Séance en hémicycle du 15 décembre 2010 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • initiale
  • rectificative
  • taxe

La séance

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La séance est ouverte à quatorze heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président du Sénat a reçu de M. Emmanuel Constans, président du Comité consultatif du secteur financier, le cinquième rapport annuel de cet organisme.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des finances et sera disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2010 (projet n° 163, rapport n° 166).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui le traditionnel projet de loi de finances rectificative de fin d’année.

Il s’agit du quatrième collectif pour l’année 2010, les trois précédents étant ceux du 9 mars 2010 relatif aux investissements d’avenir, du 7 mai 2010 sur l’aide à la Grèce et du 7 juin 2010 sur la mise en place du Fonds de stabilisation financière de l’Union européenne.

Ce projet de loi de finances rectificative procède à un certain nombre d’ajustements concernant l’équilibre du budget de l’État, qui prennent acte du respect de nos objectifs en matière de dépenses ainsi que de nos prévisions de recettes, sur lesquelles je ne reviendrai pas.

Cette année, la norme de dépense est respectée et le solde budgétaire marque une légère amélioration depuis nos dernières prévisions. Les dépenses évolueront bien selon la norme « zéro volume » fixée pour cette année 2010. Notre engagement de maîtrise des dépenses est confirmé : nous respectons le plafond de dépenses fixé à 352, 3 milliards d’euros.

L’évolution favorable de la charge des intérêts de la dette permet de compenser les besoins accrus des politiques de l’emploi et de la solidarité.

De même, les recettes pour 2010 correspondent aux dernières prévisions, que nous avons exposées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, en ce qui concerne tant les recettes fiscales, qui s’élèveront à 255 milliards d’euros, que les recettes non fiscales.

En conséquence, le déficit budgétaire est globalement conforme à nos prévisions, et même en légère amélioration, puisqu’il s’établit à 149, 7 milliards d’euros en exécution, contre 152 milliards d’euros prévus dans la dernière loi de finances rectificative. Cette différence s’explique principalement par la réévaluation du coût pour l’État, en 2010, de la réforme de la taxe professionnelle, qui reste toutefois sans incidence sur le rythme de croisière de cette réforme.

Ce projet de loi de finances rectificative permet aussi d’apurer certaines dettes de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale, clarifiant ainsi les relations financières entre ces deux entités.

Un effort important a déjà été réalisé, puisque cette dette s’élevait à 7 milliards d’euros à la fin de l’année 2006. La mobilisation des excédents du panier de recettes affecté à la sécurité sociale en compensation des allègements généraux de charges, à hauteur de 1, 4 milliard d’euros, permet d’apurer le montant résiduel de dette constaté à la fin de l’année 2009. À partir de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, le passage à un régime où ce panier est définitivement affecté à la sécurité sociale s’effectue donc sur des bases assainies. Le Gouvernement a été particulièrement attentif à cette question, qui est importante.

Nous avons par ailleurs entendu l’appel des départements en difficulté financière. Dans la ligne des préconisations du rapport Jamet, nous souhaitons leur apporter une solution pragmatique pour la construction de leurs budgets pour 2010 et 2011.

Le Gouvernement a donc décidé de mettre en place un mécanisme exceptionnel de soutien aux départements en difficulté, doté de 150 millions d’euros et financé par redéploiements de crédits à partir de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et du Fonds national des solidarités actives.

Nous avons bien évidemment calibré ces redéploiements de façon à ne pas déséquilibrer les actions menées par ces deux organismes.

Premièrement, nous créons un fonds de soutien aux départements en difficulté, à hauteur de 75 millions d’euros, géré par la CNSA pour le compte de l’État.

Plus précisément, face au poids croissant de l’allocation personnalisée d’autonomie – je n’apprends rien sur ce point aux membres de la Haute Assemblée –, il s’agit d’apporter une aide exceptionnelle aux départements les plus exposés à cette dépense, sur la base de critères objectifs.

Les crédits du fonds de soutien seront répartis entre les départements les plus exposés, en fonction de trois critères : la part des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans ; le rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et celui de chaque département, le dernier revenu imposable connu étant pris en compte ; enfin, le potentiel fiscal des départements. Quiconque fait preuve d’un minimum de sérieux devrait pouvoir souscrire à ces critères, qui me semblent objectifs et exhaustifs.

Nous compléterons cette aide par une enveloppe de soutien conventionnel d’un montant de 75 millions d’euros, gagé par la mobilisation de crédits non versés au Fonds national des solidarités actives en raison d’une montée en charge du revenu de solidarité active « activité » plus lente que celle qui avait été initialement prévue.

Il était, me semble-t-il, nécessaire de répondre de façon immédiate et opérationnelle à la préoccupation dont témoignent aujourd’hui de nombreux élus face aux difficultés rencontrées par certains départements. Toutefois, cet effort exceptionnel devra être suivi d’une action plus structurelle.

Pour faire face au fameux effet de ciseaux existant entre les recettes et les dépenses des départements, il est en effet indispensable, d’une part, de rationnaliser l’action de ces derniers, comme le suggère le rapport Jamet, et, d’autre part, de revoir notre action en faveur de la dépendance, notamment son mode de financement. Tel est l’objet de la réforme voulue par le Président de la République, à propos de laquelle un débat sera engagé à l’échelle nationale dès le début de l’année prochaine.

Nous avons souhaité également, à travers le volet fiscal de ce projet de loi de finances rectificative, poursuivre notre action réformatrice dans le sens de la modernisation de la fiscalité foncière des entreprises, de l’encouragement de comportements favorables à l’environnement – en déclinant les objectifs du Grenelle – et, enfin, de la simplification des procédures fiscales et douanières.

En ce qui concerne la modernisation de la fiscalité foncière des entreprises, nous proposons deux dispositifs.

Le premier porte sur la révision des valeurs locatives foncières des entreprises. Attendue depuis longtemps et maintes fois repoussée, cette mesure a été préparée en concertation avec les associations d’élus et les entreprises. Elle permet de rétablir – enfin !, diront certains, à juste titre d’ailleurs – l’équité dans l’impôt foncier des entreprises, à produit constant.

Nous voudrions conduire une expérimentation dès l’année prochaine dans cinq départements – l’Hérault, le Pas-de-Calais, le Bas-Rhin, Paris et la Haute-Vienne –, en vue d’une généralisation des travaux en 2012 et d’une traduction de la réforme dans les bases d’imposition en 2014.

Les valeurs locatives des entreprises seront désormais assises sur des valeurs calculées à partir des loyers réellement constatés et révisées automatiquement chaque année. La réforme est limitée à ce stade aux locaux commerciaux et aux locaux professionnels des professions libérales.

Le second dispositif prévu pour la modernisation de la fiscalité foncière des entreprises porte sur la simplification des taxes d’urbanisme. Si vous l’adoptez, mesdames, messieurs les sénateurs, à compter de 2012 deux taxes viendront se substituer à quinze des dix-sept prélèvements existants.

Il s’agira, en premier lieu, d’une taxe d’aménagement, à vocation budgétaire, qui reconstituera l’essentiel du produit des anciennes taxes, avec une part communale et une part départementale, dont les taux demeureront fixés par délibération des collectivités.

En second lieu, un versement pour sous-densité, dont l’objectif sera de lutter contre l’étalement urbain, sera instauré sur délibération des municipalités. Il sera obligatoire pour les communes dont les projets d’équipements sont importants.

Annoncée dans la loi Grenelle II, et fruit d’une longue concertation, cette réforme a également reçu le soutien des élus locaux et des professionnels.

Le dernier point de cette modernisation fiscale porte sur des mesures de financement du Grand Paris. Je les mentionne pour mémoire, car j’ai noté qu’elles avaient suscité l’enthousiasme de votre assemblée – en effet, sans attendre l’examen de ce collectif, vous avez souhaité les incorporer dans le projet de loi de finances pour 2011.

Le texte adopté en commission mixte paritaire lundi dernier a permis de trouver une solution pour le financement du logement social et de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, qui constitue, à juste titre d’ailleurs, une priorité pour bon nombre d’élus locaux. En outre, la CMP a maintenu dans le projet de loi de finances rectificative la création des recettes fiscales destinées à financer les transports en Île-de-France, lesquels ont bien besoin d’un accompagnement budgétaire si l’on veut que leur fluidité, leur efficacité et la qualité du service rendu aux usagers s’améliorent.

La deuxième orientation du volet fiscal de ce projet de loi de finances rectificative porte sur l’encouragement des comportements favorables à l’environnement.

En premier lieu, le barème du malus automobile sera durci à compter de 2012.

En deuxième lieu, la taxe générale sur les activités polluantes, qui pèse sur les émissions d’oxydes d’azote, sera majorée afin de respecter les prescriptions communautaires.

En troisième lieu, et enfin, le cadre législatif permettant de mettre en place l’écotaxe sur les poids lourds sera adapté aux exigences opérationnelles révélées à l’occasion des appels d’offres.

La troisième orientation de ce collectif budgétaire que j’ai l’honneur de vous présenter, mesdames, messieurs les sénateurs, porte sur la simplification des procédures fiscales et douanières.

S’agissant des modalités de déclaration de l’impôt, nous prévoyons la possibilité de centraliser au niveau du groupe les montants de la TVA due ; la simplification du calcul du seuil de chiffre d’affaires pour les auto-entrepreneurs ; la suppression de l’exigence de dépôt de la déclaration d’impôt sur le revenu d’une personne dans les six mois suivant son décès ; enfin, l’extension de la dispense de cautionnement pour les opérations de dédouanement à l’entrée sur le territoire national. Nous avons également prévu des mesures techniques visant à la simplification.

