La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, madame, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Ce matin, les représentants des régions et des départements de France n’ont pas souhaité, à juste titre, participer à la conférence des déficits publics, et cela pour deux raisons : d’une part, les collectivités locales ne contribuent pas au déficit ; d’autre part, les décisions étaient déjà prises.
En effet, les collectivités locales votent des budgets en équilibre, faisant apparaître un déficit qui ne représente qu’1 % du déficit de l’État et correspond à des dépenses d’investissement pour l’avenir de nos territoires.
Très bien ! sur les travées socialistes.
Elles votent donc des comptes en équilibre, alors qu’elles doivent faire face à de grandes difficultés.
En premier lieu, elles doivent assumer des charges résultant de transferts de compétences mal financés, mal compensés.
En deuxième lieu, elles doivent répondre à l’appel de l’État pour financer des investissements qui sont hors de leurs compétences, qu’il s’agisse du grand emprunt, des autoroutes, des lignes à grande vitesse, du plan Campus… Cette semaine encore, elles ont été sollicitées à trois reprises.
En troisième lieu, leurs ressources sont peu évolutives, peu dynamiques.
Néanmoins, en un an, les collectivités locales empruntent ce que l’État emprunte en une semaine !
Ce matin, elles n’ont pas participé à la conférence des déficits parce que le Gouvernement veut régler non pas les comptes de l’État, mais le compte des collectivités locales ! Je le répète, les décisions étaient déjà prises !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Première décision : la suppression de la taxe professionnelle. De ce fait, les communes, les départements et surtout les régions sont dotés d’un budget affecté sans ressources dynamiques. La perte d’autonomie fiscale est réelle. Les budgets locaux en subissent déjà les conséquences.
Deuxième décision : le gel des dotations accordées aux collectivités. À l’issue de cette conférence, j’ai de surcroît appris que le soutien aux collectivités serait modulé en fonction de leur « degré de bonne gestion ». Qui déterminera ce degré ? Que sera la bonne gestion ? §
Et vous voulez en plus faire voter à la hussarde une réforme des collectivités locales entraînant une perte de légitimité démocratique !
Depuis le mois de mars, nous avons demandé sans succès un rendez-vous au chef de l’État.
Nous souhaitons l’instauration d’un vrai dialogue entre l’État et les collectivités locales, de façon à mettre en place une réelle décentralisation, qui permettra à la nation de sortir des difficultés auxquelles elle est actuellement confrontée.
M. François Patriat. Par ailleurs, et je m’adresse là à Mme Lagarde, le Gouvernement vient de notifier à Bruxelles le fait que, dans les deux années à venir, des prélèvements obligatoires supplémentaires d’un montant de 40 milliards d’euros seront opérés en France. Vous nous parlez de croissance, mais nous savons bien que ce sont en réalité les Français qui paieront !
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur Patriat, la meilleure façon de nouer un dialogue est d’y participer !
Bravo ! et applaudissementssur les travées de l’UMP.
Mme Christine Lagarde, ministre. Pour ce qui concerne votre dernière remarque, je précise que les prélèvements obligatoires supplémentaires figurent dans un document transmis à Bruxelles au mois de janvier dernier et communiqué, bien entendu, aux commissions des finances des assemblées. Cette augmentation des prélèvements obligatoires résulte évidemment de l’élargissement des bases, compte tenu de la croissance prévue pour l’année.
Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Didier Boulaud mes ses mains en visière, feignant de scruter l’horizon.
Par conséquent, il ne s’agit pas à proprement parler d’augmenter les prélèvements obligatoires.
Je tiens maintenant à vous expliquer très précisément la façon dont le Gouvernement articule sa politique budgétaire. Celle-ci n’a pas changé d’un iota. Au fur et à mesure du retour de la croissance, les mesures adoptées afin de favoriser la relance de l’économie sont rapportées.
Par ailleurs, plusieurs méthodes peuvent être choisies pour réduire les déficits publics, cette réduction constituant un impératif national : comme l’a dit ce matin M. le Premier ministre, il y va de la crédibilité du pays tout entier et de sa croissance.
Puisque M. le Premier ministre est présent, il pourrait le dire lui-même !
Il y va également, comme j’ai pu moi-même le constater à l’occasion de discussions à Bruxelles concernant d’autres pays, de l’indépendance nationale.
Dans ces conditions, il est évident que chacun d’entre nous doit participer à la réduction des déficits.
Quelle politique budgétaire pratiquer pour y parvenir ?
Une première option est d’augmenter massivement les impôts, ce qui signifie brider la croissance.
Très clairement, le Gouvernement ne souhaite pas y recourir.
La deuxième option consiste à réduire la dépense publique. C’est manifestement dans cette direction que nous devons nous engager, volontairement, délibérément et tous ensemble.
La troisième option vise à apporter à notre économie les réformes propres à reconstituer son potentiel de croissance qui a été détruit lors de la crise économique.
Monsieur Patriat, je regrette d’autant plus votre absence ce matin que vous auriez pu prendre connaissance de deux rapports.
Le premier est celui qui a été remis par MM. Champsaur et Cotis, et qui établit de manière irréfutable que, depuis trente ans, tout le monde a contribué aux déficits publics.
Mme Christine Lagarde, ministre. « Tout le monde », cela signifie l’État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale.
Applaudissementssur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
À la lecture de ce même rapport, vous auriez constaté que les collectivités territoriales concourent beaucoup plus que l’État à l’augmentation des déficits publics, respectivement pour 2, 7 et 1, 9 points.
Mme Christine Lagarde, ministre. Je vous conseille également la lecture du rapport que vient de fournir M. Bruno Durieux, qui explique très clairement que le remplacement de la taxe professionnelle par la contribution économique territoriale fournit une dynamique bien meilleure à l’ensemble des collectivités territoriales.
Applaudissementssur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Monsieur le Premier ministre, au moment de lancer la réforme des retraites, vous avez fait de l’affichage, notamment en organisant un simulacre de consultation des partenaires sociaux. Pour quel résultat ?
En réalité, vos options sont déjà toutes connues. Comme en 1987, en 1993, en 1995, en 2003 ou en 2008, vous voulez imposer aux salariés et aux retraités de notre pays un véritable plan de super-austérité, vous inspirant des directives européennes et du plan de rigueur infligé notamment au peuple grec.
Pour ce faire, vous allongerez la durée de cotisations et repousserez l’âge légal de départ à la retraite. Autrement dit, vous renoncerez à une mesure qui rassemble 63 % des Français : la retraite à soixante ans.
Mais, comme cela ne suffira pas – toutes les projections le prouvent –, vous irez encore plus loin, en remettant en cause les avantages sociaux et familiaux, en pillant le Fonds de solidarité vieillesse
MM. Jackie Pierre et Alain Vasselle s’exclament.
Au final, comme toujours avec votre gouvernement, ce seront les salariés, les ménages et les retraités qui mettront la main à la poche ! Les entreprises et leurs actionnaires, grâce aux exonérations et aux exemptions de cotisations sociales, continueront d’accumuler les bénéfices réalisés sur le dos des salariés. Les financiers et les spéculateurs, qui prospèrent en fermant les usines ou les entreprises de notre pays – 680 000 emplois ont été supprimés depuis 2009 : du jamais vu ! – sont, quant à eux, encore et toujours épargnés.
Pourtant, la question fondamentale…
M. Guy Fischer. … est précisément celle de la juste répartition des richesses produites, ce que vous contestez. Pour preuve : ce matin même, au Sénat, votre majorité a voté contre la suppression du bouclier fiscal que nous proposions.
Hou ! sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Selon nous, il est urgent de mettre à contribution tous les revenus, de sanctionner la financiarisation de l’économie, de favoriser l’emploi qualifié et l’investissement.
De telles mesures permettraient de maintenir l’âge légal de la retraite à soixante ans, voire de financer de nouveaux droits, tels que la prise en compte des périodes de précarité et d’études dans le calcul des annuités.
M. Guy Fischer. Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin nous dire comment les riches contribueront à la réforme des retraites ?
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Monsieur le président Fischer, nous sommes tous attachés au système de retraites par répartition, mais il est bon que je rappelle quelques chiffres, même si vous les connaissez.
Ce système repose sur la solidarité intergénérationnelle. Voilà une soixantaine d’années, il y avait à peu près quatre actifs pour un retraité. Aujourd’hui, nous en sommes à un peu moins de deux actifs pour un retraité et, dans une vingtaine d’années, ce même ratio sera quasiment de un pour un. Il est bon de garder ces chiffres en mémoire.
Par ailleurs, il ne faut pas non plus oublier les déficits, que le Conseil d’orientation des retraites, le COR, dont les estimations ne sont désormais plus remises en cause par quiconque, a mis sur le devant de la scène. Selon ses prévisions, le déficit des régimes de retraites, estimé à 30 milliards d’euros aujourd’hui, s’élèverait à 40 milliards d’euros en 2020 et à environ 70 milliards d’euros en 2030.
Alors, monsieur Fischer, toutes celles et tous ceux qui sont attachés au système de retraites par répartition ne peuvent pas nier que des mesures doivent être prises en termes d’allongement de la vie active.
Et je me fais l’écho non pas seulement des voix du COR ou du Gouvernement, mais également de celles d’experts indépendants. Hier, le commissaire du Plan Jean-Michel Charpin, qui a remis un rapport sur les retraites à Lionel Jospin en 1999, abondait lui-même dans ce sens.
Il existe un réel point de divergence entre vous et nous : la fiscalité. Une théorie consiste à penser que l’on peut prélever 45 milliards d’euros de fiscalité pour sauver le système de retraites par répartition : cela signifierait une hausse de trois points des prélèvements obligatoires, ce qui ne manquerait pas d’affaiblir la compétitivité de la France.
Cela impliquerait aussi de matraquer les classes moyennes, en particulier les 20 millions de Français détenteurs de contrats d’assurance vie.
Il en résulterait également une augmentation du chômage. En effet, une hausse de 1 point des cotisations patronales représente, certes, une rentrée supplémentaire de 4, 5 milliards d’euros, mais aboutit à une perte de 50 000 emplois, cela est parfaitement clair.
Enfin, monsieur Fischer, taxer les stock-options et les bonus, comme le propose le parti socialiste, …
… de manière à dégager une recette de 2 milliards d’euros sur une assiette de 2, 7 milliards d’euros, cela conduirait à appliquer un taux d’imposition de 70 % !
Je vous le dis très clairement : le Gouvernement prendra ses responsabilités, d’abord en jouant sur le paramètre de l’allongement de la vie active et, ensuite, comme l’ont dit tant M. le Premier ministre qu’Eric Woerth, …
M. Georges Tron, secrétaire d'État. … en instaurant une taxation sur les revenus du capital et les hauts revenus qui ne sera pas incluse dans le bouclier fiscal.
Applaudissementssur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Joël Bourdin. Tout d’abord, je tiens à vous féliciter, madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, pour la manière dont vous vous êtes engagée dans le rôle d’ambassadeur de l’euro, relayant avec bonheur l’action propre du Président de la République
Manifestations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste miment le geste du violoniste.
