prélever 19 milliards d’euros en 2011, contre 2, 2 milliards d’euros prévus par le Gouvernement. Est-il surprenant de proposer une contribution du capital à l’effort national ?
La vérité, c’est simplement que nous voulons mettre beaucoup plus fortement à contribution ceux que l’on a maintenant coutume d’appeler « les amis du Fouquet’s » et les grandes fortunes. Naturellement, cela vous paraît inacceptable.
Je souhaite également revenir sur un autre point très important dans notre développement d’hier, à savoir l’emploi des seniors. En effet, nous considérons que la hausse de l’emploi des seniors apporterait bien, je le confirme, 6 milliards d’euros. Le ministre nous a reproché hier d’avancer ce chiffre d’un « coup de baguette magique » ! Mais il faut être particulièrement myope pour ne pas voir que l’augmentation du taux d’emploi a des effets mécaniques sur les cotisations : plus il y a d’actifs au travail, et plus ils cotisent !
Il est tout de même surprenant de devoir rappeler de telles évidences !
Car là est le point faible de la réforme que nous présente le Gouvernement : elle n’adopte pas une approche globale, elle sépare les retraites de l’emploi, alors que tout est lié.
Enfin, si j’étudie votre projet et la manière dont vous le financez, c’est lui qui me paraît non financé ! En effet, dès 2011, il vous manquera 25 milliards d’euros. Vous me reprocherez sans doute d’être dogmatique et doctrinal, d’inventer des chiffres, mais vous devriez vous rappeler la « réforme Fillon », qui était censée être financée à 100 %...
… et dont nous constatons qu’elle n’est déjà plus suffisante.
Puisque notre parole peut être mise en doute, je reprendrai les propos de la présidente de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV : « Le compte n’y est pas en termes de ressources et de financement. À l’horizon 2020, on sait très bien qu’il faut de l’ordre de 45 milliards d’euros par an pour financer le régime et là, sur la table, [le ministre du travail, Éric Woerth, ] nous met 29 milliards d’euros, donc il en manque ». Faites le calcul !
La présidente de la CNAV ajoute que ce projet « n’est pas équilibré » et qu’il faut « réfléchir à une assiette de financement différente », alors qu’aujourd’hui seuls les salaires sont mis à contribution.
Je pense donc, messieurs les ministres, que vous devriez faire preuve de moins d’arrogance lorsque vous décrivez le projet concurrent qui vous est opposé et d’un peu plus de modestie lorsque vous présentez le vôtre !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – MM. Guy Fischer, Jacques Mézard et Robert Tropeano applaudissent également.
M. le ministre voulait nous répondre, vous lui coupez la parole ! C’est incroyable !
M. le ministre m’a fait signe qu’il répondrait lorsqu’il donnerait l’avis du Gouvernement sur l’ensemble des amendements de suppression.
L’amendement n° 1 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L’amendement n° 64 est présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau et Daudigny, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L’amendement n° 251 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.
L’amendement n° 319 rectifié est présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L’amendement n° 635 rectifié est présenté par M. P. Dominati, Mme Descamps et MM. Lecerf et Darniche.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l’amendement n° 1.
Cet amendement tend à la suppression de l’article 1er, car vous aurez compris que, sur le fond, nous contestons la logique même de cet article qui crée un nouvel organisme, le comité de pilotage des régimes de retraite.
En effet, si la vocation de ce comité est de pallier les défaillances actuelles du pilotage du système de retraite, il a surtout pour but, selon les trois missions qui lui sont confiées, de proposer des mesures financières correctrices et de suivi, dont nous contestons le bien-fondé.
Il viserait, semble-t-il, à sauver notre système par répartition en assurant sa pérennité financière et la solidarité intergénérationnelle. Admettons !
Certes, le morcellement du système en de multiples régimes et la complexité du calcul des pensions ne facilitent pas une gouvernance efficace, mais cette situation est le résultat d’une organisation de ces régimes sur des bases socioprofessionnelles et correspond à une réalité ! À l’évidence, il faut simplifier ce système, nous le reconnaissons.
Certes, ce comité se voit confier un pouvoir si le dérapage des comptes menace la pérennité financière du système et notre commission a voulu en faire un « comité d’alerte ». Encore faut-il s’entendre sur la notion d’efficacité et s’interroger pour savoir à qui elle profite ! Mais, à mon avis, l’essentiel n’est pas là. Le défaut majeur de ce nouvel organisme est de n’envisager le problème fondamental de la place de la retraite dans notre société que sous le seul angle comptable et technique.
De surcroît, je comprends mal l’intérêt de créer un tel comité alors qu’existent déjà un organisme similaire, Yves Daudigny l’a très bien dit, le Conseil d’orientation des retraites, le COR, ainsi que toute une série d’autres structures dont la vocation est précisément de réaliser des études à partir desquelles le Gouvernement et le Parlement peuvent prendre, de manière éclairée, leurs décisions.
Ce comité exercerait donc des attributions assez proches de celles du COR, principalement celle de réfléchir et de faire des propositions sur les perspectives de financement de la réforme des retraites.
La rédaction retenue pour définir les missions de ce comité est également très vague, puisqu’il doit simplement « veiller » à la réalisation de divers objectifs, sans même que soient précisés les moyens qui lui seront attribués. Nous nous interrogeons également sur la légitimité des personnalités appelées à y siéger, si éminentes soient-elles, vis-à-vis des représentants des organisations syndicales, de ceux de la CNAV, de l’AGIRC-ARRCO, ou bien encore des caisses de retraite de la fonction publique ?
Non, il ne serait ni raisonnable, ni efficace de créer un organisme redondant par rapport au COR !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et sur plusieurs travées du groupe socialiste.
Vous ne voulez pas nous écouter, nous devons donc insister, peut-être sans répéter pour autant tous les arguments !
L’article 1er crée un comité de pilotage des régimes de retraite et lui fixe des objectifs et des missions qui sont une succession de déclarations de principes.
Même si le rôle de ce dernier a été modifié par la commission des affaires sociales du Sénat – cela a déjà été dit –, il n’en reste pas moins que l’intérêt de cet article reste à démontrer, tant la création d’un énième comité semble finalement surprenante.
C’est au Gouvernement et au Parlement, et non à un comité de pilotage, qu’il revient de prendre les décisions qui garantissent la pérennité financière et l’équité des régimes de retraite par répartition. Vous ne nous ferez pas accepter qu’un comité de ce type décide à notre place !
Par ailleurs, le Conseil d’orientation des retraites, créé en 2000, a pour mission essentielle d’assurer le suivi et l’expertise, concertée et permanente, de notre système d’assurance vieillesse et de faire des propositions.
L’article 6 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a consacré et élargi son rôle.
Rappelons – cela mérite d’être détaillé – qu’il a pour mission :
« De décrire les évolutions et les perspectives à moyen et long termes des régimes de retraite légalement obligatoires, au regard des évolutions économiques, sociales et démographiques, et d’élaborer, au moins tous les cinq ans, des projections de leur situation financière ;
« D’apprécier les conditions requises pour assurer la viabilité financière à terme de ces régimes ;
« De mener une réflexion sur le financement des régimes de retraite […] et de suivre l’évolution de ce financement ;
« De formuler les avis [préalables aux décisions à prendre tous les quatre ans relatives à la durée d’assurance requise dans les régimes de retraite] prévus aux III et IV de l’article 5 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ; […] »
À travers le rappel des missions du Conseil d’orientation des retraites, comment ne pas saisir et mesurer l’inutilité de ce comité de pilotage des régimes de retraite ?
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous avons déposé cet amendement, que je vous invite à soutenir.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 251.
Comment ne pas être séduit par ce nouveau comité de pilotage des régimes de retraite ?
Ce comité devrait veiller au respect des objectifs du système de retraite, tels que la lisibilité, la transparence, la pérennité financière ou la solidarité intergénérationnelle.
Il me semble pourtant que le Conseil d’orientation des retraites, lui aussi, suit l’évolution des régimes et fait des propositions pour assurer leur solidité financière et leur fonctionnement solidaire.
C’est la même chose, non ? Où est la différence ? Pourquoi créer un organisme supplémentaire ?
Nous disposons également d’une Commission de garantie des retraites, qui rend des avis sur les évolutions des durées d’assurance ou de services, et sur les bonifications.
Il me paraît donc inutile de superposer une nouvelle structure, alors que les missions décrites dans l’article sont déjà exercées par des organismes existant.
Nous sommes en train de confectionner un millefeuille illisible et indigeste pour nos citoyens. Ce n’est pas pour rien qu’ils sont des millions, aujourd’hui, à défiler dans la rue
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
, tout simplement pour dire qu’ils refusent cette manière de faire, qu’ils refusent d’être considérés comme des irresponsables. Car l’irresponsabilité, c’est vous !
Exclamations sur plusieurs travées de l ’ UMP.
Mme Alima Boumediene-Thiery. C’est pourquoi, aujourd’hui, nous vous demandons une fois encore de faire preuve d’un peu plus de responsabilité et de retirer cet article 1er du projet de loi. Nous, parlementaires Verts, souhaitons que soit maintenu le contrôle législatif actuel sur les régimes de retraite.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l'amendement n° 319 rectifié.
En créant un comité de pilotage des régimes de retraite, le Gouvernement se décharge de compétences qui doivent normalement lui incomber.
En effet, l’article 1er détaille les missions de ce comité, qui sont notamment de tendre vers la pérennité financière des régimes de retraite ou vers leur équité.
Le respect de ces principes doit guider l’action du Gouvernement, et pas seulement celle du comité de pilotage.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer l’article 1er et le comité de pilotage des régimes de retraite, afin que le Gouvernement conserve le rôle central dans cette matière fondamentale.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l'amendement n° 635 rectifié.
Dans ce débat qui s’est engagé, monsieur le secrétaire d’État, nous sommes un certain nombre, au sein de la majorité, à avoir besoin d’être convaincus.
En effet, la création d’un organisme supplémentaire démontre simplement qu’un dispositif n’a pas bien fonctionné et, apparemment, il s’agit du Conseil d’orientation des retraites.
Celui-ci a travaillé ; il a établi un diagnostic ; il a défini la nécessité d’une équation pour rétablir ou sauvegarder notre système de retraite. Or on s’aperçoit que l’expression politique qui résulte de ce constat est totalement différente.
Il y a bien un dysfonctionnement dans le dialogue social de notre pays depuis des années : nous identifions des nécessités, des problèmes à affronter et, lorsque nous abordons la phase politique, l’opposition retrouve un rôle souvent excessif ou hors sujet. Dès lors, en tout cas, nous n’y arrivons plus.
Vous vous sentez alors dans la nécessité de créer un nouveau comité de pilotage pour pallier les défaillances constatées à ce jour dans le pilotage des retraites, ce qui soulève des interrogations.
Je contredis d’ailleurs M. Guy Fischer. Cette solution ne satisfait absolument pas les libéraux ! Nous voudrions simplement que le système soit clair, que le comité institué joue son rôle et ait la crédibilité nécessaire pour convaincre les Français de la nécessité de prendre les mesures économiques les plus justes pour les générations futures.
Voilà pourquoi, avec un certain nombre de collègues, nous nous interrogeons sur la création de ce comité de pilotage des régimes de retraite, qui, ne s’accompagnant pas de la suppression d’autres comités, contribuera à cette incompréhension et à ces difficultés pédagogiques vis-à-vis de nos concitoyens.
L’amendement que nous présentons n’est donc pas de même nature que ceux qui émanent de l’opposition, qui vous aurait reproché de ne pas avoir créé ce comité si vous n’en aviez pas eu l’intention ou si vous aviez envisagé de le mettre en place dans le cadre du Conseil d’orientation des retraites.
Nous demandons, au nom de la simplification et des nécessités pédagogiques, d’améliorer le dialogue social dans notre pays et de changer les méthodes ayant prouvé leur inefficacité depuis des années, dans ce domaine, dès lors que nous abordons la phase politique.
Telle est l’interrogation que nous sommes un certain nombre à soulever au sein de la majorité et, monsieur le secrétaire d’État, il faudra nous convaincre de l’utilité de ce comité.
Je précise que nous partageons également l’intention initiale de la commission quant à sa composition, qui, nous le voyons, est extrêmement variable.
Les interrogations reflétées ici sont aussi celles de certains de nos collègues membres de la commission.
S’agissant de ces amendements de suppression, je voudrais revenir sur des constatations que nous avons faites au cours des travaux de commission, mais également dans le cadre de réflexions plus brèves. Je pense notamment aux conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale – la MECSS –, le thème des retraites ayant été abordé, comme d’autres thèmes, dans le calendrier de cette mission d’enquête de la commission des affaires sociales.
Nous disposons d’une multiplicité de régimes et, c’est vrai, les différentes réformes ont permis de faire progressivement converger certaines règles vers un socle plus partagé. Ce pilotage reste malgré tout très morcelé, la situation actuelle étant aussi le fruit d’une histoire, que celle-ci soit économique – souvent – ou sociale.
Une approche beaucoup plus globale et transversale est donc nécessaire.
Vous l’avez très bien vu, mes chers collègues, parmi les objectifs que nous cherchons à atteindre avec ce projet de loi, on trouve la pérennité financière et – on l’a souvent répété – une plus grande équité. Mais, in fine, ce qui nous importe le plus, ce qui constitue l’objectif véritable de cette réforme, c’est de garantir un certain niveau de vie aux retraités. Notre démarche n’est donc pas, comme le disent certains, simplement technique et/ou financière.
Le comité de pilotage nous permet de répondre à cette préoccupation, qui, au travers des discussions, semble partagée par l’ensemble des acteurs du système de retraite.
Contrairement à ce que certains de nos collègues ont dit et à ce que j’ai pu entendre lors de la discussion sur une certaine motion référendaire, il n’a jamais été question de déposséder le Parlement de ses prérogatives.
Mme Christiane Demontès est dubitative.
Quant au COR, mon cher Philippe Dominati, pour y participer, je crois qu’il a fait ce qui était de son ressort !
Le COR est d’abord un comité technique, mais c’est aussi, depuis 2003, un important lieu de concertation, au regard de sa composition. Si nous pouvons progresser, d’une part, dans notre réflexion et, d’autre part, en tant que décideurs politiques, dans notre action, nous le devons à ce socle qui n’est que ce qu’il est… Le COR n’a pas vocation à être force de proposition et, du fait de sa composition, ne peut se voir fixé un tel objectif.
J’insiste donc, mes chers collègues, en l’occurrence il n’est question de déposséder ni le Parlement ni le COR de leurs prérogatives. D’ailleurs, le Parlement n’est pas écarté puisque aujourd’hui nous sommes appelés à prendre des décisions concernant l’âge du départ à la retraite – nous l’avons fait aux articles 5 et 6 du projet de loi – alors que ces dispositions pourraient ne concerner que le domaine réglementaire. Le Parlement reste donc bien au cœur de la décision.
Le comité de pilotage sera spécialement dédié au suivi de l’ensemble des régimes de retraite. Je vous rappelle qu’on évoque parfois 21 régimes obligatoires de base et qu’il existe une multiplicité – on parle d’une centaine – de régimes de retraite dans le seul domaine obligatoire. Autre exemple, le GIP Info Retraite se compose de 36 régimes légalement obligatoires.
La commission a également souhaité clarifier les compétences du COR et du comité de pilotage, en renforçant le caractère opérationnel et stratégique des missions de ce dernier. Nous nous sommes rapprochés du modèle du comité d’alerte de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie – l’ONDAM –, comité que nous évoquerons prochainement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et avons chargé le comité de pilotage d’être le gardien vigilant non pas de l’orthodoxie, mais du suivi des retraites.
Dans le cadre d’articles additionnels, la commission des affaires sociales vous fera une proposition, qui a largement été évoquée, présentant des perspectives d’avenir.
Pour toutes ces raisons, elle ne peut qu’être défavorable à la suppression de ce comité de pilotage.
M. Roger Romani remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces cinq amendements de suppression. Ce n’est ni une surprise ni le point le plus important, puisque l’intérêt, ici, est plutôt de dégager une vision d’ensemble et de tenter de répondre aux différents orateurs, sans d’ailleurs revenir sur des sujets déjà abordés et en se limitant à cet article 1er.
Je voudrais faire quelques observations.
Tout d’abord, le Parlement peut-il avoir le sentiment d’être dépossédé d’un pouvoir quelconque ? La réponse…
… est non ! Si vous répondez aux questions que je pose, je vais répondre aux questions que vous posez vous-mêmes !
Laissez-moi donc répondre aux questions que je me pose.
Non, le Parlement n’est pas dépossédé de ces pouvoirs. Je voudrais d’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous rappeler le point suivant : c’est nous, notamment s’agissant du régime général, qui introduisons dans la loi des dispositions, comme la fixation de l’âge de la retraite, qui relevaient jusqu’à présent du domaine réglementaire. Vous voyez donc bien que nous ne craignons absolument pas de donner – j’allais presque dire de redonner – au Parlement des pouvoirs qui lui sont naturellement dévolus.