Nous avons souhaité, notamment, moderniser le régime fiscal et social des plans d’épargne logement, les PEL. Il s’agit en fait de recentrer le PEL sur son objectif premier de financement de l’acquisition d’un logement. Le taux de rémunération des nouveaux plans sera fixé annuellement en fonction des conditions du marché et leurs intérêts seront soumis aux contributions sociales au fil de l’eau et non plus au bout de dix ans, ce qui représentera un apport de trésorerie bien précieux par les temps qui courent.

Par ailleurs, le droit à prime sera subordonné à la contractualisation d’un véritable prêt, et cette gratification sera « verdie ».

Nous avons souhaité, ensuite, harmoniser les procédures de recouvrement forcé, pour traduire dans la législation la fusion entre l’ancienne direction générale des impôts et l’ex-direction générale de la comptabilité publique au sein de la nouvelle direction générale des finances publiques.

Enfin, nous avons voulu mettre en conformité avec la norme communautaire certaines dispositions en matière de TVA. Il s’agit, notamment, de supprimer le taux réduit pour les prestations d’aide juridictionnelle et de revoir la fiscalité des produits du tabac. Pour cette dernière, sont concernées essentiellement la suppression du prix de seuil et la réforme des mesures encadrant l’introduction de produits du tabac en France. À cet égard, le Gouvernement précise qu’il n’est pas question d’accepter la libre circulation du tabac, compte tenu des enjeux de santé publique qui s’y attachent, notamment à cause de la lutte contre le tabagisme.

Voilà, monsieur le président, monsieur le rapporteur général, madame le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, les grands axes structurant ce collectif budgétaire.

Évidemment, en raison de la gestion du calendrier parlementaire, l’examen de ce texte intervient quelques heures seulement après une commission mixte paritaire importante et pour laquelle je tiens, devant la Haute Assemblée, à remercier le rapporteur général de la commission des finances, M. Philippe Marini, de son degré d’implication personnelle, qui est bien connu, et depuis tant d’années. Je veux lui rendre un hommage sincère, individuel, …

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

… mais aussi eu égard à la dignité de sa fonction éminente. Le contexte de nos finances publiques, tout à fait singulier, exigeait un échange vertueux entre le Gouvernement et le Parlement. C’est ce qui s’est passé, me semble-t-il, puisque deux cents amendements ont été acceptés parmi les neuf cents qui avaient été déposés.

Par ailleurs, au sein de la commission mixte paritaire, la représentation nationale a accompagné de manière, me semble-t-il, intelligente et efficace l’affirmation d’un objectif partagé et intangible de réduction de nos déficits publics. Je vous en remercie de nouveau, monsieur le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voici venu le quatrième collectif budgétaire de l’année.

Grâce à ces lois de finances rectificatives, nous avons accompagné les changements du contexte économique. Au début de l’année, il s’agissait de sortir de la crise financière, ce qui nécessitait de prendre des mesures exceptionnelles pour essayer de compenser la perte de produit intérieur brut potentiel induite par la crise ; d’où la loi de finances rectificative permettant le financement des investissements d’avenir.

Puis, la zone euro a été rattrapée par d’autres turbulences, et ce fut la crise des dettes souveraines. Dès lors, on a demandé au Parlement de souscrire aux mesures spécifiques pour la Grèce, puis à l’élaboration d’un mécanisme européen de stabilisation.

Nous pouvons maintenant faire le point de façon quasi définitive sur la situation budgétaire de la France en cette fin d’année, qui est toujours marquée par la crise de la dette souveraine.

Certes, le présent collectif budgétaire ne comporte pas de dispositions spécifiques en faveur de l’Irlande, mais la situation de ce pays est dans tous les esprits, de même que les problèmes de la Grèce et leurs conséquences sur la zone euro avaient occupé une bonne part de nos débats au premier trimestre de l’année 2010.

Il me semble, mes chers collègues, que nous sommes fondés à nous poser tout d’abord une question fondamentale : les pays de la zone euro croient-ils encore en celle-ci ?

Cette question est directement liée à la mise en œuvre du dispositif que nous avons approuvé en juin dernier et, surtout, aux conditions que les pays de la zone euro poseront à l’Irlande pour prix de son renflouement.

Il y a, mes chers collègues, quelque chose d’affolant – je pèse mes mots – à constater, d’un côté, la mise sous tutelle économique et financière d’un État souverain – car, lorsque l’on se reporte au plan imposé à l’Irlande, c’est bien de cela qu’il s’agit : ce pays met entre parenthèses pendant un certain temps sa pleine indépendance –, et, d’un autre côté, l’absence de raisonnement à long terme sur les dommages que provoque au sein de la zone euro l’existence de systèmes fiscaux non coopératifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C’est à croire que les États de la zone euro ne croient plus vraiment en l’avenir de cette dernière, qu’ils ont renoncé dans les faits à l’objectif de convergence des structures économiques et qu’ils se contentent de passer les obstacles les uns après les autres, en d’autres termes de bâtir des plans susceptibles seulement de sauver les intérêts des principaux établissements financiers créanciers.

En tout état de cause, monsieur le ministre, il serait utile de nous indiquer quand le ministre de l’économie sera en mesure d’accorder la garantie de la France au Fonds européen de stabilité financière et quand et comment sera mise en œuvre la procédure d’information des commissions des finances des assemblées, prévue à l’article 3 de la loi de finances rectificative de juin 2010.

Permettez-moi de le redire : renflouer avec l’argent de la zone euro un pays à qui on ne demande même pas de prendre un minimum d’engagements pour sortir du dumping fiscal pose une question vraiment fondamentale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Si l’on repasse à présent de ce côté-ci du Channel, le déficit de l’État ne peut que susciter encore beaucoup d’inquiétudes. Il est supérieur de 27, 5 % à la prévision de la loi de finances initiale pour 2010 et de 8, 5 % à l’exécution de 2009, et nous ne pouvons qu’être sensibles, nous aussi, à la nécessité d’inspirer confiance aux analystes et aux marchés.

À cet égard, en cette période où les sphères budgétaire et financière s’interpénètrent, on peut considérer que l’approche française d’une régulation stricte constitue pour notre système financier un véritable atout et protège nos finances publiques du risque de devoir le renflouer de nouveau. Monsieur le ministre, il est clair que, grâce aux choix réalisés, ensemble, par le Parlement et le Gouvernement, notre pays n’est pas menacé par un scénario à l’irlandaise.

J’en viens maintenant au projet de loi de finances rectificative en tant que tel.

Par définition, une loi de finances rectificative corrige des insuffisances. En matière fiscale, c’est un exercice qui se place dans la continuité des années précédentes, et nous trouvons ici nombre d’éléments divers.

Nous sommes habitués aux expressions utilisées en la matière : « troisième partie » de la loi de finances de l’année à venir, « session de rattrapage », « inventaire à la Prévert ». Dans ces articles fiscaux, il est vrai, on mêle les choses importantes à l’accessoire. Nous traiterons du régime fiscal des chiens de traîneaux et de celui des vendeurs colporteurs de presse, …

Sourires.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… mais nous aborderons aussi des sujets significatifs, tels que l’aménagement du régime des sociétés de personnes…

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… ou la déclinaison qu’il convient de donner aux notions de transparence et de translucidité fiscales des sociétés de personnes. Enfin – M. le ministre y a fait allusion –, nous simplifierons et nous renforcerons le régime des taxes locales d’urbanisme.

Dans le domaine des dépenses, il faut apporter des corrections, ce qui est l’objet de cette loi de finances rectificative.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Certes, monsieur le président de la commission !

Les ouvertures de crédits attestent – monsieur le ministre, vous le savez mieux que nous – une hausse significative des dépenses d’intervention à caractère social de l’État, qui est partiellement – mais partiellement seulement – imputable à la crise. Toutefois, elles sanctionnent également la persistance de sous-budgétisations d’une loi de finances initiale à l’autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je prendrai quelques exemples.

Le premier concerne les ouvertures de crédits en faveur de la politique de l’emploi – 1, 3 milliard d’euros –, notamment au profit des contrats aidés. Bien sûr, nous ne mettons pas en cause les mesures prises ; nous observons simplement que les calculs du début de l’année étaient quelque peu optimistes en ce qui concerne tant le nombre de ces contrats que leur mode de calcul, et nous constatons en ce domaine un important dérapage. Par ailleurs, en exécution, il ne semble pas vraiment – c’est une litote – que les dépenses aient été engagées avec le souci quotidien et permanent de tenir compte des disponibilités budgétaires.

Deuxième exemple : l’allocation aux adultes handicapés – plus 319 millions d’euros –, dont nos excellents rapporteurs spéciaux ont, de façon récurrente, dénoncé le caractère habituellement sous-budgété.

Troisième exemple : les aides au logement et les dépenses d’hébergement d’urgence – plus 275 millions d’euros –, déjà abondées par décret d’avance et, une fois encore – nous ne nous lasserons jamais de le répéter –, régulièrement sous-évaluées en loi de finances initiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il en va de même pour la fameuse aide médicale d’État, les bourses étudiantes, la prise en charge des demandeurs d’asile : autant de rubriques que nous considérons habituellement comme insuffisamment dotées en loi de finances initiale, autant de mesures qui, sans surprise, sont évoquées de façon répétitive par nos rapporteurs spéciaux.

Hors dépenses à caractère social, nous observons aussi des ouvertures de crédits permettant de faire face à des pénalités communautaires dans le domaine agricole, pour un montant de 83 millions d’euros – en d’autres termes, nous avons alloué des aides hors du droit communautaire et nous sommes sanctionnés pour cette raison –, des dotations destinées à compléter le financement des opérations extérieures, les OPEX – plus 387 millions d’euros : là encore, c’est une chronique annuelle – ou visant à assurer la dette de l’État vis-à-vis du Crédit foncier de France au titre des primes d’épargne logement – 83 millions d’euros. D’ailleurs, il n’y a rien à reprocher à cette écriture, conforme aux recommandations formulées cette année par notre excellent rapporteur spécial, notre collègue Jean-Pierre Fourcade.

