… qui, lui, ne cesse de diminuer depuis que votre majorité est au pouvoir.
On ne peut pas appréhender la catégorie des personnes retraitées comme s’il s’agissait d’une population homogène bénéficiant d’un confort de vie supérieur à celui des jeunes générations, car de grandes inégalités de revenus existent chez les plus de 60 ans. Parmi les 8 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté en France, 600 000 sont des personnes âgées qui perçoivent une allocation de solidarité de 628 euros par mois. Je vous invite à méditer ce chiffre, mes chers collègues !
On n’aborde pas le temps de la vieillesse avec les mêmes atouts. On ne vieillit pas de la même manière selon son parcours de vie, si l’on a été sans domicile fixe, ouvrier ou cadre supérieur. Le différentiel de durée de vie de sept ans entre ces deux dernières catégories en témoigne.
De fait, le passage à la retraite s’accompagne déjà d’une incontestable baisse de revenu – notre collègue Fortassin l’a rappelé tout à l’heure – que ce projet de loi s’apprête encore à aggraver.
Entre 1996 et 2005, la progression du niveau de vie des plus de 65 ans a été inférieure à celle du niveau de vie des actifs et l’évolution du minimum vieillesse reflète la même tendance. En 1990, il se situait, pour une personne seule, au niveau du seuil de pauvreté ou à peu près. Malheureusement, il est passé aujourd’hui en dessous, c’est-à-dire à 88 % du seuil de pauvreté.
Les différences de niveaux de vie, qui sont encore plus marquées chez les retraités que chez les personnes en âge de travailler, risquent d’ailleurs de s’accroître à l’avenir, car les parcours de vie sont de plus en plus affectés par des aléas de carrière, par l’instabilité des revenus et par des périodes de chômage plus fréquentes.
Encore une fois, ce sont les ouvriers, les employés et les personnes les moins diplômées qui sont les plus affectés au moment du passage à la retraite, car ce sont eux qui ont les trajectoires professionnelles les plus chaotiques. C’est ce qui explique d’ailleurs que les femmes représentent 60 % des bénéficiaires du minimum vieillesse et qu’elles sont plus durement frappées par la pauvreté que les hommes.
Ajoutons à ce tableau déjà sombre que les mêmes disparités apparaissent quand survient une situation de dépendance et qu’il faut faire face aux frais engendrés par le maintien à domicile ou l’entrée dans un établissement spécialisé, le « reste à payer » étant bien souvent supérieur aux capacités financières des personnes âgées. En conséquence, près de 80 % des personnes en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes doivent faire appel aux ressources de leurs proches pour financer leur prise en charge ou mobiliser une partie de leur patrimoine, à condition évidemment d’en posséder un.
Cependant, tout en affirmant reconnaître ce cinquième risque et en laissant croire de ce fait qu’il serait couvert comme les autres, votre majorité s’oriente aujourd’hui vers le recours à l’assurance privée, collective ou individuelle, et vers la mobilisation du patrimoine des personnes concernées, ce qui est inadmissible.
Ce virage constitue une véritable rupture dans la façon d’assurer la couverture des risques sociaux. Il s’agirait d’une tromperie sur l’objectif affiché, par le caractère ségrégatif et inégalitaire du système mis en place. On est donc très loin de l’ambition des fondateurs de la « sécurité sociale », inventeurs d’un mécanisme de solidarité universelle, dont notre collègue Bourquin vient de faire le rappel. Vos références à ces fondateurs, monsieur le secrétaire d’État, sont mensongères, fourbes et insultantes.
Par cet amendement, nous soutenons que, face à la précarisation croissante des retraités, il est important de maintenir leur niveau de vie, mais aussi de le faire progresser.