Je vous sais gré d’avoir réussi à vaincre la réticence de la Banque centrale européenne à faire le lien entre les financements de l’économie et la politique monétaire. La tâche est rude, tant est ancré, dans les pays de la zone euro, l’esprit d’indépendance en ce qui concerne leurs politiques économiques et budgétaires.
Naguère, nous avons consacré l’euro monnaie commune, en oubliant qu’il n’est pas tombé du ciel et que sa valeur comme son utilité résultent d’engagements économiques et budgétaires européens qui n’ont pas été tenus. Ils ont même été ignorés ! C’est freudien, dirait Michel Onfray…
Les créateurs d’une monnaie unique fondée sur la convergence n’ont eu de cesse de disperser leurs politiques économiques avec des objectifs disparates.
Certains ont pratiqué une politique de stabilisation des salaires, comme l’Allemagne, qui a le souci permanent, dans un esprit de pacte social, de la compétitivité ; d’autres ont délibérément choisi, comme l’Espagne, de se laisser bercer par une politique inflationniste, en laissant filer les salaires nominaux et se développer les crédits à la consommation.
La France s’est située entre ces deux extrêmes. Inéluctablement, on allait à la catastrophe – nous avons été plusieurs à l’écrire avant 2008 – et, immanquablement, une remise en ordre serait nécessaire. On en est là !
C’est un peu tard, mais on doit se féliciter que les gouvernements osent évoquer la coordination de leurs politiques économiques. La remise en ordre est laborieuse. Nous sommes au printemps et il ne faut pas s’étonner que le régime minceur appliqué aux budgets fasse florès !
Sourires
À cet égard, l’Allemagne se distingue : elle ne cache pas que le modèle allemand est le modèle type de ralliement.
L’Allemagne se distingue encore par son initiative technique visant à interdire les ventes à terme de titres.
Aussi, depuis hier, on a la douloureuse impression qu’à nouveau on improvise ici ou là.
Ma question est simple.
M. Joël Bourdin. Quand va-t-on organiser la coordination européenne ? Quand allez-vous, gouvernements de la zone euro, parler d’une seule voix, défendre les mêmes principes, prendre les mêmes engagements ? Quand va-t-on cesser de finasser et de faire le bonheur des arbitragistes internationaux ?
Marques d’impatience sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
M. Joël Bourdin. Quand va-t-on sortir de ce système de communication nationale néfaste ?
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur Bourdin, vous le savez certainement, Jean Monnet disait que l’Europe se construit et avance dans les crises.
La crise économique et financière que nous venons de traverser a permis à l’Europe de découvrir un certain nombre de failles et de proposer d’y remédier.
Vous posez la question de la gouvernance économique. À l’occasion de la crise grecque et, plus récemment, à l’occasion de la crise financière qu’a vécue notre monnaie commune, l’euro, il est nettement apparu que certains mécanismes nous manquaient. Cela nous incite à examiner la question de la gouvernance économique et à faire des propositions.
M. le Président de la République et M. le Premier ministre m’ont demandé de représenter notre pays au sein du groupe de travail convoqué demain après-midi par M. Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, et précisément chargé de mettre au point ces propositions de modifications en matière de gouvernance économique.
Il s’agit d’avoir des mécanismes d’alerte qui fonctionnent un peu mieux, un peu plus vite, et qui reposent sur un pacte de stabilité et de croissance comportant non seulement l’indicateur des déficits et des dettes, mais également un indicateur de la compétitivité économique. Il s’agit aussi d’envisager la convergence de nos modèles économiques, à laquelle vous faisiez référence, monsieur Bourdin.
Ça fait huit ans que la droite est au pouvoir ! Qu’est-ce que vous avez fait ?
Nous devons en outre mettre en place des mécanismes de sanctions.
Certains proposent la modification des traités. Nous avons attentivement examiné la chose et il nous semble – je parle sous l’autorité du Premier ministre – que nous pouvons parfaitement pratiquer à traité constant. Aujourd’hui, on trouve dans les traités des mécanismes adéquats : les avertissements, sur le fondement de l’article 136 ; la privation de fonds communautaires tels que les fonds de cohésion ; les mécanismes d’accès à la banque européenne d’investissement. Ce sont là autant de sanctions propres à rappeler à chacun ses obligations dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance.
La stabilité signifie évidemment l’effort budgétaire, c’est-à-dire la lutte contre les déficits publics, évoquée par le Premier ministre, et qui nous a réunis autour du Président de la République, avec le président de votre commission des finances et votre rapporteur général.
Il s’agit aussi d’essayer de pratiquer la croissance ensemble. Pour ce faire, nous devons travailler sur les objectifs « Europe 2020 » et nous efforcer de rapprocher nos modèles économiques.
Ceux qui ont des déficits de balance des paiements trop importants doivent les réduire, grâce à une politique budgétaire rigoureuse et à des réformes de fond.
Mme Christine Lagarde, ministre. Les pays en excédent doivent également faire une part du chemin nécessaire !
Applaudissementssur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et concerne la très grave crise dans laquelle se trouve l’euro, notre monnaie et celle de quinze autres pays de l’Union européenne.
Hier encore, la monnaie unique a poursuivi sa chute : elle est descendue, en début de journée, au-dessous de 1, 22 dollar, son plus bas niveau depuis avril 2006, à la suite de rumeurs se répandant chez des traders et selon lesquelles la Grèce envisageait de quitter la zone euro ou même l’Union européenne. Il a fallu un démenti formel du gouvernement grec pour voir l’euro remonter aux alentours de 1, 23 dollar…
Sans dramatiser la situation, force est de constater que l’avenir et l’existence même de l’euro sont en jeu. Au-delà, c’est le sort des économies de toute la zone euro qui se joue, celui de nos industries, de nos emplois, de notre pouvoir d’achat.
Actuellement, les marchés financiers testent la solidarité européenne, la capacité de la zone euro à trouver une solution à la situation de la Grèce, pour éviter la contagion tant redoutée. Autant dire qu’ils sanctionnent, ni plus ni moins, l’absence de gouvernement économique européen. L’Europe est prise en défaut de coordination. Et la toute récente décision de l’Allemagne d’interdire les ventes à découvert montre, une fois de plus, le manque de cohésion de l’Europe.
Madame la ministre, qu’avez-vous finalement décidé, dans la hâte, avec vos homologues, mardi, à Bruxelles ? Pas grand-chose !
Vous avez livré quelques détails sur le dispositif de soutien, mais vous avez surtout loué les efforts de la Grèce, du Portugal et de l’Espagne pour l’adoption de plans nationaux de rigueur en vue d’assainir leurs finances publiques.
Mais ces méthodes appartiennent au passé. Pour réussir à surmonter cette crise de confiance sans précédent dans l’histoire de l’économie européenne, il nous faut inventer des solutions nouvelles. Il n’y a pas de remède miracle ! Mais la véritable solution de fond est connue : c’est la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro.
Déjà en 2007, Yvon Collin et Joël Bourdin tiraient la sonnette d’alarme dans un rapport intitulé « La coordination des politiques économiques en Europe : le malaise avant la crise ? ». Madame le ministre, avez-vous lu ce rapport sénatorial ? Avez-vous lu son tome II, publié en 2009 ?
Pouvez-vous nous dire quelles solutions concrètes la France entend proposer pour faire évoluer, sans tarder, les institutions européennes en matière de gouvernance économique ?
En conclusion, je vous demande si vous partagez la position des sénateurs radicaux de gauche et, plus largement, du RDSE, qui appellent à une plus grande solidarité européenne et à une véritable politique économique commune.
Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste. – Mme Muguette Dini et M. Joël Bourdin applaudissent également.
La parole est à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Didier Boulaud. Voilà la croissance qui revient ! On l’appelle « Mme Croissance » !
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Les chefs d’État et de gouvernement, le Président de la République en tête…
… ont manifesté tous ensemble la solidarité européenne, en particulier au sein de la zone euro, et notre détermination commune à défendre notre monnaie.
Qu’avons-nous fait ? Eh bien, nous avons tout simplement construit un fonds européen de stabilité financière, doté de garanties pour le montant non négligeable de 440 milliards d’euros et destiné à remédier à une défaillance dans la « maison euro » telle qu’elle a été bâtie il y a dix ans.
Figurez-vous que l’on peut, dans l’état actuel des choses, soutenir la Hongrie – pays hors zone euro – ou l’Ukraine – pays simplement voisin de l’Union européenne –, mais pas un pays membre, comme la Grèce, …
… sauf à inventer quelque chose de nouveau. C’est ce que nous avons fait !
Pendant ces journées et ces nuits, nous avons donc construit ce fonds européen de stabilité financière, qui sera en mesure de soutenir des États en difficulté, en supplément du Fonds monétaire international, pour agir de concert, comme nous l’avons fait dans le cas de la Grèce.
Nous avons également débattu de la communication de la Commission européenne sur la meilleure gouvernance économique. Nous avons par ailleurs approuvé le projet de texte sur les hedge funds, les fonds alternatifs, à propos desquels l’Allemagne et la France ont une position commune, parfaitement alignée.
Cela nous a permis de tenter de faire obstacle au principe du passeport européen, pour éviter que notre zone euro ne soit un champ de spéculation ouvert à tous les vents.
Vous m’interrogez aussi, madame Laborde, sur la question des ventes à découvert. Comme si l’on découvrait soudain que l’Allemagne ne fonctionne pas comme la France !
Je vous le rappelle, la France, depuis le mois de septembre 2008, interdit les ventes à découvert sur toutes les valeurs financières ! Autrement dit, l’Allemagne fait maintenant exactement ce que nous avons fait en septembre 2008.
Dans notre pays, bien entendu, les ventes à découvert sur les valeurs financières restent interdites.
Concernant les ventes à découvert sur des valeurs correspondant à des dettes d’État souverain sur le marché secondaire, il faut une concertation supplémentaire.
Croyez-le bien, la solidarité au sein de la zone euro est forte et notre détermination à la maintenir et à défendre notre monnaie est absolument intacte !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Ma question concerne le rétablissement de l’indexation des salaires des enseignants du premier degré à Mayotte.
De nombreux mouvements de grève, menés par les instituteurs et les professeurs des écoles, ont eu lieu à Mayotte depuis 2007.
Le 18 mai 2010, le préfet, recevant une délégation de grévistes, a annoncé l’ouverture du dossier de l’indexation des salaires dès ce jour. Il s’est également engagé à convoquer, d’ici au mois de juin, l’Observatoire des prix et des revenus afin que celui-ci étudie le décalage des prix entre Mayotte et la métropole, en vue de fixer l’indice de correction pour Mayotte.
Il s’agit là de réparer une discrimination que subissent ces agents depuis 1978, date à laquelle l’indexation a été supprimée par décret alors qu’elle reste en vigueur dans l’ensemble des autres départements d’outre-mer.
Les grévistes restent déterminés quant à la revendication de l’effectivité de l’indexation des salaires au plus tard en janvier 2011.
