…constitue, clairement, une véritable spoliation du pouvoir des sociétaires et, bien sûr, des coopérateurs, pourtant consacré par la loi et le code monétaire et financier.
Un autre motif qui nous conduit à rejeter ce projet de loi tient aux enjeux financiers qui ont présidé à son élaboration.
Nous avons souligné précédemment la place toute particulière qu’occupaient les réseaux des caisses d’épargne et des banques populaires dans le paysage du crédit bancaire. Proximité et accessibilité bancaire, notamment en direction des plus démunis, des territoires délaissés par les banques commerciales « banalisées », des très petites entreprises ou encore des associations : voilà ce qui caractérise, avant tout, l’action de ces deux réseaux.
Mais on pourrait citer également le fait que les caisses d’épargne participent au développement local, non seulement en apportant aide et soutien à des projets économiques et sociaux menés à l’échelon local – cela fait partie de leurs obligations législatives –, mais aussi en apportant leur concours à l’effort d’investissement des collectivités territoriales, singulièrement des plus petites, qui ne font que plus rarement appel aux produits sophistiqués de la Caisse des dépôts ou de Dexia.
Ce qui est donc en cause, dans cette affaire, c’est la persistance d’une source de financement accessible pour les collectivités locales, au moment même où elles sont particulièrement sollicitées pour contribuer à la reprise de l’activité économique.
Si, comme nous le pensons, l’une des priorités de la fusion est de dégager des moyens pour prendre en charge les pertes découlant, d’une part, des erreurs de M. Charles Milhaud, ancien patron de la CNCE, d’autre part, des placements hasardeux de Natixis, structure portée sur les fonts baptismaux par M. François Pérol, installé par l’Élysée à la tête du nouvel ensemble créé par le projet de loi, que va-t-il rester pour financer l’initiative locale, le développement des territoires, l’action publique des collectivités ?
Ce texte nous oblige donc clairement à nous poser certaines questions de fond sur le devenir du paysage bancaire et financier de notre pays.
Devons-nous voter un projet de loi dont la finalité est non pas l’intérêt général – c’est pourtant, en vertu de la Constitution, l’objet de la loi –, mais la défense et l’illustration d’intérêts privés ?
Les dérives financières de quelques-uns doivent-elles se traduire par une confiscation des pouvoirs de décision, par un autoritarisme renforcé – et assumé –, par des opérations et des mouvements financiers faisant payer à d’autres la facture desdites dérives ?
Ce projet de loi étant profondément injuste et déséquilibré, nous ne pouvons évidemment que le rejeter.