Vous avez évoqué par ailleurs, s’agissant cette fois des ouvertures de crédits, la persistance de sous-budgétisations en loi de finances initiale. Je vous répondrai brièvement, en mettant en avant deux idées principales.
D’une part, nous finançons en 2010 un dépassement de dépenses très exceptionnel, essentiellement lié à la situation économique. Il n’est pas illogique de mettre en regard une ressource, elle aussi ponctuelle, sur les charges de la dette notamment. Cette opération ne remet pas en cause la sincérité du projet de loi de finances pour 2011.
D’autre part, concernant les dépenses d’intervention, nous présentons dans ce collectif plus de 3 milliards d’euros d’ouvertures de crédits, lesquelles sont bien évidemment gagées par des annulations de crédits à due concurrence. Nous respectons ainsi la norme de dépense, et ce dans un contexte difficile, je vous remercie de l’avoir reconnu.
Ces ouvertures de crédits sont exceptionnelles et conjoncturelles. Ainsi, près de 1, 4 milliard d’euros de crédits sont ouverts en faveur respectivement de la politique de l’emploi – il était indispensable de soutenir l’activité et l’emploi des plus fragiles –, en faveur de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » – en raison évidemment des difficultés plus grandes de retour à l’emploi des personnes handicapées, ce qui pèse notamment sur les dépenses liées à l’allocation aux adultes handicapés –, et en faveur de l’hébergement d’urgence ou des aides au logement, dépenses qui sont, là encore, très sensibles à la situation économique.
En votre éminente qualité de maire, monsieur le rapporteur général, vous pouvez mieux que quiconque mesurer l’importance des dépenses budgétaires consenties en faveur des politiques de proximité et d’accompagnement menées à destination des publics les plus fragiles.
En regard de ces dépassements exceptionnels, il faut signaler la baisse, elle aussi ponctuelle, de la charge de la dette, et, dans une moindre mesure, des prélèvements en faveur des collectivités locales et de l’Union européenne.
De notre point de vue, ce schéma équilibré nous permet de faire face à des dépenses pour l’essentiel obligatoires sans pour autant remettre en cause nos engagements de maîtrise des dépenses.
Concernant le caractère structurel ou reconductible de ces dépassements pour l’année 2010 et leur répercussion sur les comptes de l’année 2011, je veux vous rassurer : les dépassements étaient attendus et, dans leur grande majorité, ils ont été anticipés et intégrés dans le projet de loi de finances pour 2011. Autrement dit, mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne cachons rien sous le tapis, tout est sur la table, tout est transparent !
À l’appui de ma démonstration, je citerai quelques exemples.
Les crédits en faveur de l’emploi, sur lesquels nous économisons entre 1 milliard d’euros et 1, 5 milliard d’euros en 2011, restent stables en valeur parce que nous avons tenu compte des effets en 2011 des dérapages constatés en 2010.
Interrogé sur ce même sujet à l’Assemblée nationale, je n’ai pas fait de réponse différente : à interrogation logique, réponse étayée !
Les contrats aidés seront moins nombreux l’année prochaine en raison de l’amélioration de la situation économique, mais la dotation afférente augmentera de 400 millions d’euros en 2011.
De même, la dotation pour l’AAH, quant à elle, est réévaluée de près de 700 millions d’euros : cette réévaluation s’explique, pour une moitié, par le coût de la revalorisation annuelle et la progression anticipée du nombre de bénéficiaires, mais, surtout, pour l’autre moitié, par une vraie remise à niveau de la dotation, qui tire les conséquences des ouvertures demandées dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative.
Je précise d’ailleurs que le Président de la République a lui-même rendu un arbitrage en ce sens pour tenir l’engagement pris d’augmenter de 25 % l’AAH sur la durée du quinquennat.
De la même façon, nous tenons compte du dépassement consécutif à une baisse du nombre des départs à la retraite, en 2009 et en 2010, dans la budgétisation des crédits de personnel des différents ministères en 2011.
Vous avez souligné, cher Philippe Marini, le caractère plus contraignant, ou plus vertueux, de la norme de dépense « zéro valeur » que l’État s’est fixée à compter de 2011. Je remercie également Adrien Gouteyron d’avoir souligné que nous respections cette norme cette année, tout comme nous la respecterons bien évidemment l’année prochaine, même si les contraintes sont plus fortes.
Madame Morin-Desailly, j’ai bien noté vos inquiétudes quant aux effets sur les salles de cinéma de la réforme de l’évaluation des valeurs locatives. Je rappelle néanmoins que, dans un premier temps, cette réforme sera expérimentale et limitée à quelques départements, ce qui permettra d’en juger les effets sur certaines professions.
À cet égard, je souligne que ces expérimentations ont été rendues possibles grâce à la révision constitutionnelle. Sans cet outil constitutionnel mis à la disposition du Gouvernement ou du Parlement, nous n’aurions probablement pas la possibilité de mesurer, pendant un temps défini, l’impact d’une politique publique nouvelle.
Personne ne peut sérieusement contester la nécessité de réviser les valeurs locatives professionnelles, même s’il faut être conscient des difficultés que cela pourra susciter. Si nous ne sommes jamais parvenus, dans le passé, à engager cette révision, c’est bien qu’il y avait un obstacle difficilement franchissable. L’expérimentation à laquelle nous allons procéder dans cinq départements l’année prochaine…