Je voudrais savoir à quelle date une décision sera prise par le Gouvernement afin de rétablir cette indexation par un nouveau décret.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer, qui est actuellement en déplacement à La Réunion et qui m’a demandé de vous répondre.
Dans le cadre de l’évolution statutaire de Mayotte, la loi du 11 juillet 2001 a posé le principe du droit à l’intégration des agents publics mahorais.
Un premier bilan, établi en 2008, a permis de constater que le dispositif d’intégration n’était pas suffisamment attractif et n’a pas permis d’atteindre les objectifs visés dans ce domaine.
C’est pourquoi le Gouvernement a notamment proposé toute une série de mesures visant à améliorer l’attractivité des corps passerelles. Un protocole d’accord, qui a fait l’objet d’un large consensus, a été signé le 8 avril 2009 par les organisations syndicales. Il a posé le principe d’une amélioration des conditions d’intégration.
Les décrets traduisant ce protocole sont parus dès l’automne 2009. Ils ont abouti à améliorer les conditions d’intégration pour la fonction publique de l’État et pour la fonction publique territoriale.
Ils ont notamment permis une revalorisation très sensible de la grille indiciaire des corps transitoires, un passage accéléré dans les corps définitifs, la définition d’un régime indemnitaire et un régime de cotisation de droit commun qui améliorera le niveau des pensions.
Ces mesures, monsieur le sénateur, représentent un effort budgétaire important pour les collectivités locales et peuvent contribuer à créer un différentiel de rémunération et de retraite avec le secteur privé.
Le pacte pour la départementalisation permet d’assurer un développement économique et social équilibré sur le territoire de Mayotte. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s’attache prioritairement à mettre en œuvre les dispositions de ce pacte et n’envisage pas de créer un dispositif d’indexation des rémunérations des agents publics qui risquerait de déstabiliser l’économie locale.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Pierre-Yves Collombat. La montée du chômage et le sous-emploi sont, de loin, la première préoccupation des Français, avant même le financement des retraites ; je vous laisse deviner ce qu’il en est de la burqa !
Sourires sur les travées du groupe socialiste. – Murmures sur les travées de l ’ UMP.
Nos compatriotes ont raison de s’inquiéter ! En effet, le bilan de Nicolas Sarkozy et de ses gouvernements, depuis mai 2007, est de 693 400 chômeurs et sous-employés en plus.
Je parle ici uniquement des personnes qui effectuent des actes positifs de recherche d’emploi, soit les catégories A, B et C de la DARES, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques. Avec celles qui, inscrites à Pôle emploi, ne font pas de recherches, c'est-à-dire les catégories D et E, on frôle les 900 000 personnes : 862 600 exactement.
À titre de comparaison, je rappellerai que, de juin 1997 à mai 2002, le gouvernement de Lionel Jospin avait, lui, fait baisser de 516 200 le nombre des demandeurs d’emploi des catégories A, B et C et de 578 300 celui de l’ensemble des chômeurs.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Il existe donc, entre les résultats des deux politiques, un écart de 1 440 000 demandeurs d’emplois !
M. Pierre-Yves Collombat. Comme disait tout à l'heure M. Tron, il s'agit là d’un vrai point de divergence entre nous !
Rires sur les travées du groupe socialiste. – Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Autre comparaison, cette fois avec nos partenaires de l’OCDE : selon les derniers chiffres publiés par cette organisation, le taux de chômage français, soit 10, 1 %, est supérieur à celui de tous les autres pays membres !
D’un côté, les chômeurs de longue durée ont augmenté de 30, 4 % en un an ; de l’autre, les jeunes, même diplômés, « galèrent » de plus en plus. Seuls 36 % des jeunes diplômés de 2009 sont en poste !
J’aurai donc deux questions.
Je voulais poser la première à Mme Lagarde, mais elle nous a quittés !
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Ne doutant pas que la lutte contre le chômage et le sous-emploi ne soit son ardente obligation, je souhaitais qu’elle m’explique comment il est possible de les réduire tout en diminuant les déficits publics, puisque telle est l’autre priorité du Gouvernement.
J’avoue, en effet, ne pas comprendre comment on fait pour relancer l’emploi tout en comprimant la demande et les emplois publics !
Ma seconde question, qui s’adressait plutôt à vous, monsieur Wauquiez, est d’ordre pratique. Le vœu le plus cher d’un nombre croissant de nos concitoyens serait de pouvoir travailler plus pour gagner plus…
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. Pierre-Yves Collombat. Quels conseils leur donneriez-vous pour leur permettre d’atteindre ce double objectif ?
Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Je vous rappelle, monsieur Collombat, que l’on n’interroge qu’un seul ministre à la fois !
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur Collombat, j’ai écouté avec attention les chiffres que vous avez cités, notamment lorsque vous avez comparé la période 1997-2002 à celle que nous vivons actuellement. Mais, curieusement, il y a une donnée sur laquelle vous n’avez pas établi de comparaison entre ces deux périodes : celui de la croissance, et notamment de la croissance à l'échelle mondiale…
Souriressur les travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Pourquoi un tel oubli ? Peut-être, tout simplement, parce que, au cours de cette période, la France a connu le meilleur taux de croissance des vingt dernières années…
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. … et que cette situation n’a guère été mise à profit pour réaliser les réformes qui étaient nécessaires !
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
À l’inverse, aujourd'hui, nous avons à affronter la pire crise mondiale pour ce qui concerne l’emploi.
La croissance, Sarkozy devait aller la chercher avec les dents. Il les a perdues ?
Je veux tout de même rappeler quelques réalités, monsieur Collombat.
Vous avez affirmé que la France était, de tous les pays de l’OCDE, celui où la situation de l’emploi était la plus dégradée. Observez donc ce qu’il en est en Espagne ou au Portugal !
Puisque vous voulez des chiffres, examinez donc l’évolution du taux de chômage moyen des pays de l’OCDE !
En France, le chômage a augmenté en un an de 20 %. C’est beaucoup trop, nous en sommes tous d’accord, mais, dans le même temps, il a crû aux États-Unis de plus de 100 %, …
… en Espagne de 150 %, au Royaume-Uni de 50 %.
Bien sûr, mais je réponds sur les points qu’a évoqués M. Collombat, ne serait-ce que par respect pour lui !
Ces chiffres signifient tout simplement que, dans la période récente, la France a été, avec l’Allemagne, le pays qui a le mieux résisté sur le front du chômage. §Cette réalité est peut-être déplaisante pour vous, mais c’est celle qui résulte de la politique de l’emploi.
Permettez-moi, maintenant, de poser quelques questions simples.
Le parti socialiste, qui, aujourd’hui, se préoccupe tant de l’emploi, a-t-il soutenu les mesures qui ont été mises sur la table au cours de la période récente ? Non !
Le contrat de transition professionnelle, destiné à aider les personnes qui ont perdu leur emploi, a-t-il été voté par le parti socialiste ? §
Les mesures destinées à favoriser la formation en alternance, notamment au bénéfice de l’emploi de nos jeunes, ont-elles été soutenues par le parti socialiste ?
Non ! sur les travées de l ’ UMP.
L’activité partielle, qui est destinée à prévenir les licenciements et à former plutôt que licencier, a-t-elle été défendue par le parti socialiste ? §
La réalité, monsieur le sénateur, c’est que, sur tous ces sujets, le parti socialiste s’est enfermé dans une politique d’opposition systématique, à la différence des partenaires sociaux qui, eux, ont fait preuve d’esprit de responsabilité au cours de cette période, pour gérer, ensemble, les nouveaux outils de la politique de l’emploi.
Parlez-nous plutôt des élections régionales, par exemple en Auvergne, où trois membres du Gouvernement ont été battus !
Monsieur le sénateur, si j’ai un conseil à donner à nos compatriotes qui veulent sortir de ces difficultés, c’est de ne surtout pas suivre les propositions qui sont formulées en matière d’emploi par le parti socialiste !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En effet, si nous devions appliquer la politique de matraquage fiscal qui est prônée par Martine Aubry, il y aurait fort peu de chances que notre pays parvienne à se redresser !
Applaudissementssur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
La Commission européenne a annoncé, le 4 mai dernier, la relance des négociations commerciales avec le MERCOSUR, qui étaient suspendues depuis des années.
Cette annonce survient au pire moment pour l’agriculture européenne, qui traverse une crise particulièrement grave. Une hausse massive des importations de viande, qui serait la conséquence inévitable d’un accord, serait destructrice pour elle.
En outre, du point de vue des intérêts européens dans les négociations du cycle de Doha, cette annonce est particulièrement malvenue.
Dans le cadre de ces négociations, la Commission européenne a déjà proposé, en juillet 2008, des concessions très importantes dans le domaine agricole, dont le MERCOSUR serait le principal bénéficiaire. Toutefois, ces concessions n’avaient de sens que dans la perspective de la conclusion du cycle de Doha par un accord à la fois équilibré et global. Et elles étaient, très clairement, la limite ultime de ce que l’Europe pouvait mettre sur la table.
Il faut savoir que, dans le domaine agricole, l’Union européenne enregistre déjà un déficit commercial de plus de 20 milliards d’euros dans ses relations avec le MERCOSUR.
Il faut savoir également que les producteurs du MERCOSUR n’ont pas à respecter les mêmes normes que les agriculteurs européens en matière de sécurité alimentaire, de bien-être animal et d’environnement, et qu’ils en tirent un avantage comparatif totalement injustifié.
M. Jean Bizet. Ma question, particulièrement cruciale après les réunions qui se sont tenues ces derniers jours sous présidence espagnole, est donc la suivante : est-il raisonnable de reprendre ces négociations ? Et si le Gouvernement, comme je l’espère, estime que tel n’est pas le cas, que compte-t-il faire pour que les intérêts agricoles de l’Europe ne soient pas sacrifiés, une fois de plus ?
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, que, en ce moment, nous retrouvons avec plaisir chaque jour au Sénat, pour débattre d’un dossier important !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Merci, monsieur le président !
Monsieur le sénateur, la position du gouvernement français, sous l’autorité de François Fillon, est claire : nous sommes opposés à la reprise des négociations commerciales entre l’Union européenne et le MERCOSUR.
M. Jean-Paul Virapoullé applaudit.
Nous y sommes opposés parce que les exportations de produits agricoles, notamment de viande, en provenance des pays du MERCOSUR et à destination de l’Union européenne ont doublé en l’espace de cinq ans.
Nous y sommes opposés parce que, au moment même où l’Union européenne acceptait des importations supplémentaires de biens agricoles en provenance du MERCOSUR, certains pays de cet ensemble augmentaient leurs droits de douane sur les produits alimentaires en provenance de l’Union européenne.
Enfin, nous y sommes opposés parce qu’il n’y a aucune raison pour que l’Union européenne signe des accords avec le MERCOSUR avant que les négociations commerciales au sein de l’OMC soient conclues !
C'est la raison pour laquelle, sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, nous avons défendu cette position, au Conseil européen comme au Conseil des ministres de l’agriculture.