On peut ajouter à ces ouvertures de crédits l’opportune souplesse consistant à relever le plafond d’emploi du ministère de l’éducation nationale pour nous mettre en situation de le respecter en exécution. En modifiant le plafond, on a effectivement plus de chances de le respecter – monsieur le ministre, vous savez fort bien tout cela.

Face aux dépenses que j’ai caractérisées et qui – je tiens à le souligner – seront récurrentes, nous avons certes quelques bonnes surprises du côté des recettes. Toutefois, celles-ci sont de nature exceptionnelle.

Nous constatons, et nous nous en félicitons, une diminution de la charge de la dette à hauteur de 2, 2 milliards d’euros par rapport à la prévision révisée pour 2011. Cette évolution est due, d’une part, au maintien à un niveau très bas des taux d’intérêt, et, d’autre part, à l’extrême technicité, au professionnalisme et à l’ingéniosité de l’Agence France Trésor, qui, grâce notamment à la pratique de l’assimilation et à l’utilisation opportune du marché, a été en mesure de redéployer un assez grand nombre de lignes budgétaires, ce qui s’est traduit par des économies.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Néanmoins, ces marges positives exceptionnelles financent, nous le savons, des dépenses d’intervention et de fonctionnement qui, elles, ne présentent pas un tel caractère d’exception.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Par ailleurs, pour ce qui concerne les prélèvements sur recettes, nous observons un effet d’aubaine, dont nous ne pouvons que nous réjouir, avec une baisse de ces prélèvements qui s’élève à 1, 2 milliard d’euros et se décompose en, d’une part, une réduction de 566 millions d’euros au titre de notre contribution en faveur de l’Union européenne – le mode de calcul nous est un peu plus favorable ! – et, d’autre part, une diminution de 646 millions d’euros du prélèvement en faveur des collectivités territoriales, en raison d’une baisse du Fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA. Toutefois, ce ne sont là, je le répète, que des effets favorables momentanés.

Nous notons également, pour nous en féliciter, une forte hausse des recettes non fiscales sous l’effet de facteurs exceptionnels. Ainsi, nous prélevons – et c’est tant mieux ! – 1 milliard d’euros sur la Caisse des dépôts et consignations et nous bénéficions, à hauteur de 700 millions d’euros, de dividendes supplémentaires de la part de grandes sociétés du secteur public.

Mes chers collègues, il est tout à fait clair que la dépense devra être, à l’avenir, mieux calibrée, pour que nous puissions respecter la trajectoire des finances publiques, celle de la consolidation budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le ministre, la maîtrise des dépenses est la pierre angulaire de la politique d’ajustement budgétaire du Gouvernement.

Les dérapages des dépenses ne doivent jamais être pris à la légère, car ils affectent notre capacité à respecter nos engagements en matière de solde budgétaire et de retour à l’équilibre primaire.

Ils illustrent la nécessité de compléter les déclarations de principe sur les réformes structurelles et de multiplier les actions concrètes permettant de peser sur la dépense.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de vous livrer une brève réflexion sur la norme de dépense et donc sur la sincérité budgétaire.

La norme de dépense est exigeante. Elle doit être appliquée de manière pérenne et sincère.

Je rappelle que la norme « zéro volume » fait l’objet de quelques raffinements. Elle continue, certes, d’être notre objectif général, mais elle est complétée par la règle selon laquelle les dépenses hors dette et pensions doivent être stables en valeur. Nous devrons donc nous diriger au mieux dans ce tunnel du « zéro volume » et du « zéro valeur ». On veut aujourd’hui, et c’est tout à fait positif, que les économies de constatation sur la charge de la dette ne puissent plus être « recyclées » en dépenses nouvelles, comme c’est le cas – pour la dernière fois, espérons-le – dans le présent collectif budgétaire.

Le respect de la nouvelle norme, c’est-à-dire le cheminement dans ce tunnel, à compter de 2011, imposera de réelles contraintes nouvelles. À cet égard, je me suis livré à de petits calculs.

Si nous avions appliqué à la loi de finances initiale pour 2010 les principes annoncés pour 2011, il aurait fallu arbitrer les dépenses du budget général à un niveau inférieur de 3, 9 milliards d’euros à celui que le Gouvernement nous a proposé à l’époque.

De manière analogue, si nous devions aujourd'hui appliquer à ce collectif budgétaire les nouvelles règles « zéro volume » et « zéro valeur », les crédits qui nous sont soumis devraient être inférieurs de 5, 6 milliards d’euros au niveau cumulé des ouvertures pratiquées par la loi de finances initiale et par les différents collectifs budgétaires de l’année, et cela hors plan de relance, hors réforme de la taxe professionnelle et hors financement par le grand emprunt.

Enfin, monsieur le ministre, j’évoquerai une autre source d’inquiétude, à savoir la multiplication des dispositifs de contournement de la norme de dépense. Je sais que vous y êtes particulièrement vigilant ; le ministre du budget doit d’ailleurs souvent se trouver dans une position quelque peu solitaire s’il veut faire respecter une telle discipline.

Sourires.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

C’est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La nouvelle règle a été conçue pour imposer des contraintes supplémentaires aux gestionnaires de crédits, car les tentations sont multiples.

Ainsi, l’article 40 de ce projet de loi de finances rectificative pour 2010 met en place, dans le cadre de notre quote-part au financement du programme A400M, cher à M. Jacques Gautier, un dispositif que je qualifierai de « complexe » et d’« ambigu » pour financer des opérations qui, à vrai dire, relèveraient plus naturellement des crédits affectés à la mission « Défense ».

De la même façon, l’article 43 transfère à un compte d’affectation spéciale, c'est-à-dire hors champ de la norme de dépense, le financement des augmentations des parts de capital des banques internationales de développement.

Par l’article 33, on affecte directement à des organismes sociaux certaines recettes, afin de rembourser des dettes de l’État à l’égard des organismes de sécurité sociale. Ce procédé permet de ne pas faire transiter ces sommes par le budget général, ce qui évite à l’État de devoir se conformer à la norme de dépense.

Les dispositions de ce projet de loi de finances rectificative pour 2010 s’ajoutent à d’autres, de même nature, qui figurent dans la loi de finances pour 2011. Elles s’ajoutent aussi au mode de financement des investissements d’avenir, dont l’impact budgétaire a été entièrement pris en compte, il faut le reconnaître, en 2010, alors même que, dans les années à venir, il majorera de plusieurs milliards d’euros les dépenses des opérateurs de l’État, évitant ainsi aux différents ministères de devoir leur verser des subventions.

Lors de l’examen du dernier projet de décret d’avance, la commission des finances a tenu à exprimer son avis favorable, tout en vous faisant part solennellement, monsieur le ministre, de ses inquiétudes. C’est dans le même esprit qu’elle analyse aujourd'hui le projet de loi de finances rectificative pour 2010.

Il existe dans ce texte de nombreux points de fuite budgétaires. Face à cette menace pour la maîtrise des finances publiques, il convient de se demander si les dispositifs de provision ou de précaution mis en place au cours de ces dernières années pour affronter des dépenses imprévues ne sont pas totalement dépassés ; c’est une question que nous nous permettons de poser, monsieur le ministre.

À notre sens, la nécessaire rénovation des outils de maîtrise des dépenses de l’État pendant l’exercice budgétaire constitue l’une des clefs de la réussite de la convergence budgétaire. En d’autres termes, nous sommes demandeurs d’un contrôle de gestion plus aigu encore dans l’exécution des crédits, au fur et à mesure de l’exercice budgétaire.

Face à l’importance de l’enjeu, l’heure n’est certainement plus, pour personne, au double langage consistant à proclamer la rigueur tout en évitant de la mettre en œuvre. L’heure est à la cohérence ! Et c’est bien ainsi que j’ai compris les propos tenus hier par le Premier ministre, François Fillon, devant la majorité parlementaire.

Engageons donc, mes chers collègues, sans complaisance, mais de manière constructive, l’examen de ce dernier texte financier de l’année, qui, comme toujours, est révélateur à la fois de nos ambiguïtés et de nos espoirs.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication s’est saisie pour avis du projet de loi de finances rectificative pour 2010, en vue, d’une part, de soutenir certaines dispositions adoptées par nos collègues députés et, d’autre part, de vous proposer quelques amendements dans le domaine de la culture.

Je tiens, tout d’abord, à attirer votre attention sur les modalités d’application aux salles de cinéma de l’article 17 du projet de loi de finances rectificative pour 2010 relatif à la réforme de l’évaluation des valeurs locatives.

En effet, il serait souhaitable de prendre en considération les spécificités de ces locaux à caractère monovalent et à faible commercialité. Ce fut le cas d’ailleurs, je le rappelle, dans la loi relative à l’équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques, adoptée en septembre dernier, qui rend obligatoire le recours aux usages en vigueur dans l’exploitation cinématographique pour l’évaluation des loyers.

Or, au 1er janvier 2012, le marché locatif des salles de cinéma n’aura pu encore bénéficier pleinement de ces nouvelles dispositions protectrices. Il conviendrait donc que les bases locatives retenues tiennent compte de la volonté du législateur d’encadrer les loyers des salles de cinéma.

Par ailleurs, notre commission soutient les articles adoptés par l’Assemblée nationale qui relèvent de son champ de compétences, et j’en citerai plusieurs.

