Intervention de Guy Fischer

Réunion du 9 novembre 2006 à 22h15
Participation et actionnariat salarié — Article 44

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

J'interviendrai à trois reprises sur cet article, qui n'a rien à voir avec les précédents ni avec les suivants. S'il fallait illustrer par l'exemple ce qu'est un cavalier législatif, celui-ci conviendrait parfaitement, même si le Gouvernement n'utilise pas la procédure de l'amendement pour introduire cette modification législative.

Cet article est dépourvu de tout lien avec le texte qui avait été déposé initialement. Que vient-il faire dans un projet de loi sur lequel l'urgence a été déclarée ? Nous attendons vos explications, monsieur le ministre. Lorsque je dis « nous », je ne parle pas seulement de mes collègues du groupe CRC. Il s'avère que bon nombre de membres d'autres groupes s'interrogent eux aussi. J'en veux pour preuve les six recommandations que vient de présenter M. Dufaut.

Vous connaissez comme moi le malaise qui règne au sein de la commission des affaires culturelles sur ce sujet. Est-ce la raison pour laquelle vous n'êtes pas venu vous expliquer devant elle, monsieur le ministre ?

Pouvez-vous justifier l'urgence qu'il y a à modifier le code du sport afin d'autoriser l'entrée des clubs sportifs en bourse lorsque l'on sait qu'un seul club en France est actuellement en mesure de le faire ? Certes, d'autres pourraient être intéressés, mais leur situation financière le leur interdit actuellement, et rien ne peut présumer qu'ils en auront prochainement la capacité. De toute façon, finalement, très peu de clubs sportifs seront en mesure de le faire.

Depuis quand doit-on légiférer au profit d'une seule société et forcer le travail législatif quand rien, je dis bien rien, ne nous y oblige, si ce n'est l'impatience d'un club ?

En fait, on nous demande de légiférer en urgence sous la pression de la Ligue, sans avoir entendu les représentants de la Fédération française de football, et sous l'influence du président de l'Olympique Lyonnais. En effet, avant même que le projet de loi ne soit examiné, celui-ci déclarait dans l'Équipe du 25 septembre que tout était prêt pour l'introduction en bourse de son club, mais que cela restait confidentiel.

Ainsi, seulement trois jours après le conseil des ministres, le président Aulas avait déjà choisi les établissements financiers, les avocats d'affaires spécialisés et monté son dossier. Il était au courant des décisions avant même que celles-ci ne soient annoncées.

Le mercredi 25 octobre, avant même notre vote, le même président présentait à la radio le projet de nouveau stade réalisé dans le cadre de la cotation en bourse de son club.

Cette attitude est méprisante pour nos travaux. Nous ne pouvons accepter de légiférer sous de telles pressions ! C'est pourtant à celles-ci que vous avez cédé, monsieur le ministre. Si ce n'est pas le cas, comment expliquer votre revirement ?

Il y a trois ans, vous déclariez que la bourse et le football n'avaient pas grand-chose à faire ensemble. Le 21 septembre dernier, sur le perron de l'Élysée, vous déclariez encore rester interrogatif sur les résultats d'une entrée en bourse des clubs sportifs. Enfin, à l'Assemblée nationale, le 10 octobre dernier, vous rappeliez que vous aviez toujours considéré que le recours à l'épargne publique pour les sociétés sportives était une question seconde et secondaire.

Alors, pourquoi ce texte, que vous ne semblez pas vraiment soutenir, et surtout pourquoi l'urgence ? Les pressions de Bruxelles ne peuvent tout expliquer.

Il serait plus respectueux pour la représentation nationale que vous retiriez cet article. Cela permettrait par ailleurs, si vous décidiez de présenter un projet de loi sur cette question, de revoir votre texte afin qu'il aborde toutes les conséquences d'une telle modification de notre droit, suivant en particulier les préconisations contenues dans le rapport pour avis très complet et très bien argumenté de M. Dufaut, fait au nom de la commission des affaires culturelles. En effet, la précipitation dont vous faites preuve pose divers problèmes au législateur que nous sommes.

Finalement, monsieur le ministre, vous cédez sans combat aux injonctions de Bruxelles et précipitamment aux pressions de certains.

Pour toutes les raisons que nous venons d'invoquer, nous considérons que votre texte n'est pas recevable en l'état. C'est pourquoi, avant de défendre un amendement de suppression, nous vous demandons à nouveau de retirer vous-même cet article, qui pose plus de problèmes qu'il n'en résout.

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