Par ailleurs, toutes les questions qui ont été posées, notamment par vous, monsieur Fischer, ne me choquent pas. En réalité, comme d’ailleurs M. Philippe Dominati, vous cherchez à savoir si nous disposons de deux outils ayant deux rôles différents. Chacun évidemment – c’est tout à fait normal et légitime – pose le problème en termes politiques, mais la question revient à cela.
Disons les choses le plus simplement du monde : le COR a bien rempli sa mission, parce qu’il a mis en exergue toute une série d’informations, de façon d’ailleurs assez consensuelle.
M. Didier Guillaume évoquait tout à l’heure son diagnostic alarmiste. Je me permets de réfuter ce point. Le COR a une composition plurielle et compte, parmi ses membres, des parlementaires de la majorité, des parlementaires de l’opposition, des experts, des syndicalistes. Le document élaboré par ses soins met en avant une série de déficits qui se succèdent année après année.
On ne peut pas parler de rapport alarmiste. Il s’agit simplement de savoir si, une fois qu’il a établi son diagnostic, on se demande si le médecin est bon ou mauvais. Comme le médecin, en l’occurrence, est une assemblée plurielle, et non une personne identifiée, j’estime qu’on peut éviter ce type de débat et je me permets, avec beaucoup de nuances, de vous confirmer que le COR a bien fait son travail.
Avons-nous besoin qu’il continue à remplir sa mission ? La réponse est oui. Nous aurons toujours besoin d’une expertise, d’une analyse et c’est le propre de la mission du COR.
En revanche, le comité de pilotage des régimes de retraite présente une valeur ajoutée, dans la mesure où il va devoir indiquer, sur la base d’objectifs quantitatifs, si nous respectons la montée en puissance de la réforme que nous mettons en œuvre pour remplir quatre ou cinq missions bien déterminées.
La première d’entre elles est l’équilibre des régimes de retraite. Pardonnez-moi de le dire, en particulier à Mme Annie David – elle a plusieurs fois employé le mot « comptable » comme si c’était une critique que l’on devait adresser à la profession et à tous ceux qui ont des objectifs de cette nature –, le fait de fixer des objectifs comptables n’a rien de choquant en matière de retraite ou dans d’autres domaines tels que l’assurance maladie.
Il s’agit de savoir si, oui ou non, les recettes et les dépenses sont ajustées. Je n’ai pas l’impression de découvrir la pierre philosophale en disant que, s’agissant de retraites et de pensions, il n’est pas totalement idiot d’avoir des recettes à peu près équivalentes aux sommes dépensées, sauf à considérer qu’à un moment ou à un autre les pensions ne seront plus versées faute de moyens pour financer le dispositif.
Je m’adresse là en particulier au président Bel qui l’a dit avec des mots choisis, mais je ne souhaite pas entrer dans le débat qu’il a eu, hier, avec Éric Woerth. Je profite d’ailleurs de cette intervention pour vous prier de bien vouloir excuser ce dernier pour son absence : il est à l’Assemblée nationale pour répondre aux questions au Gouvernement.
Cela étant dit, sans rentrer dans le projet de réforme fiscale du parti socialiste, je ferai remarquer que nous sommes, nous, dans un dispositif « retraites ». À partir du moment où l’on change de dispositif, que l’on n’a plus un système de recettes assis sur des cotisations salariales, comme c’est le cas actuellement, on peut avoir un dispositif fiscal. On change simplement de système.
D’ailleurs, j’ai été très attentif aux critiques formulées de manière récurrente ces deux dernières années au sein du parti socialiste sur les aléas de ce type de recettes quand la crise intervient. Ce qui me frappe beaucoup, c’est qu’aujourd’hui, on puisse vouloir maintenir des dispositifs de recettes pour les retraites, alors même que l’on sait à quel point les recettes s’effondrent dans les périodes difficiles.
Donc, pour dire les choses simplement, je considère que l’objectif d’équilibre qui est celui du COPILOR se justifie pleinement.
Certains orateurs, notamment Mme David, ont souligné que nous étions complètement focalisés sur cet objectif d’équilibre. Non, le niveau de vie des retraités observé par le COPILOR n’est pas simplement d’ordre comptable ; c’est une question d’équité et de justice sociale, de même que la solidarité intergénérationnelle, qui est l’un des fondements mêmes du principe de la retraite par répartition.
Je terminerai en disant un mot d’un sujet qui nous a pris beaucoup de temps et sur lequel il est parfaitement légitime de réfléchir : les niveaux différents de pensions entre les hommes et les femmes.
La mission du COPILOR sur ce sujet consistera à indiquer les orientations qu’il préconise en s’appuyant, entre autres, sur les travaux du COR. La vocation du COPILOR est différente de celle du COR, qui, lui, fournit des analyses à partir desquelles nous travaillons.
Le COPILOR, se fondant sur les objectifs qui ont été définis et que je viens de rappeler, présente les ajustements possibles, et le Parlement décide. Le COR conseille, le COPILOR suggère, et le Parlement décide. Nous sommes donc dans une démarche logique et ordonnée, et c’est la raison pour laquelle nous demandons le rejet de ces amendements.
Si j’ai bien compris les différentes interventions, sur la quasi-totalité des travées de cet hémicycle, on s’interroge sur l’utilité de ce nouveau comité de pilotage. Nous sommes nombreux, bien entendu à gauche, mais aussi à droite, à dire qu’au fond, il vaudrait mieux le supprimer avant même qu’il ne soit créé.
Je ferai trois observations.
La première observation, c’est ce que nous confirme la création de ce comité de pilotage. On lit, en effet, dans l’article 1er, que la durée de vie du comité de pilotage est limitée jusqu’en 2018, mais, à l’article suivant, il nous est dit qu’au-delà de 2018, on légiférera à nouveau.
Voilà bien la confirmation de ce que nous disons depuis le début de ce débat : vous nous faites une réforme à courte vue ! Vous nous faites une réforme pour les huit ans à venir, en sachant très bien qu’au-delà, nous serons face à un gouffre financier, que vous ne prenez pas en charge ; c’est la différence qu’il y a entre vous et nous. Nous, nous proposons une réforme pérenne, qui trouvera des financements même après 2018.
Deuxième observation, on voit bien que ce comité de pilotage est une sorte de session de rattrapage en matière de concertation. Vous semblez nous dire que la concertation, telle qu’elle a eu lieu aujourd’hui avec les organisations syndicales, pourra rebondir demain à l’intérieur de ce comité de pilotage. Permettez-moi de vous dire que, si la médiocrité de la concertation que vous avez conduite avec les organisations syndicales vous sert de modèle pour le comité de pilotage, ce n’est pas la peine de créer ce comité !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
J’en viens à ma troisième observation. J’ai entendu M. le secrétaire d’État tout à l’heure s’étonner de la crainte que nous exprimions que le Parlement ne soit dépossédé de ses compétences. Il nous a affirmé qu’il n’en était rien et que le comité de pilotage proposerait d'ailleurs au Parlement de faire des réformes.
Monsieur le secrétaire d’État, vous oubliez simplement un point constitutionnellement très fort, qui figure dans l’ensemble des textes régissant l’Assemblée nationale et le Sénat : le Parlement a un rôle de suivi de la loi.
Alors, ne créez pas un organisme pour déposséder le Parlement !
En définitive, comme on le voit bien au travers de cet article, la confusion règne, et elle transparaît dans l’ensemble de votre texte.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Fischer applaudit également.
Monsieur le secrétaire d’État, comme vient de le dire excellemment notre collègue Alain Anziani, il y a tout de même un formidable paradoxe à présenter cette réforme comme étant la grande affaire du quinquennat, au moment où vous vous apprêtez à mettre en place ce dispositif.
Vous êtes prêt à brader en quelque sorte vos responsabilités en renforçant une espèce d’usine à gaz où les uns conseillent, les autres suggèrent et les troisièmes décident.
Compte tenu de l’importance de cette réforme, compte tenu des incertitudes dont elle est porteuse, comme nous le constatons tous, quant aux résultats que vous en attendez, et des inquiétudes qui s’expriment au sein de la population, vous n’avez pas le droit de retirer au Parlement ses responsabilités, car, encore une fois, il appartient au Parlement de vérifier lui-même l’application de la loi qu’il aura votée.
Pour toutes ces raisons, nous sommes très vigilants dans ce débat et nous vous demandons à nouveau de retirer l’article 1er qui ne sert à rien, sinon à vous donner la possibilité de vous exonérer allégrement de vos propres responsabilités.
Et s’il y a besoin d’un comité pour sauver la retraite par répartition, en cet instant, c’est d’un comité de salut public que nous avons besoin !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Fischer applaudit également.
On ne parle déjà plus de comité de pilotage des régimes de retraite, mais de COPILOR. Alors que ce comité n’est même pas encore voté, on ne s’y réfère plus que par son acronyme !
Plus sérieusement, comme Yves Daudigny l’a dit en présentant son amendement, et même si la commission des affaires sociales du Sénat a déjà modifié le rôle du comité, ce dernier n’en reste pas moins un instrument financier au service d’une réforme purement comptable.
Je formulerai brièvement trois remarques.
Premièrement, comme cela a déjà été dit lors de la présentation des différents amendements, et ce sur la plupart des travées de notre assemblée d’ailleurs, ce débat sur un énième comité n’a pas de sens.
Le COR, le Conseil d’orientation des retraites, est en place ; il fonctionne, fait du bon travail, rend des rapports. Sa composition, même si elle n’est pas complètement paritaire, est large, puisque ce conseil comprend à la fois des représentants du Parlement, donc des élus, mais aussi des représentants des organisations syndicales de salariés et des représentants du patronat, ainsi qu’un certain nombre d’experts. Il est donc inutile de créer une structure supplémentaire qui va peut-être venir en concurrence ou en superposition par rapport à ce qui existe déjà.
Deuxièmement, en annonçant la création d’un comité de pilotage, vous reconnaissez implicitement, monsieur le secrétaire d’État, que vous ne pilotez pas le dossier des retraites. Vous voulez, en créant ce comité de pilotage, dissimuler votre scepticisme sur l’architecture financière que vous avez mise en place et que, d’ailleurs, nous dénonçons.
Si ce comité est créé pour s’ajouter au Conseil d’orientation des retraites, c’est que le Gouvernement reconnaît implicitement que, sur les plans juridique et législatif, l’équilibre du dispositif n’est pas réellement garanti.
Le Gouvernement a manifestement besoin du rendez-vous de 2018 afin de préparer, pour autant qu’il en ait encore la responsabilité à cette date, une nouvelle série de mesures d’âge d’ordre financier qui viendront frapper de nouveau les Français.
Alain Anziani vient de le dire, votre réforme n’a pas de financement pérenne, contrairement à notre propre projet, parce qu’elle est financée uniquement – nous l’avons maintes fois dénoncé – par les revenus du travail. Or, on le sait, la problématique des retraites, c’est que, s’il y a aujourd'hui deux actifs pour un retraité, il y aura bientôt 1, 2 actif pour un retraité.
Nous ne pouvons donc pas continuer à faire peser uniquement sur les revenus du travail le financement de notre régime de retraite.
Enfin, troisièmement, ce comité remet en question le rôle du Parlement et des parlementaires. Vous voulez nous imposer un comité composé de personnes non issues du suffrage universel et qui décident à notre place. Contrairement à ce que vous nous avez affirmé pendant des années, il ne s’agit en rien de renforcer les pouvoirs du Parlement.
Votre réforme du règlement de l’Assemblée nationale, comme ici au Sénat, tend à réduire le pouvoir de légiférer des parlementaires. Vous êtes dans cette continuité en nous proposant ce comité. Le comité consulte le Gouvernement, lequel consulte de nouveau le comité ! Tout cela donne le sentiment que rien n’est piloté, ni au Gouvernement ni au Parlement auquel vous enlevez les prérogatives en la matière.
Pour ces trois raisons, outre celles qui ont été indiquées par mes collègues, nous voterons contre la mise en place de ce comité de pilotage.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Ce comité de pilotage, tel qu’il est prévu, ne correspond pas du tout à ce que nous attendons concernant la question des retraites.
Il se substitue au pouvoir politique et aux représentants des assurés sociaux. Selon nous, ce comité, qui serait désigné par décret, pourrait être non pas un comité de pilotage, mais, très vite, un comité de verrouillage des retraites.
J’ai entendu tout à l’heure notre collègue Philippe Dominati nous parler d’un dysfonctionnement dans le dialogue social. Traiter de questions comme celle-ci aujourd’hui, alors qu’il y a certainement plusieurs millions de personnes dans la rue
Mais non ! sur les travées de l ’ UMP.
… en persistant à vouloir imposer une réforme des retraites qui ne convient pas à la majorité des Français, c’est atteindre le paroxysme du non-dialogue social.
M. Martial Bourquin. Cela s’apparente à de l’autisme, et même à un mépris du peuple !
Exclamations sur les mêmes travées.
Monsieur le secrétaire d'État, sur la question de l’équilibre financier des retraites, une fois pour toutes, considérez que la réforme que nous voulons n’est pas celle que vous nous proposez.
Vous, vous voulez vous en prendre à ceux d’en bas, à ceux qui travaillent, qui peinent tous les jours. Nous, nous voulons nous en prendre à la financiarisation de l’économie. Nous pensons, par exemple, qu’une politique de croissance serait bien plus utile pour l’équilibre des retraites. Nous pensons aussi que les plus de 3 millions de chômeurs, s’ils travaillaient demain, pourraient cotiser pour la retraite, pour la sécurité sociale.
Vous vous êtes habitué au chômage de masse, qui est devenu intolérable dans notre société.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.
Comment peut-on envisager de faire travailler deux ans de plus nos concitoyens, qui ont parfois des métiers difficiles, alors qu’une minorité bénéficie de ce scandale qu’est le bouclier fiscal ?
À cette heure, nos concitoyens sont en train de manifester, certainement 5 à 6 millions de personnes !
Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.
Moquez-vous, chers collègues, ce que je peux vous dire, c’est que la grande majorité du peuple, y compris vos électeurs, …
Monsieur le président, je vous demande de faire taire ceux qui m’empêchent de parler !
M. le président. Moncher collègue, pardonnez-moi, mais vous avez beaucoup de talent pour provoquer en quelque sorte ces exclamations. Alors, je vous en prie, ne vous plaignez pas !
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, que voulez-vous dire ? Que faites-vous de votre impartialité ?
Je m’interroge donc profondément sur le blocage que vous êtes en train de construire, cette séparation entre les élites et le peuple !
M. Martial Bourquin. Vous êtes-vous demandé une seule fois quelle serait votre réaction si l’on modifiait votre régime de retraite ? Accepteriez-vous la réforme telle qu’elle est actuellement menée ?
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
(Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Voilà le vrai scandale ! C’est là qu’il y a une coupure entre les élites et le peuple !
Protestations sur les mêmes travées.
Vous imposez cette réforme au peuple, mais ne l’accepteriez certainement pas pour vous ! §
Nous, nous aimons la solidarité et la justice.
Rires sur les travées de l ’ UMP.
Vous, vous vous mettez au service des forces de l’argent ; vous serez jugés comme tels !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Vives exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants, avant d’aborder, à dix-sept heures, le point suivant de l’ordre du jour, les questions cribles thématiques, qui portent aujourd’hui sur l’accès au logement.
Nous reprendrons ensuite la discussion du projet de loi portant réforme des retraites et poursuivons les explications de vote sur les cinq amendements de suppression de l’article 1er.
M. le président a reçu une lettre de M. Christian Gaudin par laquelle il remet son mandat de sénateur du Maine-et-Loire, à compter du lundi 11 octobre 2010 à minuit.
Acte est donné de cette décision.
Conformément aux articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales a fait connaître au Sénat que, en application de l’article L.O. 320 du code électoral, Mme Catherine Deroche est appelée à remplacer, en qualité de sénateur du Maine-et-Loire, M. Christian Gaudin.
Son mandat a débuté le mardi 12 octobre 2010 à zéro heure.
Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite une cordiale bienvenue.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur l’accès au logement.
Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique. Je sais que chacun aura à cœur de respecter son temps de parole, aidé en cela par les chronomètres qui sont disposés dans l’hémicycle.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
Monsieur le secrétaire d'État, les organismes d’HLM sont très inquiets. Deux mesures récentes sont susceptibles de conduire à leur paupérisation, comme à celle de toute la politique du logement.
Première mesure, l’article 99 du projet de loi de finances pour 2011 projette de soumettre les organismes d’HLM à la contribution sur les revenus locatifs, la CRL, qui est assise sur les loyers perçus par les bailleurs privés institutionnels. Or, jusqu’à présent, les organismes d’HLM en étaient exonérés en raison de leur activité sociale.
Il s’agit là d’une ponction de ces organismes sur fond de désengagement de l’État. Les crédits consacrés à l’aide à la pierre dans le budget sont en forte baisse. Le nouveau prélèvement viendra se substituer aux financements de l’État pour le montant de son produit, soit 340 millions d’euros par an.
La seconde mesure, plus ancienne, est celle du décret du 21 août 2008, qui conduit à une augmentation importante des surloyers.
Ces deux mesures combinées auront, à mon sens – j’espère me tromper – une incidence très néfaste sur le logement social.
