Intervention de Anne-Marie Idrac

Réunion du 20 mai 2010 à 9h00
Bouclier fiscal — Rejet d'une proposition de loi

Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État :

Je rappelle l’argument invoqué par le Conseil constitutionnel : l’égalité devant l’impôt est un principe d’équité important.

Certains ont regretté un manque de transparence sur certains sujets. Je rappelle que l’administration fiscale, à la demande de Christine Lagarde, d’Éric Woerth et maintenant de François Baroin, a entrepris des efforts en ce sens.

Le Gouvernement a ainsi rendu publiques des statistiques provisoires dès le mois d’avril. On peut difficilement faire mieux ! Dès que les données définitives seront connues, c’est-à-dire dès le mois de juillet, elles viendront alimenter le débat public.

Nous avons également publié les statistiques sur les exilés fiscaux, et nous répondons à toutes les sollicitations du président et du rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Leurs homologues du Sénat ont reçu copie de toutes les données transmises.

Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour revenir sur les propositions alternatives à la suppression du bouclier fiscal, et faire ainsi écho aux propos de Catherine Morin-Desailly.

Sur la forme, cela a été dit, l’examen d’une proposition de loi se prête mal à la discussion de tels sujets, qui sont d’ordinaire rattachés aux projets de loi de finances.

Les propositions alternatives consisteraient pour l’essentiel à supprimer à la fois le bouclier fiscal et l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, et à majorer l’impôt sur les revenus du travail et du patrimoine ; c’est la fameuse « trilogie », ou plutôt « tétralogie », chère au président Jean Arthuis.

Il est vrai que nous sommes presque les seuls en Europe – à l’exception de quelques cantons suisses – à avoir conservé une taxation sur la fortune, ce qui peut avoir des effets négatifs.

Cela étant, nous avons fait beaucoup ces dernières années pour que l’ISF soit un impôt plus juste économiquement. Nous avons par exemple augmenté l’abattement applicable à la valeur de la résidence principale, qui est passé de 20 % à 30 %.

Nous avons également offert aux contribuables la possibilité d’investir une partie des sommes dues au titre de l’ISF dans des petites et moyennes entreprises, sous le contrôle vigilant du Parlement, et en particulier du Sénat. Il faut en effet éviter les abus, ce à quoi nous nous sommes employés, avec M. Albéric de Montgolfier. Cela nous a également permis d’améliorer l’emploi et la solidité de ces entreprises.

À propos du bouclier fiscal, Mme Catherine Morin-Desailly soutenait que le revenu réel était trop éloigné du revenu final pris en compte. Sur ce point, des améliorations ont déjà été apportées, notamment en ce qui concerne les dividendes. Au demeurant, nous pourrons poursuivre notre réflexion dans ce domaine.

Nous ne sommes donc pas figés, et encore moins autistes. Au contraire, nous sommes prêts à engager le dialogue et à débattre.

Au sujet de la fameuse « trilogie » ou « tétralogie », dont Christine Lagarde et François Baroin auront l’occasion de débattre avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, je ferai remarquer que le fait d’exonérer la détention de capital en supprimant l’ISF et de taxer davantage des revenus issus, pour la plupart, du travail ou d’activités en relation avec l’emploi me semble paradoxal.

Serait-il juste de privilégier les rentiers au détriment des actifs ? Cela pose un problème d’équité et je ne doute pas que le groupe Union centriste contribuera au débat de la majorité sur cette question.

En guise de conclusion, je souhaite saluer le sens des responsabilités manifesté par votre assemblée, et spécialement par la commission des finances et la majorité sénatoriale.

Le Sénat est depuis longtemps à la pointe de la réflexion sur les questions fiscales, et notamment sur le bouclier fiscal. Il entend conserver sa position, et il a raison. Nous comptons sur lui pour animer le débat.

Pour autant, j’ai relevé qu’aucun amendement n’avait été déposé sur cette proposition de loi. J’y vois le signe que nous nous entendons sur l’essentiel, c’est-à-dire sur la notion d’équité fiscale.

Le débat est respectable, mais il ne nous paraît pas apporter une réponse crédible aux enjeux majeurs auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, en particulier l’évolution démographique des actifs – aucune proposition n’a été faite sur ce sujet – et le financement des retraites.

En faisant appel à votre sens des responsabilités, je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de rejeter l’ensemble de cette proposition de loi.

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