Voilà encore trois semaines, seuls deux pays, dont la France, étaient sur cette ligne. Lors du Conseil des ministres de l’agriculture qui s’est tenu lundi dernier à Bruxelles, il y en avait dix. Désormais, parmi les pays membres de l’Union européenne, nous sommes quinze à nous opposer à la reprise des négociations avec le MERCOSUR !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Bruno Le Maire, ministre. J’ai entendu les responsables d’un certain nombre de pays européens se féliciter de ce que la reprise de ces négociations entre l’Union européenne et le MERCOSUR puisse, dans un futur proche, bénéficier aux pays de cette zone. J’aimerais que l’Union européenne, avant de se préoccuper des intérêts des pays du MERCOSUR, se soucie de ceux de ses agriculteurs et de ses citoyens !
Applaudissementssur les mêmes travées.
M. Bruno Le Maire, ministre. J’aimerais que la production agricole cesse d’être systématiquement la variable d’ajustement des négociations commerciales en Europe !
Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Lundi dernier, avant même l’ouverture du débat sur le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, le Président de la République a réuni les représentants des agriculteurs, du secteur des fruits et légumes, de l’industrie agro-alimentaire et de la grande distribution pour évoquer la modération des marges des distributeurs en période de crise.
Belle opération de communication, dirai-je, mais qui anticipait toutefois sur la décision parlementaire ! Devons-nous rappeler encore une fois que le Sénat n’est pas une simple chambre d’enregistrement ?
Demain, le Président de la République, toujours lui, se rendra dans le Lot-et-Garonne…
… pour expliquer sur le terrain les mesures annoncées et assurer leur « service après-vente », alors même que l’article n’a pas encore été entièrement déballé, …
… et cela, comme toujours, en amont et au détriment du travail parlementaire !
En effet, monsieur le ministre, votre participation à ce déplacement nous prive non seulement de votre présence, mais aussi d’une journée de travail et de débat sur la loi de modernisation de l’agriculture qui était pourtant programmée depuis longtemps.
Mais nous sommes habitués à ces pratiques, et leur visée électoraliste me semble beaucoup plus évidente et réelle que la portée des accords sur l’amélioration du revenu des agriculteurs.
En effet, il y a bien là un problème de fond : à quoi donc a servi la loi de modernisation de l’économie, sinon à conforter des pratiques qui sont dénoncées maintenant, comme par hasard, par tout le monde ?
Monsieur le ministre, accepterez-vous de remettre en question les éléments de cette loi encadrant les pratiques commerciales, comme vous le demandent des parlementaires de tous bords, et de conforter les moyens de contrôle, notamment ceux de la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes –, qui va perdre, d’ici à 2011, je le rappelle, 250 équivalents temps plein ?
En quoi un accord sur la modération, en cas de crise, des marges sur les fruits et légumes, prétendument imposé à la grande distribution, peut-il rassurer les consommateurs et les producteurs ? D’autant que vous vous fondez, au prix d’un calcul compliqué, sur la baisse constatée par rapport à la moyenne des trois dernières années, qui ont été, tout le monde le sait, particulièrement mauvaises dans le secteur des fruits et légumes !
Comme le texte de la loi à venir, celui de l’accord reste très vague : l’emploi de termes comme « éventuellement » ou « le cas échéant » et du conditionnel ne sont pas de nature à garantir une rémunération juste et décente du travail des agriculteurs…
La grande distribution, qui n’est pas la seule responsable des problèmes des agriculteurs, …
… cédera-t-elle à la menace d’une taxe supplémentaire, ou aura-t-elle le même comportement que les banques, dont les représentants, quelques mois seulement après s’être fait morigéner par le Président de la République, ont l’attitude que l’on sait ?
Si la situation de nos agriculteurs n’était pas aussi dramatique, il y aurait presque de quoi rire à la lecture des titres de nos quotidiens nationaux et régionaux !
J’y arrive, monsieur le président.
Je vous demande solennellement, monsieur le ministre, de nous indiquer en quoi exactement cet accord et la loi à venir permettront de faire évoluer réellement les revenus de nos agriculteurs et de rémunérer l’activité de ces derniers à sa juste valeur, alors qu’ils incarnent particulièrement, et depuis longtemps, la valeur travail.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
La parole est à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Madame la sénatrice, vous ne pouvez pas reprocher au Président de la République de se soucier des agriculteurs et de leurs revenus au moment où le secteur traverse l’une des crises les plus graves depuis une trentaine d’années.
Cette préoccupation me semble légitime et nécessaire.
Quoi qu'il en soit, je voudrais vous répondre dans le même esprit que celui qui préside aux travaux que nous menons ici depuis plusieurs jours pour améliorer le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, travaux dont je tiens à souligner une fois encore la qualité.
Lundi dernier, un accord de modération des marges dans le secteur des fruits et légumes par la grande distribution en période de crise a été signé entre les distributeurs et les producteurs. La période de crise est définie de manière tout à fait officielle, à partir des données publiées par l’INSEE sur les trois dernières années, qui servent alors de référence. Pour certains produits, la crise est déclarée lorsque le prix baisse de 10 % par rapport à ces trois années de référence – c’est le cas de la pêche ou de la nectarine –, pour d’autres, qui sont moins sensibles, elle le sera lorsque la baisse atteint 20 % ou 25 %. Ces données s’imposent à tout gouvernement, qu’il soit de gauche ou de droite.
Quand la période de crise est reconnue, la réduction des marges s’applique de manière automatique à l’ensemble des distributeurs ayant signé cet accord. Pour ceux qui ne l’auraient pas fait ou qui, l’ayant fait, décideraient de ne plus le respecter, le Gouvernement a prévu – on n’est jamais trop prudent ! – dans le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche l’application d’une taxe ; nous aurons donc l’occasion d’en débattre.
Pour le Gouvernement, cet accord de réduction des marges s’inscrit dans une démarche beaucoup plus large, qui vise à améliorer les relations commerciales au sein de la filière alimentaire en France. Depuis plusieurs années, en effet, les relations entre producteurs, industriels et distributeurs se caractérisent par la confrontation systématique, la confusion, voire l’opacité. Le Gouvernement entend donc mieux les organiser et les rendre plus transparentes, de façon à assurer aux producteurs de meilleurs revenus.
À cela s’ajoute la suppression des remises, rabais, ristournes ; le groupe socialiste a d’ailleurs amélioré le texte initial du projet de loi de modernisation sur ce point. Grâce à l’UMP, qui a proposé le renforcement du dispositif, est également prévu un encadrement des prix après-vente pour que plus aucune marchandise agricole en France ne soit vendue sans un contrat écrit.
Enfin, le Gouvernement a développé les missions de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, qui s’intéressera désormais à tous les produits agricoles en France, ainsi qu’aux coûts de production, afin que ceux-ci puissent enfin être comparés au prix des produits.
Tous ces dispositifs permettront une augmentation sensible du revenu des producteurs en France.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez toujours montré votre attachement à la filière de l’apprentissage.
Tout récemment encore, les ateliers de l’apprentissage et de l’alternance, installés au début de l’année à la suite du rapport d’Henri Proglio, en témoignent.
Nous ne pouvons que saluer votre volonté de faire de l’apprentissage la filière de l’excellence et de la réussite, alors que la formation en alternance est encore trop considérée comme celle où conduisent les échecs successifs. Elle est trop souvent perçue comme un stigmate de l’échec.
À mon sens, trois causes principales expliquent cette situation.
Tout d’abord, il s’agit d’un problème culturel propre à notre pays, celui de la hiérarchisation des intelligences et, par corollaire, de la hiérarchisation des voies de formation.
Ensuite, il faut noter le désamour pour l’entreprise et l’entrepreneur, notamment au sein du système éducatif. Or cette attitude est aux antipodes de celle de nos voisins allemands, par exemple !
Marques d’approbation sur les travées de l ’ UMP.
Enfin, nous devons faire face au sentiment, largement répandu au sein de l’éducation nationale, qu’elle doit avoir le monopole du savoir et de sa transmission.
Certes, des changements sont apparus, notamment grâce aux lois de décentralisation, à la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école de 2005, dite « loi Fillon », à la loi sur la réforme de la formation professionnelle de 2009, à laquelle vous avez attaché votre nom, monsieur le secrétaire d'État, et qui fait désormais entrer la formation professionnelle dans le cadre de compétences partagées.
L’apprentissage résiste à la crise. Il n’est qu’à voir l’augmentation du nombre de contrats en 2009, de l’ordre de 5 %. Qu’il me soit permis de saluer le sens des responsabilités dont font preuve, dans le contexte difficile que nous connaissons, un certain nombre d’acteurs socio-économiques, tout particulièrement ceux qui dirigent les petites et très petites entreprises. Ils ont compris qu’il s’agissait d’un véritable investissement et que cette voie était celle qui apportait dans le même temps une réponse aux projets des jeunes, aux besoins de l’économie et à la diversité de nos territoires.
Avec les ateliers de l’apprentissage et de l’alternance, vous avez manifesté votre intention d’ouvrir des pistes nouvelles d’évolution. Il faut maintenant concrétiser, serais-je tenté de dire. Cela suppose quelques réformes, notamment celle de la collecte et de la répartition de la taxe d’apprentissage, afin que les sommes en question aillent de préférence à ceux qui font de l’apprentissage.
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous préciser les suites que vous comptez réserver aux ateliers de l’apprentissage et de l’alternance et la démarche que vous entendez adopter afin que cette voie soit véritablement celle de la réussite ? Car, pour moi, un apprenti en marche fait plus avancer la France qu’un intellectuel ou un pédagogue assis !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le sénateur, parmi les parlementaires, vous êtes sûrement l’un des plus fins connaisseurs des questions de formation professionnelle et l’un des meilleurs défenseurs de l’alternance et de l’apprentissage.
Votre question le prouve encore une fois.
Ce n’est d’ailleurs pas une surprise puisque le Sénat est, des deux assemblées, celle qui s’est la première attachée à défendre l’apprentissage, et je sais que le président Gérard Larcher entend faire en sorte que cet engagement se poursuive. La Haute Assemblée accueille d’ailleurs chaque année – vous y participez, monsieur Carle – les Rencontres de l’apprentissage, qui contribuent à valoriser l’image des apprentis.
Quels sont les avantages d’une formation par l’apprentissage ?
D’abord, dans sept à huit cas sur dix, l’apprenti trouve un emploi dès la fin de sa formation. En d’autres termes, ses chances de trouver un emploi en CDI sont de 20 % à 40 % plus grandes que s’il avait suivi la même formation sans alternance.
Ensuite, l’apprentissage est une formation concrète, qui permet à nos jeunes d’être directement dans la vie pratique, d’entrer dans l’univers des entreprises et de faire leurs preuves, ce à quoi ils aspirent de plus en plus fortement.
Enfin, et c’est loin d’être négligeable, parce qu’il est rémunéré, l’apprentissage permet à des familles modestes de financer les études de leurs enfants.