D’une part, du fait de la CRL, les organismes d’HLM auront bien du mal à continuer de financer, sur leurs fonds propres, l’entretien du parc et son extension pour répondre à une demande sans cesse croissante. Ils vont donc s’appauvrir. D’autre part, avec l’évolution incontrôlée des surloyers, c’est la mixité sociale qui sera mise à mal. Entre les deux, c’est un cercle vicieux, parce que, sans mixité sociale, la situation financière des organismes ne risque pas de s’améliorer.
Vous me répondrez, monsieur le secrétaire d'État, que la péréquation mise en œuvre profitera à la région d’Île-de-France.
Mais ce n’est pas au Calvados de payer pour la capitale, d’autant que cette dernière est très riche et achète des immeubles occupés pour rester dans le cadre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU. Voilà la politique de la Ville de Paris !
Monsieur le secrétaire d'État, avez-vous pris conscience de ce risque et des effets mécaniques induits par votre politique sur l’équilibre social et économique des villes ?
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez à la fois au sujet de la contribution sur les revenus locatifs et en ce qui concerne les surloyers.
Le Gouvernement, qui souhaite organiser la mutualisation et une forme de péréquation entre les bailleurs sociaux, a décidé de proposer au Parlement la mise en place de la CRL dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2011. Quand on se penche aujourd'hui sur l’équilibre financier du monde HLM, on s’aperçoit que la capacité d’autofinancement de cet acteur varie fortement en fonction des bailleurs, de 5 % à plus de 20 %.
Je souhaite attirer votre attention sur les éléments suivants : les 340 millions d'euros que vous avez évoqués seront intégralement reversés au monde HLM. En outre, ils ne pèseront pas sur les loyers, car le Gouvernement entend bloquer l’indice de référence des loyers, l’IRL. Par conséquent, cette mesure ne contribuera pas à paupériser le monde HLM.
Je rappelle qu’au-delà des aides à la pierre que vous avez évoquées, monsieur le sénateur, l’État investit tous les ans 9 milliards d’euros dans le monde HLM : 4 milliards d'euros de dépenses fiscales, 5 milliards d'euros au titre de l’aide personnalisée au logement, l’APL. Il va de soi que ces sommes ne seront absolument pas remises en cause dans le projet de loi de finances pour 2011.
Je vous confirme donc que l’État continue à investir massivement dans le monde HLM.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
De la même façon, nous souhaitons que se poursuivent les records de production que nous enregistrons depuis cinq ans maintenant, de l’ordre de 100 000 logements sociaux par an.
J’en viens aux surloyers. Le Gouvernement part du principe que le monde HLM est là notamment pour loger les plus modestes. Il est donc logique que ceux qui perçoivent des revenus excédant deux fois le plafond de loyer contribuent de façon plus importante au bénéfice du monde HLM.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse claire, mais il vous faut faire un effort de communication plus important, car le monde HLM est très inquiet.
C’est à dessein que j’ai mis ces deux mesures en parallèle, car le risque d’appauvrissement des organismes d’HLM est réel. Nous devons veiller à ne pas continuer à créer des ghettos qui provoqueront de forts déséquilibres sociaux et économiques et dans lesquels s’enfermeront les quelques familles accumulant des problèmes sociaux.
Il est très important de faire attention à cet effet mécanique, même si votre engagement en faveur de la mutualisation et les efforts que vous déployez à cette fin sont réels.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite vous interroger sur le problème de l’accession à la propriété.
La politique du Gouvernement en matière de construction depuis 2007 est à mes yeux un échec, puisque nous constatons une baisse de 25 % du nombre de logements construits entre 2007 et 2009. C’est une réalité !
Cette politique a été soutenue par des effets d’annonce suivis de quelques « couacs », comme la maison à 100 000 euros, celle à 15 euros par jour, etc.
Malgré cela, le 14 septembre 2010, lors de la présentation de votre réforme, vous avez déclaré que le Gouvernement n’avait jamais autant investi en faveur de l’accession à la propriété et vous avez critiqué les dispositifs existants.
À l’occasion d’un récent débat auquel nous avons participé, vous avez annoncé une réduction des crédits de votre ministère, passant de 7 milliards d'euros à 4 milliards d'euros. Curieuse politique pour améliorer le nombre de constructions !
L’axe de votre nouvelle politique d’accès au logement est le renforcement du prêt à taux zéro, de 1, 2 milliard d'euros à 2, 6 milliards d'euros. Mais vous prévoyez, en parallèle, la suppression ou la diminution d’autres financements, tel le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt immobilier.
Surtout, monsieur le secrétaire d'État, vous avez eu une illumination miraculeuse. Vous avez découvert l’existence des zones tendues et des zones détendues et vous en avez conclu qu’au lieu d’apporter davantage de moyens aux zones tendues, il fallait étrangler les zones détendues, les malheureux habitants de la zone C étant sans doute moins dignes d’intérêt que ceux des Alpes-Maritimes ou des Hauts-de-Seine. Curieuse politique d’aménagement du territoire !
Ainsi, vous voulez imposer aux communes de la zone C de ne plus construire du neuf et de rénover l’ancien !
M. le secrétaire d'État le conteste.
Monsieur le secrétaire d'État, j’ai l’une de vos déclarations sous les yeux. C’est une nouvelle étape dans votre politique de rupture, qui aggrave la fracture territoriale.
Pour la zone C, on peut résumer votre raisonnement ainsi : elle a peu d’habitants, c’est encore trop ! Si au moins vous augmentiez le financement des crédits de rénovation de l’habitat dans cette zone, ce serait un moindre mal.
En d’autres termes, qu’allez-vous faire pour faciliter, au moins en zone C, la rénovation de l’habitat ? Rien, je le crains !
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué deux sujets : l’accession à la propriété et la production de logements neufs, d’une part, les zones tendues et détendues, d’autre part.
Vous avez raison, entre 2007 et 2009, la production de logements a baissé en France, passant grosso modo de 435 000 – 2007 fut une année record – à 350 000. Vous auriez pu préciser qu’entre-temps était survenu un événement qui s’appelle la crise
Exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG
Monsieur le sénateur, je tiens à vous faire remarquer que, en matière de production de logements, aucun pays n’a mieux résisté que la France.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Nous avons choisi de réaliser l’ambition présidentielle autour de la France des propriétaires. Parce que nous considérons que le taux de propriétaires est trop faible dans notre pays, nous avons remis à plat l’ensemble de nos outils dans un seul but : dépenser moins et être plus efficace.
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.
J’avoue être particulièrement surpris que, sur certaines travées, ceux qui défendent aujourd'hui le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt immobilier, mesure issue de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, ou loi TEPA, soient ceux-là même qui vilipendaient ce dispositif depuis sa création voilà trois ans !
Nous avons décidé la suppression de cet outil, qui coûtait près de 3 milliards d'euros par an, car nous souhaitons ne conserver que les produits efficaces ou pris en compte par les banques pour la solvabilité de leurs clients.
Par conséquent, dans le même temps, nous réalisons des économies et nous redistribuons des sommes très importantes au bénéfice de l’accession à la propriété. Jamais aucun gouvernement n’aura fait autant !
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. J’en viens à la question du logement dans les zones tendues et détendues. Nous ne faisons rien d’autre qu’adapter nos produits à la réalité des prix du marché. Si nous apportons une aide identique dans les zones où le coût du mètre carré atteint 7 000 euros et dans celles où il est de 2 000 euros, personne ne pourra devenir propriétaire dans les zones tendues, où les prix sont les plus élevés ! Il n’en reste pas moins que l’on pourra toujours autant construire de logements neufs en zone C.
Applaudissementssur les travées de l’UMP.
Monsieur le ministre, lorsque le mètre carré vaut 7 000 euros, un logement de 100 mètres carrés coûte 700 000 euros. Faut-il vraiment aider la construction à ce niveau de prix ? C’est aussi une question qu’il faut poser.
Par ailleurs, vous affirmez que l’on n’a jamais autant fait pour l’accession à la propriété. Pourtant, les crédits consacrés à la construction seront ramenés de 7 milliards d'euros à 4 milliards d'euros. Cet effort ne me paraît guère significatif ; à mon avis, c’est une déclinaison de ce que l’on appelle dans d’autres secteurs la révision générale des politiques publiques, ou RGPP !
M. Jacques Mézard. Enfin, je terminerai par un exemple. À partir du 1er janvier 2011, en raison de la réforme du prêt à taux zéro, nos concitoyens qui voudront construire dans l’un des onze départements de la zone C – nous sommes un certain nombre de sénateurs ici à en faire partie – ne pourront plus emprunter que 31 600 euros à taux zéro contre 63 000 euros aujourd'hui. C’est tout à fait catastrophique. Malheureusement, telle est la réalité. Mais nous aurons l’occasion d’en reparler, monsieur le secrétaire d'État.
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite vous interroger sur la mise en œuvre du droit au logement opposable, le DALO, dans la perspective de l’échéance du 1er janvier 2011 et de celle du 1er janvier 2012.
Dans quelques semaines maintenant, les délais d’instruction des dossiers devront être ramenés de six mois à trois mois. De la même façon, l’État ne disposera plus que de trois mois pour proposer une solution aux familles qui auront été reconnues comme prioritaires.
On sait déjà que, dans les zones tendues, c'est-à-dire en Île-de-France et dans les départements les plus concernés – dans les zones non tendues, le DALO est parfois un non-sujet ! –, les services d’instruction des dossiers ont bien du mal à respecter les délais, ...
... tout comme les préfets, à proposer des logements pour les familles prioritaires !
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est double.
En premier lieu, de quels moyens supplémentaires les commissions disposeront-elles pour instruire les dossiers qui afflueront en nombre ? Vous envisagez de réformer et de restructurer le questionnaire que les familles devront remplir, le rendant beaucoup plus exhaustif, ce qui provoquera un travail supplémentaire pour ces commissions. Par conséquent, pourquoi le nombre de ces dernières n’a-t-il pas été doublé dans la région d’Île-de-France, alors que la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, dite loi « MOLLE », le permettait afin d’accélérer les procédures ?
En second lieu, comment comptez-vous répondre à la demande de logements dans les zones tendues, alors que l’on n’y parvient pas aujourd'hui ?
Par ailleurs, je tiens à vous faire part de ma préoccupation, qui est celle de tous les maires, de droite ou de gauche, de communes comptant des quartiers en difficulté. Souvent, nous le savons bien, tout le contingent préfectoral sert au DALO.
Alors que l’objectif de mixité sociale est fondamental dans les quartiers en rénovation urbaine, mais aussi dans les villes sans quartier en rénovation urbaine, nous perdons quelque peu cet objectif de vue, …
M. Philippe Dallier. … ce qui est un risque très important pour l’avenir.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le sénateur, tout d’abord, la commission de suivi du DALO nous a récemment proposé de reporter l’échéance du 1er janvier 2011 concernant les délais d’instruction. Nous avons décidé de suivre son avis, et nous ne réduirons donc pas les délais d’instruction à partir du 1er janvier 2011.
Ensuite, vous posez une question fondamentale, celle du relogement au titre du DALO dans les quartiers relevant du dispositif de l’agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU. Si nous procédions de la sorte, nous nous heurterions à une difficulté en ce sens que nous ajouterions, en quelque sorte, de la pauvreté à la pauvreté.
Nous avons récemment signé des contrats avec un certain nombre de bailleurs sociaux d’Île-de-France. La décision que nous avons prise, c’est de mobiliser le contingent préfectoral, dont c’est la vocation, pour reloger les DALO dans tous les quartiers, à l’exclusion des quartiers ANRU. Un certain nombre de bailleurs sociaux ont accepté cette clause. D’autres l’ont refusée, croyez-bien que je le regrette !
Enfin, d’une façon plus générale, concernant le DALO, notamment en Île-de-France, nous avons, en effet, décidé de mobiliser le contingent préfectoral, parce que c’est l’outil principal à notre disposition pour pouvoir remplir l’obligation légale que cette majorité a votée.
Nous avons doublé le nombre de relogements au titre du DALO. Nous savons gérer ce droit au logement opposable sur l’ensemble du territoire, à l’exception de la région d’Île-de-France où la situation reste insatisfaisante.
La vraie réponse au DALO, c’est produire, produire, produire !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
J’utiliserai la minute qui me reste uniquement pour vous inciter, monsieur le secrétaire d’État, à faire de l’interdépartementalisation une réalité dans la région d’Île-de-France, celle que je connais le mieux.
En effet, en matière de mixité sociale, on ne peut pas régler le problème du DALO à l’échelle de la Seine-Saint-Denis entre les communes de ce seul département. Quelle que soit la bonne volonté du préfet, il ne pourrait pas régler pas les problèmes de son ressort !
Je n’ai pas le sentiment que la dimension interdépartementale inscrite dans la loi MOLLE soit encore tout à fait entrée dans les têtes et dans les faits. Je pense, notamment, au doublement du nombre des commissions. Bien qu’il soit autorisé par la loi, il n’est pas effectif.
J’espère simplement que les difficultés ne vont pas s’aggraver lors des échéances du 1er janvier 2011 et, surtout, du 1er janvier 2012. Il faut, en effet, se souvenir qu’à partir de cette date, tous ceux qui considèrent que le délai de réponse est anormalement long auront la possibilité de déposer un recours. Le nombre de dossiers déposés pourrait alors s’élever à 500 000, voire 600 000, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. Si ce scénario devenait réalité, nous serions en grande difficulté.
Monsieur le secrétaire d'État, l’une des premières priorités de nos concitoyens, c’est l’accès à un logement locatif décent correspondant à la taille de la famille et à ses revenus. La France des propriétaires, c’est bien, mais il ne faut pas opposer l’accession à la propriété au logement locatif social !
Les élus présidents d’organismes d’HLM, de retour récemment du 71ème congrès national de l’Union sociale pour l’habitat, l’USH, étaient déçus et en colère après l’annonce des mesures relatives au logement inscrites dans le projet de loi de finances pour 2011.
S’ils ont été élus à la tête de ces organismes d’HLM, c’est non pas pour constituer un matelas, comme cela a pu être suggéré, mais pour gérer, et bien gérer.
Dès lors, quand vous prévoyez, pour le prochain budget, de prélever 2 % sur leurs revenus locatifs, soit 340 millions d’euros par an durant trois ans, au total 1 milliard d’euros, opérant ainsi un véritable hold-up dans leurs finances, vous commettez, à mon sens, une double erreur.
D’abord, vous soutirez à des gestionnaires rigoureux une part de leurs ressources pour combler les propres carences de l’État en matière de logement social.
Ensuite, par cette opération, vous allez priver les locataires du bénéfice de travaux pourtant indispensables que réalisent, avec ces ressources locatives, ces bailleurs sociaux - construction de logements neufs, travaux de réhabilitation ou d’entretien, ou encore amélioration de la performance énergétique.
Vous le savez, le problème de plus en plus criant dans les collectifs HLM déjà anciens est non pas le montant des loyers, mais celui des charges qui surenchérissent dangereusement la quittance. En l’occurrence, vous semblez avoir moins d’états d’âme pour accepter les hausses de tarifs, par exemple d’électricité. Et pour ce poste de dépenses, il n’est pas prévu d’aide personnalisée au logement, l’APL, les seules aides étant celles des départements : le Fonds unique logement habitat, ou FUHL, et le Fonds énergie.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous rassurer les demandeurs de logements, les bailleurs sociaux, les collectivités territoriales qui sont devenues les premiers partenaires du logement social, et démontrer votre engagement en faveur de l’accès au logement social ? Allez-vous revenir sur cette décision qui met en péril le développement du logement social en France ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, nous avons effectivement, dans le cadre du projet de loi de finances, décidé de mettre en place une vraie mutualisation entre les bailleurs sociaux.
M. Daniel Raoul s’exclame.
En effet, nous considérons qu’en matière de logement, comme dans le cadre de toutes les politiques publiques, il est nécessaire de procéder à des économies budgétaires. Je l’assume totalement et j’assume cette politique !
Aujourd’hui, le monde HLM représente une capacité financière de 6, 5 milliards d’euros dont la marge d’autofinancement moyenne est de 12, 5 %, ce qui est considérable. Nous avons donc à y travailler ensemble.
Il n’est pas question de dire qu’il y a un matelas dans le monde HLM ! Simplement, nous constatons l’existence de marges de manœuvre, qu’il convient de mutualiser.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, les 340 millions d’euros seront redistribués, à l’euro près, au monde HLM par le biais de l’ANRU et les aides à la pierre. C’est la décision qui a été prise par le Gouvernement. Elle n’aura aucune incidence sur les loyers.
J’entends souvent dire que ces 340 millions d’euros signifient potentiellement 20 000 constructions de logements en moins ou des réhabilitations qui ne seront pas faites.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Permettez-moi de vous citer un autre chiffre : si les bailleurs sociaux tenaient leur engagement et vendaient 1 % du parc d’HLM, cela permettrait de constituer 2 milliards d’euros de fonds propres chaque année, c’est-à-dire de réaliser 100 000 logements sociaux de plus ! Telle est la réalité des chiffres !
Applaudissementssur les travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Je soulignerai deux réalités.
