Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 23 juillet 2007 à 15h00
Règlement du budget de l'année 2006 — Débat de contrôle de l'exécution des crédits de la mission « sécurité »

Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales :

Le rapport sur le taux d'exécution de la LOPSI est aujourd'hui en cours de finalisation ; je pourrai probablement vous le communiquer avant la discussion du projet de loi de finances pour 2008.

Je voudrais situer dans un cadre un peu plus général la façon dont j'entends conduire la politique du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Ce ministère affirme plus que jamais son rôle déterminant dans la mise en oeuvre de l'action publique sur chaque parcelle de notre territoire national, en métropole comme outre-mer. En cela, il est fidèle à sa tradition historique et à sa préoccupation d'être au service des Français.

Comme nous autres élus le constatons auprès de nos mandants, la présence de l'Etat ne faiblit pas globalement. Au contraire, dans la situation actuelle, c'est vers l'État que l'on se tourne spontanément pour apaiser une crainte. Dans le contexte actuel de mondialisation, la proximité rassure. La première des proximités est celle du réseau de l'État. Face à cette attente, il convient de répondre avec justesse.

L'efficacité de l'État suppose une parfaite unité dans la mise en oeuvre de son action, une relation étroite entre son administration territoriale et les services directement en charge de la sécurité. Elle suppose également un lien avec les élus locaux, avec les collectivités territoriales. De notre capacité commune à répondre à l'attente des Français dépend l'efficacité de l'État.

Les conditions nouvelles de la vie sociale, l'évolution rapide du contexte international donnent à cette mission une intensité et une actualité sans précédent.

Notre action doit porter prioritairement sur la lutte contre l'insécurité. Car la sécurité est la condition de la mise en oeuvre de nos libertés et, finalement, c'est l'une des premières attentes, voire la première, de nombre de nos concitoyens.

Cette nécessaire efficacité et, parallèlement, cette nécessaire image de l'unité de l'action de l'État et des collectivités locales sont parfois mises à mal par la multiplication et la diversification des acteurs chargés de la sécurité sur le territoire national. Aussi, il appartient à l'État d'assurer la cohérence des dispositifs et de définir les priorités.

Les Français veulent être protégés contre les menaces, quelles qu'en soient l'origine et l'ampleur.

Sous ma responsabilité, l'action du ministère de l'intérieur sera dictée, davantage encore dans les temps qui viennent, par cet impératif de répondre à l'attente et au besoin de sécurité. À mes yeux, le ministère de l'intérieur est d'abord le ministère de la protection des Français au quotidien. Et celle-ci sera assurée à condition, en premier lieu, de lutter contre la délinquance.

Les résultats des importants efforts qui ont été soutenus depuis 2002 par mes prédécesseurs se sont confirmés au cours du premier semestre de 2007 puisque la délinquance générale a encore baissé. En outre, les résultats obtenus en juin ont été les meilleurs pour ce mois-ci depuis dix ans.

Néanmoins, au risque de vous surprendre, je tiens à dire que les chiffres, même fiables, ne disent pas tout. Si excellents soient-ils, je ne saurais me tenir quitte de ces résultats pour l'année 2006 s'agissant des crédits de la mission « Sécurité ».

Quels sont les résultats que nous avons obtenus grâce aux moyens que vous nous avez accordés ?

Monsieur le rapporteur spécial, vous vous demandez si le nombre des créations d'emplois prévues par la LOPSI et le format de nos forces de sécurité ne sont pas excessifs par rapport à ceux d'autres pays.

Notre ratio - un policier ou un gendarme pour 261 habitants - n'est pas fondamentalement différent de ce qu'il est chez nos voisins européens. Ainsi, il est de un pour 305 en Allemagne, soit un taux légèrement inférieur au nôtre, mais de un pour 199 en Italie, donc un taux légèrement supérieur. Nous nous situons donc dans la moyenne européenne.

Ce modèle me paraît équilibré et, finalement, assez bien adapté à nos besoins. Il nous permet de répondre aux nécessités créées par les fortes concentrations urbaines comme au besoin de maillage de l'ensemble de notre territoire, notamment dans les zones rurales, en métropole comme outre-mer.

Le niveau atteint étant satisfaisant, aucune création nette d'emplois n'est à l'ordre du jour.

Dans ce contexte, les forces mobiles constituent la marge de manoeuvre nécessaire.

Le constat que vous avez effectué, monsieur Courtois, découle, en réalité, de la mise en oeuvre, en 2006, du plan de lutte contre les violences urbaines et l'insécurité.

Ce plan a permis de renforcer les services territoriaux par l'affectation de forces mobiles en mission de sécurisation, soit vingt-cinq CRS et sept escadrons de gendarmes mobiles. Il existe une différenciation non pas dans les missions de ces forces, mais seulement dans leurs zones de compétences.

