Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 12 octobre 2010 à 21h45
Réforme des retraites — Article 1er

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Pendant notre période d’activité, nous produisons des marchandises et des services que de grands et bienveillants patrons vendent afin de réaliser un profit. Mais la retraite vous pose problème, puisque nous ne produisons plus durant ce temps, du moins plus rien de commercialisable. Pendant notre retraite, nous faisons les choses par goût de vivre. C’est là une concurrence que vous jugez bien déloyale !

Depuis les années quatre-vingt-dix et le gouvernement Juppé, la droite néolibérale a un projet bien précis : faire la chasse au temps libre rémunéré – congés, retraites, RTT –, qui est évidemment du temps perdu pour le capital. Cette politique exclut a priori tout allongement du temps de retraite financé par cotisations. Pour servir son projet, la droite s’efforce d’ancrer la certitude que l’on ne peut pas faire autrement, à cause de la mondialisation, qui nous obligerait à comprimer nos charges fiscales et sociales.

Pour vous, reculer l’âge de la retraite, c’est obéir aux lois et aux évidences du marché. Monsieur le ministre, vos arguments démographiques ne sont pas recevables. À vrai dire, plus personne n’y croit. Le passage à 1, 9 du taux de natalité diminue de 40 % les besoins de financement aux environs de 2050. Tout est question de ressources, vous le savez. D’ailleurs, la durée effective de cotisation ne se décrète pas, sauf à ce que le Gouvernement soit disposé à garantir le plein-emploi permanent !

Or, toutes les mesures que vous avez mises en place jusqu’à présent se sont révélées inefficaces pour résorber le taux de chômage. Le montant des exonérations de charges, compensées par nos impôts au travers du budget de l’État, s’élève à 33 milliards d’euros pour 2009, tandis que le cumul de ces exonérations pour les années 1991 à 2008 incluses atteint 260 milliards d’euros. Je souligne au passage que les exonérations non compensées représentent près de 40 milliards d’euros de perte sèche pour la sécurité sociale.

Dans tous les pays européens qui disposent d’un système social fort, les néolibéraux n’ont eu de cesse de créer les conditions d’une destruction du pacte social forgé à la Libération. Leur méthode : vider les caisses de l’État et de la sécurité sociale à coups d’exonérations et de cadeaux aux riches, pour ensuite nous persuader que nous vivons au-dessus de nos moyens ! Cette méthode est aussi la vôtre.

La retraite n’est rien d’autre qu’un droit inaliénable, individuel et collectif à la liberté. Ce droit doit être garanti à tous et doit de ce fait reposer sur un fonctionnement et un financement solidaires. Cela en fait un enjeu primordial de civilisation, et c’est la raison pour laquelle nous souhaitons que le caractère solidaire et intergénérationnel des régimes de retraite soit inscrit dans la loi.

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