D’abord, le budget en faveur du logement social dans notre pays est passé de 800 millions d’euros en 2008 à une perspective de 400 millions d’euros en 2013. Le chiffre est inscrit dans la loi de finances dont nous aurons à discuter. Une telle diminution affectera tout le territoire, les zones tendues, comme les zones détendues !
Ensuite, la ponction de 1 milliard d’euros se fera exclusivement sur les locataires du monde HLM, et sur eux seuls !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Il n’y aura évidemment pas de mutualisation, puisque cette somme sera affectée au paiement des dettes de l’ANRU, c’est-à-dire des dettes contractualisées à l’égard des collectivités locales ou des organismes d’HLM. Il ne s’agit donc pas d’une péréquation.
Cette somme est également destinée à financer des aides à la construction.
Monsieur le secrétaire d'État, il ne revient pas aux locataires du monde HLM, et à eux seuls, de se substituer à la solidarité nationale !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le secrétaire d’État, j’orienterai ma question, en lien avec le débat des retraites, sur la problématique de l’accès au logement des retraités.
Un récent rapport sur l’état du mal-logement en France de la fondation Abbé Pierre rappelle que tous les seniors ne sont pas riches et bien portants comme Mme Bettencourt : 600 000 personnes âgées vivent actuellement avec une allocation de solidarité de 628 euros, ce qui les place sous le seuil de pauvreté, comme 8 millions de nos concitoyens aujourd’hui dans notre pays.
Comment se loger avec si peu de ressources ? Votre réforme des retraites va accentuer ce dysfonctionnement par un mécanisme très simple : l’allongement des durées de cotisations, cumulé avec le report de deux années de l’âge légal de départ à la retraite, va conduire à une diminution du montant des pensions.
Pourtant, nous savons très clairement que seule une politique publique volontaire en matière de revenus et, donc, de pensions, peut concrètement favoriser l’accès au logement.
C’est loin d’être le cas aujourd’hui : les prix des logements ont doublé en moins de dix ans et les loyers ont augmenté de 30 % à 50 % pendant la même période ! À l’évidence, les ressources des ménages n’ont pas suivi un tel rythme. Ainsi, l’association Consommation, logement et cadre de vie, la CLCV, et la fondation Abbé Pierre estiment à plus de 500 000 le nombre de ménages qui présentent des impayés de loyers de deux mois ou plus, soit une augmentation, sur quatre ans, de 96 % dans le parc privé et de 58 % dans le secteur public. Ce chiffre ne tient pas compte de la faible revalorisation des aides personnalisées au logement, qui est à l’origine d’une diminution de plus de 11 % de la solvabilisation.
Cette perte de pouvoir d’achat s’inscrit dans le cadre d’une politique du logement délétère, caractérisée notamment par la diminution continue des aides à la pierre, par la prochaine ponction des organismes d’HLM de l’ordre de 340 millions d’euros par an et l’obligation qui leur est faite de vendre leur patrimoine.
Aujourd’hui, il manque 900 000 logements, selon la fondation Abbé Pierre.
Il est clair que votre gouvernement mène une politique en rupture avec les valeurs qui sont au cœur de la République : la fraternité et la solidarité.
Aujourd’hui, c’est à chacun selon ses moyens ! Notre retraite, nous l’obtiendrons individuellement, par la voie de la capitalisation et non de la répartition. Et nous pourrons nous loger, sous l’unique condition d’être solvables et propriétaires !
Oui, les logements sont chers ! Oui, les retraités non fortunés pourront de moins en moins se voir garantir un droit au logement ! Cela est d’autant plus vrai que leur situation spécifique nécessite bien souvent des aménagements particuliers.
Je vous interroge donc, monsieur le secrétaire d'État : quand ce gouvernement va-t-il entendre, notamment en ce jour de manifestations, la voix du peuple ? Plus précisément, quelles mesures comptez-vous prendre pour faciliter l’accès au logement de ces populations fragilisées que même les bailleurs sociaux hésitent à accueillir dans leur contingent ?
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
Madame la sénatrice, la question que vous posez est essentielle dans un pays où la démographie – vous en discutez en ce moment même dans le cadre du débat sur les retraites – fait que l’on y vit plus longtemps, et c’est tant mieux !
Un certain nombre de questions se posent, notamment sur l’accès au logement.
J’apporterai trois éléments de réponse à votre question.
D’abord, si nous souhaitons recentrer les missions du monde HLM sur le logement des plus modestes, c’est justement pour répondre à la question que vous avez évoquée du vieillissement de la population.
De la même façon, si le Gouvernement souhaite accélérer l’accession à la propriété, c’est parce que cette dernière est aussi un moyen de permettre à nos concitoyens de préparer et de sécuriser leur retraite. Telle est la réalité ! Telle est la politique que nous menons !
J’ai récemment demandé à Mme Boulmier un rapport sur l’adaptation de l’habitat au défi de l’évolution démographique. En la matière, nous avons pris un certain nombre de décisions, notamment dans le cadre du grand emprunt, qui consacre 1, 25 milliard d’euros pour adapter nos logements à la précarité énergétique et y réaliser des travaux dans la perspective du vieillissement de la population.
Ensuite, les aides personnalisées au logement ont augmenté de 6 % ces trois dernières années, justement pour faire face à la problématique que vous avez évoquée, à savoir les difficultés de logement d’un certain nombre de nos compatriotes, notamment des personnes âgées.
Enfin, concernant les 340 millions d’euros que vous avez évoqués – et je m’adresse également à M. Repentin, qui me semble pourtant bien connaître ce dossier –, je veux rappeler une vérité : non, ce ne seront pas les locataires qui paieront cette contribution.
Ah ! sur les travées du groupe CRC-SPG.
La raison en est très simple : nous avons décidé que l’augmentation des loyers, qui relevait auparavant d’un « conseil » de l’État et qui était indexée à l’indice de référence des loyers, ou IRL, sera plafonnée dans une fourchette de 1 % maximum par an. Donc, les bailleurs sociaux ne pourront pas répercuter sur les locataires la contribution en question !
Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Monsieur le secrétaire d'État, vous n’en serez pas étonné, je ne partage pas vos analyses ! Certes, nos concitoyens vivent plus longtemps, mais pour beaucoup d’entre eux, on le sait, avec souvent nettement moins d’argent.
Je voudrais bien voir que les 340 millions d’euros à la charge des offices HLM ne seront pas pris sur le dos des locataires !
On sait déjà que ce seront forcément les locataires qui paieront. Leur contribution a même été évaluée à 80 euros par an. Comment vont-ils faire ? Ils n’ont pas le choix… .
En affaiblissant la capacité de construction des offices, cette mesure va également provoquer une hausse des loyers. En outre, les files d’attente des demandeurs vont s’allonger.
Il en est de même du montant des APL. Alors que le revenu maximum pour obtenir cette aide était de 2, 4 SMIC en 1977 pour une personne, il n’était plus que de 1, 07 SMIC en 2007. Nous voyons donc bien que la politique du logement s’effrite.
Comment accepter que la politique de logement social soit financée par la seule contribution des locataires HLM quand la nation entière subventionne le bouclier fiscal, qui représente aujourd’hui 640 millions d’euros réservés aux 19 000 foyers les plus aisés ?
Monsieur le secrétaire d’État, vous comprendrez que nous ne soyons pas d’accord avec vos réponses. Vous tournez le dos à une république solidaire, alors que, à l’inverse, le groupe CRC-SPG se prononce pour un grand service public du logement qui garantisse à tous le droit au logement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Monsieur le secrétaire d’État, le pouvoir d’achat des petits retraités est aujourd’hui notre préoccupation. C’est le coût de leur habitation qui pose un vrai problème dans notre pays, devenu en soixante-dix ans un pays de locataires.
Les 57 % de propriétaires recensés dans notre pays sont très majoritairement des Français appartenant aux classes aisées et les 43 % de locataires sont très majoritairement des Français fragilisés économiquement. Je tire de ce constat la certitude que c’est à nous, politiques, de proposer des solutions.
En effet, il n’est pas acceptable de laisser perdurer un système qui consiste à maintenir à l’état de locataire plusieurs millions de nos concitoyens à faibles revenus, en les subventionnant directement ou indirectement par le biais des bailleurs sociaux. Ce sont plus de 45 milliards d’euros par an qui sont engagés pour soutenir un système qui éloigne ses bénéficiaires de tout projet d’accession à la propriété.
Par conséquent, lorsque ceux qui ont de petits revenus arrivent à l’âge de la retraite, ils sont encore locataires et redevables d’un loyer qui continue d’augmenter. La charge financière assumée par la collectivité serait moindre si nous leur avions permis d’accéder à la propriété au début de leur parcours résidentiel.
Un couple de Français avec deux enfants peut cumuler près de 300 000 euros d’aide à la location au cours de son existence. Il est temps de remettre ce mécanisme en question et de demander aux bailleurs sociaux de faire accéder à la propriété massivement et plus tôt.
J’ai déjà eu l’occasion de soutenir que la propriété du logement valait bien un complément de retraite.
Les moyens financiers sont là et des financements extérieurs sont possibles. Je rappelle que 45 milliards d’euros consacrés chaque année à la location pourraient être basculés progressivement.
Monsieur le secrétaire d’État, je demande au Gouvernement de revoir le statut des bailleurs sociaux pour faire de ces derniers une force technique et financière dédiée prioritairement à l’accession à la propriété des classes les plus défavorisées.
L’État peut leur demander de vendre une partie de leur patrimoine existant, qui est parfois amorti, aux plus anciens locataires ou de construire prioritairement pour faire de la location-vente. C’est d’ailleurs dans cette perspective que les bailleurs sociaux ont été créés dans les années vingt !
Monsieur le secrétaire d’État, merci de préciser vos intentions à ce sujet.
Monsieur le sénateur, je connais votre engagement en faveur de l’accession à la propriété et votre volonté farouche de faire de la France un pays de propriétaires.
Cependant, mettons-nous bien d’accord sur un point. Certes, la France de propriétaires que nous appelons tous de nos vœux implique d’augmenter le taux de propriétaires, qui est aujourd’hui de 57 %, comme vous l’avez rappelé. L’objectif fixé par le Président de la République est d’arriver autour de 70 %.
Toutefois, il ne s’agit pas d’avoir 100 % de propriétaires, car dans ce cas il n’y aurait plus de mobilité dans le pays. Nous avons d’ailleurs pu constater que les conséquences de la crise étaient malheureusement plus dramatiques dans les pays où ce taux était plus élevé que chez nous, notamment aux États-Unis ou en Espagne.
Il faut donc rechercher le bon équilibre entre propriétaires et locataires sans opposer ces deux catégories.
Je partage totalement votre analyse sur la nécessité pour les bailleurs sociaux de vendre une partie de leur patrimoine. Nous avons fixé un objectif de vente de 1 % par an, dont la réalisation progresse. S’agissant par exemple du patrimoine relevant du « 1 % logement », cet objectif est maintenant accepté par tous les syndicats confondus.
Le Gouvernement, dans le cadre des conventions d’utilité sociale, les CUS, va pousser le monde HLM à vendre une partie de son patrimoine, car cela permettra de développer la mixité sociale, de dégager des moyens financiers supplémentaires et de donner vie au rêve des locataires HLM qui souhaitent devenir propriétaires.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne crois pas que l’on puisse comparer la France et les États-Unis.
S’agissant des logements locatifs, il me semble vraiment urgent d’interrompre l’aide à la construction. On est allé trop loin et cette politique est trop coûteuse.
M. Jean-François Mayet. Il est temps de dédier des aides importantes à l’accession à la propriété des plus faibles.
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.
Je suis convaincu qu’un tel dispositif peut fonctionner. Il suffit d’essayer !
Monsieur le secrétaire d’État, après avoir entendu les différentes interventions de mes collègues, je souhaiterais faire quelques remarques.
Tout d’abord, la France des propriétaires, ça ne marche pas.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
D’ailleurs, les aides que vous proposez aujourd’hui – je pense notamment au taux zéro refondu, qui n’est pas soumis à une condition de ressources – risquent de bénéficier uniquement à ceux qui avaient déjà un profil d’acheteur idéal.
Ensuite, je n’ai pas l’impression de voir les HLM se vider d’un seul coup et des ménages acheter en masse. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui sont concernées. Il y a, d’un côté, celles qui sont considérées comme solvables par les banques et, de l’autre, celles qui n’obtiennent pas de prêt auprès des établissements bancaires parce qu’elles n’ont pas un emploi stable. À cet égard, il faudrait faire le point sur le nombre de CDI signés dans notre pays, car, chacun le sait, l’octroi du prêt immobilier est souvent conditionné par le fait que les aspirants propriétaires sont employés en CDI.
Par ailleurs, la France des propriétaires est une notion à manier avec prudence. Le rêve d’un pays de propriétaires a pris forme aux États-Unis et en Espagne, à marche forcée, et cet idéal s’est révélé un marchepied vers la précarité, parfois vers la ruine de certains propriétaires.
Monsieur le secrétaire d’État, ne vous fondez pas sur ces exemples ! Essayons de trouver une solution qui soit conforme à la tradition de notre pays, qui comprend dix millions de locataires, mais aussi des personnes souhaitant accéder à la propriété.
Or la suppression de l’exonération de la contribution sur les revenus locatifs, qui représente un manque à gagner de 340 millions d’euros par an pour les offices HLM, revient à empêcher la construction de 20 000 logements, comme l’affirmait Didier Guillaume voilà quelques instants.
Et, dans le même temps, ce sont 10 millions de locataires du parc social qui paieront la moitié du bouclier fiscal. Ce n’est pas possible !
Il doit y avoir dans notre pays un minimum de solidarité et d’égalité. Sur ce plan, les systèmes anglo-saxons dont vous vous réclamez sont certainement une impasse…
M. Martial Bourquin. … et, surtout, ils nous empêcheraient de réunir les conditions nécessaires à la mise en place d’un vrai logement social de qualité dans notre pays.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, nous n’avons peut-être pas, en effet, la même philosophie en matière de politique du logement.
C’est vrai ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. En effet, cette majorité souhaite que les Français soient propriétaires.
Applaudissementssur les travées de l’UMP.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Il est possible que, au contraire, un certain nombre de sénateurs socialistes préfèrent que les Français soient locataires !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
J’attire simplement votre attention sur un point : il me semble que les états généraux du logement, qui ont été organisés par l’USH, l’Union sociale pour l’habitat, ont lancé un appel pour une réforme globale de l’accession à la propriété.
C’est exactement ce que nous avons fait à la demande de l’ensemble des acteurs du monde du logement au travers de ces états généraux, car il faut cesser d’opposer les politiques du logement dans notre pays.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Certes, dans notre pays, nous avons besoin de construire des logements sociaux. Cependant, là encore, l’objectif d’une personne qui entre dans un logement HLM n’est pas d’y rester à vie, mais de progresser dans son parcours locatif pour, un jour, devenir propriétaire.
Exclamations sur les mêmes travées.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C’est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas opposer les politiques les unes aux autres.
Marques de protestations sur les mêmes travées.
Notre politique vise à produire plus de logements sociaux, plus de logements locatifs privés et à faciliter l’accession à la propriété. Telle est la politique que mène ce gouvernement !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Claude Bérit-Débat. Je souhaite répondre à M. le secrétaire d’État au sujet des 340 millions d’euros qui sont ponctionnés aux organismes HLM, car c’est un vrai scandale.
Tout à fait ! sur les travées du groupe socialiste.
Après avoir siphonné le dispositif du 1 % logement, le Gouvernement, sous votre autorité, monsieur le secrétaire d’État, s’attaque maintenant aux fonds propres des organismes d’HLM.
Or, comme l’ont indiqué mes collègues, et il faut y insister, 340 millions d’euros de recettes en moins, c’est 2 % d’augmentation de loyer pour les pauvres, qui vont devoir compenser la défaillance du Gouvernement, notamment concernant l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU.
Ensuite, quelles seront les conséquences d’une telle mesure pour les collectivités locales dont nous sommes les représentants au sein de la Haute Assemblée ? Les bailleurs sociaux se tourneront vers les collectivités locales pour remplacer leurs fonds propres, afin de faire face au surenchérissement des prix des terrains et aux surcoûts liés aux normes relatives aux performances énergétiques exigées par les collectivités.
Ce dispositif se retourne donc à la fois contre les locataires et contre les politiques des collectivités territoriales, au premier rang desquelles se trouvent les communes.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. François-Noël Buffet. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous poser une question relative à l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, qui impose aux communes un objectif de 20 % de logements sociaux.
Ah ! sur les travées du groupe socialiste.
Cette obligation concerne les communes d’Île-de-France dont la population est au moins égale à 1 500 habitants, et celles des autres régions qui comptent au moins 3 500 habitants. La loi de 2006 a fait évoluer cette disposition en intégrant dans ce quota de logements sociaux ceux qui relèvent de l’accession sociale à la propriété, mais seulement pour une durée de cinq années.
Il me semble que, sur ce point, nous pourrions aller encore plus loin. En effet, les plafonds de revenus ouvrant droit à l’accession sociale à la propriété, d’une part, et ceux exigibles pour la location d’un certain type de logement social, d’autre part, sont sensiblement les mêmes.
