Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 12 octobre 2010 à 21h45
Réforme des retraites — Article 1er bis A

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Examiner l’impact des retraites sur le pouvoir d’achat des familles permettrait de mieux percevoir l’importance de cette catégorie dans notre vie économique. Il ne faudrait pas oublier non plus que ces retraités ont été des actifs qui, pour la plupart, ont largement contribué à faire croître la richesse de notre pays. Depuis les années soixante, la productivité a été multipliée par cinq. Ces vingt dernières années, la richesse de la France a doublé et il devrait en aller de même pour le PIB d’ici à 2050.

Pourquoi n’est-il pas possible, malgré cette richesse accumulée, de payer aujourd’hui les retraites à leur juste mesure ? L’explication est relativement simple : en trente ans, 10 % de la richesse produite a été prise dans les poches des salariés pour être transférée vers les comptes des actionnaires. Cela représente huit fois le déficit de la caisse d’assurance vieillesse.

C’est cette même politique menée dans notre pays depuis des décennies que vous poursuivez de façon encore plus caricaturale. J’en veux pour preuve le bouclier fiscal et les centaines de milliers d’euros que vous faites distribuer par le fisc à certains de vos amis. Vous préférez favoriser la rémunération des dividendes plutôt que les pensions de nos anciens.

Pour mener ces politiques, vous avez le plein appui des dirigeants européens, puisque la Commission européenne vient de sortir, au mois de juillet dernier, un Livre vert sur les retraites. Elle part du même constat que le vôtre : « À partir de 2012, la population en âge de travailler en Europe va commencer à diminuer et il nous appartient de relever ce défi. » Elle se félicite que de nombreux États membres aient « réformé leurs systèmes de pension à des degrés divers », néanmoins elle remarque que la crise financière et économique a « rendu la situation plus difficile et plus urgente ».

On ne peut croire, vous en conviendrez, que ce discours puisse s’adresser aux grands groupes du CAC 40 comme la Société Générale, qui vient de multiplier par soixante-dix ses profits au cours du premier semestre de l’année 2010 !

Le Livre vert, qui part de votre constat, arrive à la même conclusion : il faudrait aller plus loin, plus vite et, si possible, tous ensemble. La principale voie préconisée est « de faire en sorte que le temps passé à la retraite ne continue pas à augmenter par rapport à celui passé à travailler ».

Les membres de la Commission européenne doivent fréquenter les mêmes milieux, les mêmes spéculateurs boursiers, et doivent entretenir peu de relations avec les salariés du privé ou du public. En détournant la formule qui a permis à M. Sarkozy de se faire élire en abusant les électeurs, je dirais que votre but est de faire travailler plus les Français en tant qu’actifs pour qu’ils gagnent moins en tant que retraités.

En réalité, le Livre vert prévoit un recul généralisé de nos retraites au niveau européen. Dans tous les pays d’Europe, les salariés ont fait savoir le 29 septembre dernier leur opposition à ces politiques de casse.

Depuis 1993, les mêmes politiques produisent les mêmes effets : un calcul sur 25 années de cotisations au lieu de 10, une indexation sur les prix et non plus sur les salaires, l’exigence de 40 années de cotisation au lieu des 37, 5 années et une décote de 5 % par année manquante, tout cela a conduit à une baisse de 20 % du pouvoir d’achat des pensions depuis la mise en œuvre de ces mesures. Comment s’étonner dès lors que la moitié des retraités disposent de moins de 1 000 euros par mois, qu’un million d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et que des veuves survivent avec des pensions de réversions minables ?

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