Eh oui, ceux qui n’ont pas de moyens ne peuvent prétendre faire des études !
En outre, l’apprentissage est un moteur très puissant de promotion sociale. Il permet aujourd’hui d’atteindre des formations de niveau master.
C’est pourquoi le Président de la République et le Premier ministre ont souhaité que nous puissions franchir une étape supplémentaire et atteindre, à l’instar de l’Allemagne, l’objectif d’un jeune sur cinq formé par le biais de l’alternance.
Que faut-il changer pour y parvenir ?
Tout d’abord, il faut agir sur l’orientation. Les jeunes ne sont pas encouragés par les conseillers d’orientation-psychologues à faire le choix de l’alternance et de l’apprentissage.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Cela n’est pas acceptable.
Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.
Ensuite, il convient de simplifier les procédures à la fois pour les entreprises et pour les jeunes. Ainsi, ce matin, le Gouvernement a lancé un site Internet dédié à l’alternance, qui vise à rassembler toutes les offres d’apprentissage.
Par ailleurs, il s’agit de valoriser le statut des apprentis. Un apprenti n’est pas un étudiant de « seconde zone ». Il doit bénéficier des mêmes avantages que les autres étudiants, des mêmes réductions, des mêmes possibilités en matière de déplacements ou d’accès à certains logements.
Enfin, il est indispensable de promouvoir l’alternance dans de nouveaux domaines, notamment du secteur tertiaire, comme les services ou le tourisme.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l’alternance est une voie d’excellence et nous comptons sur vous pour nous aider à la défendre !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
Monsieur le secrétaire d'État, lors d’un récent colloque à Sciences Po, ...
M. Jean Louis Masson. ... deux anciens Premiers ministres, Édouard Balladur et Lionel Jospin, se sont prononcés contre le cumul des mandats. Ils ont tout à fait raison, car cette particularité bien française est la principale cause de l’absentéisme parlementaire !
Rires et exclamations sur les travées de l ’ UMP. – Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste.
Les fonctions de maire de grande ville, de président de conseil régional, de président de conseil général ou de président de communauté d’agglomération impliquent une activité à plein-temps. L’exercice d’un mandat parlementaire est également une activité à plein-temps.
Exclamations ironiques sur plusieurs travées de l ’ UMP.
M. Jean Louis Masson. Quand on occupe des fonctions gouvernementales, on doit être le ministre de toute la France et pas le porte-parole des intérêts particuliers de telle ville ou de tel département.
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
Tous les partis se déclarent hostiles aux cumuls abusifs, mais personne ne fait rien ! Les déclarations de bonnes intentions se heurtent en effet à l’obstruction de ceux qui profitent du système. Édouard Balladur a d’ailleurs très bien résumé la situation en indiquant dans Le Figaro du 7 mai 2010 : « Il n’y a pas d’enthousiasme dans la classe politique, ni à droite ni à gauche, pour prohiber le cumul…
… Si l’on veut progresser, il ne faut pas se référer à la bonne volonté, il faut que la loi intervienne. »
Sur cette question, je partage tout à fait le point de vue d’Édouard Balladur. (Ah ! sur les travées de l ’ UMP.)
Ma question est donc très simple. Monsieur le secrétaire d'État, oui ou non, le Président de la République et le Gouvernement ont-ils l’intention de limiter les cumuls abusifs de mandats à la fois pour les parlementaires et pour les ministres ou bien faudra-t-il attendre un changement de majorité ?
Oui ! sur les travées socialistes.
La parole est à M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
Monsieur le sénateur, vous ne vous contentez pas d’assister aux colloques organisés par Sciences Po : pour avoir participé assidûment au débat sur la réforme des collectivités territoriales, vous n’ignorez pas que, parmi ses dispositions essentielles, figure la création d’un conseiller territorial appelé à siéger à la fois au conseil général et au conseil régional.
Les conseillers territoriaux seront titulaires d’un mandat unique, même si l’exercice de celui-ci les conduit à siéger dans deux assemblées, donc à exercer plus de responsabilités.
C’est pourquoi le projet de loi prévoit qu’ils pourront se faire remplacer par leur suppléant, qui sera, je le rappelle, de sexe opposé, pour siéger dans les organismes extérieurs.
Ce nouveau mandat s’inscrira par ailleurs dans le cadre de la législation actuelle. Le Gouvernement n’a pas, en effet, proposé à ce jour de modification de la législation sur le cumul des mandats. Vous le savez, les textes qui régissent ce point ont connu des évolutions successives depuis 1985, ...
... allant dans le sens d’une limitation plus forte et dont la dernière date de la loi du 11 avril 2003. Je souligne au passage que toute modification majeure ne doit pas dénaturer le rôle de la Haute Assemblée, dont la fonction est la représentation de nos collectivités territoriales.
Le Gouvernement n’est cependant pas hostile à ce qu’une réflexion soit ouverte sur la question du cumul des fonctions de président des plus grosses intercommunalités avec d’autres mandats électifs.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Cette réflexion pourrait s’inscrire notamment dans le cadre de l’examen à venir, par votre assemblée, du projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale.
Applaudissementssur les travées de l’UMP.
Nous en avons fini avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, je vous confirme que, le jeudi 17 juin, à la suite des questions d’actualité au Gouvernement, je prononcerai une brève allocution pour commémorer l’appel du 18 juin du général de Gaulle.
Très bien ! sur les travées de l ’ UMP.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Guy Fischer.
J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au Grand Paris est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
(Texte de la commission)
I. – Le livre II du code rural est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Alimentation, santé publique vétérinaire et protection des végétaux » ;
2° L’intitulé du titre III est ainsi rédigé : « Qualité nutritionnelle et sécurité sanitaire des aliments » ;
3° Avant le chapitre 1er du titre III, il est ajouté un chapitre préliminaire ainsi rédigé :
« Chapitre préliminaire
« La politique de l’alimentation
« Art. L. 230-1. – La politique de l’alimentation vise à assurer à la population l’accès à une alimentation sûre, diversifiée, en quantité suffisante, de bonne qualité gustative et nutritionnelle, produite dans des conditions durables. Elle vise ainsi à offrir à chacun les conditions du choix de son alimentation en fonction de ses souhaits, de ses contraintes et de ses besoins nutritionnels, pour son bien-être et sa santé.
« La politique de l’alimentation est définie par le Gouvernement dans un programme national pour l’alimentation après avis du conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire. Le Conseil national de l’alimentation est associé à l’élaboration de ce programme et contribue au suivi de sa mise en œuvre. Il est rendu compte tous les trois ans au Parlement de l’action du Gouvernement dans ce domaine.
« Le programme national pour l’alimentation prévoit les actions à mettre en œuvre dans les domaines suivants :
« - la sécurité alimentaire, l’accès pour tous, en particulier les populations les plus démunies, à une alimentation en quantité et qualité adaptées ;
« - la sécurité sanitaire des produits agricoles et des aliments ;
« - la santé animale et la santé des végétaux susceptibles d’être consommés par l’homme ou l’animal ;
« - l’éducation et l’information notamment en matière d’équilibre et de diversité alimentaires, de règles d’hygiène, de connaissance des produits, de leur saisonnalité et de l’origine des matières premières agricoles ainsi que des modes de production, de l’impact des activités agricoles sur l’environnement ;
« - la loyauté des allégations commerciales et les règles d’information du consommateur ;
« - la qualité gustative et nutritionnelle des produits agricoles et de l’offre alimentaire ;
« - les modes de production et de distribution des produits agricoles et alimentaires respectueux de l’environnement et limitant le gaspillage ;
« - le respect des terroirs par le développement de filières courtes ;
« - le patrimoine alimentaire et culinaire français.
« Art. L. 230-2. – L’autorité administrative compétente de l’État peut, afin de disposer des éléments nécessaires à l’élaboration et à la mise en œuvre de sa politique de l’alimentation, imposer aux producteurs, transformateurs et distributeurs de produits alimentaires, quelle que soit leur forme juridique, la transmission de données de nature technique, économique ou socio-économique relatives à la production, à la transformation, à la commercialisation et à la consommation de ces produits.
« Un décret en Conseil d’État précise la nature de ces données et les conditions de leur transmission.
« Art. L. 230-3. – Les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés sont tenus de respecter des règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu’ils proposent déterminées par décret.
« Les agents mentionnés aux 1° à 7° et au 9° du I de l’article L. 231-2 et, dans les conditions prévues par l’article L. 1435-7 du code de la santé publique, les médecins inspecteurs de santé publique, les ingénieurs du génie sanitaire, les ingénieurs d’études sanitaires et les techniciens sanitaires, les inspecteurs et les contrôleurs des agences régionales de santé veillent au respect des obligations fixées en application du présent article. Ils disposent à cet effet des pouvoirs d’enquête prévus au premier alinéa de l’article L. 218-1 du code de la consommation.
« Lorsqu’un agent mentionné à l’alinéa précédent constate dans un service de restauration scolaire ou universitaire la méconnaissance des règles relatives à la nutrition mentionnées au premier alinéa, l’autorité administrative compétente de l’État met en demeure le gestionnaire du service de restauration scolaire ou universitaire concerné de respecter ces dispositions dans un délai déterminé. Si, à l’expiration de ce délai, l’intéressé n’a pas déféré à la mise en demeure, cette autorité peut :
« 1° Ordonner au gestionnaire la réalisation d’actions de formation du personnel du service concerné ;
« 2° Imposer l’affichage dans l’établissement scolaire ou universitaire des résultats des contrôles diligentés par l’État.
« Lorsque le service relève de la compétence d’une collectivité territoriale, d’un établissement public, d’une association gestionnaire ou d’une autre personne responsable d’un établissement d’enseignement privé, l’autorité compétente de l’État informe ces derniers des résultats des contrôles, de la mise en demeure et, le cas échéant, des mesures qu’il a ordonnées.
« Un décret en Conseil d’État précise la procédure selon laquelle sont prises les décisions prévues au présent article.
« Art. L. 230-4. – L’aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux plus démunis. Cette aide est apportée tant par l’Union européenne que par des personnes publiques et privées.
« Seules des personnes morales de droit public ou des personnes morales de droit privé habilitées par l’autorité administrative peuvent recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire.