Autrement dit, le fait de devenir propriétaire dans le cadre de l’accession sociale à la propriété ne change en rien les conditions de ressources des bénéficiaires de ce dispositif.
À mon avis, il faudrait remettre ce texte sur le métier afin de le faire évoluer. Je sais qu’en évoquant l’éventualité de remettre en cause ce taux de 20 %, je soulève un tabou. Il me paraît pourtant tout à fait possible d’amender l’article 55. Si l’on acceptait d’intégrer l’accession sociale à la propriété dans le quota du logement social, on pourrait placer le curseur plus haut, soit à 25 %, 26 %, voire au-delà.
À tout le moins pourrait-on prévoir d’intégrer l’accession sociale à la propriété dans le quota des 20 %. Cette proposition mérite d’être examinée, car elle serait utile aux communes qui n’ont pas encore atteint cet objectif, et même à celles qui l’ont largement dépassé, car elles ont également tout intérêt à encourager l’accession sociale à la propriété.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je rappelle, tout d’abord, que le Gouvernement tient à l’application de la loi SRU et au pourcentage de 20 % de logements sociaux dans toutes les communes de plus de 3 500 habitants, car cette disposition favorise la mixité sociale.
J’ajoute que, si les communes ayant moins de 20 % de logements sociaux sur leur territoire ne respectent pas l’objectif de mixité sociale, celles qui en ont plus de 50 % ne la respectent pas davantage.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Vous m’interrogez, monsieur le sénateur, sur le devenir des logements sociaux vendus à leurs locataires et qui sont, à ce titre, intégrés dans le quota des 20 % de logements sociaux d’une commune pour une durée de cinq ans seulement. Pour ma part, je suis attaché à cette mesure, car un logement social n’a pas vocation à être l’habitat de toute une vie. Nous souhaitons, au contraire, encourager la rotation des logements au sein du parc d’HLM.
Un logement social transféré du parc locatif à celui de l’accession à la propriété ne participe plus à cette rotation.
La règle des cinq ans me paraît donc constituer un bon compromis, car elle permet d’établir un équilibre entre la nécessité d’encourager les bailleurs sociaux à vendre une partie de leur parc d’HLM et celle d’assurer la rotation des logements sociaux.
Enfin, cette durée de cinq ans représente un délai satisfaisant pour la construction de nouveaux programmes de logements sociaux. Notre objectif est très clair : il s’agit d’encourager les bailleurs sociaux à vendre une partie de leur parc d’HLM pour construire de nouveaux logements sociaux.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je n’aurai pas la prétention de contester les propos de M. le secrétaire d’État. Je souhaite simplement que l’on s’inscrive dans une logique de parcours résidentiel.
L’accession sociale à la propriété présente, selon moi, un intérêt non négligeable. Tout d’abord, elle permet de libérer des logements sociaux, qui bénéficieront à des personnes n’y ayant pas encore accès, compte tenu de l’actuelle situation de blocage du parc locatif social. Ensuite, elle augmente la capacité financière des bailleurs sociaux, qui peuvent ainsi réinvestir.
Il ne faut pas envisager ce dispositif au travers du seul prisme d’une typologie de logements, mais de façon globale. C’est sur ce point qu’il nous faut travailler !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, d’y avoir participé.
Avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures, sous la présidence de M. Roger Romani.
(Texte de la commission)
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons les explications de vote sur les amendements identiques n° 1, 64, 251, 319 rectifié et 635 rectifié, tendant à supprimer l’article 1er.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
L’article 1er tend à créer un comité de pilotage des régimes de retraite. Les arguments développés sur ce sujet par la commission et le Gouvernement ne m’ont pas convaincue.
Vous me reprochez, monsieur le secrétaire d’État, de critiquer votre seule prise en considération de l’aspect comptable de la réforme que vous nous proposez. Certes, à toute réforme doit être associée la garantie de son financement et de sa pérennité financière, ce qui n’est d’ailleurs pas le cas en l’espèce, puisque 4 milliards d’euros manqueront. Mais l’argument comptable ne peut pas être le seul avancé.
Sourires
Non, mon cher collègue, mais je suis opposée aux réformes qui prennent en compte seulement l’aspect comptable et oublient le point de vue humain.
Monsieur le secrétaire d’État, votre préoccupation comptable dénote plus votre souci d’apporter une réponse satisfaisante aux attentes et aux injonctions des agences de notation que celui d’assurer un niveau de vie satisfaisant aux futurs retraités de notre pays.
Quant au COPILOR, acronyme retenu par Mme Demontès, …
Nouveaux sourires
… il répond parfaitement à la logique du Gouvernement,
En effet, sur la base du rapport qui sera remis par le COR, vous consulterez le COPILOR et vous vous appuierez sur ses conclusions pour envisager une nouvelle réforme des régimes de retraite destinée à maintenir leur équilibre financier au-delà de 2020 et pour formuler des propositions.
Malgré vos dires, monsieur le secrétaire d’État, le Parlement est bel et bien dépossédé de sa prérogative en matière de proposition législative. Légiférer dans de telles conditions est contraire à la Constitution, qui établit clairement que cette prérogative est conférée au Parlement.
De plus, une consultation, à laquelle vous tenez tant, existe déjà auprès du Conseil d’orientation des retraites. Nous l’avons dit les uns et les autres, mais il est bon de le rappeler. De surcroît, la pluralité des membres du COR est meilleure que celle du nouveau comité que vous entendez créer.
Pourquoi instaurer une nouvelle consultation, si ce n’est pour aboutir immanquablement à une nouvelle réforme des retraites après 2020 ?
Les arguments développés par M. le secrétaire d’État et de M. le rapporteur ne m’ont pas convaincue. Au sein de mon groupe, nous ne doutons pas que le rapport du COR sera un outil au service du Gouvernement, lui permettant de justifier encore plus facilement toutes les mesures antisociales qu’il devra prendre d’ici à 2020.
Mes chers collègues, je vous incite donc à ne pas voter la création de ce nouveau comité. Il suscite de nombreuses inquiétudes, quant à son rôle futur et sa légitimité, mais aussi en ce qui concerne les véritables objectifs visés par le Gouvernement au travers de ce comité.
C’est pourquoi je vous invite à adopter l’amendement n° 1 tendant à la suppression de l’article 1er.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Je crois me souvenir que le Gouvernement avait annoncé une réduction des trop nombreuses instances créées pour répondre à des problématiques diverses et variées. Cette déclaration s’est traduite, au fil des années, par la suppression de bon nombre d’instances consultatives ou délibératives. Pourtant, chacun peut le constater, leur nombre demeure encore relativement élevé. Leur efficacité, en particulier en matière de prévision, reste parfois à démontrer, alors que leur coût de fonctionnement est, quant à lui, bien réel.
Or, avec l’article 1er du présent projet de loi, vous nous proposez, monsieur le secrétaire d’État, la création d’un comité supplémentaire, d’un « machin », comme l’aurait sans doute nommé le général de Gaulle ; vous jetez une sorte de poudre de perlimpinpin aux yeux des retraités.
Au nom du légitime principe d’économies, sans doute aurait-il été plus judicieux d’inclure cette nouvelle structure au sein du COR
M. Jean-Louis Carrère acquiesce.
La création de ce comité de pilotage ajoute à la complexité du système et renforce la confusion qui existe déjà aux yeux des Français.
Comme l’a très justement indiqué Christiane Demontès tout à l’heure, cette disposition constitue un double aveu : celui d’un dispositif dont l’équilibre n’est absolument pas garanti et celui de l’annonce pour 2012 d’un nouveau rendez-vous au cours duquel de nouvelles dispositions relatives à l’âge ou d’ordre financier seront de nouveau infligées aux salariés.
En d’autres termes, ce comité est l’outil de l’improvisation gouvernementale. C’est pourquoi je refuse de voter en faveur de sa création, qui ne répond en rien aux légitimes craintes de nos concitoyens, toujours plus nombreux à manifester dans nos rues. Selon la dernière estimation en ma possession émanant d’une grande centrale syndicale, ils seraient plus de 3, 5 millions.
Monsieur le secrétaire d’État, ne pariez pas sur l’essoufflement de ce type de référendum grandeur nature ! Ne jouez pas la stratégie du pire.
Soldez l’article 1er, dont l’inutilité a été prouvée par les différents intervenants. Comme vous l’avez fait pour les acquis sociaux avec les articles 5 et 6, soldez ce comité Théodule, extérieur aux véritables détenteurs de la légitimité, à savoir les élus.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Au cours de ce débat quelque peu passionné, ce qui est tout à fait normal, nous vous présenterons, mes chers collègues, un amendement de repli, qui ne recueillera peut-être pas l’unanimité, mais dont l’adoption pourrait permettrait de trouver une solution donnant satisfaction à nombre d’entre nous s’agissant de ce fameux comité.
Aux termes de l’alinéa 4 de l’article 1er, « le comité de pilotage des régimes de retraite veille au respect des objectifs du système de retraite par répartition ». Lors de la présentation de l’amendement n° 65, nous vous proposerons de remplacer le mot « veille » par les mots suivants : « fait des propositions au Gouvernement et au Parlement afin que ceux-ci veillent ». En effet, ce n’est pas au comité de pilotage d’assurer un contrôle sur les régimes de retraite. D’ailleurs, tous les débats et rapports relatifs aux retraites ont toujours attribué à de tels comités de pilotage un rôle propre, différent de celui des élus : ces comités ne doivent en aucun cas se substituer au pouvoir législatif, principe que nous voulons mettre en œuvre par le biais de l’amendement précité. Ils ne doivent pas davantage se substituer au Gouvernement ni au Conseil d’orientation des retraites. Ce serait une erreur.
La création du comité tel que présenté aurait pour conséquence de diminuer le rôle du Parlement. Vous ne pouvez pas nous faire accepter, monsieur le secrétaire d'État, qu’un comité composé de personnalités n’ayant pas la légitimité issue du suffrage universel décide à la place de ceux qui la possèdent.
À la lecture de l’article 1er, nous décelons les intentions cachées derrière la création de ce comité. Ainsi, l’alinéa 4 précise que l’une des missions du comité de pilotage sera de veiller à ce que nos retraites par répartition restent au cœur du pacte social qui unit les générations.
Ce grand principe, au respect duquel nous sommes attachés, est-il au rendez-vous, alors même que le report de l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans affectera nos concitoyens qui auraient pu bénéficier d’une retraite à taux plein dès 60 ans, alors même que le report de l’âge requis pour percevoir une pension sans décote de 65 à 67 ans concernera les personnes, essentiellement des femmes, qui ne peuvent obtenir une retraite à taux plein qu’en atteignant l’âge légal de départ à la retraite ? En outre, quel sera l’avenir des jeunes qui, à l’heure actuelle, sont déjà relativement âgés lorsqu’ils ont la chance d’entrer sur le marché du travail ? Devront-ils travailler jusqu’à 70 ans ?
Ce grand principe est-il encore d’actualité, alors que le financement des 45 milliards d’euros de déficit passera nécessairement, en partie, par une diminution des prestations servies, même si d’aucuns soutiennent le contraire, sans pourtant convaincre l’opinion publique ?
Peut-on parler d’équité alors que les efforts fiscaux nécessaires, imputés à 90 % aux salariés, ne concerneront pas les bénéficiaires du bouclier fiscal ?
Telles sont les différentes réflexions que nous inspire la création de ce comité de pilotage, que j’hésite à qualifier de « comité Théodule », expression quelque peu méprisante, mais dont l’utilité est de faire semblant et de masquer les incohérences du présent projet de loi et de la politique gouvernementale en matière de retraite.
Nous le soulignons comme Mme David, les explications que M. le rapporteur et M. le secrétaire d’État nous ont fournies avant les questions cribles thématiques ne nous ont absolument pas convaincus.
C’est une habitude, mon cher collègue !
Nous avons la conviction que l’article 1er a été rédigé conformément au précepte de Georges Clemenceau selon lequel pour enterrer un problème, il suffit de créer une commission.
Or, monsieur le secrétaire d’État, depuis le début du débat, les problèmes que vous voulez enterrer sont multiples ! Seule une difficulté échappe à cette intention, l’équilibre financier des régimes. Mais sachez que ce sujet nous préoccupe autant que vous, voire plus.
C’est la raison pour laquelle – elle a été fort bien exposée par le président du groupe socialiste, Jean-Pierre Bel –, nous avons présenté une réforme alternative comportant un plan de financement qui assure la pérennité des régimes de retraite à l’horizon 2020. Cette réforme est beaucoup plus juste, beaucoup plus équilibrée, beaucoup plus équitable que la vôtre, car vous, vous avez choisi de faire peser la quasi-totalité de l’effort sur les salariés.
Mais en l’occurrence, monsieur le secrétaire d’État, l’essentiel est la rédaction de l’article 1er.
Vous nous avez longuement expliqué que le comité de pilotage serait chargé de réfléchir, de faire des propositions sur des sujets aussi importants que la solidarité intergénérationnelle et intragénérationnelle, le maintien d’un niveau de vie satisfaisant pour les salariés.
Si telle avait été réellement votre intention, vous n’auriez pas rédigé ainsi cet article. Le texte proposé pour l’article L. 114-4-2 du code de la sécurité sociale comprend trois alinéas. Le premier d’entre eux fait référence aux objectifs du système de retraite par répartition définis dans le code susvisé. Les deux suivants ne font, en réalité, que poser la question de l’équilibre financier.
À mon sens, la seule fonction que vous assignez au comité de pilotage est d’assurer cet équilibre. Si vous insistez autant, c’est probablement que vous doutez de l’efficacité des mesures que vous nous soumettez pour assurer la pérennité de l’équilibre financier. Soit dit en passant, le système que nous vous proposons n’a pas encouru, jusqu’à présent, de critiques de votre part sur ce point essentiel !
Tel qu’il est rédigé, le rapport de la commission vend la mèche ! À la page cinquante-huit, en tête de l’objet de l’article 1er, on peut lire : « Cet article a pour objet de créer le comité de pilotage des régimes de retraite, nouvelle instance chargée du pilotage stratégique du système de retraite afin de veiller, notamment, … », – d’ailleurs, tout se joue sans doute autour de cet adverbe ! – « …au retour à l’équilibre financier à l’horizon 2018. »
Voilà l’aveu que la seule chose qui vous préoccupe, c’est non pas l’équité ou l’efficacité, mais l’équilibre financier, au détriment de tout le reste.
Je l’ai dit tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, vous voulez passer sous silence une multitude de problèmes. Je pense, en particulier, à l’équité entre les hommes et les femmes, à leurs inégalités en matière de retraite, à la pénibilité du travail, dont vous affirmez qu’elle a été réglée par vos mesures, à la médecine du travail et à son indépendance que vous bafouez dans ce texte. Je pourrais continuer encore longtemps cette liste.
En tout état de cause, la rédaction même de cet article nous conduit à douter très profondément de la capacité de ce comité à se saisir de ces nombreux problèmes.
Les partenaires sociaux qui y participeront, notamment les représentants du monde du travail et des organisations syndicales, s’en apercevront probablement assez vite : ce comité est un jeu de dupes.
C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement de suppression.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je serai bref, beaucoup de choses ayant été dites.
Partout et toujours, vous nous parlez de simplification et de rationalisation. Vous avez d’ailleurs travaillé à la promotion du concept de millefeuilles, qui est pour le moins variable, puisqu’il consiste à simplifier dans certaines occasions et, dans d’autres, comme dans ce cas particulier, à complexifier !
Il est paradoxal que vous nous proposiez l’instauration d’un comité de pilotage qui ne simplifie ni la lecture du paysage ni la compréhension des responsabilités.
Son utilité n’est absolument pas prouvée. Il vient, en effet, s’ajouter au Conseil d’orientation des retraites en matière de prospective, ainsi qu’à la commission de garantie des retraites. Surtout, il vient empiéter sur le champ des responsabilités politiques, celles qui incombent au Gouvernement que vous représentez, comme celles qui incombent au Parlement que nous représentons.
Force est de constater que, avec cet article, les responsabilités sont moins identifiées et plus diluées, sur un sujet pourtant crucial. Au mieux, cet article est inutile. Il pourrait aussi avoir un autre objectif, celui de vous laisser davantage les coudées franches par la suite.
Vous n’avez pas entendu les organisations syndicales lorsqu’elles ont été reçues au ministère. Vous les avez rencontrées, certes, mais leur argumentation ne vous a pas atteint.
Vous refusez d’entendre aujourd’hui le mouvement social et vous demandez à notre assemblée, par le biais de cet article et d’autres, une sorte de chèque en blanc.
Pour ma part, avec le groupe socialiste, je défendrai la responsabilité du Parlement et je ne voterai pas l’article 1er que vous proposez. D’ailleurs, je pense que, sur les travées de notre assemblée, ce sentiment est partagé au-delà de la gauche.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
En 1995, compte tenu de la situation des comptes sociaux, le Gouvernement avait jugé utile de procéder à l’adoption de la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale.
Une telle démarche visait, en réalité, à consacrer la fin de la négociation paritaire pour ce qui concerne les choix et les orientations en matière de finances sociales.