Ainsi, l’article 12 ter aménage les conditions ouvrant droit au crédit d’impôt relatif à la production déléguée d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles en permettant la prise en compte des différents modes de rémunération des auteurs.

De ce fait, le choix du type de rémunération des auteurs par les producteurs ne sera plus orienté artificiellement. Je vous rappelle que, sur l’initiative de notre commission, le Sénat avait adopté cette mesure dans le collectif budgétaire de décembre 2009, mais, à l’époque, la commission mixte paritaire ne l’avait pas retenue dans ses conclusions. Nous nous réjouissons donc que nos collègues députés soient désormais convaincus du bien-fondé de cette mesure, et nous sommes persuadés que nous pourrons également rallier nos collègues les plus sceptiques de la commission des finances.

L’article 32 bis modifie le calcul de la taxe prévue à l’article 302 bis KA sur les régies publicitaires de télévision afin de prendre en compte la situation particulière des chaînesd’information.

Quant à l’article 35, il étend aux départements d’outre-mer le dispositif de soutien automatique à l’industrie cinématographique grâce à l’application de la taxe spéciale additionnelle à laquelle ils ne sont pas aujourd’hui assujettis. Cette imposition alimente le compte de soutien géré par le CNC, le Centre national du cinéma et de l’image animée. Ainsi, les salles des DOM pourront désormais, elles aussi, bénéficier notamment des aides à la numérisation.

Enfin, l’article 44 met en cohérence le régime de reclassement des maîtres de conférences des établissements d’enseignement supérieur publics relevant du ministre chargé de l’agriculture avec celui qui est prévu pour les enseignants-chercheurs de l’enseignement supérieur.

Mes chers collègues, notre commission vous proposera d’adopter trois amendements.

Le premier vise à conforter l’attractivité du crédit d’impôt en faveur de la production internationale de films. Il s’agit d’une disposition purement technique, sans impact financier, d’aménagement de la procédure d’agrément des œuvres pour l’obtention du crédit d’impôt international.

Le deuxième amendement tend à relever le plafond du crédit d’impôt cinéma, en le portant de 1 million d’euros à 4 millions d’euros, à l’instar du crédit d’impôt international et des montants proposés dans d’autres pays européens. Il s’agit d’éviter la délocalisation de quelques productions françaises importantes, comme cela se produit malheureusement aujourd'hui.

Le troisième et dernier amendement a pour objet de simplifier le circuit de déclaration et de paiement de la taxe sur les spectacles d’art dramatique, lyrique et chorégraphique et de diminuer ainsi le coût de sa gestion.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les collectifs de fin d’année ont souvent l’apparence – je vais utiliser une image plus expressive que celles qui sont utilisées habituellement ! – d’un « camion-balai ».

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

En ramassant les dispositions législatives isolées, ils s’emplissent d’articles hétéroclites, avec pour seul fil conducteur l’incidence financière de ces derniers !

Cette année, c’est une impression à laquelle nous n’échappons pas avec ce texte qui, entre la version initiale et celle qui nous est soumise, est passé de quarante-trois à soixante-quatorze articles, sans compter ceux qui pourraient résulter de la discussion d’aujourd’hui !

Le premier constat est une légère amélioration du solde budgétaire global, puisque le déficit passe de 152 milliards d'euros à 149, 7 milliards d'euros. Toutefois, cette amélioration du solde budgétaire global ne doit rien à la réalité de l’activité économique et des recettes qui peuvent en découler.

En effet, la croissance attendue au terme de l’année 2010 risque de rester inférieure à deux points, ce qui entraîne des conséquences, notamment, sur les recettes fiscales de la taxe sur la valeur ajoutée nette et de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers. L’élan de la consommation n’est pas assez fort pour porter très haut ces recettes.

Le seul pan de la fiscalité pour lequel la progression des recettes peut s’observer est celui de la fiscalité du patrimoine. On pourrait donc comprendre la subite attention du président de la République pour ce sujet.

Sans anticiper sur le débat que nous devrions avoir en 2011, constatons que les recettes de l’impôt de solidarité sur la fortune, dont le rendement est pourtant affecté par la réduction des niches fiscales, progressent de 253 millions d’euros selon les prévisions les plus optimistes. Quant aux droits de mutation, qu’ils soient à titre onéreux ou gratuit, ils progressent de près de 400 millions d’euros.

Le bon rendement de ces impositions montre clairement que les valeurs sûres de l’immobilier se portent fort bien et que la situation n’est pas plus mauvaise pour les placements mobiliers. La sortie de crise, si tant est qu’elle soit avérée, n’attendra pas 2011 pour quelques propriétaires immobiliers et contribuables !

La situation des comptes publics est également améliorée par la baisse des dépenses liées à l’application du droit fiscal. Comme les produits de la taxe sur la valeur ajoutée brute sont moins importants, il y a moins de TVA déductible à imputer. La même remarque vaut d’ailleurs pour l’impôt sur le revenu, dont le rendement a connu une inflexion à la baisse, dont on dit qu’elle serait due à la progression moindre des rémunérations des salariés. La modération salariale mise en œuvre par l’État, qui est imité par le patronat du secteur privé, et la mise en cause du pouvoir d’achat des retraités créent, en effet, toutes les conditions pour une stagnation du produit de l’impôt sur le revenu !

D’autres facteurs interviennent dans la réduction du déficit budgétaire observée dans cette loi de finances rectificative. Ainsi, on constate cette année une diminution de la contribution de la France au budget de l’Union européenne, qui est imputable autant à l’ajustement du prélèvement communautaire au montant des recettes de TVA qu’au remboursement de versements indus réalisés dans les années précédentes.

On constate aussi une réduction des prélèvements en direction des collectivités territoriales, avec une diminution qui est loin d’être faible du fonds de compensation de la taxe sur la valeur a joutée. Cela explique peut-être la facilité avec laquelle l’État a accepté en loi de finances initiale pour 2011 de retirer le FCTVA de l’enveloppe normée !

On peut imputer cette baisse non seulement à l’anticipation des versements intervenus dans le cadre du plan de relance, mais aussi à la contraction des dépenses d’équipement des collectivités territoriales observée dans le rapport présenté par le Comité des finances locales.

Bien évidemment, nous ne pouvons nous satisfaire d’une telle situation, car la baisse du prélèvement sur recettes qui en découle signifie une réduction de l’effort d’équipement des collectivités et de l’activité économique elle-même, singulièrement dans les domaines du bâtiment et des travaux publics.

Ces difficultés nouvelles proviennent aussi – faut-il le préciser ? – des limites de la participation de l’État à certains projets structurants répondant aux besoins collectifs.

N’est-on pas à la veille de confier aux seuls montages public-privé les travaux de construction et de rénovation des stades que notre pays proposera aux équipes qualifiées pour l’Euro 2016 de football ? N’engage-t-on pas l’avenir des projets de nouvelles lignes de TGV en renchérissant, via les partenariats public-privé, le coût des trajets, avec le risque d’une réduction de la progression du nombre d’usagers, ce qui est tout à fait contradictoire avec les conclusions du Grenelle de l’environnement ?

Il semble aussi que nous ne soyons qu’au début des difficultés pour d’autres chantiers d’équipements de transport collectif, par exemple la réalisation de la tangentielle Nord, qui doit, à terme, relier Sartrouville à Noisy-le-Sec. Finalement, le parcours sera plus court, puisqu’il ira d’Épinay-sur-Seine au Bourget !

Les articles dont nous débattrons et qui concernent la restructuration de la région capitale montrent ainsi que, en l’absence de consensus sur les objectifs visés, nous sommes aussi loin d’un consensus sur les financements mobilisés !

La maîtrise des dépenses publiques, pierre angulaire des politiques menées depuis 2002, trouve d’autres illustrations dans ce collectif budgétaire, notamment avec les annulations de crédits, désormais rituelles, et les ouvertures le plus souvent rendues inévitables par l’insuffisance d’évaluation de certaines dépenses dans la loi de finances initiale ou dans les lois de finances rectificatives d’ores et déjà votées. M. le rapporteur général vient d’en dire quelques mots.

Sur certaines dépenses d’action sociale – les aides personnelles au logement en sont un exemple parmi d’autres –, il demeure des cas typiques et récurrents de sous-évaluations qui appellent des révisions à la hausse et qui, sur le terrain, posent de véritables problèmes.

Au-delà de cette cuisine budgétaire, je ne peux manquer d’évoquer avec un intérêt particulier la participation de notre pays aux errements de la construction européenne.

Les auteurs du projet de loi nous indiquent, pour s’en féliciter, que la gestion active de la dette a permis de réduire de 2, 2 milliards d’euros le coût de sa charge cette année. Chacun appréciera ce que représente cette économie au regard des 1 500 milliards d’euros de la dette publique... Rappelons que la raison profonde de cet allégement est la « qualité » de la dette publique française.

Du fait de l’aggravation des difficultés de la Grèce et de l’Irlande, sans parler de l’Italie, du Portugal ou de l’Espagne, la dette publique française est, plus encore qu’auparavant, un « bon produit », offrant sécurité et rentabilité à l’investisseur. De fait, France Trésor a pu adjuger certains lots de la dette publique à des conditions plus favorables que prévu, singulièrement sur les titres de court terme.

En conséquence, la part de la dette publique française contrôlée par les non-résidents s’est encore accrue : elle dépasse désormais les 70 % et met un peu plus nos politiques économiques sous la pression des desiderata des marchés financiers.

Tout étant lié, il faut mettre en regard, d’une part, les 2, 2 milliards d’euros que nous avons retrouvés grâce à une gestion active de la dette et à la « qualité » des émissions et des adjudications, et, d’autre part, les 1 925 millions d’euros que notre pays ajoutera au concours apporté au plan grec. Ce dernier, qui vise surtout à sauver les banques de leurs créances douteuses, va de pair avec le plan d’austérité imposé par la Commission européenne.