« Des décrets fixent les modalités d’application du présent article, notamment les conditions auxquelles doivent satisfaire les personnes morales de droit privé ; ces conditions doivent permettre de garantir la fourniture de l’aide alimentaire sur une partie suffisante du territoire et sa distribution auprès de tous les bénéficiaires potentiels, d’assurer la traçabilité physique et comptable des denrées et de respecter de bonnes pratiques d’hygiène relatives au transport, au stockage et à la mise à disposition des denrées. »
II. -Au chapitre Ier du titre IV du livre V du code de la consommation, il est inséré un article L. 541-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 541-1. – La politique de l’alimentation est définie à l’article L. 230-1 du code rural. »
III. – Au début du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique, il est ajouté un article L. 3231-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3231-1-1. – La politique de l’alimentation est définie à l’article L. 230-1 du code rural. »
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 522 rectifié, présenté par MM. Fortassin et Collin, Mme Escoffier, MM. Tropeano et de Montesquiou, Mme Laborde et MM. Chevènement, Mézard, Vall, Milhau, Plancade, Baylet, Barbier, Alfonsi, Marsin et Detcheverry, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Rédiger ainsi cet alinéa :
« - le respect des terroirs et le lien entre le consommateur et le producteur par le développement de filières courtes et l'amélioration de la proximité géographique entre producteurs et transformateurs ;
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Les consommateurs, mais aussi les restaurateurs, artisans et commerçants de bouche, sont les véritables prescripteurs de l’agriculture, car ce sont eux qui achètent et valorisent ses productions. Un lien étroit doit, par conséquent, les unir aux producteurs pour que les produits agricoles correspondent aux attentes de ces clients.
Or on constate aujourd’hui une évidente distension de ce lien. Elle découle notamment de l’urbanisation et des fortes évolutions qu’ont connues, que connaissent encore les exploitations agricoles. II convient donc de veiller à préserver et à renforcer ce lien. À cette fin, le développement des circuits courts et la proximité de l’ensemble des acteurs d’un processus d’élaboration sur un même territoire apparaissent comme des outils efficaces.
Le consommateur gagnera en confiance envers les produits qu’il achète s’il a plus facilement connaissance de leur origine et de leurs modes de transformation. L’objet de cet amendement est donc d’inscrire plus précisément cet enjeu dans la politique de l’alimentation.
La proximité entre producteurs et transformateurs suppose notamment le maintien d’équipements indispensables comme les abattoirs.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 204 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Bernard-Reymond, B. Fournier, Juilhard, Amoudry, Bailly, Alduy, Hérisson et Gouteyron
L'amendement n° 328 est présenté par Mme David, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Tous deux sont ainsi libellés :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
et l’amélioration de la proximité géographique entre producteurs et transformateurs
L’amendement n° 204 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 328.
Cet amendement vise notamment les territoires de montagne, et je me fais ici le porte-parole de Mme David, en particulier.
En vue de valoriser les circuits courts et les terroirs, cet amendement tend à compléter la politique nationale de l’alimentation par un champ d’action supplémentaire, de manière à renforcer le lien entre les produits agroalimentaires et leur territoire.
On peut se féliciter de l’adoption, en commission, d’un amendement visant à intégrer le respect des territoires dans l’action du PNA – programme national pour l’alimentation – par le développement des filières courtes. Toutefois, la valorisation des circuits courts passe aussi par l’amélioration de la proximité géographique entre producteurs et transformateurs.
C’est particulièrement important dans les territoires de montagne, où, au-delà de la reconnaissance de la spécificité géographique, c’est toute une politique de produits qu’il s’agit de développer. Cette politique doit passer, en partie, par la reconnaissance de nouveaux labels, exigeant que le produit de montagne présente une typicité qui le distingue de biens analogues produits dans d’autres parties du territoire, mais également par l’aide à la commercialisation en circuits courts.
Il ne suffit pas de reconnaître la spécificité de l’agriculture de montagne ; encore faut-il en tirer les conséquences pratiques pour organiser réellement l’aide propre à ces filières.
Par ailleurs, cet amendement permettra sans nul doute d’offrir une meilleure visibilité au consommateur, qui aura connaissance de l’origine et des modes de transformation des produits qu’il achète.
L'amendement n° 227, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
notamment par des actions en faveur du maintien des abattoirs à proximité des élevages
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, dans sa version déposée sur le bureau de notre assemblée, ne faisait pas mention des circuits courts. Pourtant, la réflexion a largement fait son chemin à travers les exigences du Grenelle et le rapport à ce sujet dont vous avez pris l’initiative, monsieur le ministre.
Nous sommes donc satisfaits que le rapporteur ait jugé utile de faire entrer les circuits courts dans l’article 1er du projet de loi. Cependant, cette modification a été faite a minima, alors que des propositions concrètes existent. Dans ce contexte de volonté commune de développement des circuits courts – commune mais plus ou moins ambitieuse ! – nous tenons à attirer l’attention sur la question des abattoirs.
En effet, les abattoirs constituent un élément essentiel de la filière viande. Or ils ferment les uns après les autres, si bien que dans les zones proches de notre frontière avec la Belgique, par exemple, les bêtes sont abattues dans ce pays ! Hier, en commission, il a été question de l’Allemagne, où il n’y a que trois abattoirs : ce n’est certainement pas le modèle à imiter !
Cette situation s’explique de plusieurs façons. On sait que les abattoirs doivent respecter – et c’est normal – les exigences sanitaires et environnementales en vigueur, en particulier tous les règlements du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, qui posent toutes les règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale, à tous les échelons de la filière.
Au niveau régional, les investissements nécessaires pour la mise aux normes sanitaires peuvent être financés dans le cadre du fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER. Toutefois, cela n’est souvent pas suffisant et, si des investisseurs publics interviennent, les conditions d’éligibilité sont largement réduites.
Les contraintes sanitaires et celles de la concurrence libre et non faussée sont là, mais elles ne sauraient justifier la fermeture massive des sites. Nous demandons que l’objectif de maintien des abattoirs soit inscrit dans la loi et que le Gouvernement travaille à trouver des solutions qui permettent à ces structures d’exister.
Par là même, on satisferait à des exigences environnementales mais également sociales, tout en encourageant le maintien de la diversité des productions sur le territoire, diversité qui risque de disparaître du fait de l’éloignement des structures d’abattage.
L'amendement n° 441, présenté par M. Lecerf et Mme Descamps, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
portées à la connaissance de l'ensemble des personnes morales de droit public dotées de services de restauration
Cet amendement n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?
En ce qui concerne l’amendement n° 522, je souhaiterais rappeler que les filières courtes ont précisément pour objet de rapprocher les producteurs et les consommateurs. Par essence, elles ne sont concevables que pour les produits peu ou pas transformés.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 328, qui en est proche.
L’amendement n° 227 vise spécifiquement les abattoirs. Bien sûr, nous souhaitons les uns et les autres avoir des abattoirs à proximité. Cependant, il faut, d’une part, que ces abattoirs correspondent aux normes européennes ou qu’ils soient mis en conformité, d’autre part, qu’ils aient une dimension suffisante pour que la taxe d’abattage soit aussi équilibrée que possible. Or, ne l’oublions pas, les abattoirs se font tout de même concurrence.
Cela étant, je pense que la question du maintien des abattoirs à proximité des élevages n’a rien à voir avec ce texte. Mon avis est donc défavorable.
Ce sont trois avis défavorables également, monsieur le président.
En ce qui concerne les circuits courts, il nous semble que la rédaction du texte de la commission, qui mentionne leur développement, est suffisamment explicite. Par ailleurs, d’autres dispositions sont envisagées dans la suite du texte pour améliorer les circuits courts.
Au sujet des abattoirs, je souhaiterais tout d’abord apporter une précision à M. Le Cam : c’est effectivement moi qui ai cité l’exemple des trois abattoirs allemands – Tönnies, Vion et Westfleisch – qui, à eux seuls, concentrent l’abattage de 54 % des porcs allemands. Je l’ai cité pour expliquer les écarts de compétitivité, mais je ne pense pas qu’il s’agisse d’un modèle pour la France.
Cela dit, l’installation des abattoirs ne peut pas se faire sous la forme d’un plan national, ce à quoi votre amendement conduirait, car ce serait contraire à la directive Services. Rien n’interdit de développer des abattoirs ici ou là, mais il ne peut y avoir de plan national.
Je profite de ce que j’ai la parole, monsieur le président, pour vous prier de bien vouloir m’excuser, car je devrai m’absenter à partir de 16 heures 40 pour assister à l’entretien que le Président de la République aura avec le commissaire européen à l’agriculture, M. Dacian Cioloş. Pendant cette courte période, je serai avantageusement remplacé par M. Henri de Raincourt.
Sourires
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 522 rectifié.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je sais bien que ce texte ne traite pas des AOC – appellations d’origine contrôlée – et de ses enjeux, mais je veux signaler que, lors des journées de l’AOC qui se sont déroulées voilà quelques semaines à Cambremer, il a été question d’une possible délocalisation de l’agriculture et d’un certain nombre de productions. À cette occasion, l’importance cruciale du lien entre la consommation et les territoires a été soulignée, les AOC étant évidemment le moyen de fixer les productions.
Je dois le dire, dans un premier temps, cette notion de « délocalisation de l’agriculture » m’a paru un peu incongrue. Cependant, après avoir entendu les explications des experts qui étaient présents, j’ai mieux compris de quoi il retournait.
Je crois que l’amendement qu’a présenté Mme Laborde a au moins le mérite de donner de l’importance à ce lien entre les productions et les terroirs. À mon sens, dans le fatras de cet article 1er, cela ne changerait pas grand-chose d’ajouter ce lien entre les produits des terroirs et les consommateurs locaux. En tout cas, je voterai cet amendement s’il est maintenu.
Je voudrais dire à mon tour combien cet amendement me paraît intéressant dans la mesure où il maintient en effet un lien entre le respect du terroir et le consommateur local.
On nous dit que le texte est déjà assez explicite. Cependant, il n’est pas inutile de souligner ici l’importance de ce lien. Élu de la Dordogne, je suis bien placé pour savoir que l’on peut mettre en avant le terroir, notamment pour certains produits transformés, sans que le lien de proximité entre le produit et le territoire existe réellement. Il y a parfois une ambiguïté qui peut aller jusqu’à la tromperie.
Voilà pourquoi je considère que les précisions apportées par cet amendement me semblent mériter de figurer dans la loi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 205 rectifié, présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, B. Fournier, Bernard-Reymond, Juilhard, Amoudry, Bailly, Alduy et Hérisson, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - l’adaptation des normes et réglementations applicables aux spécificités marquées de certains territoires, tels que ceux de montagne en application de l’article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;
La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.
Le présent amendement vise à compléter la politique nationale de l’alimentation pour que soient systématiquement prises en compte les spécificités territoriales, notamment celles des territoires de montagne.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 329 est présenté par Mme David, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 574 rectifié est présenté par MM. Fortassin, Tropeano, Alfonsi et Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Marsin, de Montesquiou, Plancade et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'alinéa 17
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - l'adaptation en tant que de besoin des normes et réglementations applicables aux spécificités marquées de certains territoires, tels que ceux de montagne en application de l'article 8 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ; »
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 329.
Il s’agit, par cet amendement, d’attribuer au programme national pour l’alimentation une action spécifique d’adaptation des normes à certains territoires, notamment ceux de montagne, que je défends au nom de Mme David, afin de tenir compte de leurs spécificités, conformément à l’article 8 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
En effet, la montagne est un ensemble de territoires qui, du fait de leurs caractéristiques géographiques et climatiques propres, appellent des mesures spécifiques.