Depuis l’adoption de la loi organique, nous avons eu l’occasion de discuter de maintes lois de financement, devenues un passage obligé de la session d’automne, des lois de financement, qui ont, de manière générale, consacré la réduction de la qualité des prestations sociales et largement développé la prise en charge par les assurés eux-mêmes de leurs dépenses de santé ou encore du coût de l’éducation de leurs enfants – nous ne pouvons que le constater –, sans parler du lent mais sûr processus qui a conduit le pouvoir d’achat des retraités vers une chute régulière...
De manière tout aussi habituelle, les conseils d’administration, tant de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, que de la Caisse nationale d’assurance maladie, la CNAM, et de la Caisse nationale d’allocations familiales, la CNAF, ont très régulièrement exprimé un avis négatif sur les lois de financement de la sécurité sociale.
Toujours est-il que ces lois ont été votées, les majorités parlementaires passant outre l’avis des partenaires sociaux.
L’équilibre – si l’on peut dire – de la réforme « Juppé » s’est donc établi en fonction de la devise « Cause toujours ! »
Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.
Par ce rappel, je vous indique que notre rejet de ce comité de pilotage des régimes de retraite se fonde expressément sur le recul démocratique que constituerait l’adoption de l’article 1er.
Alors même que les partenaires sociaux ne peuvent se faire réellement entendre des parlementaires votant les lois de financement, comment un comité de pilotage réuni sous les auspices de la plus parfaite logique technocratique et comptable, comme le disait ma collègue Annie David, pourrait-il avoir plus d’écoute de l’opinion des partenaires sociaux ?
De plus, comment accepter que ce comité puisse dicter leur conduite aux représentants élus de la nation ? Oui, monsieur le secrétaire d’État, le Parlement est dessaisi !
C’est pourtant bel et bien ce schéma qui est aujourd’hui retenu par votre gouvernement. Qu’on ne s’y trompe pas, donner au comité de pilotage le pouvoir qu’il est appelé à exercer en vertu des dispositions de l’article 1er, c’est vider d’une part importante de leur contenu les lois de financement de la sécurité sociale ; au surplus, c’est déposséder plus encore les assurés sociaux eux-mêmes de leurs droits !
Nous ne pouvons donc que vous inviter, mes chers collègues, à voter la suppression de cet article et, face aux 3, 5 millions de Français qui ont manifesté aujourd’hui, à marquer votre choix en adoptant ces amendements de suppression par scrutin public !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Avec l’article 1er se pose, à nouveau, la question de la réforme des retraites et son financement.
Cet article traduit l’embarras du Gouvernement, qui se rend compte que sa réforme injuste est inefficace et, en tout cas, incapable d’assurer un financement pérenne des régimes de retraite.
D’abord, vous proposez de tarir les ressources des salariés pour financer une crise dont ils ne sont absolument pas responsables, puisqu’elle est issue de la spéculation des banques et des entreprises.
Ensuite, une fois que vous aurez vidé les poches de toutes ces femmes et ces hommes les plus modestes, qui subissent déjà les conséquences de cette crise, quelles ressources allez-vous chercher ? Quels revenus allez-vous ponctionner ?
Certainement pas ceux des plus riches, puisque le financement de votre réforme, à l’image du bouclier fiscal, est assuré à hauteur de 80 % par les salariés et les retraités, alors que les plus riches et les entreprises ne sont mis à contribution qu’à hauteur de 10 % !
Votre réforme, ignorant la dimension humaine du problème des retraites, a pour seul objectif le retour à l’équilibre pour plaire aux agences de notation.
Cet équilibre est précaire. En effet, si nous calculons le coût pour les finances publiques du paquet fiscal pour l’été 2007, nous avoisinons 34 milliards d’euros.
C’est un nouveau passif à combler pour les comptes publics. Vous entendez le solder avec le Fonds de réserve pour les retraites, qui s’élève, lui aussi, à 34 milliards d’euros.
Voilà votre sens de l’équilibre, fondé sur des principes de trésorerie à court terme !
Avec ce projet, vous ne cherchez qu’à camoufler, au moins jusqu’en 2012, le gaspillage dont vous êtes responsables. Vous le savez, dès lors que vous aurez pillé le Fonds de réserve pour les retraites, le problème du financement des retraites sera à nouveau impitoyablement posé.
Les mesures que vous aviez engagées en 2003 devaient pourtant permettre d’assurer l’équilibre financier des régimes de retraite. Tel n’est pas le cas.
Voilà pourquoi les sénateurs du groupe CRC-SPG ont déposé une proposition de loi garantissant le financement du droit à la retraite à 60 ans. §
Je vous en recommande la lecture, monsieur le secrétaire d’État. Cette proposition prévoit des mesures de financement qui sont fondées non pas sur la fiscalité, mais plutôt sur les contributions sociales dont le Gouvernement ne cesse de proposer des exonérations et des exemptions.
Je vous renvoie à l’article 2 de cette proposition de loi, qui démontre notre sens de l’équilibre financier, bien différent du vôtre. Nous voulons qu’au sein des entreprises, le partage entre le capital et le travail soit rééquilibré en faveur de ce dernier, pour amener les entreprises à transférer leurs bénéfices principalement vers le financement du travail et les investissements, plutôt que vers les dividendes à des fins spéculatives.
Cet équilibre, vous l’avez compris, est diamétralement opposé à celui que vous recherchez.
Pour toutes ces raisons, je voterai cet amendement et je vous invite, mes chers collègues, à en faire autant.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
Le groupe socialiste souhaite la suppression de l’article 1er, car, s’il était adopté, le Gouvernement et le Parlement perdraient leurs prérogatives au travers de cette disposition.
Je ferai écho aux remarques de M. le rapporteur, et en particulier à deux de ses phrases, lors de sa réponse à l’ensemble des orateurs qui ont défendu leur amendement de suppression de l’article.
Tout d’abord, s’agissant de l’équilibre financier, il a souligné qu’il importait d’assurer la pérennité financière, comme le prévoit cet article. Ensuite, il a insisté sur la nécessité de garantir un certain niveau de vie des retraités.
Ces deux aveux montrent que le projet de loi, tel qu’il est proposé, est injuste et, surtout, qu’il n’est pas pérenne.
Par ailleurs, à l’instar de plusieurs de mes collègues, je m’interroge sur la création d’un nouveau comité. Nous venons d’apprendre qu’il pourrait s’appeler COPILOR. Le nom est bien choisi, puisqu’il s’agira en effet de copie : ce comité copiera un certain nombre de modèles, en particulier les mauvaises pratiques.
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Avec la création de ce comité, on peut s’interroger, en contrepartie, sur ce que deviendront les fonctions des missions respectives des ministères, de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, du COR, des conseils de surveillance des caisses de vieillesse, qui, d’ailleurs, ne se réunissent pratiquement plus.
En créant ce nouvel organisme, qui est inutile, on assèche les fonctions de ceux qui existent déjà.
En outre, par définition, ce comité devrait assurer une pérennité financière. Mais est-il de bonne politique de confier à une autorité administrative indépendante les décisions qui doivent appartenir au Gouvernement et être contrôlées par le Parlement ?
Pour conclure, je voudrais m’interroger sur le rôle du conseil de surveillance de la CNAV qui, lui, ne s’est pas réuni depuis maintenant trois ans. Surtout, je reviendrai sur les remarques qu’a formulées la présidente de cet organisme et qu’a rappelées le président de notre groupe cet après-midi : à propos du financement du projet de loi qui nous est présenté, elle a souligné, d'une part, que le compte n’y était pas, puisqu’il manquait entre 4 et 5 milliards d'euros, et, d'autre part, que la pérennité de cette réforme n’était plus assurée à partir de 2018.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, avec les autres membres du groupe socialiste, je soutiens les amendements de suppression de cet article 1er et je vous invite à nous imiter pour que nous en revenions à davantage de sérieux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous ai fait part tout à l'heure des réserves d’un certain nombre de membres de la majorité. Toutefois, des explications données par M. le rapporteur et par vous-même, je tire deux éléments de nature à rassurer
Premièrement, la coexistence des deux comités a peut-être – en tout cas, c’est mon interprétation – un caractère temporaire et transitoire, ce qui signifie que le processus dans lequel nous sommes engagés est évolutif.
Deuxièmement, vous avez réaffirmé que la décision ultime appartiendrait au Parlement. Dans la méthode que vous avez définie pour le comité de pilotage, vous avez nettement distingué trois phases et vous avez souligné que, contrairement à ce que viennent d’affirmer un certain nombre d’orateurs, le choix final reviendrait au Parlement.
En conséquence, monsieur le président, je retire l’amendement n° 635 rectifié.
Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
L'amendement n° 635 rectifié est retiré.
La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le sigle « COPILOR » est incontestablement tout à fait séduisant.
Sourires sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.
Toutefois, ce comité a été l’objet de propos si peu flatteurs que je n’ai pas à en rajouter, vous le comprendrez.
Monsieur le secrétaire d'État, vous vous efforcez de traiter cette question sur un plan purement technique…
M. François Fortassin. … alors que, au fond, nous sommes au cœur d’un débat éminemment politique.
Bien dit ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Quel est le problème essentiel ici ? Nos concitoyens vous demandent l’équité.
Or, à la limite, les inégalités de revenus sont plus importantes entre les retraités – on peut en effet considérer que les pensions sont des revenus –, que parmi les actifs engagés dans la vie professionnelle, ce qui est proprement scandaleux. Une telle situation méconnaît la dignité de nos concitoyens. Il s'agit là d’un problème politique, et il ne sera pas résolu par un comité technique !
C'est la raison pour laquelle, avec la majorité des membres de mon groupe, je voterai ces amendements identiques de suppression.
Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur Fortassin, je ne crains pas, bien entendu, le débat politique. Il se trouve simplement que, quand on discute des régimes de retraite, malgré tout le charme et la poésie de ce sujet
Souriressur les travées de l’UMP.
D'ailleurs, nous avons mené sur les articles 5 et 6 du projet de loi un véritable débat politique, qui a été nourri, notamment, par les remarques de l’opposition.
Je vous assure donc que je ne fuis pas le débat politique.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je ne fuis pas non plus la notion d’équilibre financier. Tout ce que j’ai tiré de plusieurs de vos interventions, c’est qu’il faudrait presque que nous nous excusions de viser l’équilibre des régimes de retraite !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Il ne me semble pas complètement insensé d’avoir l’ambition, dans le cadre d’une réforme des retraites, d’équilibrer les régimes, et je n’entrerai pas dans le jeu sémantique consistant à dire que nous en faisons trop ou pas assez.
La vérité, c’est que nous sommes attachés à l’équilibre des régimes de retraite, parce que nos concitoyens tiennent à ce que leurs pensions soient versées.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.- Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Cela dit, j’apporterai quelques éléments d’information pour répondre plus précisément encore à plusieurs intervenants.
Tout d'abord, madame David, madame Schurch, je ne crois vraiment pas que l’on puisse affirmer que le Parlement se trouve en quoi que ce soit dessaisi à travers ce texte, pas même au profit du COPILOR.
Comme je l’ai souligné tout à l'heure, à travers ce projet de loi, nous rétablissons le vote par le Parlement des mesures d’âge relatives aux régimes de retraite. C’est vous qui, en 1985, aviez transféré cette prérogative du législatif au réglementaire, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition !
En 2010, à l’inverse, nous rendons au Parlement le pouvoir que vous lui avez pris pour le donner au Gouvernement.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Non, au Parlement ! Monsieur Carrère, vous êtes bien pessimiste : vous semblez douter de votre capacité à exercer, demain, les responsabilités…, et je vous comprends !
Souriressur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.
Cela dit, c’est au Parlement que nous rendons ce pouvoir.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. En l’occurrence, la majorité actuelle n’est pas socialiste, mais au fond cela ne change rien.
Mme Christiane Demontès proteste.
En second lieu, monsieur Kerdraon, monsieur Botrel, vous avez formulé une remarque sur la simplification du paysage administratif que je trouve au demeurant plutôt sensée.
Monsieur le sénateur, ce n’est pas parce que vous êtes l’auteur d’un propos qu’il est nécessairement faux ! Je n’entrerai pas dans la logique, qui est parfois la vôtre, du : « Quand ils disent blanc, nous disons noir ». Quand vous tenez des propos sensés, je vous donne raison. Et c’est le cas ici : vous avez souligné que la création du nouvel organisme ne devait pas compliquer la situation existante.
C'est la raison pour laquelle je vous précise que, en même temps que le COPILOR sera mis en place, la conférence pour la revalorisation des retraites, la commission de garantie des retraites et le comité de pilotage pour l’emploi des seniors disparaîtront. Comme vous le constatez, pour un organisme créé, trois organismes seront supprimés. Votre remarque était pleine de bon sens, et c’est la raison pour laquelle nous l’avons devancée.
Monsieur Teulade, vous avez affirmé que le COPILOR manquera de légitimité par rapport aux organismes élus. Je me permettrai de vous faire remarquer que personne ne conteste la légitimité du COR. J’ai d'ailleurs rappelé tout à l'heure qu’il ne fallait pas avoir une vision trop critique ou simpliste du diagnostic qu’il a émis.
La logique est exactement la même avec le COPILOR, dont vous avez affirmé qu’il ne disposait d’aucune légitimité démocratique. Je crois vous avoir montré que nous rendions au Parlement des pouvoirs dont il avait été dépossédé. Très clairement, le COR possède une capacité d’expertise et le COPILOR est une force de suggestion et d’inflexion, ce qui ne remet nullement en cause, bien entendu, la qualité des avis qu’il rend.
Madame Schurch, en évoquant les années 1995 et 1996, vous avez laissé entendre qu’il y aurait eu alors un dessaisissement du Parlement. Je rappellerai que c’est bien en 1996 qu’ont été créées les lois de financement de la sécurité sociale ; ces lois permettent au Parlement de mener un véritable débat sur un pan important des finances publiques qui, jusque-là, lui échappait.
Ainsi, en tant que parlementaires, vous pouvez aujourd'hui vous exprimer sur ces sujets, ce qui n’était pas le cas auparavant, et ce point me paraît tout à fait important.
En dernier lieu, madame Schurch, vous avez affirmé que l’ensemble des organismes qui avaient été consultés sur ce projet de loi avaient émis un avis défavorable. Toutefois, je me permets de vous le faire remarquer, le conseil d’administration de la CNAV a rendu un avis positif, ce qui n’est pas rien. Là encore, il fallait nuancer vos propos, qui laissaient penser que tous les avis formulés sur ce texte étaient critiques, alors que tel n’est pas le cas.
Pour terminer, sur le fond du sujet, mesdames, messieurs les sénateurs, il serait évidemment plus facile de ne rien faire, même si je ne prétends pas que c’est ce que vous préconisez. Toutefois, compte tenu de la situation des finances des régimes de retraite, pour notre part, nous prenons nos responsabilités et nous les assumons totalement.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 1, 64, 251 et 319 rectifié tendant à supprimer l’article 1er.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 17 :
Nombre de votants341Nombre de suffrages exprimés339Majorité absolue des suffrages exprimés170Pour l’adoption154Contre 185Le Sénat n'a pas adopté.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 860, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Avant le mot :
veille
insérer les mots :
formule au Parlement toutes les propositions émanant des membres le composant afin que celui-ci
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Nous avons déjà dit notre opposition à la création de ce comité de pilotage et nous réaffirmons notre désaccord, tant sur le fond que sur la forme.
En effet, les dispositions de cet amendement traduisent la volonté du Gouvernement de n’envisager la réforme des retraites que d’un point de vue exclusivement comptable, que vous le niiez ou non, monsieur le secrétaire d’État. Vous ne prenez en compte ni les attentes ni les besoins légitimes de la population.
De plus, une partie des missions confiées à ce comité recoupent celles qui sont déjà exercées par le Conseil d’orientation des retraites qui a, lui, l’intérêt d’être réellement pluraliste dans sa composition et d’avoir acquis depuis sa création en 2000 une légitimité certaine.
En effet, nous estimons que la composition de ce comité, tel qu’elle est présentée et prévue dans ce texte, n’est en rien satisfaisante. Pas satisfaisante, d’abord, parce qu’elle ne garantit pas une véritable représentation des partenaires sociaux. Pas satisfaisante, encore, car c’est un décret de l’exécutif qui décidera au final de la composition et des modalités d’organisation de ce comité, ce qui va à l’encontre de la transparence démocratique que nous concitoyens, premiers concernés d’ailleurs par le sujet, sont en droit d’attendre.
Sur le fond maintenant, nous pensons que la question du pilotage de nos régimes de retraite est un sujet non pas technique mais absolument politique. Il s’agit de veiller au maintien et à la défense des droits des assurés et de la solidarité, poumon de notre système de retraite par répartition. Sinon, cela équivaudrait à ce que nous, législateurs, acceptions d’être dépossédés de cette question au profit d’un comité ad hoc.
La question, si stratégique, du pilotage des régimes de retraite doit être assurée par l’exécutif et par le législatif. Chacun est dans son rôle.
La réécriture que cet article a subie lors de son examen par la commission des affaires sociales du Sénat, qui a considérablement réduit les missions et la portée de ce comité, montre qu’il n’inspire guère d’enthousiasme.