À ce propos, je me permets d’apporter ici le soutien des parlementaires de mon groupe aux salariés, aux jeunes et aux retraités grecs, qui sont largement mobilisés en cette journée de grève générale dans leur pays.

Qui dit austérité dit ralentissement de l’activité ; nous ne pouvons que nous étonner de la contagion qui touche tous les gouvernements européens en la matière ! Les signes de ce ralentissement sont déjà perceptibles, et la baisse des investissements locaux en constitue la première illustration patente.

La logique d’austérité demeure très présente dans ce texte, comme elle le fut dans la loi de finances initiale pour 2011, que nous avons combattue. Nous ne partageons pas cette orientation. C’est pourquoi nous aurons avec ce collectif la même attitude qu’avec la loi de finances pour 2011 : il faudrait vraiment que notre examen le transforme profondément pour que nous le votions !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, cet ultime texte budgétaire de l’année intervient dans un contexte européen inquiétant, comme M. le rapporteur général l’a souligné.

La crise des finances publiques met sous contrainte les États européens. L’Irlande, frappée en outre par une crise des finances privées, est obligée de faire appel au dispositif de stabilisation entériné par la loi de finances rectificative pour 2010 du 9 mars 2010.

Au demeurant, monsieur le ministre, la commission des finances attend toujours d’être informée des conditions de mise en œuvre de ce plan d’aide à l’Irlande. Serons-nous plus éclairés après le sommet européen qui se tiendra les 16 et 17 décembre prochains ? Permettez-moi de noter, de la manière la plus courtoise possible, que, depuis le 18 novembre dernier, Mme la ministre de l’économie a été peu présente au Sénat pendant la discussion budgétaire, ce qui est dommage.

À la suite d’une demande formulée en séance publique par le président et le rapporteur général de la commission des finances, qui avaient souhaité une information plus complète sur les conditions de mise en œuvre de cette aide à l’Irlande, Mme Lagarde a donné au Sénat une réponse très laconique. Nous devrons revenir sur cette question de façon approfondie, notamment en pour qui concerne la conditionnalité de l’aide. Je le souhaite, et c’est d’ailleurs le droit du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je n’insisterai pas davantage sur ces aspects ; lors de l’examen de la loi de finances initiale, je m’étais exprimée, notamment, sur la fiscalité.

L’économie française se remet très lentement du choc de 2008. La production industrielle ne devrait retrouver son niveau d’avant la crise qu’en 2013. L’industrie a payé le prix fort, perdant de nombreux emplois qu’elle ne retrouvera pas.

Nos finances publiques accuseront cette année un déficit de 148, 5 milliards d’euros, en légère baisse par rapport à celui qui était prévu par la dernière loi de finances rectificative, à savoir 152 milliards d’euros. Cependant, cette baisse est relative, car elle repose sur l’adoption de mesures discrétionnaires. En réalité, elle cache une révision à la baisse de la prévision initiale du produit des principales recettes.

En effet, la Caisse des dépôts et consignations fait l’objet de prélèvements supplémentaires à hauteur de 1 milliard d’euros, dont l’essentiel porte sur les fonds d’épargne, ce qui est une mauvaise manière de reconstituer les fonds propres mis à mal par le choc de 2008. S’y ajoute une révision à la hausse des dividendes versés par la Société de prise de participation de l’État.

Bref, ce surplus de recettes non fiscales cache une baisse du produit des recettes fiscales due principalement – je veux insister sur ce point – à un coût de dépenses fiscales plus élevé que prévu, grevant l’impôt sur le revenu. Le surcoût s’établit à 1, 8 milliard d’euros, ce qui est énorme ! Les rentrées d’impôt sur les sociétés ne sont pas celles qui étaient espérées. Le produit de la TVA est revu à la baisse, mais il est vrai – M. le rapporteur général l’a souligné en commission – que cette baisse, et c’est un paradoxe, se trouve compensée par l’augmentation du produit des impositions sur le patrimoine.

Heureusement que nous avons les revenus du patrimoine pour compenser la diminution de la TVA ! Au moment où il est question de revoir la fiscalité du patrimoine, le Gouvernement ferait bien d’y regarder à deux fois.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le rapporteur général, vous avez dit lors de la réunion de la commission – je reprends votre terme – que les revenus du patrimoine étaient les seuls à être « dynamiques ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il faudra donc bien y réfléchir l’année prochaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Les économies de 2, 2 milliards d’euros réalisées sur la charge de la dette contribuent, elles aussi, à l’amélioration du solde. Toutefois, mes chers collègues, nous savons tous que cette situation ne durera pas : en 2013, la France devrait être le premier émetteur de dette en Europe, et tout le monde s’attend à une remontée des taux.

Les recettes de l’État ne sont donc pas protégées et surtout – je le souligne, car ce point n’a pas encore été évoqué – elles n’ont pas l’élasticité espérée. Je rappelle que la loi de programmation des finances publiques est fondée sur une croissance de 2 % – un chiffre exagérément optimiste, nous l’avons dit à plusieurs reprises – et que les recettes sont ajustées en fonction de cette hypothèse.

En 2010, malgré une croissance qui devrait se situer entre 1, 6 % et 1, 7 % en rythme annuel, le surcroît de recettes affiché dans la loi de finances initiale n’a pas été au rendez-vous. Tout cela signifie clairement que, dès 2011, la trajectoire budgétaire définie dans le document transmis à Bruxelles ne sera pas respectée.

Si nous, parlementaires, nous en apercevons, il en va de même pour les marchés financiers. Les analystes non seulement décortiquent les lois de finances initiales, mais ils sont très attentifs à leur exécution.

Évidemment, avec un système fiscal inchangé – je le qualifie volontiers de « passoire » –, grevé d’exonérations – je ne reviendrai pas sur la baisse de la TVA sur la restauration, qui représente une perte de recettes de 3 milliards d’euros – et de multiples niches dont, depuis une dizaine d’années, l’expansion va galopant, il ne faut pas s’étonner que les recettes, même avec un surcroît de croissance, soient beaucoup plus faibles que celles qui étaient inscrites dans la loi de finances initiale. Mais peut-être faut-il considérer que la loi de finances initiale n’était pas sincère… Les deux solutions sont possibles !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Les dépenses, quant à elles, ont été sous-évaluées. J’en veux pour preuve le décret d’avance que le Gouvernement a demandé au Parlement – je rappelle cet épisode, que nous avons tous dénoncé lors de l’examen de la loi de finances initiale – afin d’ouvrir des crédits de personnel, à hauteur de près d’un milliard d’euros, au bénéfice de huit ministères.

Il est nécessaire de « traduire » ce déblocage de crédits, pour que ceux qui écoutent nos débats, ou qui en liront le compte rendu, en comprennent la portée. Que signifie-t-il ? Tout simplement que le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, annoncé à grands coups de clairon, ne suscitera pas l’économie espérée de 500 millions d’euros par an.

En effet, les fonctionnaires ne cessent plus de travailler avant l’heure, alors que les mesures de compensation négociées avec les organisations syndicales, de manière légitime d’ailleurs, lors de la réforme des retraites pèsent lourdement sur les comptes publics. Il faut par conséquent considérer que ces économies, que l’on évaluait à 500 millions d’euros, seront sans doute, tout au plus, de 100 millions d’euros.

M. le rapporteur général acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Enfin, et ce point nous concerne particulièrement en tant que sénateurs, les travaux de l’Assemblée nationale ont révélé que le coût de la suppression de la taxe professionnelle pourrait être deux fois supérieur à l’estimation réalisée par le Gouvernement.

Voilà qui relativise la déclaration récente de Mme Parisot, présidente du MEDEF, selon laquelle les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises, tels qu’ils sont prévus par la loi de finances pour 2011, seraient « considérables ». Mme Parisot ne sait pas compter ! En effet, les nombreuses niches existant pour l’impôt sur les sociétés, la suppression de la taxe professionnelle, qui visait à apporter une bouffée d’air aux entreprises, et les exonérations qui, dès leur naissance, mitent la nouvelle cotisation sur la valeur ajoutée, comme la contribution foncière d’ailleurs – dans ce domaine, aucune réforme profonde n’a été en réalité menée –, relativisent considérablement les déclarations de la présidente du MEDEF.

En outre, le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale a qualifié dans son rapport la suppression de la taxe professionnelle d’« allégement historique de la pression fiscale pesant sur les entreprises ». Cette réforme serait comparable à l’ensemble des diminutions de l’impôt sur les sociétés menées entre 2000 et 2009. Puisse Mme Parisot entendre mes propos, même si ma voix porte peu en dehors de cet hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Et si tel n’est pas le cas, répétez-les lui, monsieur le ministre.

Il est nécessaire de souligner que l’examen de trois lois de finances en l’espace de deux mois à peine prive le Parlement du temps d’examen et du recul nécessaires à une réelle appréciation comparative des prévisions et de l’exécution de certaines mesures. Lorsqu’il faut « jongler » entre loi de finances initiale et lois de finances rectificatives, comme cela a été le cas s’agissant de l’article 15 relatif au financement du Grand Paris, un tel travail devient difficile.

J’en viens à la loi de finances rectificative en elle-même. Celle-ci est traditionnellement un véhicule-balai. Nous avons droit ici, comme d’habitude, à de multiples dispositions, mais aussi à trois réformes d’importance qui auraient dû faire l’objet de projets de loi spécifiques.

