Intervention de Philippe Marini

Réunion du 8 juin 2009 à 21h30
Organe central des caisses d'épargne et des banques populaires — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur :

En outre, les caisses d’épargne, tout comme d’ailleurs Natixis, se sont livrées à une politique onéreuse d’acquisitions immobilières, et ce en haut de cycle, avec notamment le montage complexe de l’acquisition du contrôle de Nexity et l’opération Foncia.

Nous nous souviendrons également que les caisses d’épargne ont subi un grave préjudice, tant sur le plan financier qu’en termes d’image, à la mi-octobre 2008, avec une perte de 752 millions d’euros sur des opérations de négociation pour compte propre d’instruments dérivés sur des indices d’actions, opérations qui avaient manifestement échappé à la vigilance, et peut-être même à la compréhension, de la direction générale du groupe. Il en est résulté le départ des deux principaux dirigeants, MM. Charles Milhaud et Nicolas Mérindol.

Enfin, pour terminer ce rappel de l’historique récent, les deux groupes ont été et demeurent directement confrontés aux graves difficultés des rehausseurs de crédit, ou monolines, qui sont une spécificité de la finance américaine, au travers de leur filiale CIFG, Compagnie Ixis Financial Guaranty, créée en mai 2002 et apportée par Ixis, c’est-à-dire, à l’origine, par la Caisse des dépôts et consignations, lors de la fusion qui devait donner naissance à Natixis.

Telles sont les difficultés auxquelles le nouveau groupe doit faire face.

Cette situation dégradée a été manifestement un facteur d’accélération du rapprochement entre les caisses d’épargne et les banques populaires. Ce rapprochement procédait d’un choix opéré par les précédentes directions générales, mais, compte tenu des quelques éléments que je viens de rappeler, il est devenu une urgente nécessité.

En septembre 2008, la Caisse nationale des caisses d’épargne et la Banque fédérale des banques populaires ont été, une première fois, amenées à recapitaliser Natixis à hauteur de 3, 7 milliards d’euros. Cette opération a été relayée, via les outils que nous avons créés en octobre 2008 dans la loi de finances rectificative pour le financement de l’économie, par la souscription de la SPPE à une première émission de titres super-subordonnés à durée indéterminée, pour plus de 2 milliards d’euros.

Natixis a également engagé un recentrage de sa stratégie et de son offre et a cantonné, dans une structure comptable interne dénommée « Gestion active des portefeuilles cantonnés », les portefeuilles d’actifs qui ne correspondaient plus aux nouveaux choix stratégiques ou requéraient une trop grande immobilisation de fonds propres et de trésorerie.

En d’autres termes, il s’agit des actifs potentiellement « illiquides » ou « toxiques », dont le montant total s’élevait à 31 milliards d’euros à la fin du mois de décembre 2008 et à environ 33, 7 milliards d’euros en avril 2009. Je parle à dessein d’actifs « potentiellement illiquides », car il est clair que le risque de pertes financières sur ce portefeuille ne porte pas sur la totalité de son évaluation. Il est non moins clair cependant qu’il peut en concerner une fraction significative, même si nous ignorons à ce jour dans quelle proportion.

Hélas ! la chronique n’est pas achevée.

Ainsi, le 13 mai dernier, Natixis a publié de lourdes pertes pour le seul premier trimestre de 2009, à savoir 1, 83 milliard d’euros, liées à de nouvelles dépréciations d’actifs au sein de la structure interne « Gestion active des portefeuilles cantonnés ». Dès lors, les deux actionnaires de référence ont dû réaliser un nouvel apport en capital à hauteur de 3, 5 milliards d’euros, conduisant à une nouvelle émission de titres super-subordonnés à durée indéterminée par la Caisse nationale des caisses d’épargne et la Banque fédérale des banques populaires, émission placée auprès de la SPPE, pour un montant de 2 milliards d’euros. Ce montant vient « préempter » en quelque sorte une grande partie de l’apport de 5 milliards d’euros décidé par l’État et dédié au nouvel organe central.

Enfin, les deux actionnaires de référence doivent aussi apporter 1, 5 milliard d’euros sous forme d’avance remboursable, financée à parité par chaque réseau et rémunérée à un taux de 6, 83 % environ, en vertu des conditions en vigueur à la mi-mai 2009.

Dans ces conditions, on le comprendra, le rapprochement des deux réseaux doit être mené à marche forcée : c’est cette option qui assure la crédibilité de l’ensemble, qui conditionne sa position sur les marchés et, tout simplement, la continuité de l’exploitation.

Les bases de cette opération ont été fixées par le protocole de négociations du 16 mars 2009.

Ce document pose tous les principes, à savoir la création d’un nouvel organe central « fort » et « disposant d’une structure financière robuste et pérenne », dénommé CEBP ; le maintien temporaire de la Banque fédérale des banques populaires et de la Caisse nationale des caisses d’épargne en tant que sociétés holdings détenant les filiales et actifs non transférés ; l’apport de fonds propres par l’État pour un montant total de 5 milliards d’euros, élément décisif du protocole de négociations.

Les dix articles du document détaillent les principaux aspects du rapprochement. Si celui-ci n’est pas opéré dans les semaines qui viennent sur la base des résultats comptables audités au 31 décembre 2008, il sera nécessaire d’apprécier de nouveau les conditions économiques de l’opération, les parités, en se fondant sur les comptes suivants, c’est-à-dire ceux qui seront émis à la date du 30 juin 2009.

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