C’est pourquoi nous vous proposons, avec cet amendement de repli, de cantonner ce comité dans un strict rôle de proposition.
L'amendement n° 65, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le mot :
veille
par les mots :
fait des propositions au Gouvernement et au Parlement afin que ceux-ci veillent
La parole est à M. René Teulade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je me suis déjà exprimé tout à l’heure sur la teneur de cet amendement de repli qui est notre solution pour faire en sorte que le comité de pilotage reste dans son rôle et en particulier son rôle de conseil. La décision doit rester aux organismes élus.
Cet amendement a pour but de ramener le comité de pilotage à son véritable rôle. C’est dans ce sens-là que cet amendement de repli nous permettrait de conserver ce nouveau comité sans développer de polémiques inutiles.
L'amendement n° 861, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et à la pérennité d'un système de retraite fondé sur l'épanouissement des hommes et des femmes dans leurs activités non professionnelles
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le comité de pilotage des régimes de retraite, COPILOR, doit veiller au respect des missions du régime de retraite : la pérennité financière, l’équité du système de retraite, l’amélioration du niveau de vie des retraités et du niveau des pensions, et le rapprochement des règles et des paramètres entre les différents régimes, entre autres.
Outre le fait que certaines de ces affirmations sont en contradiction avec les dispositions détaillées dans le texte, notamment en termes d’amélioration du niveau de vie des retraités, nous regrettons la prédominance accordée aux objectifs budgétaires et comptables. Monsieur le secrétaire d’État, nous le redisons !
La moitié des objectifs assignés à ce comité révèlent la véritable obsession de votre Gouvernement : l’équilibre comptable.
Je voudrais à ce titre citer Paul Krugman, prix Nobel d’économie 2008 : « L’élite des responsables politiques, les banquiers centraux, les ministres des finances, les élus qui se dressent en défenseurs de la vertu budgétaire, agissent comme les prêtres d’un culte antique, exigeant que nous nous livrions à des sacrifices humains pour apaiser la colère des dieux invisibles. »
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Il s’agit finalement de sacrifier le travail au nom du capital.
Nous nous opposons à cette logique comptable qui semble aujourd’hui être le maître mot de vos politiques. Nous ne pouvons cautionner une action politique qui traite les travailleurs comme une rentrée d’argent et les retraités comme une dépense coûteuse.
La quantité ne peut être un objectif en soi, et c’est pourquoi nous proposons de remplacer l’un des critères quantitatifs du projet de loi par l’affirmation d’un objectif qualitatif. Le comité de pilotage des régimes de retraite doit assurer l’existence d’un système de retraite fondé sur l’épanouissement en dehors des activités professionnelles. C’est ce que disent, entre autres, les trois millions et demi de personnes qui manifestent aujourd’hui. Elles y sont attachées.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Les hommes et les femmes qui ont étudié puis travaillé tout au long de leur existence, consacrant l’essentiel de leur vie à devenir et à être des forces de production doivent pouvoir être délivrés de cette contrainte en accédant à une retraite satisfaisante.
Cela implique de considérer la retraite comme un véritable temps de vie et non un résidu accordé gracieusement en fin de vie. Cela nécessite d’accorder une pension au montant suffisant et non de la tronquer au maximum.
Nous plaidons pour un temps de vie libéré et délié des contraintes du travail. Nous défendons le seul droit à la retraite qui mérite ce nom, celui qui ne se définit pas simplement en opposition au travail en rejetant ceux qui ne sont plus utiles et qui n’ont plus assez de valeur productive, mais celui qui correspond à un moment de vie en bonne santé, véritable période d’épanouissement.
C’est pourquoi nous vous demandons d’adopter cet amendement.
Chers collègues, vous proposez de réécrire l’alinéa 4 de l’article 1er qui traite du fameux comité de pilotage.
En commission, nous avons tenté justement de réécrire cet alinéa pour répondre à deux objectifs.
Nous avons ainsi, premièrement, tenu compte de la codification des objectifs assignés à l’assurance vieillesse dans le code de la sécurité sociale, deuxièmement renforcé le caractère opérationnel et stratégique des missions du comité de pilotage.
Nous estimons que le libellé de la commission donne un meilleur équilibre au texte concernant le comité de pilotage. J’insiste sur le fait que ce comité veillera au bon équilibre financier du système puisqu’il sera chargé, je le répète, d’une procédure d’alerte identique au comité de pilotage de l’ONDAM, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.
Je tiens à le réaffirmer une fois de plus, ce comité ne se substitue en rien à l’exécutif ni bien évidemment au législatif, qui gardent toutes leurs prérogatives. Pour toutes ces raisons, la commission se déclare défavorable à ces amendements.
Le Gouvernement est défavorable aux trois amendements.
Pour les deux premiers amendements, comme je l’ai expliqué, il n’y a pas dessaisissement du Parlement, bien au contraire.
Sur le dernier amendement, même si l’ambition est tout à fait noble, les objectifs nous apparaissent difficilement quantifiables et de ce fait, plus prosaïquement, plus modestement, si je peux m’exprimer ainsi, nous en restons aux objectifs qui sont prévus dans le texte.
La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 860. (Marques de lassitude sur les travées de l ’ UMP.)
M. Guy Fischer. Cela fait très longtemps que je n’ai pas parlé, chers collègues.
Sourires.
Cet amendement n° 860 est un amendement de repli par rapport à notre amendement de suppression du comité de pilotage des régimes de retraite créé par l’article 1er du projet de loi.
Ce comité de pilotage ne suscite guère d’enthousiasme, et pour cause. Comment nous, parlementaires, pourrions-nous accepter d’être dépossédés et, à travers nous, les citoyens, du pouvoir de décision sur des questions aussi fondamentales que le respect des objectifs du système de retraite par répartition et la garantie de sa pérennité financière ?
Nous défendons au contraire le maintien du contrôle législatif sur les mesures correctrices concernant les régimes de retraite. C’est au Gouvernement et au Parlement, et non à ce comité de pilotage, qu’il revient de prendre les décisions en la matière.
Du reste, on voit bien que ces décisions que l’on fait prendre par des comités de pilotage nous reviennent un jour ou l’autre, un peu comme les recommandations de la Cour des comptes qui, bien souvent, se retrouvent dans des textes législatifs, réécrites.
Aucun contournement du Parlement ne saurait être toléré sur cette question. En ce sens, on ne peut que s’étonner et s’inquiéter de voir que la présidence de ce comité de pilotage est confiée au ministre en charge de la sécurité sociale.
D’autant que cette indication, étonnement, figure non pas dans le projet de loi déposé par le Gouvernement, mais dans l’étude d’impact, qui précise aussi que les ministres de tutelle en feront également partie.
Double incongruité, quand on sait que c’est ce même comité de pilotage, présidé par le ministre en charge et composé des ministres de tutelle, qui sera consulté en 2018 par le Gouvernement sur un projet de réforme destiné à maintenir l’équilibre du système de retraite au-delà de 2020 !
Nos concitoyens ont bien raison de se faire du souci !
En somme, c’est un peu le Gouvernement qui conseillera le Gouvernement ! C’est cela, monsieur le secrétaire d’État ?
De plus, c’est à la faveur d’un décret et non selon un mode de désignation démocratique, que seront fixées la composition exacte et les modalités d’organisation de ce comité. Le recours au décret, c'est-à-dire à la seule décision de l’exécutif, est en contradiction avec les règles minimales de transparence.
Aussi, si comité il doit y avoir - bien qu’au regard d’une partie de ses missions et de sa composition même sa coexistence aux côtés du COR paraît superflue - il ne saurait avoir un rôle décisionnaire et doit être cantonné dans un simple rôle de proposition.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 861.
Je tenais à vous rappeler en quoi consistait cet amendement, car je ne suis pas sûre que les explications du secrétaire d’État et du rapporteur aient bien permis de le comprendre.
Nous vous proposions d’inscrire dans les missions de ce comité l’objectif qualitatif de veiller à « la pérennité d’un système de retraite fondé sur l’épanouissement des hommes et des femmes dans leurs activités non professionnelles ».
Par votre refus, mes chers collègues, vous déniez aux salariés le droit à l’épanouissement s’il se situe en dehors de la sphère du travail. En clair, l’épanouissement ne vaut rien en dehors de la seule valeur qui compte, celle que l’on peut monnayer, celle qui est relative à notre capacité à créer de la richesse matérielle et quantifiable.
Mais vous faites là une erreur fondamentale : il ne peut y avoir de bonne réforme des retraites, même financière, si celle-ci ne vise pas à la réalisation de chaque individu et si elle ne reconnaît pas la nécessité d’assurer le bonheur individuel et collectif de tout citoyen à chaque moment de sa vie.
Les choses sont donc clairement énoncées : la politique du Gouvernement en matière de retraite ne vise pas, ni ne veut prendre en compte le critère du bien-être.
Dans son livre Éloge de l’oisiveté publié en 1932, Bertrand Russell affirmait, et je ne pourrais le dire mieux que lui : « Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l’aisance et la sécurité. Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela, nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n’y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment. » Il renchérissait ainsi : « Croire que le travail est une vertu est la cause de grands maux dans le monde moderne [...] la voie du bonheur et de la prospérité passe par une diminution méthodique du travail. »
Mme Annie David. C’est le bien-être des salariés, monsieur le ministre !
Rires sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Depuis 1932, de conquêtes sociales en révoltes, un long chemin a été parcouru : il a permis de définir le droit à des repos hebdomadaires, à un temps de travail limité, à des congés payés et à un temps de vie délié de la contrainte du travail.
Comment peut-on aujourd'hui opérer de telles régressions, nier cet héritage ? Après des décennies de luttes et d’acquis sociaux, faut-il réellement revenir aux problématiques du début du XXe siècle ? Comment peut-on encore se retrouver à réaffirmer l’évidence, c'est-à-dire que chacun à droit à la retraite dans des conditions qui ne soient pas celles de la misère ou de l’éreintement ? Il faut vraiment que les agressions soient sévères pour que nous en soyons arrivés là !
Reconnaître le droit à l’épanouissement, c’est accorder à chacun le droit de profiter de sa retraite en bonne santé, d’un temps qui ne l’aliène ni ne le brise plus ; c’est affirmer que le travail ne doit pas épuiser toutes les ressources possibles d’un individu, le rejetant seulement quand il n’est plus exploitable, et sans plus s’en préoccuper.
Après l’asservissement du corps et de l’esprit au travail et à la contrainte productive, chacun doit pouvoir partir à la retraite avant que le corps ne soit rattrapé par la maladie, la fatigue, particulièrement quand cette dernière trouve son origine dans des conditions de travail harassantes.
Veuillez conclure, ma chère collègue, car votre temps de parole est épuisé.
Monsieur le président, j’ai droit à cinq minutes pour une explication de vote, et non à trois !
M. le président. Vérification faite, ma chère collègue, c’est, en effet, une erreur de chronomètre.
Exclamations amusées.
Il vous reste une minute et trente secondes. Veuillez donc poursuivre, ma chère collègue.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Mme Annie David. Je voulais évoquer pour terminer Paul Lafargue, gendre de Marx et auteur du Droit à la paresse
Rires
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 66, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer le mot :
juillet
par le mot :
juin
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Le comité de pilotage, tel qu’il est prévu dans le dispositif de la commission des affaires sociales du Sénat, s’apparente au comité d’alerte créé par la loi du 13 août 2004 pour l’assurance maladie. Ce dernier doit rendre chaque année, au plus tard le 1er juin, un avis sur le respect de l’ONDAM. Par souci de cohérence, il faudrait que le comité de pilotage des régimes de retraite rende son rapport à la même date. La situation étant déjà assez compliquée, il ne faut pas faire l’économie d’une mesure cohérente !
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Effectivement, il est logique de faire coïncider les deux dates. La commission est donc favorable à cet amendement.
Oh ! sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Lorsque l’on nous propose une mesure cohérente, nous sommes d’accord ! Le Gouvernement est donc également favorable à cet amendement.
Exclamations amuséessur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Applaudissements sur certaines travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 68, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer l'année :
par l'année :
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Monsieur le secrétaire d'État, chers collègues de la majorité, nous nous réjouissons que l'amendement n° 66 ait été adopté. Nous vous évitons de commettre des erreurs sur des articles que nous ne voterons pas : c’est dire notre sérieux !
La question soulevée par l’amendement n° 68 est celle de l’horizon de la réforme et non celle de la date à laquelle l’équilibre est atteint.
L’enjeu est de proposer une réforme juste, efficace, équilibrée, qui garantisse dans la durée le rétablissement de l’équilibre financier et qui rassure et redonne confiance aux jeunes, aux actifs et aux retraités.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez assuré que votre projet de loi garantissait le financement jusqu’en 2018. Après, c’est l’inconnu ! C'est d’ailleurs la raison pour laquelle vous avez fixé un nouveau rendez-vous en 2018 pour revoir le dispositif. Devons-nous comprendre que, à cette date, il faudra imaginer de nouveaux reculs, par exemple de l’âge de départ à la retraite ?
En fait, le financement de l’équilibre jusqu’en 2018 s’assimile très clairement à une belle opération de maquillage !
Les 18, 6 milliards d’euros attendus des seules mesures d’âge reposent sur des hypothèses irréalistes. Pour remédier aux écarts prévisibles, il est déjà prévu de ponctionner plus l’UNEDIC pour donner à la CNAV. Vous allez devoir faire main basse sur le Fonds de réserve pour les retraites qui, je le rappelle, ne devait être utilisé qu’à partir de 2020 pour lisser le financement des retraites des baby-boomers de l’après-guerre, qui deviennent aujourd'hui des papy-boomers et des mamy-boomers !
Mais même ces mauvaises actions ne suffiront manifestement pas. L’encre du projet de loi à peine sèche et les comptes officiellement à l’équilibre, selon vos dires, et voilà qu’une une nouvelle estimation du déficit des régimes, révélée jeudi dernier par le quotidien Les Échos, fait s’écrouler tout l’édifice ! En effet, l’ardoise se révèle beaucoup plus lourde qu’initialement prévue, et ce au moment où Nicolas Sarkozy annonce des comptes équilibrés en 2018, et même excédentaires !
En réalité, monsieur le secrétaire d'État, votre réforme est déséquilibrée avant même d’avoir été adoptée !
Nous ne cesserons de le répéter, le bouclage financier de la réforme des retraites relève de plus en plus de l’équation impossible. Et vous continuez de nous seriner que le projet est financé. Mais il ne l’est pas ! Si vous voulez des idées, nous pouvons vous en donner.
Rendez aux Français les 100 milliards d’euros d’allégement de charges que vous avez offerts aux entreprises et aux plus riches. Cessez de tailler dans les dépenses et exigez, comme nous l’avons déjà proposé à plusieurs reprises, que l’effort soit justement réparti entre les revenus du capital et les revenus du travail.
Nous pouvons trouver 80 milliards d’euros de façon pérenne et équilibrée. Oui, nous en avons fait la démonstration et notre président Jean-Pierre Bel l’a répété. Oui, une politique alternative est possible, et nous tenons à votre disposition les éléments de la démonstration. Oui, une retraite universelle et choisie est possible, qui nécessite d’aller à rebours de votre projet comptable de régression sociale. Oui, les conditions de la pérennité et de la visibilité sont possibles !
Ce sont tous ces éléments qui expliquent la nouvelle date que nous vous proposons.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Dans le projet de loi, la perspective est fixée à l’année 2018. L’amendement qui tend à repousser cette date à 2025 est contraire à l’esprit de la réforme. La commission y est donc défavorable.
Le Gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. Martial Bourquin. Je ne comprends pas qu’un débat ne s’engage pas à la suite de l’intervention de notre collègue Christiane Demontès.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Tout à l’heure, M. le secrétaire d’État s’est écrié qu’il n’allait tout de même pas s’excuser de vouloir équilibrer les comptes des caisses de retraite.
Encore faudrait-il avoir un débat sur la question de la dette publique et du déficit important de nos régimes de retraite ! Les problèmes que nous rencontrons s’expliquent essentiellement par trois éléments, comme vient de le démontrer Christiane Demontès : la faiblesse de la croissance, la politique fiscale très injuste menée par le Gouvernement et un chômage de masse.
Aux 100 milliards d’euros de baisses d’impôts accordées entre 2000 et 2010 – ce n’est pas nous qui avons inventé ce chiffre, nous le trouvons dans un rapport parlementaire auquel des membres de la majorité ont travaillé –, il faut ajouter 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales.
Monsieur le secrétaire d'État, pour nous, le moteur des recettes, c’est l’emploi, une fiscalité plus juste, la volonté de mettre en place une croissance durable, une nouvelle efficacité économique et sociale et, surtout, la justice fiscale. Voilà ce qui différencie nos propositions des vôtres !
Mais aujourd’hui, quelle est la préoccupation essentielle de la majorité ? Trouver le moyen de sortir la résidence principale du calcul de l’ISF. C’est invraisemblable !
Nous sommes toujours dans la même situation : à chaque fois que nous faisons des propositions solides pour taxer les stock-options ou instituer un impôt sur les banques, des mesures qui se pratiquent dans d’autres pays européens, et même à côté de chez nous, vous nous répondez que ce n’est pas possible. C’est bien un débat de fond !
