Intervention de Paul Raoult

Réunion du 24 janvier 2006 à 16h00
Application de la loi relative au développement des territoires ruraux — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Paul RaoultPaul Raoult :

Une telle initiative grandirait le rôle du Parlement.

Au-delà du comptage des décrets qui ne sont pas encore parus, je voudrais insister plus particulièrement, de manière très générale, sur quatre points.

Le premier, évoqué par M. Soulage, concerne l'ampleur du mouvement de populations vers les zones rurales, en particulier en zones périurbaines, confirmée par le dernier recensement partiel.

De nombreuses zones rurales connaissent une immigration spectaculaire, avec l'installation de jeunes foyers qui cherchent un cadre de vie plus agréable, plus sûr, en profitant d'une offre foncière à des prix nettement moins élevés. L'installation de nouvelles populations s'inscrit dans un rayon plus ou moins grand, pouvant atteindre jusqu'à cent kilomètres, par rapport aux agglomérations, en fonction des moyens de transport existants sur le territoire.

Ce phénomène pose plusieurs problèmes. Tout d'abord, comment accompagner les communes ou les intercommunalités dans la maîtrise de leur sol ? Beaucoup de communes rurales sont contraintes de réviser leur plan local d'urbanisme pour augmenter l'offre foncière ; d'autres, dépourvues de PLU ou de carte communale, souhaitent en élaborer un.

Aujourd'hui, l'administration de l'État, en clair la DDE, manque de moyens financiers et humains pour accompagner ces communes. Cela est dommage car l'attente des communes est forte, sous la pression des demandes de terrains en vue de bâtir des logements. Je souhaite donc que des moyens exceptionnels soient dégagés dans les secteurs géographiques les plus démunis.

J'évoquerai brièvement la difficulté de faire vivre ensemble des populations qui ont une culture et un mode de vie différents. Il conviendrait peut-être d'ajuster notre législation afin de mieux protéger l'activité économique traditionnelle de nos territoires, surtout en face de juges qui ont une culture urbaine.

Ainsi, dans un petit village du Cambrésis, un métier à broder a été condamné au silence - ce qui revient à condamner l'entreprise à disparaître - sous prétexte que le bruit trop élevé gênait le voisin. Et je passe sur le chant du coq, la sonnerie de l'angélus qui perturbe le sommeil de paisibles retraités, les odeurs insupportables de fumier, de pulpe de betterave, ou encore les salissures provoquées par les roues des tracteurs...

L'arrivée de ce flot de nouvelles populations nous contraint également à redéfinir les transports collectifs - cars, bus, trains. À cet égard, je souhaite que tous les partenaires s'impliquent dans une meilleure définition du réseau de transport.

Ensuite, je m'inquiète beaucoup de la poursuite de la politique de « déménagement » du territoire par certains services publics, au nom des nécessaires progrès de la productivité. Comme j'ai pu en être le témoin ces dernières semaines, on oublie, malgré la loi, les intérêts primordiaux des territoires, et on continue de proposer des suppressions de classes et d'écoles. Dans le Nord et au sein de mon propre canton, le nombre de suppressions de classes me fait vraiment frémir.

De même, voilà quelques jours, le directeur de La Poste de l'arrondissement d'Avesnes me proposait de transformer un bureau de poste en agence postale. Il convient d'ajouter les menaces qui pèsent sur certaines lignes ferroviaires, la dernière en date, la ligne Maubeuge-Paris, concernant les zones rurales de l'Avesnois.

Il serait tout de même temps d'inverser la tendance et de redonner élan et dynamisme aux services publics, en adoptant par exemple des horaires d'ouverture plus appropriés, en informant de façon plus percutante et répétée des services rendus par ces derniers.

Lorsqu'on ferme des services publics, c'est en quelque sorte de la substance de notre territoire qui s'en va, et peut-être regrettera-t-on, demain, cette disparition, comme on a pu regretter la disparition dans les zones urbaines, voilà une trentaine d'années, des réseaux de tramways ou des lignes de chemin de fer, que l'on tente aujourd'hui de rétablir à grands frais.

Le troisième point que je veux évoquer concerne les pôles d'excellence rurale, qui ont été annoncés par le Gouvernement après le vote de la loi relative au développement des territoires ruraux. Trois cents d'entre eux seraient programmés en 2006 et l'appel à candidatures a été lancé.

Les élus, toutes tendances politiques confondues, ont salué la pertinence de cette initiative. Plusieurs questions restent cependant en suspens : les moyens financiers seront-ils réellement dégagés ? Le zonage prendra-t-il en compte la singularité des territoires ruraux ? Qu'en sera-t-il de la concertation avec les collectivités territoriales qui devront obligatoirement participer au financement de ces pôles d'excellence rurale ? J'espère donc que cette idée, loin d'être un gadget, sera un outil susceptible de provoquer l'activité économique en milieu rural.

Mon dernier point concerne la téléphonie mobile. Monsieur le ministre, je veux exprimer ma colère devant la publicité mensongère des grands groupes de téléphonie mobile, qui font croire, par exemple lors du congrès des maires de France, que d'immenses territoires sont couverts.

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