Il s’agit de la réforme des sociétés de personnes, des nouvelles modalités du plan d’épargne logement et de la refonte des taxes d’urbanisme. Cette dernière réforme au moins, qui consiste à passer de six à deux taxes, ce qui entraînera des conséquences pour les collectivités territoriales, aurait mérité de faire l’objet d’un projet de loi spécifique, discuté par le Sénat. En effet, nous n’avons pas le temps de l’examiner de façon approfondie.

Je consacrerai les quelques minutes de temps de parole qui me restent à des développements relatifs aux collectivités territoriales.

Premièrement, j’évoquerai le financement du Grand Paris, tel qu’il est prévu à l’article 15 du projet de loi, qui est réservé pour la séance de demain matin par M. le rapporteur général. C’est bien compréhensible, d’ailleurs, tant le compromis auquel est parvenue la majorité lors de la commission mixte paritaire relative à la loi de finances pour 2011 est à mes yeux mauvais.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous aurons l’occasion d’en reparler.

S’agissant du Grand Paris, je voudrais rappeler les engagements qui ont été pris par le Gouvernement et le président de la République. En effet, l’article 15 de ce projet de loi de finances rectificative relativise totalement certaines déclarations.

Ainsi, la Société du Grand Paris devait être dotée de 4 milliards d’euros gagés sur le remboursement des prêts consentis aux constructeurs automobiles. Or non seulement ces derniers n’ont rendu que 2 milliards d’euros, mais le délai de remboursement n’est pas arrivé à terme. Le Gouvernement nous explique que cette dotation sera mobilisée par l’État au fur et à mesure de l’avancée du projet.

Aussi, étant donné que la Société du Grand Paris, aux termes de la loi de programmation des finances publiques, ne pourra ni emprunter au-delà d’un an ni recevoir des dotations de l’État avant trois ans, nous sommes très loin des annonces réalisées le 29 avril 2010 – cela n’est pas si ancien ! – par le Président de la République, aux termes desquelles les travaux devaient débuter en 2012.

Lors de l’examen de la loi relative au Grand Paris, l’opposition n’a cessé d’affirmer que ce projet était irréaliste et fumeux. Nous ne renions rien de ce que nous avons déclaré alors, et nous verrons quelle sera la situation à l’issue des deux débats publics engagés respectivement sur le projet du conseil régional d’Île-de-France et sur celui de l’État. Certes, il ne faut pas injurier l’avenir, car de bons compromis peuvent effectivement être conclus en ce qui concerne le financement. Toutefois, les recettes fiscales prévues par la mission Carrez devaient être, dans une première phase, clairement affectées aux priorités régionales.

L’article 16 modifie le zonage sur lequel repose le versement transport en Île-de-France. Monsieur le ministre, la proposition de l’Assemblée nationale nous semble bien meilleure que la version initiale du Gouvernement. Elle a néanmoins un défaut : contrairement aux préconisations de la mission Carrez, aucune augmentation des taux n’est prévue.

Dans la version transmise par l’Assemblée nationale, l’article 16 bis augmente le versement transport pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dont la population est comprise entre 50 000 et 100 000 habitants. Le Gouvernement ne s’est pas opposé à cette mesure, ce dont nous nous félicitons, puisque nous avions, lors de l’examen de la loi de finances initiale, défendu un amendement identique au nom de notre collègue Roland Ries, président du GART, le Groupement des autorités responsables de transports. Cet amendement avait été rejeté au Sénat. Si ses dispositions sont aujourd’hui reprises, c’est tant mieux. Nous souhaitons donc que cette version soit adoptée.

En effet, il est fondamental de trouver des recettes pour financer les transports urbains. La mission Carrez, dans son rapport remis en 2009, avait le mérite de recenser, pour l’Île-de-France, certains financements qui sont sollicités au travers de ce texte. Elle avait également proposé de recourir à l’écotaxe poids lourds.

Or l’article 20 de ce projet de loi de finances rectificative se contente d’assurer la sécurité juridique du dispositif introduit par la loi du 3 août 2009. En revanche, monsieur le ministre, la date de la mise en œuvre de ce dernier demeure floue. Les professionnels évoquent 2013, l’ancien ministre des transports avait parlé de 2012 et le projet de loi de finances rectificative fait référence à cette dernière date.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous aimerions connaître la vérité sur ce point.

Je voudrais rappeler que, en Allemagne, l’écotaxe, qui avait fait l’objet d’une mise en œuvre assez difficile, a rapporté 4, 4 milliards d’euros en 2009, ce qui n’est pas rien. Ces sommes permettent d’ailleurs à ce pays de rénover son réseau routier, qui ne l’avait pas été depuis la dernière guerre. Il est vrai que la fourchette des taux de la taxe allemande est large. Toutefois, même si l’écotaxe française ne rapportait qu’un milliard d’euros – c’est-à-dire ce qui est prévu à travers les estimations disponibles –, cette somme serait bien utile aux transports urbains, en Île-de-France comme ailleurs.

Je voudrais que le flou qui existe sur la date d’application de cette mesure soit levé. Je sais bien que 2012 sera une année délicate en raison de la tenue d’une élection cardinale, mais il faut lever le mystère qui entoure la taxe poids lourds. Nos finances ne peuvent pas s’en priver, notamment pour aider les transports urbains.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Enfin, l’article 34 prévoit la création d’un fonds exceptionnel de soutien aux départements en difficulté – à hauteur de 75 millions d’euros –, et une ouverture de crédits supplémentaires d’un même montant. Cette solution ponctuelle n’est évidemment pas à la hauteur des besoins des départements – nous avons plusieurs fois expliqué au Sénat notre position à ce sujet, par exemple lors de l’examen, le 9 décembre 2010, de notre proposition de loi relative à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements.

Compte tenu de la modicité des sommes dont dispose le Fonds national des solidarités actives, le FNSA, nous souhaitons que celles-ci soient ciblées sur les départements les plus en difficulté.

S’agissant des subventions exceptionnelles liées à la signature d’une convention entre l’État et les départements, les contreparties qui seraient exigées par l’État pourraient s’apparenter à une mise sous tutelle, ce qui n’est pas acceptable et ne sera pas admis par les départements. Nous disposons d’un financement de 75 millions d’euros alors que plusieurs milliards d’euros seraient nécessaires.

En définitive, le Gouvernement n’a pas mis à profit le temps dont il disposait pour chercher à compenser, dans les comptes de l’État, le coût de la suppression de la taxe professionnelle. Il n’a pas davantage cherché à corriger l’injustice de la fiscalité locale pesant sur les ménages. Enfin, il ne se dote pas des moyens de sortir les conseils généraux de leurs difficultés.

La loi de finances pour 2010 était un texte d’affichage, qui a vécu.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Le Gouvernement a cherché à gagner du temps : il sera rattrapé par le temps.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. Yvon Collin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2011 n’est pas encore adopté qu’il nous faut déjà examiner le collectif budgétaire.

Nous sommes habitués à cet exercice, qui est tout de même relativement insolite. Certains mauvais esprits diront qu’il s’agit plutôt d’une session de rattrapage qui ne veut pas dire son nom. D’autres préféreront voir dans ce texte l’ultime occasion de l’année pour tenter de redresser la barre en matière de déficits, tant ceux-ci deviennent abyssaux, malgré quelques effets, quelque peu pervers d’ailleurs, liés à la gestion de la dette publique.

Voilà un texte technique et « fourre-tout », le quatrième de ce genre de l’année 2010, qui porte diverses dispositions d’ordre économique et financier. Nous observons que les projets de loi de finances rectificative se succèdent sans jamais prendre à bras-le-corps les véritables difficultés du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Certes ! Toutefois, à l’évidence, le véritable problème, et nos concitoyens le sentent bien, c’est que le rabot fiscal – le terme est joli – est devenu, dans certains cas, une lime à ongles et qu’il n’a pas produit les effets escomptés.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Si une loi de finances, comme son nom l’indique, est censée contribuer à l’assainissement des finances publiques, elle doit avant tout s’appuyer sur certains principes. À cet égard, vous ne ferez pas croire à nos concitoyens que ne pas supprimer le bouclier fiscal est une bonne chose. Monsieur le ministre, c’est le symbole de l’iniquité, le symbole de l’injustice !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Ceux qui souffrent, ceux qui rencontrent des difficultés financières, ont le sentiment que l’on fait des cadeaux à ceux de nos concitoyens qui sont les plus aisés.

Si l’on avait décidé l’abrogation du bouclier fiscal, ceux qui en bénéficient n’auraient pas vu pour autant leur niveau de vie baisser trop sensiblement, pas plus que leur pouvoir d’achat.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Tant que vous ne voudrez pas prendre en compte ces données, vous ne ferez que du replâtrage !

De la même façon, et nous avons déjà eu l’occasion de vous le dire, nos concitoyens n’acceptent pas que les revenus du travail soient beaucoup plus taxés que les revenus du capital ou du patrimoine. Il en résulte une perte de confiance dans les élus politiques, et dans le Gouvernement, aussi.

Dans un tel contexte de perte de confiance, le redressement de notre pays devient une véritable gageure !

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Nous aurions pu corriger ce défaut majeur grâce au présent projet de loi de finances rectificative.

Sur le plan technique, de bons arguments plaident en faveur de ce texte ; ils ne résistent cependant pas à une analyse politique. C’est la raison pour laquelle les déficits continueront malheureusement de s’accroître.

Le groupe du RDSE ne peut que vous inciter à redresser promptement la barre, afin d’orienter ce texte vers une plus grande équité, vers une plus grande égalité, ce qui permettra de restaurer véritablement et la confiance et les finances de ce pays.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Sinon, nous pourrons toujours affirmer que la France se porte un peu moins mal que l’Irlande, l’Espagne, la Grèce ou le Portugal ; mais est-ce avec ce type d’affirmation que l’on permettra à notre pays de sortir de la crise ?

