Intervention de Renée Nicoux

Réunion du 20 mai 2010 à 15h00
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Renée NicouxRenée Nicoux :

Le titre II du projet de loi met l’accent sur la recherche et le renforcement de la compétitivité de l’agriculture française.

Le présent amendement vise à rédiger l’intitulé de ce titre de manière à souligner que l’un des objectifs prioritaires de la politique française en matière d’agriculture est d’assurer un revenu équitable à la population active agricole.

En effet, au regard du projet de loi, il semble évident que le Gouvernement n’aborde la question de l’avenir de l’agriculture que du point de vue de la fonction économique de celle-ci. Ce sont davantage les notions de marché et de concurrence qui sont au cœur du texte que celles de valorisation de la qualité, de reconnaissance du travail réalisé par les agriculteurs pour l’entretien de nos paysages et de nos espaces ruraux ou au bénéfice de la vitalité de nos territoires.

Pourtant, chacun s’accorde à reconnaître que ce texte doit permettre aux agriculteurs de tirer de leur travail un revenu décent. Il est donc indispensable d’y inscrire cet objectif.

La crise agricole que nous traversons actuellement impose de repenser notre approche politique de l’agriculture. Nous pourrions, dans cette perspective, nous inspirer de deux exemples.

Tout d’abord, le commerce équitable permet, grâce à un comportement vertueux des distributeurs, d’assurer un juste revenu aux agriculteurs du Sud. Pourquoi ne pas appliquer cette démarche au profit de nos agriculteurs, afin de leur permettre de tirer un revenu décent de leur activité ?

L’objectif visé, au travers des contrats, est bien de sécuriser le revenu des agriculteurs. Aussi ne peut-on, à notre avis, vouloir renforcer sans fin une compétitivité fondée uniquement sur les prix et ne tenant pas compte du rôle joué par le monde agricole en matière tant d’aménagement rural que de maintien du tissu social ou de préservation de notre environnement. Ce que font les consommateurs en choisissant d’acheter plus cher un produit pour soutenir l’activité des agriculteurs du Sud, ne peuvent-ils le faire au bénéfice des producteurs français ?

Le second exemple que je voudrais évoquer est celui du tourisme équitable, qui consiste à assurer aux communautés locales une part équitable des revenus issus de l’activité touristique et de concilier celle-ci avec leur développement durable.

Dans le même esprit, il faut se diriger vers une agriculture équitable !

J’entends par là que les prix doivent au moins couvrir les coûts de production, rémunération du travail comprise, que le revenu doit être à la hauteur des efforts réalisés par les agriculteurs en termes de qualité et de respect de l’environnement. Nous ne pouvons plus tolérer que des exploitants vendent à perte ! Il faut donc rééquilibrer les relations entre producteurs, transformateurs et distributeurs, qui doivent être désormais placés sur un pied d’égalité.

Il convient aussi d’instituer une répartition équilibrée de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation alimentaire. Nous devons mettre en place un cadre permettant de contrôler l’évolution des prix alimentaires tout au long du processus de production et de vente afin de pouvoir, le cas échéant, sanctionner toute forme de distorsion.

C’est dans cet esprit qu’il faut développer aujourd’hui l’agriculture française, pour qu’elle soit « mieux disante », et non pas forcément « moins disante ». C’est pourquoi renforcer la compétitivité ne nous semble pas approprié, car ce serait en rester à des considérations purement productivistes ne tenant pas compte des hommes. Les aliments ne sont pas des biens de consommation comme les autres. De ce fait, les exploitations qui les produisent doivent être considérées différemment des autres entreprises.

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