Intervention de Jean-Paul Virapoullé

Réunion du 24 janvier 2006 à 21h30
Prévention et répression des violences au sein du couple — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Jean-Paul VirapoulléJean-Paul Virapoullé :

En fait, je ne comprends pas pourquoi il ne serait pas possible d'organiser une préparation au mariage. S'il s'agit véritablement d'un acte d'état civil d'une grande portée, il faut une information minimale. Or le droit français ne la prévoit pas.

Si vous voulez lutter contre les mariages forcés, contre le consentement extorqué, si vous voulez un acte d'état civil fondé sur des bases équitables, sur une information commune des parties et un consentement mutuel éclairé, rendez obligatoires par la loi - si ce n'est par celle-ci, du moins par un prochain texte - l'information et la préparation au mariage au bénéfice des futurs époux et sous l'égide d'un officier d'état civil, le maire ou son officier d'état civil délégué.

Vous donnerez ainsi un sens à l'article 212. En effet, les uns et les autres pourront s'expliquer et discuter ; il y aura un véritable débat. Dès lors, ceux auxquels on aura un peu forcé la main pourront se confier à l'officier d'état civil, en lui expliquant qu'ils n'étaient pas réellement désireux de se marier, mais qu'ils y ont été contraints.

Par conséquent, monsieur le garde des sceaux, madame la ministre, ma proposition est la suivante : instaurer dans un prochain volet - voire dans le code civil -, après discussion et réflexion, une séance de préparation au mariage animée par un officier d'état civil, afin de conférer à une telle démarche non pas seulement un aspect formel ou festif, mais un véritable sens.

Ma deuxième remarque est liée à mon intervention liminaire.

Une victime de violences conjugales a à la fois peur et honte. Des progrès ont certes déjà été accomplis, mais nous devons, me semble-t-il, aller encore plus loin. Je propose notamment que, dans les écoles de gendarmerie et de police, les officiers de police judiciaire soient formés par des cours adaptés à l'écoute de ces victimes. On ne reçoit pas une victime de violences conjugales comme l'on reçoit une personne ayant subi un vol ; ce n'est pas pareil !

Les victimes de violences conjugales sont dans une situation d'infériorité et éprouvent souvent un sentiment de culpabilité personnelle. Il leur faudrait donc des interlocuteurs capables de les comprendre.

Les officiers de police ne doivent pas seulement demander à la victime quel est le nombre de jours d'interruption temporaire de travail, si son mari l'a frappée ou si elle a un certificat médical. De telles questions ne constituent pas un dialogue ! La victime se replie alors sur elle-même et ne reviendra plus. La prochaine fois qu'on la verra, elle sera mutilée ou peut-être plus gravement atteinte.

C'est pourquoi je propose un cours de préparation destiné aux officiers de police judiciaire accueillant des victimes de violences conjugales.

Par ailleurs, s'agissant du volet prévention, je souhaite évoquer une expérience que nous avons menée à la Réunion et qui a porté ses fruits : les structures d'accueil en milieu familial.

En effet, lorsqu'un drame se produit - ou est sur le point de se produire -, il est parfois souhaitable d'offrir à la mère et à ses enfants une structure d'accueil, fût-ce à titre temporaire. Cela permet aux victimes - réelles ou potentielles - de bénéficier d'un temps de répit et de repos, afin de faire le point, et aux époux ou aux personnes pacsées de souffler un peu et peut-être d'arriver à reprendre une vie commune.

Dans ma commune, nous avons mis un tel dispositif en place. Nous en suivons les actions de près et nous avons pu constater que cela ne fonctionnait pas mal. C'est peut-être une solution qu'il faudrait étendre.

Je voudrais également insister sur l'importance de l'accompagnement social, qui peut remédier à de tels drames lorsque le problème est lié - et c'est souvent le cas dès qu'il s'agit de violence - à l'alcool.

C'est pourquoi je voterai la présente proposition de loi, en espérant qu'elle améliorera la situation de personnes connaissant des drames familiaux. Je pense notamment aux partenaires, mais également aux enfants. J'ai en effet une pensée particulière pour les enfants. Leur vie est brisée, alors que ce sont des innocents. Ainsi que le rappelait ma collègue tout à l'heure, ils risquent de reproduire à l'âge adulte ce qu'ils ont vécu plus jeunes, brisant ainsi de nouvelles familles.

Je pense donc que le Sénat s'honore en mettant en place de telles mesures de répression ; il s'honorera encore plus en instituant un dispositif de prévention, afin de compléter le système des sanctions pénales.

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