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Mes chers collègues, dès que l’on vous dit quelques vérités, vous vous fâchez ! Vous demanderez la parole après mon intervention pour me contredire, mais, en attendant, laissez-moi parler !
À chaque fois que nous voulons aborder les questions de fond, vous nous dites que ce n’est pas possible et qu’il n’y a que votre politique qui vaille.
Nous formulons des propositions, mais nous n’obtenons jamais que l’on en débatte. M. Bel a dit les problèmes que pose votre réforme des retraites, tout comme M. Fischer et Mme Demontès. Mais aucune réponse du rapporteur, aucune réponse du Gouvernement !
Dans ce pays, depuis quelques années, il n’y en a que pour quelques-uns, les plus privilégiés ; les autres, ceux qui sont en bas, parce qu’ils sont plus nombreux, doivent payer sans cesse, encore et toujours.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Voilà le problème dans ce pays : il n’y a plus de justice, plus d’égalité, plus de solidarité ! Vous êtes en train d’écorner la République !
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Il est encore temps de vous réveiller et de voir que tout cela va trop loin. D’ailleurs, certains d’entre vous le pensent. Réagissez et demandez qu’une réflexion soit engagée pour trouver d’autres solutions plutôt que de toujours ponctionner les mêmes. Arrêtez donc de vous en prendre systématiquement aux plus démunis d’entre nous !
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Nous sommes les représentants du peuple. Par conséquent, vous savez que, parmi vos électeurs, il y a aussi des gens qui souffrent. Mais, avec vos propositions, vous représentez uniquement les banquiers et les financiers !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Protestations sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 67, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après le mot :
rend
insérer les mots :
au Gouvernement et au Parlement
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Nous vous le répétons avec constance : nous n’avons pas besoin d’un énième comité qui se substitue au Gouvernement et au Parlement.
Le Conseil d’orientation des retraites, le GIP Info Retraite, cher à notre ami Claude Domeizel, et la commission de garantie des retraites remplissent à l’heure actuelle les missions prévues par l’article 1er. Il est ainsi inutile de créer une structure supplémentaire qui ne fera qu’apporter de la confusion à la confusion.
C’est au Gouvernement et au Parlement et non au comité de pilotage qu’il revient de prendre des décisions garantissant la pérennité financière et l’équité des régimes de retraite par répartition.
Il est ici proposé que le comité de pilotage remette son avis sur la situation financière des régimes de retraite au Gouvernement et au Parlement.
Cette précision est utile. La commission a donc émis un avis favorable.
Exclamations amusées sur les travées de l ’ UMP.
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis favorable.
Mêmes mouvements.
Sourires
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 863, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il veille également à la progression du niveau de vie des retraités et du niveau des pensions de retraite.
La parole est à M. Guy Fischer.
Le « maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités » est un objectif à faible portée. Tout le monde souhaite que nos retraités, qui ont consacré leur vie au travail et souvent dans des conditions très difficiles, puissent bénéficier de ce qui leur est dû.
Un niveau de vie satisfaisant, c’est évident, mais satisfaisant au regard de quels critères et satisfaisant pour qui ? Voilà les questions que nous nous posons.
Si, pour vous, survivre est satisfaisant, nous préférerions, nous, que les retraités vivent décemment, sans atteinte à leur dignité. Or vivre dignement, ce n’est pas vivre sous le seuil de pauvreté. Pourtant, on le sait, 600 000 retraités se trouvent aujourd’hui en dessous de ce seuil. En France, une nouvelle catégorie est en effet apparue il y a quelques années : les retraités pauvres, au premier rang desquels figurent bien entendu les femmes.
Le cumul des mesures des lois de 1993 et de 2003 devrait provoquer une baisse moyenne du taux de remplacement en 2020 de près de 40 % !
L’allongement de la durée de cotisation prévue par le présent projet de loi conjugué au très fort taux de chômage des personnes de plus de 50 ans, étant donné nos capacités actuelles d’emploi des salariés âgés, aura pour effet mécanique de diminuer encore le niveau des pensions.
À la suite du rendez-vous de 2008, la suppression pour les salariés âgés de 57 ans de la dispense de recherche d’emploi et de certaines dispositions spécifiques nous conduit à déposer cet amendement.
Selon la CNAV, en moyenne, près de 40 % des seniors s’inscrivent à l’ANPE à la suite d’un licenciement économique, contre 23, 5 % pour la totalité des inscrits. En outre, ils ont été les premiers à payer les frais de la crise financière. Rappelons en effet que 680 000 licenciements sont intervenus sur la période 2008-2009. Autant dire que la situation des seniors ne va pas s’arranger !
On n’embauche pas les seniors, c’est une réalité, car, comme l’a récemment déclaré M. Wauquiez, « ils coûtent trop cher ». C’est la raison pour laquelle ils ne doivent pas pâtir des comportements délibérés des entreprises, qui refusent de les embaucher, et qu’ils doivent avoir, comme tout le monde et malgré tout, un niveau de pension qui leur permette de vivre au-dessus du seuil de pauvreté.
Cet amendement vise donc à affirmer l’objectif de progression du niveau de vie des retraités pour leur permettre de vivre décemment, dignement, car le but ici est non pas de survivre, mais bel et bien de vivre.
Compte tenu de l’importance d’un tel amendement, nous demandons un scrutin public.
La disposition proposée figure déjà à l’article 1er A. Introduire une nouvelle fois cette précision alourdirait inutilement le texte.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Cela étant, je veux apporter quelques précisions.
Selon le rapport du COR, le niveau moyen des pensions devrait progresser de l’ordre de 20 % au-delà de l’inflation d’ici à 2030.
En outre, l’INSEE, qui a pris en compte l’ensemble des éléments, indique que le niveau de vie des retraités est aujourd’hui supérieur à celui des actifs.
Pour être précis, il s’agit de 23 970 euros par an pour les retraités, contre 23 060 euros pour les actifs. Nous disposons donc de deux indications précises l’une pour le présent, avec les moyennes fournies par l’INSEE, l’autre pour l’avenir, avec les prévisions du COR.
Enfin – vous le savez déjà, mais le passé permet d’éclairer l’avenir –, le taux de pauvreté des personnes âgées a été divisé par plus de 3, 5 depuis 1970. Cette situation est d’ailleurs en grande partie liée à notre décision de revaloriser le minimum vieillesse. Je rappelle sans aucun esprit polémique que cette mesure n’avait pas été votée par l’opposition !
Sans esprit polémique non plus, j’aimerais à mon tour verser aux débats quelques éléments qui ne vont pas dans le sens que vous venez de nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État.
Vous évoquez sans cesse la nécessité de réformer les retraites, parce que l’espérance de vie augmente ou bien encore parce que les autres pays l’ont fait, mais à aucun moment vous n’évoquez le niveau des pensions, …
… qui, lui, ne cesse de diminuer depuis que votre majorité est au pouvoir.
On ne peut pas appréhender la catégorie des personnes retraitées comme s’il s’agissait d’une population homogène bénéficiant d’un confort de vie supérieur à celui des jeunes générations, car de grandes inégalités de revenus existent chez les plus de 60 ans. Parmi les 8 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté en France, 600 000 sont des personnes âgées qui perçoivent une allocation de solidarité de 628 euros par mois. Je vous invite à méditer ce chiffre, mes chers collègues !
On n’aborde pas le temps de la vieillesse avec les mêmes atouts. On ne vieillit pas de la même manière selon son parcours de vie, si l’on a été sans domicile fixe, ouvrier ou cadre supérieur. Le différentiel de durée de vie de sept ans entre ces deux dernières catégories en témoigne.
De fait, le passage à la retraite s’accompagne déjà d’une incontestable baisse de revenu – notre collègue Fortassin l’a rappelé tout à l’heure – que ce projet de loi s’apprête encore à aggraver.
Entre 1996 et 2005, la progression du niveau de vie des plus de 65 ans a été inférieure à celle du niveau de vie des actifs et l’évolution du minimum vieillesse reflète la même tendance. En 1990, il se situait, pour une personne seule, au niveau du seuil de pauvreté ou à peu près. Malheureusement, il est passé aujourd’hui en dessous, c’est-à-dire à 88 % du seuil de pauvreté.
Les différences de niveaux de vie, qui sont encore plus marquées chez les retraités que chez les personnes en âge de travailler, risquent d’ailleurs de s’accroître à l’avenir, car les parcours de vie sont de plus en plus affectés par des aléas de carrière, par l’instabilité des revenus et par des périodes de chômage plus fréquentes.
Encore une fois, ce sont les ouvriers, les employés et les personnes les moins diplômées qui sont les plus affectés au moment du passage à la retraite, car ce sont eux qui ont les trajectoires professionnelles les plus chaotiques. C’est ce qui explique d’ailleurs que les femmes représentent 60 % des bénéficiaires du minimum vieillesse et qu’elles sont plus durement frappées par la pauvreté que les hommes.
Ajoutons à ce tableau déjà sombre que les mêmes disparités apparaissent quand survient une situation de dépendance et qu’il faut faire face aux frais engendrés par le maintien à domicile ou l’entrée dans un établissement spécialisé, le « reste à payer » étant bien souvent supérieur aux capacités financières des personnes âgées. En conséquence, près de 80 % des personnes en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes doivent faire appel aux ressources de leurs proches pour financer leur prise en charge ou mobiliser une partie de leur patrimoine, à condition évidemment d’en posséder un.
Cependant, tout en affirmant reconnaître ce cinquième risque et en laissant croire de ce fait qu’il serait couvert comme les autres, votre majorité s’oriente aujourd’hui vers le recours à l’assurance privée, collective ou individuelle, et vers la mobilisation du patrimoine des personnes concernées, ce qui est inadmissible.
Ce virage constitue une véritable rupture dans la façon d’assurer la couverture des risques sociaux. Il s’agirait d’une tromperie sur l’objectif affiché, par le caractère ségrégatif et inégalitaire du système mis en place. On est donc très loin de l’ambition des fondateurs de la « sécurité sociale », inventeurs d’un mécanisme de solidarité universelle, dont notre collègue Bourquin vient de faire le rappel. Vos références à ces fondateurs, monsieur le secrétaire d’État, sont mensongères, fourbes et insultantes.
Par cet amendement, nous soutenons que, face à la précarisation croissante des retraités, il est important de maintenir leur niveau de vie, mais aussi de le faire progresser.
Je veux compléter l’intervention d’Annie David et apporter l’éclairage d’une élue locale.
Ce que l’on constate pour les retraites, on le constate également pour les salaires – il n’y a pas de raison ! –, à savoir une grande inégalité.
Certains retraités d’aujourd’hui ont connu en activité un déroulement de carrière linéaire, grimpant peu à peu les échelons au sein de l’entreprise, de sorte qu’ils bénéficient aujourd’hui d’un niveau de pension tout à fait correct. Tant mieux ! Je pense par exemple à des ouvriers qui sont devenus agents de maîtrise ou techniciens. Oui, tant mieux, car la réalité est que ces personnes-là aident leurs enfants et leurs petits enfants !
Mais il en est d’autres, parmi nos concitoyens – Annie David y a fait allusion –, qui arrivent à la retraite après des parcours que l’on peut qualifier de chaotiques – il s’agit plus particulièrement des femmes, mais pas uniquement – parce qu’ils ont alterné temps partiel, chômage et contrats aidés et se retrouvent, effectivement, avec des retraites presque indécentes !
Je souhaite vous apporter mon témoignage, celui d’une élue de la banlieue lyonnaise, puisque je suis maire d’une petite ville qui compte 60 % de logements sociaux et dont le niveau de revenu moyen est extrêmement faible. Je peux vous assurer que, depuis quelques années, le nombre des personnes âgées – celles de plus de 60 ans, pour être précise – qui poussent la porte du CCAS et qui fréquentent les Restos du cœur parce qu’elles n’ont pas d’autre choix, croît fortement.
Cette situation est assez dramatique et révélatrice puisque ces personnes ne vont bien évidemment pas avec plaisir dans ces structures. Ces retraités ne poussent pas la porte du CCAS avec gaieté de cœur ! Ils le font parce qu’ils ne peuvent vraiment pas faire autrement !
Je crois donc qu’il s’agit d’une réalité à prendre en compte et c’est pour cette raison que nous soutiendrons l’amendement du groupe CRC-SPG.
Notre pays est riche, quoi qu’on en dise, et se doit d’accorder un revenu décent à ses retraités, de même que nous devons marquer notre respect envers nos anciens !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans va principalement léser ceux qui ont commencé à travailler très tôt.
Comme l’a relevé François Legendre, professeur d’économie à l’université Paris-Est Créteil, dans un article publié le 13 septembre dernier dans le journal le Monde : « À l’âge de 60 ans, ces salariés sont, soit encore dans l’emploi, soit au chômage. Aussi, ont-ils, soit “sur-cotisé” à l’assurance vieillesse, puisqu’ils disposent largement de la durée de cotisation requise pour le taux plein, soit de très faibles opportunités de retrouver un emploi. Dans les deux cas, il semble particulièrement injuste de repousser l’âge auquel ils pourraient prendre leur retraite […] d’autant que cela aggravera la tendance à la paupérisation des retraités. […]
« La caisse nationale d’assurance vieillesse a cherché […] à mieux connaître la situation de ses cotisants l’année qui précède leur départ à la retraite. En 2006, 57 % des hommes et 42 % des femmes ont pu valider au moins un trimestre de cotisation au titre d’une activité ; 34 % des hommes et 31 % des femmes ont pu valider au moins un trimestre à un autre titre – chômage, invalidité, maladie… – ; mais 19 % des hommes et 36 % des femmes ne valident aucun trimestre pour la retraite. On voit ainsi grossir une population âgée, exclue de l’emploi et frappée, à des degrés variés, par la pauvreté. Près d’un homme sur cinq serait dans cette situation, bénéficiant du soutien de son conjoint, de sa famille ou d’un minimum social comme le RSA. Le recul de deux ans des deux âges légaux de 60 ans à 62 ans et de 65 ans à 67 ans participerait, à côté de la crise économique, au développement d’une nouvelle figure de l’exclusion économique et sociale : celle des seniors en fin de droits maintenus dans la pauvreté par incapacité d’obtenir la liquidation de leur retraite. […]
« Au total, la réforme des retraites proposée par le Gouvernement est profondément injuste pour les Français qui ont commencé à travailler tôt à la fin des années soixante ou au début des années soixante-dix. Le relèvement des âges légaux de départ ne s’impose en rien. »
François Legendre résume parfaitement une évolution en cours depuis trop longtemps. Par ailleurs, la suppression pour les salariés âgés de 57 ans, des suites du rendez-vous de 2008, de la dispense de recherche d’emploi et celle des dispositions particulières auxquelles ils avaient droit sur l’allocation de solidarité spécifique aggravent la situation de ces personnes jusqu’à l’âge où elles pourront liquider leur retraite.
Ainsi, un tableau assez noir de l’extension considérable de la précarisation des retraités est malheureusement dressé !
Tous ces éléments plaident en faveur de l’adoption de notre amendement, qui vise à ce que le comité de pilotage des régimes de retraite veille à la progression du niveau de vie des retraités et du niveau des pensions de retraite.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a tout de même un formidable décalage entre notre débat et ce qui s’est passé tout à l’heure dans les rues des plus grandes villes de France, qui ont connu une mobilisation sans précédent !
En effet, malgré les efforts de l’opposition, la majorité en place reste manifestement indifférente aux événements d’aujourd’hui.
Cet amendement concerne les personnes qui ont eu des carrières chaotiques et donc qui ont été sous-payées. Au moment où elles vont prendre leur retraite, après avoir eu pendant longtemps le minimum, elles risquent de ne pouvoir toucher que le minimum du minimum !
La justification de cet amendement est de plaider pour ces gens-là, à la fin de leur vie, en demandant un effort pour qu’effectivement les conditions de leur retraite puissent être en adéquation avec ce que vous revendiquez à travers l’article 1er A dans lequel vous écrivez – encore une fois – en lettres d’or que chacun doit pouvoir aspirer à une retraite décente.
Mais aujourd’hui, nous sommes stupéfaits de voir l’indifférence que vous manifestez, mes chers collègues, par rapport à une situation que pourtant vous vivez chacune et chacun au quotidien en tant qu’élus dans vos collectivités respectives.
Ces gens qui ont 68 ans ou 70 ans, qui vont à reculons aux Restos du cœur durant les périodes de l’année les plus difficiles, avouent souvent, malgré eux, qu’ils ne peuvent pas, à l’égard de leurs petits-enfants, faire le minimum que devraient pouvoir faire décemment des grands-parents.
Très franchement, mes chers collègues, je regrette et déplore cette indifférence qui, à mes yeux, surtout après les interventions éloquentes des collègues qui se sont exprimés avant moi, s’apparente à une forme de mépris !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je mets aux voix l'amendement n° 863.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je vous rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 18 :
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Je rappelle aux membres de la commission des affaires sociales que nous nous réunissons à dix-neuf heures cinquante-cinq, pour au moins trois quarts d’heure.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.