Madame la ministre, cet article 4 vise à imposer à tous les établissements publics de santé un modèle que votre majorité présente comme la transformation de l’hôpital en une entreprise de soins.
Cet hôpital-entreprise devra naturellement satisfaire à l’obligation première des entreprises commerciales, celle de la rentabilité. Il suffit, pour s’en convaincre, de confronter cet article avec le précédent, qui prévoit que les établissements publics de santé pourront se voir sanctionnés s’ils ne satisfont pas aux obligations quantitatives imposées par les CPOM.
On pourrait donc se trouver dans une situation très paradoxale, dans laquelle un établissement public de santé pourrait se voir contraint par son CPOM, et par les obligations liées à la rentabilité qui s’impose à cet hôpital-entreprise, de ne plus pratiquer certains soins parce qu’il a dépassé son quota d’actes. Et, pourtant, cet établissement, en vertu de l’obligation de service public qui s’impose à lui, doit accueillir et soigner tous les patients qui se présentent.
À n’en pas douter, cette logique de rentabilité jouera bien évidemment contre les intérêts des patients et des concitoyens dans leur ensemble.
Madame la ministre, vous le savez bien, ces établissements accueillent de préférence les patients dont les pathologies sont fortement rémunératrices et n’hésitent pas à renvoyer aux établissements publics de santé les patients dont les pathologies sont si lourdes qu’elles sont plus coûteuses que rentables. C’est d’ailleurs pour cela que les établissements publics de santé et les établissements du secteur privé à but non lucratif, sont les seuls à accueillir les patients atteints de pluri-pathologies ou ceux qui sont en fin de vie.
J’en veux pour preuve la pratique, qui a parfois lieu et que nous condamnons, qui consiste à rediriger les patients en fin de vie, notamment les plus âgés, soignés dans les établissements privés, vers les établissements publics, puisque plus de 90 % des dépenses de santé sont réalisées dans les dernières années de la vie et que ces soins sont très largement sous-tarifés.
C’est pourquoi le groupe CRC-SPG s’oppose à cette logique de transformation du service public de santé en un vaste service de soins dans lequel les établissements publics de santé ne seraient au final qu’un opérateur parmi d’autres, tous répondant à la même logique de rentabilité.
Madame la ministre, cette logique n’est pourtant pas transposable aux hôpitaux, car la santé n’est pas, contrairement à ce que vous voudriez en faire, une marchandise. Certaines missions et certains actes ne sont pas rentables et ne pourront jamais l’être.
Le directeur, que vous entendez imposer au travers de ce projet de loi, ne sera donc en fait que l’opérateur de la politique de rigueur imposée par l’ARS et décidée par votre gouvernement. §