Ne l’oublions pas, cette crise n’est responsable que d’un tiers de nos difficultés financières. Les deux autres tiers sont liés à des facteurs plus profonds que le Gouvernement et sa majorité n’ont pas voulu aborder en profondeur.

C’est la raison pour laquelle la majorité du groupe du RDSE votera contre ce projet de loi de finances rectificative. §

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le quatrième collectif budgétaire de l’année 2010. Nous le savons, le contexte économique et financier international nous oblige à un grand pragmatisme et une réactivité accrue.

La croissance est de retour, mais elle est encore fragile et de faible niveau. L’exemple de l’Irlande, mais aussi celui de l’Espagne ou du Portugal, nous montre à quel point la nécessité d’assainir nos finances publiques est devenue prégnante.

Nous devons cheminer sur un chemin de crête entre deux nécessités, le soutien de la croissance, de la consommation et de l’emploi et la réduction de notre déficit public et, à terme, de notre endettement.

Le collectif budgétaire de fin d’année se situe entre le plan de relance, en mode « gestion de crise », et le rabot des niches fiscales, en mode « sortie de crise ». C’est tout dire !

La commission mixte paritaire qui s’est réunie avant-hier pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2011 a fourni l’illustration des difficultés rencontrées pour parvenir à cet équilibre entre des logiques économique et financière parfois contradictoires.

La succession de collectifs budgétaires entraîne un affinement de nos prévisions. Ainsi, le montant du déficit budgétaire arrêté dans le présent projet de loi de finances rectificative est globalement conforme aux dernières prévisions, et même en légère amélioration, puisqu’il s’élèvera, M. le rapporteur général l’a rappelé tout à l’heure, en exécution 2010, à 149, 7 milliards d’euros, au lieu des 152 milliards d’euros prévus dans la dernière loi de finances rectificative.

Toutefois, l’écart avec la prévision de la loi de finances initiale pour 2010, c'est-à-dire 117, 4 milliards d’euros, est bien plus important. Il convient en effet de tenir compte des investissements d’avenir liés au Grand emprunt et des prêts consacrés à la Grèce.

Par ailleurs, si le respect de la norme de dépense « zéro volume », objectif fixé pour l’évolution des dépenses de l’État en 2010, est confirmé dans ce collectif, il résulte aussi d’un double effet d’aubaine, très bien décrit par M. le rapporteur général, relatif aux prélèvements sur recettes et à la charge de la dette.

Ce collectif nous montre donc que la situation demeure fragile. Bien entendu, nous devons surveiller l’évolution des taux auxquels nous empruntons. Et si, pour le moment, nous profitons, en quelque sorte, du fait que les investisseurs se sont détournés des obligations irlandaises et, dans une moindre mesure, espagnoles, portugaises ou italiennes, souvenons-nous toutefois que nous ne sommes pas à l’abri d’une remontée des taux !

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La preuve en est que, pour la première fois en deux ans, les taux des crédits immobiliers remontent en cette fin d’année en France. Quant à l’Allemagne, émetteur le plus solide de la zone euro, elle est touchée à son tour et, pour la première fois depuis de nombreux mois, on constate une remontée au-delà de la barre des 3 % du taux de ses emprunts à dix ans, alors que ce même taux avait enregistré, au début du mois de novembre, un record historique à la baisse, puisqu’il s’établissait alors à 2, 4 %.

N’oublions pas que nous sommes tributaires des évolutions du marché obligataire américain.

Face à cette volatilité ambiante, les réformes doivent être tout à la fois solides et pérennes.

La réforme des retraites menée en 2010 a été de ce point de vue salutaire. Le chantier de la dépendance a d’ores et déjà été annoncé, et le groupe UMP soutiendra bien entendu la réforme, qui devrait permettre de soulager les finances de nos départements. Il s’agit d’un sujet difficile, et nous devons nous engager avec détermination.

Dans l’attente de décisions plus importantes, la mise en place, proposée par le présent collectif, d’un fonds exceptionnel de soutien en faveur des départements, doté de 150 millions d’euros, va dans le bon sens, bien que les sommes affectées demeurent faibles au regard de l’ampleur du problème.

M. le ministre a tout à l’heure présenté ce fonds, qui bénéficiera aux départements en difficulté. Ses ressources proviendront, pour moitié, des crédits du programme Concours spécifiques et administration, répartis entre les départements suivant leur situation financière, et, pour l’autre moitié, d’un prélèvement de 75 millions d’euros sur les réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui sera ventilé entre les départements dont la proportion d’habitants de plus de 75 ans est supérieure à la moyenne nationale, en fonction du revenu disponible des personnes âgées des départements concernés et de leur potentiel fiscal.

La pondération de ces trois critères sera précisée par décret, monsieur le ministre, mais je souhaiterais d’ores et déjà que vous nous en disiez plus sur les futures modalités de répartition, si du moins celles-ci sont déjà arrêtées.

Je me félicite par ailleurs, au nom du groupe UMP, de la révision tant attendue des valeurs locatives foncières, que vous avez évoquée tout à l’heure, monsieur le ministre. Même si, pour le moment, ne sont concernés que les locaux professionnels, et dans cinq départements seulement, de surcroît uniquement à titre expérimental, le mouvement est lancé et devrait aboutir à une entrée en vigueur, que nous attendons depuis longtemps, en 2014.

Concernant les collectivités territoriales, je rappelle que nous avions décidé de les associer en 2009 au plan de relance, via le remboursement anticipé du FCTVA, le Fonds de compensation pour la TVA. Ainsi, les collectivités qui s’engageaient auprès de l’État à accroître ou à maintenir leurs investissements par rapport aux quatre années précédentes pouvaient en bénéficier.

Cette mesure avait rencontré un vif succès auprès des collectivités, qui ont été nombreuses à s’engager dans le plan de relance, contribuant ainsi à soutenir l’activité économique pendant la crise. Ce sont au total près de 22 000 collectivités territoriales qui se sont engagées sur un montant d’investissement de 57 milliards d’euros.

L’an dernier, le Parlement avait souhaité un assouplissement de la mesure, du fait des difficultés rencontrées notamment par les petites communes pour mandater toutes les dépenses relatives aux investissements concernés. Il avait été ainsi décidé en loi de finances que les restes à réaliser seraient pris en compte, en plus des dépenses mandatées, afin d’évaluer l’engagement des collectivités.

Mon collègue Charles Guené présentera un amendement tendant à prévoir un tel assouplissement pour les collectivités locales engagées dans le plan de relance en 2010. Je l’indique tout de suite, notre groupe est très favorable à l’adoption de cette mesure en faveur de nos collectivités.

Nous soutiendrons également la très pertinente réforme des taxes d’urbanisme.

Quant à la réforme des sociétés de personnes, nous soutiendrons la commission des finances du Sénat, qui a jugé, comme l’Assemblée nationale, que les conditions d’examen quelque peu précipité du collectif de fin d’année n’étaient pas propices à l’élaboration d’une analyse pertinente et à une réforme aussi complexe. Notre commission propose donc d’attendre le collectif de juin prochain sur la réforme de la fiscalité du patrimoine pour prendre une décision.

La majorité du groupe UMP estime également qu’il convient de mettre en conformité avec le droit communautaire les règles françaises en matière de détention et de circulation des produits de tabac, sujet sur lequel j’ai bien noté ce que vous avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre.

Dans ces conditions, et pour toutes les raisons que j’ai évoquées, le groupe UMP votera le présent projet de loi de finances rectificative.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’évoquer quelques éléments qui permettront de compléter mon propos liminaire, tout en apportant les éclairages supplémentaires que vous avez souhaités, dans vos interventions respectives.

Monsieur le rapporteur général, vous m’avez notamment interrogé, s’agissant des modalités du soutien à l’Irlande, sur la garantie de l’État. Je rappelle que, pour un montant compris entre 4 milliards d’euros et 5 milliards d’euros, cette garantie porte uniquement sur les emprunts qui seront émis par le Fonds européen de stabilité financière, soit 17, 7 milliards d’euros sur les 85 milliards d’euros.

Le Fonds devrait émettre dans le courant du mois de janvier. Auparavant, les États seront invités à engager leur garantie via un titre de garantie qui sera remis aux investisseurs. C’est alors que Mme la ministre de l’économie, Christine Lagarde, apportera au Parlement toutes les informations utiles, conformément à ce qui est prévu par la troisième loi de finances rectificative pour 2010, texte que vous avez examiné avant l’été.

Le plan de soutien à l’Irlande s’inscrit lui-même dans un plan d’ajustement très rigoureux, préparé en toute indépendance par la Commission européenne et le FMI, en lien avec la BCE. Tous les acteurs sont donc à la manœuvre.

Ce plan est loin d’être un chèque en blanc. Vous ne pouvez pas dire qu’aucune contrepartie n’a été demandée à l’Irlande ! Il n’est que de constater la dureté des dispositifs contenus dans ce qu’il faut bien qualifier de plan d’austérité – il est susceptible de pousser au départ une partie de la jeunesse irlandaise -, …

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

… pour mieux mesurer le courage de l’actuel gouvernement irlandais, dont le destin est, naturellement, lié à la situation budgétaire du pays.

On ne peut que saluer une telle volonté politique, qui se traduit par la mise en place de dispositifs d’une rigueur extrême. Si ce n’est pas une contrepartie, je ne sais pas ce que c’est, mesdames, messieurs les sénateurs !

Quant à la question de l’évolution de la fiscalité, notamment celle des entreprises, selon moi, il nous faut procéder étape par étape concernant l’Irlande.

Nous soutenons ce plan de rigueur.