Ainsi, en raison des surcoûts de production de l’agriculture de montagne, liés à des difficultés de production exacerbées par l’environnement montagnard – les équipements spécialisés utilisés sont onéreux –, une application uniforme et stricto sensu des normes compromettrait la viabilité économique des exploitations agricoles de ces territoires. Il nous semble donc important que le PNA adapte les mesures normatives aux spécificités territoriales de la montagne.
Bien que, comme l’a indiqué M. le rapporteur, le PNA soit davantage un outil d’animation de la politique de l’alimentation qu’un instrument réglementaire, il nous semble qu’il peut toutefois contribuer à la reconnaissance de la spécificité de la montagne en impulsant une politique de l’alimentation qui distingue les produits agricoles en fonction de leur lieu de production.
En évitant une application homogène des normes, on compenserait le « handicap » montagne et on valoriserait les produits issus de ces territoires.
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement. Je ne sais si une telle mesure s’appliquerait aux montagnes bretonnes, qui commencent à être un peu rabotées aujourd’hui !
Sourires
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 574 rectifié.
Cet amendement étant identique à celui qui vient d’être excellemment présenté, je considère qu’il est défendu.
La prise en compte des spécificités des territoires de montagne est nécessaire.
Cependant, je ne suis pas certain que l’adaptation des normes et réglementations devant s’appliquer en montagne puisse trouver sa place dans le programme national pour l’alimentation. Il me semble que la mise en place de dispositifs particuliers pour la montagne relève de textes spécifiques.
C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable sur l’amendement n° 205 rectifié et sur les amendements identiques n° 329 et 574 rectifié.
Néanmoins, en guise de compensation, je propose aux auteurs des amendements de les retirer !
Sourires
Monsieur Bernard-Reymond, l’amendement n° 205 rectifié est-il maintenu ?
Je suis compréhensif, monsieur le président ! Je m’en remets à la sagesse du rapporteur et je retire l’amendement n° 205 rectifié.
L’amendement n° 205 rectifié est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques n° 329 et 574 rectifié ?
Il convient bien entendu de tenir compte des spécificités de la montagne.
C’est pourquoi nous avons maintenu l’indemnité compensatoire de handicap naturel.
Par ailleurs, il existe une abondante réglementation européenne sur ces questions, qui concerne aussi bien le développement des territoires que les spécifications alimentaires. Si nous ajoutons dans la loi de nouvelles obligations sur le sujet, nous enfreindrons la législation communautaire.
C’est la raison pour laquelle, bien que partageant le souci qui les inspire, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques n° 329 et 574 rectifié.
Les explications qui ont été données par M. Le Cam se suffisent à elles-mêmes : il convient que nous prenions en compte mieux que cela n’a été fait jusqu’à présent les spécificités de la montagne.
Les conditions de production sont infiniment plus difficiles et plus rudes dans ces zones qu’ailleurs, et je pense non pas aux monts d’Arrée, mais aux régions de moyenne montagne, où j’habite, ainsi qu’aux Pyrénées, aux Alpes, aux Vosges.
Nous savons que, pour produire dans ces conditions, il faut utiliser des méthodes spécifiques en vue de tirer profit de produits différents, qui sont de très bonne qualité.
Il convient donc de donner, au travers de ce texte, la possibilité de labelliser en tant que « produits de montagne » les productions initiales ou obtenues dans le cadre de la pluriactivité, qui permettent de faire vivre des exploitations dans ces zones où l’équilibre agro-sylvo-pastoral est difficile à maintenir.
C’est pourquoi je regrette que la proposition de maintien local des abattoirs ait été rejetée sans plus de réflexion tout à l'heure.
Par ailleurs, le fait de ne pouvoir transformer ou valoriser sur place les produits de qualité constitue une grande erreur à mes yeux. En effet, une telle organisation de la production empêche de retenir de la valeur ajoutée sur les territoires de montagne. En outre, elle détériore le bilan carbone, les produits étant transformés à des centaines de kilomètres.
Les produits perdent de ce fait leur étiquette – chacun sait que les étiquetages sont encore très mal assurés –, ce qui fait que leur qualité ne sera pas reconnue.
Nous devons donc avoir ce réflexe de reconnaissance de la spécificité des territoires de montagne, reconnaissance qui n’est d’ailleurs pas indue, puisque loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne affirme que cette spécificité doit être prise en compte dans la législation.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 94, présenté par MM. S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Lise et Tuheiava, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni et Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Fauconnier, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« - la valorisation locale du patrimoine alimentaire et culinaire des différentes régions françaises.
La parole est à M. Jacques Gillot.
Monsieur le ministre, vous avez formulé le souhait d’une alimentation qui ne soit pas uniformisée ; cet amendement va dans ce sens.
Les traditions culinaires françaises sont bien différentes en fonction des régions. Nous pensons qu’il faut valoriser ces différences.
Nous proposons donc par cet amendement que les actions du programme national pour l’alimentation favorisent davantage la valorisation locale du patrimoine alimentaire et culinaire de chaque région française.
Cette diversité locale doit être non seulement préservée, mais aussi véritablement encouragée, et ce sous différentes formes ; il peut s’agir, par exemple, d’actions de communication, de formation, ou encore de la promotion des circuits courts de distribution.
Cette valorisation locale est très importante pour les régions d’outre-mer et, plus largement, pour toutes les productions régionales.
Cet amendement vise à modifier la rédaction qui avait été adoptée par la commission à l’alinéa 18 de l’article 1er.
Cet alinéa prévoit que, dans le cadre du programme national pour l’alimentation, soient menées des actions en faveur du patrimoine alimentaire et culinaire français. Cette définition paraît suffisamment étendue – elle avait même fait l’objet d’un large consensus en réunion de commission – pour ne pas être remise en cause.
Il me semble que la valorisation des productions agricoles et de la cuisine ultramarines pourra tout à fait intervenir dans le cadre de la rédaction actuelle. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Permettez-moi, monsieur le président, de saluer Mme Catherine Dumas, ici présente, qui a été chargée d’une mission sur la gastronomie française. Je tiens à la remercier du travail qu’elle accomplit et à l’assurer de mon amitié, ainsi que de tout notre soutien pour la gastronomie française.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
À l’instar de M. le rapporteur, le Gouvernement considère que cet amendement est satisfait par la rédaction adoptée en commission.
Par ailleurs, le patrimoine français s’appuie sur la richesse et la diversité des patrimoines régionaux, qu’il faut valoriser non seulement sur le plan local, mais aussi, bien entendu, aux échelons national et international. La rédaction proposée par l’amendement réduirait, en fait, la portée du projet du Gouvernement.
Telle est la raison pour laquelle ce dernier émet un avis défavorable.
Nous comprenons l’argument du Gouvernement et de la commission, mais, pour notre part, nous analysons la rédaction proposée par l’amendement dans un sens opposé.
Si tous les territoires, y compris par exemple la Guadeloupe ou la Martinique, font partie de la République française – nous sommes tous d’accord sur ce point –, il faut néanmoins reconnaître la spécificité de ces régions.
Le Président de la République s’est d’ailleurs engagé voilà quelques mois à élaborer un plan spécifique pour l’outre-mer.
L’ajout dans le texte des mots « des différentes régions françaises » ne constitue en aucun cas un handicap ou un bémol opposé au patrimoine français ; il représente au contraire un forte, un allegro, puisqu’il permet d’évoquer toutes les régions françaises. La modification proposée par l’amendement n’est donc pas uniquement sémantique !
Monsieur le rapporteur, la commission a adopté unanimement l’alinéa 18, auquel j’adhère totalement. Pour autant, reconnaissons-le, l’expertise de nos collègues d’outre-mer sur ces régions est bien meilleure que la nôtre.
L’amendement vise donc à renforcer l’idée de cette diversité et à parler de toutes les régions françaises, y compris de celles d’outre-mer.
Je tiens d’abord à vous remercier, monsieur le rapporteur, des propos que vous avez tenus.
Le dossier de candidature de la France pour l’inscription de sa gastronomie par l’UNESCO au patrimoine culturel de l’humanité représente une formidable opportunité pour notre pays de promouvoir son patrimoine culinaire et gastronomique. La réponse devrait intervenir en septembre 2010.
S’agissant de l’amendement, tout en souscrivant au souci de ses auteurs et aux arguments développés par M. Guillaume, je comprends l’analyse de la commission et je me rangerai à son avis.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 30 rectifié bis, présenté par MM. Revet et Etienne, Mme Henneron et MM. Le Grand, Gouteyron, Vasselle, Beaumont, Pierre, Doublet, Laurent, Trillard, Bécot et Merceron, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout produit commercialisé sur le territoire national doit porter, bien lisible pour le consommateur, l’indication du pays d’où vient le produit proposé à la vente s’il est vendu en l’état, ou du pays d’origine des matières premières ayant été utilisées pour sa fabrication s’il s’agit d’un produit ayant fait l’objet d’une transformation industrielle ainsi que l’indication du pays où il a été fabriqué.
La parole est à M. Charles Revet.
Monsieur le ministre, chacun le sait, du fait de la mondialisation, de nombreux produits consommés sur notre territoire sont importés.
Nous avons déjà longuement parlé de l’alimentation et de l’information des consommateurs. C’est bien normal, car voilà des thèmes qui sont au cœur de l’article 1er et, tout le monde l’a reconnu, d’une importance essentielle.
En effet, si les produits sont toujours fabriqués dans notre pays avec beaucoup de rigueur, c’est peut-être un peu moins vrai à l’étranger.
Il faut donc permettre au consommateur de s’y retrouver et d’acheter en toute connaissance de cause. À cette fin, il convient d’imposer un étiquetage très précis, sur lequel seraient indiquées l’origine du produit et la manière dont il a été fabriqué.
C’est dans cet esprit que j’ai cosigné cet amendement avec un certain nombre de mes collègues.
Mon cher collègue corapporteur, l’étiquetage de l’origine continue de faire l’objet d’une vaste réflexion, notamment dans le cadre de la mission Jégo sur le « Made in France ».
En ce qui concerne les produits alimentaires, la commission a adopté un article 1er bis, qui permet de répondre à votre préoccupation, puisque le principe d’un étiquetage obligatoire est désormais inscrit dans la loi.
Votre amendement étant donc, me semble-t-il, satisfait, je vous demande de bien vouloir le retirer, faute de quoi je serais malheureusement contraint d’émettre un avis défavorable.
Pas du tout ! C’est justement pour cette raison qu’il est important de rappeler ce qui a déjà été évoqué sur ce sujet hier à deux reprises. En effet, comme M. le rapporteur vient excellemment de le dire à l’instant, une telle préoccupation est prise en compte à l’article 1er bis, qui résulte des travaux de la commission et sur lequel a notamment été déposé un amendement n° 241 présenté par M. Le Cam et plusieurs de ses collègues.
Je me permettrai d’aller plus loin : cet amendement, s’il était adopté, serait contraire aux exigences communautaires et pourrait être attaqué par la Cour de justice des communautés européennes, comme cela a déjà été le cas en Grèce et en Italie pour des dispositions similaires.