De plus, si ces forces effectuent des missions de sécurisation, elles n'en conservent pas moins la capacité de passer instantanément à une posture de maintien de l'ordre si la situation l'exige. Certes, des évolutions sont possibles et l'on peut y réfléchir, mais nous devons veiller à préserver cette faculté d'adaptation immédiate. Cela correspond à un réel besoin sur le terrain.

Vous avez également abordé la valorisation de la performance au sein des forces de sécurité.

La prime de résultats exceptionnels est désormais intégrée dans la gestion de la police comme de la gendarmerie nationales. Nos forces de sécurité sont ainsi aux avant-postes de la réforme de l'État.

En 2006, 36 000 fonctionnaires de police et 35 000 militaires de la gendarmerie ont vu leurs efforts récompensés.

Par ailleurs, des mesures ambitieuses de revalorisation de la condition des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie ont été lancées au travers du « plan corps et carrières » et du « plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées ».

Ces efforts, engagés en 2004, se poursuivront jusqu'en 2012.

S'agissant de la formation, sur laquelle vous avez insisté, monsieur Courtois, je suis comme vous très attentive au maintien du meilleur niveau des connaissances juridiques des policiers et des gendarmes, notamment dans le domaine de la procédure.

De façon plus générale, je souhaite renforcer le dispositif de formation des policiers comme des gendarmes. C'est essentiel si nous voulons que nos forces de sécurité soient à même de répondre à toutes circonstances.

J'insisterai surtout sur la formation continue. Celle-ci me paraît un instrument indispensable d'efficacité de nos forces de sécurité, de promotion sociale et d'évolution de carrière. L'une de mes priorités, au sein de ce ministère, sera de développer et de valoriser la formation permanente et, à travers elle, la promotion professionnelle.

Vous avez également évoqué, à juste titre, les conditions de fidélisation et de logement des policiers, en particulier en Île-de-France. Les gendarmes, logés en caserne, ne connaissent pas ce genre de problèmes, même lorsqu'ils sont en Île-de-France.

Il y a là un problème majeur. Il est difficile - je l'ai constaté en me rendant en Seine-Saint-Denis - de fidéliser un certain nombre de policiers, pour des raisons diverses que nous sommes en train d'analyser et auxquelles il conviendra d'apporter des réponses, mais aussi parce qu'il leur est extrêmement difficile de se loger.

Mes prédécesseurs l'ont également constaté et le nombre de logements réservés à des agents du ministère de l'intérieur sur des crédits ministériels du programme « Police nationale » a été supérieur aux prévisions initiales.

Ces résultats s'expliquent par la qualité du partenariat qui a pu être noué avec les bailleurs. Le ministère loge désormais plus de 17 000 agents en Île-de-France, contre 13 000 en 2004.

C'est donc un progrès considérable, mais il faut aller encore plus loin ! En discutant avec certains agents sur le terrain, je me suis rendu compte que de nombreux problèmes subsistaient : un policier me disait que, sa famille étant restée à Metz, il y retournait toutes les semaines, faute de pouvoir se loger en Île-de-France. Il est évident que cela n'incitera pas les policiers, notamment les jeunes, à demeurer sur place. Il faut donc continuer à mener cette politique.

L'adaptation des forces de sécurité aux besoins passe aussi par le renforcement de la coordination et des liens opérationnels.

Les groupes d'intervention régionale, les GIR, sont emblématiques de l'approche partagée de la mission de sécurité. Cinq ans après leur création, le bilan est particulièrement éloquent, puisque ces unités ont permis de mener plus de 3 000 opérations, ayant abouti à près de 5 000 placements sous mandat de dépôt.

Plus de 6 tonnes de cannabis, 154 kilos d'héroïne et 92 kilos de cocaïne ont été saisis. En outre, l'équivalent de 67 millions d'euros ont été placés sous main de justice. Cela montre l'efficacité de ces GIR.

Je veux donner un nouvel élan à cette remarquable réussite pour déstabiliser durablement les réseaux criminels, afin de mieux protéger la population, en particulier celle des quartiers les plus défavorisés, où se trouve souvent le noeud d'un certain nombre de trafics.

Enfin, cette adaptation des forces de sécurité aux nouvelles menaces passe par un meilleur usage des nouvelles technologies, sur lesquelles vous avez insisté.

J'aborderai d'abord l'interconnexion des réseaux informatiques et de communication.

Le réseau RUBIS de la gendarmerie nationale et le réseau ACROPOL, qui utilisent la même technologie numérique, sont désormais interopérables dans tous les départements métropolitains. Demain, cette interopérabilité sera adaptée au réseau ANTARÈS de la sécurité civile. Nous aurons donc réussi, en quelques années, cette interconnexion.

Dans le même esprit, les fichiers STIC de la police et JUDEX de la gendarmerie sont en cours de refonte dans l'application commune ARIANE.

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