M. le président de la commission des finances s’exclame.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Jamais un pays n’est allé aussi loin, qu’il s’agisse de baisse des salaires des fonctionnaires, de suppressions de postes, de révision des dépenses de protection sociale, de hausse de la TVA.

Monsieur le rapporteur général, je comprends ce qui motive vos demandes ; cependant, en responsabilité, je ne peux pas vous suivre sur ce terrain.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Vous avez évoqué par ailleurs, s’agissant cette fois des ouvertures de crédits, la persistance de sous-budgétisations en loi de finances initiale. Je vous répondrai brièvement, en mettant en avant deux idées principales.

D’une part, nous finançons en 2010 un dépassement de dépenses très exceptionnel, essentiellement lié à la situation économique. Il n’est pas illogique de mettre en regard une ressource, elle aussi ponctuelle, sur les charges de la dette notamment. Cette opération ne remet pas en cause la sincérité du projet de loi de finances pour 2011.

D’autre part, concernant les dépenses d’intervention, nous présentons dans ce collectif plus de 3 milliards d’euros d’ouvertures de crédits, lesquelles sont bien évidemment gagées par des annulations de crédits à due concurrence. Nous respectons ainsi la norme de dépense, et ce dans un contexte difficile, je vous remercie de l’avoir reconnu.

Ces ouvertures de crédits sont exceptionnelles et conjoncturelles. Ainsi, près de 1, 4 milliard d’euros de crédits sont ouverts en faveur respectivement de la politique de l’emploi – il était indispensable de soutenir l’activité et l’emploi des plus fragiles –, en faveur de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » – en raison évidemment des difficultés plus grandes de retour à l’emploi des personnes handicapées, ce qui pèse notamment sur les dépenses liées à l’allocation aux adultes handicapés –, et en faveur de l’hébergement d’urgence ou des aides au logement, dépenses qui sont, là encore, très sensibles à la situation économique.

En votre éminente qualité de maire, monsieur le rapporteur général, vous pouvez mieux que quiconque mesurer l’importance des dépenses budgétaires consenties en faveur des politiques de proximité et d’accompagnement menées à destination des publics les plus fragiles.

En regard de ces dépassements exceptionnels, il faut signaler la baisse, elle aussi ponctuelle, de la charge de la dette, et, dans une moindre mesure, des prélèvements en faveur des collectivités locales et de l’Union européenne.

De notre point de vue, ce schéma équilibré nous permet de faire face à des dépenses pour l’essentiel obligatoires sans pour autant remettre en cause nos engagements de maîtrise des dépenses.

Concernant le caractère structurel ou reconductible de ces dépassements pour l’année 2010 et leur répercussion sur les comptes de l’année 2011, je veux vous rassurer : les dépassements étaient attendus et, dans leur grande majorité, ils ont été anticipés et intégrés dans le projet de loi de finances pour 2011. Autrement dit, mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne cachons rien sous le tapis, tout est sur la table, tout est transparent !

À l’appui de ma démonstration, je citerai quelques exemples.

Les crédits en faveur de l’emploi, sur lesquels nous économisons entre 1 milliard d’euros et 1, 5 milliard d’euros en 2011, restent stables en valeur parce que nous avons tenu compte des effets en 2011 des dérapages constatés en 2010.

Interrogé sur ce même sujet à l’Assemblée nationale, je n’ai pas fait de réponse différente : à interrogation logique, réponse étayée !

Les contrats aidés seront moins nombreux l’année prochaine en raison de l’amélioration de la situation économique, mais la dotation afférente augmentera de 400 millions d’euros en 2011.

De même, la dotation pour l’AAH, quant à elle, est réévaluée de près de 700 millions d’euros : cette réévaluation s’explique, pour une moitié, par le coût de la revalorisation annuelle et la progression anticipée du nombre de bénéficiaires, mais, surtout, pour l’autre moitié, par une vraie remise à niveau de la dotation, qui tire les conséquences des ouvertures demandées dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative.

Je précise d’ailleurs que le Président de la République a lui-même rendu un arbitrage en ce sens pour tenir l’engagement pris d’augmenter de 25 % l’AAH sur la durée du quinquennat.

De la même façon, nous tenons compte du dépassement consécutif à une baisse du nombre des départs à la retraite, en 2009 et en 2010, dans la budgétisation des crédits de personnel des différents ministères en 2011.

Vous avez souligné, cher Philippe Marini, le caractère plus contraignant, ou plus vertueux, de la norme de dépense « zéro valeur » que l’État s’est fixée à compter de 2011. Je remercie également Adrien Gouteyron d’avoir souligné que nous respections cette norme cette année, tout comme nous la respecterons bien évidemment l’année prochaine, même si les contraintes sont plus fortes.

Madame Morin-Desailly, j’ai bien noté vos inquiétudes quant aux effets sur les salles de cinéma de la réforme de l’évaluation des valeurs locatives. Je rappelle néanmoins que, dans un premier temps, cette réforme sera expérimentale et limitée à quelques départements, ce qui permettra d’en juger les effets sur certaines professions.

À cet égard, je souligne que ces expérimentations ont été rendues possibles grâce à la révision constitutionnelle. Sans cet outil constitutionnel mis à la disposition du Gouvernement ou du Parlement, nous n’aurions probablement pas la possibilité de mesurer, pendant un temps défini, l’impact d’une politique publique nouvelle.

Personne ne peut sérieusement contester la nécessité de réviser les valeurs locatives professionnelles, même s’il faut être conscient des difficultés que cela pourra susciter. Si nous ne sommes jamais parvenus, dans le passé, à engager cette révision, c’est bien qu’il y avait un obstacle difficilement franchissable. L’expérimentation à laquelle nous allons procéder dans cinq départements l’année prochaine…

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

… nous permettra – personne ne peut soutenir le contraire – d’en mesurer tous les effets sur l’ensemble des professions et d’en tirer tous les enseignements.

Cette réforme devrait aboutir en 2014. Dès 2012, nous prendrons connaissance des retours d’expérience, à partir desquels nous travaillerons ensemble afin de construire une juste réforme. Car c’est bien cela, notre objectif, mesdames, messieurs les sénateurs : une réforme juste à tous égards.

Madame Bricq, vous avez mentionné le doublement du coût de la réforme de la taxe professionnelle. Je diverge sur un point de votre analyse : pour connaître précisément le coût de cette réforme, il faudra attendre l’année prochaine que nous disposions d’une évaluation précise de l’ensemble.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Ensuite, certains, comme le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, se sont interrogés sur la sincérité de l’évaluation du coût budgétaire. Je leur ai apporté des éléments de réponse technique. Néanmoins, je rappelle que la décision prise souverainement par le Conseil constitutionnel de censurer la « taxe carbone », décision dont le Gouvernement n’a pu que prendre acte, se traduit pour l’État par une moindre recette, alors que nous comptions sur cette ressource pour financer la réforme de la taxe professionnelle.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

En effet, la taxe carbone devant partiellement compenser la transformation de la taxe professionnelle en cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, sa suppression a naturellement dégradé les comptes.

Il me faut citer aussi, dans le même ordre d’idées, la prise en compte à hauteur de 800 millions d’euros de l’impact de l’annulation par le Conseil constitutionnel des dispositions relatives aux bénéfices non commerciaux ; cet élément ayant déjà été pris en compte dans le chiffrage du Gouvernement, il fallait ne le compter qu’une seule fois.

Pour mettre fin à cette querelle de chiffres, je vous propose que nous attendions quelques mois, le temps de disposer de remontées précises et d’éléments objectifs ; nous tomberons alors sans doute d’accord et ferons ainsi l’économie d’un débat qui est déjà, à mon sens, derrière nous.

Pour conclure, je remercie l’ensemble des orateurs qui se sont exprimés. En particulier, monsieur le président de la commission, dans le respect naturellement de la séparation des pouvoirs, je veux vous dire, à la suite des propos que j’ai tenus à l’attention de M. le rapporteur général, en mon nom propre, et au nom du Gouvernement, toute ma reconnaissance pour le rôle que vous avez tenu au sein de la commission mixte paritaire réunie sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2011.

Grâce à vous, chacun peut être satisfait, le Gouvernement, qui a atteint son objectif intangible de réduction du déficit, et la représentation nationale, qui a pu, grâce à un débat parlementaire vigoureux mais vertueux, enrichir un texte utile pour notre pays.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Par convention, l’examen des articles et des amendements afférents devrait suivre immédiatement la discussion générale. Or, par exception à la règle selon laquelle la séance est désormais levée à minuit, l’examen de la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit s’est prolongé tard dans la nuit, alors qu’il était initialement prévu de l’achever cet après-midi.

Nous n’avions donc pas envisagé d’examiner maintenant en séance publique les amendements sur le projet de loi de finances rectificative, d’autant moins que le délai limite pour leur dépôt a été fixé, je le rappelle, à onze heures ce matin.

De fait, nous devons nous réunir avec nos collaborateurs, pour examiner attentivement les deux cents amendements qui ont été déposés sur ce texte, avant qu’ils ne soient soumis à nos collègues membres de la commission, demain matin, à huit heures trente. C’est pourquoi, comme il était initialement prévu, nous n’entamerons l’examen des articles que demain, à neuf heures trente, monsieur le président, mes chers collègues.

On aurait pu envisager que la commission se réunisse cet après-midi, mais c’eût été très inconvenant vis-à-vis de ceux de nos collègues qui ont déjà pris d’autres engagements.

Pour l’ensemble de ces raisons, monsieur le président, mes chers collègues, nous ne pouvons pas poursuivre dans l’immédiat nos travaux sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010, le rapporteur général devant disposer du temps nécessaire pour se forger une opinion fondée sur chacun de ces deux cents amendements et la soumettre aux membres de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mes chers collègues, nous allons donc maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Bernard Frimat.