Murmures sur les travées du groupe socialiste.
C’est la raison pour laquelle je me tourne, avec empressement et chaleur
Sourires.
Je voudrais dire un mot avant que Charles Revet n’en vienne sans doute à retirer l’amendement sous la pression amicale de M. le ministre et de M. le rapporteur.
Je comprends très bien l’argumentation qui vient d’être développée par le Gouvernement. Elle ne fait d’ailleurs que reprendre celle qui nous a été avancée pas plus tard que la nuit dernière par M. Le Maire sur des amendements similaires.
Certes, monsieur le rapporteur, la commission a prévu, sur votre initiative, à l’article 1er bis, une disposition qui devrait être de nature à satisfaire Charles Revet, mais à une nuance près : vous ne prévoyez qu’une simple faculté, quand notre collègue voudrait que cela devienne une obligation ; vous dites « peut » quand il dit « doit ».
Or j’ai entendu hier de la bouche de M. le ministre que toute disposition ayant un caractère contraignant susceptible d’être introduite dans la loi se heurterait aux règles adoptées à l’échelon européen. Il se bat, nous dit-il, pour faire évoluer cette réglementation et obtenir que ce que nous souhaitons aujourd’hui y soit en partie intégré.
Il s’agit aujourd’hui de faire confiance au Gouvernement pour aller dans la bonne direction. Mais, comme beaucoup d’autres, je reste dubitatif : les dispositions que nous introduisons dans la loi seront-elles vraiment contraignantes ? J’espère que ce ne seront pas autant de coups d’épée dans l’eau, ce qui risque d’arriver si, d’aventure, M. le ministre ne réussissait pas à dégager une majorité à l’échelon européen pour intégrer nos préoccupations dans les textes communautaires.
Je l’ai dit, il ne s’agit pas, aujourd’hui, de mettre le Gouvernement en difficulté. Nous ne pouvons qu’avoir confiance dans l’avenir et nous interroger : comment peut-on aider le Gouvernement pour qu’il obtienne l’accord des autres pays européens et que notre souhait à tous ici devienne réalité ? Sinon, à quoi servons-nous ?
En fait, tout repose sur la capacité du Gouvernement à convaincre ses homologues. Pour l’heure, je reste dans l’expectative. Je n’ai rien d’autre à dire, et je laisse à mon collègue Charles Revet le soin de prendre une décision !
À ce moment du débat, il nous faut être vraiment très précis. Pour ma part, je soutiens l’amendement de M. Revet. Non seulement la disposition proposée s’appliquerait à tout produit commercialisé sur le territoire national, mais elle permettrait en plus de garantir une meilleure information. Sans aller jusqu’à parler de publicité mensongère, il faut bien reconnaître que certains professionnels s’appuient sur l’image très positive d’un territoire pour commercialiser des produits dits « locaux » quand, en réalité, ils se contentent d’amalgamer des matières premières, certes transformées dans la région, mais venant d’ailleurs.
Cela pose un vrai problème.
Monsieur le rapporteur, pour en revenir à ce qui a été évoqué hier, le dispositif que nous avons accepté en commission permettra-t-il de contraindre les industriels fautifs à changer leurs pratiques ?
Dans le cas contraire, nous sommes tout à fait prêts à voter cet amendement.
Il est vrai que nous avons déjà eu un débat hier sur le sujet, mais cette affaire de l’étiquetage est tout de même extrêmement importante pour l’ensemble des consommateurs.
Nous avons rencontré exactement le même problème dans le cadre de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale, lorsqu’il a été question de renforcer l’information sur les produits trop gras, trop salés et trop sucrés.
À force de vouloir imposer des étiquettes les plus complètes possible, on n’aura pas fini de les lire que les produits seront déjà périmés !
L’étiquetage, globalement l’information du consommateur, est un sujet extrêmement important. Si, en règle générale, je ne suis pas très favorable à la constitution de groupes de travail, en l’occurrence, nous nous devons de mener une réflexion approfondie sur ce que nous voulons vraiment obtenir.
Pour prolonger ce que vient de dire Mme Herviaux, certains camemberts de Normandie sont faits avec du lait qui vient de n’importe où, y compris de Chine, et leurs fabricants utilisent l’image du vrai camembert de Normandie et sa réputation pour vanter la qualité de leurs produits.
Si l’amendement de M. Revet est tout à fait intéressant, il n’a peut-être pas sa place ici, dans un tel contexte. En tout état de cause, il faudra engager une vraie réflexion sur l’étiquetage dans le cadre de la politique de l’alimentation. Cela nous sera très utile lorsque, au moment de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous étudierons tout ce qu’il est envisageable de faire pour protéger à la fois les enfants et les adultes de la « malbouffe » et de l’obésité, pour les dissuader d’acheter des produits dont on ne maîtrise absolument pas la composition.
Ce problème, dont nous discutons depuis hier soir, est certes difficile, mais, disons-le, il est en réalité lié à la politique menée en la matière par l’Union européenne, qui va à l’encontre de la qualité des produits.
Au fond, l’idéologie communautaire peut se résumer ainsi : derrière notre volonté de défendre les produits locaux se cache une forme de protectionnisme déguisé. Au nom de quoi on nous fait manger des pommes golden venant de Hollande, certes peu chères mais sans aucun goût ! Et nos producteurs locaux, eux, ont beaucoup de mal à écouler leurs pommes, jonagold ou autres, pourtant de bien meilleure qualité.
Nous rencontrons des problèmes similaires dans le cadre des appels d’offres pour les cantines et restaurants scolaires. Si l’envie nous prend d’introduire dans le cahier des charges une clause exigeant des produits spécifiquement locaux, nous voyons aussitôt débarquer une armée de fonctionnaires zélés, toujours prompts à critiquer la rédaction du document sous prétexte qu’il déroge au principe de libre concurrence avec les produits venant d’ailleurs !
Outre l’Europe, qui, selon sa philosophie, est souvent encline à nous soupçonner de pratiquer un protectionnisme larvé, nous devons aussi composer avec les responsables de la concurrence et de la fixation des prix, toujours en train de nous suspecter de tricher parce que nous préférons commercer avec les producteurs locaux : comme si c’était forcément mal…
À partir de là, nous avons bien des difficultés pour faire en sorte que les produits de nos propres régions puissent se retrouver dans l’assiette de nos enfants !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.
Aux termes de l’article 1er bis, adopté par la commission, il est bien précisé : « Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication du pays d’origine peut être rendue obligatoire pour les produits agricoles, alimentaires et les produits de la mer, à l’état brut ou transformé. »
Cette rédaction va dans le sens de l’intérêt de chacun, notamment du consommateur, qui pourra ainsi connaître précisément la provenance et le niveau de qualité du produit.
Grâce à cette disposition, l’étiquetage de tous les produits agricoles pourra, pour ceux qui le souhaitent, être généralisé. C’est une avancée à mon sens très importante et extrêmement intéressante.
J’interviens peu dans le débat, mais l’amendement de Charles Revet porte sur un sujet essentiel, qui a nourri le débat en commission.
Sans parler à la place du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche – je n’ai pas cette ambition ! –, ...
… je me souviens des discussions que nous avons eues sur l’étiquetage des produits. Si nous avons accepté de prévoir une faculté, et non une obligation, c’est pour nous mettre en conformité avec les directives européennes. M. Le Maire s’est justement engagé à les faire évoluer, mais encore faut-il convaincre les autres pays.
Il y a un autre aspect que M. le ministre a décidé de prendre en compte : il s’agit des indications géographiques protégées, les IGP, auxquelles nous nous devons d’être très attentifs.
Selon le droit communautaire, une IGP permet de distinguer la nature d’un produit local. Mais il suffit que ce produit soit transformé dans la région pour bénéficier de cette appellation, ce qui est une anomalie, à mon sens.
Une indication géographique protégée, à proprement parler, doit s’appuyer sur une zone. Pour prendre un exemple, qui concerne aussi M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, l’appellation « Charolais de Bourgogne » mérite d’être une véritable IGP ; or, comme je l’ai signalé aux services du ministère, nous avons du mal à la faire reconnaître, alors même qu’elle correspond à un espace géographique précis. À l’inverse, la moutarde de Dijon est une IGP, alors qu’une partie de ses ingrédients provient du Canada.
Il y a donc vraiment une discussion à avoir à l’échelon européen, et nous pouvons compter sur M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche pour convaincre ses homologues européens.
Avec mon collègue Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes, j’ai mis en place un groupe de travail sur les perspectives d’évolution de la politique agricole commune. C’est l’un des éléments qu’il faut faire valoir devant les autres pays afin de mettre en avant les véritables indications géographiques protégées et, par la suite – pourquoi pas ? –, d’envisager de rendre obligatoire l’identification des produits, pour répondre à la préoccupation de Charles Revet.
Cela étant, M. le rapporteur et M. le ministre l’ont dit, l’amendement n° 30 rectifié bis est aujourd’hui satisfait par le texte de la commission.
Je conclurai en indiquant à Alain Vasselle qu’il ne nous est pas possible, aujourd’hui, d’aller au-delà des règles européennes. Encore une fois, je fais confiance à l’engagement de M. le ministre.
J’ai entendu l’appel de notre sympathique ministre, que nous connaissons bien. Je me demande toutefois s’il n’y a pas une confusion.
Cet amendement ne vise pas à introduire une entrave à l’ouverture des frontières aux importations de produits. Il est évident que les instances européennes s’opposeraient à une telle décision de notre part, sauf dans certains domaines particuliers.
En revanche, je ne vois honnêtement aucun obstacle à la mise en place d’un étiquetage clair informant les consommateurs. Si les instances européennes l’interdisent, je souhaiterais vivement avoir connaissance du texte sur lequel elles se fondent. Même si je ne remets pas en doute vos propos, monsieur le ministre, j’ai vu, pour m’être rendu récemment à Bruxelles, que les textes donnaient parfois lieu à interprétation.
S’il existait une opportunité d’introduire la disposition, la commission mixte paritaire pourrait peut-être s’en saisir.
Quoi qu’il en soit, ayant entendu votre appel, monsieur le ministre, je vais retirer cet amendement.
Monsieur Revet, en l’état actuel de la législation européenne, l’étiquetage que vous prônez ne peut être rendu obligatoire.
C’est cependant tout le sens de l’action menée par M. Le Maire, rappelée à l’instant par le président de la commission de l’économie, M. Emorine, visant à faire évoluer cette législation.
Pour répondre très directement à votre préoccupation, le texte que vous demandez vous sera communiqué par le ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, afin que vous disposiez de tous les éléments d’information.
M. Vasselle se demandait tout à l'heure comment aider le Gouvernement dans ce domaine. Il me semble que nous pouvons relayer la volonté du Gouvernement auprès des autres pays par l’intermédiaire de la Commission européenne et des contacts noués entre le Parlement européen et notre Parlement national pour faire avancer le débat dans le sens que nous souhaitons.
Monsieur le président, puis-je reprendre cet amendement en le modifiant légèrement ?
Vous pouvez le reprendre, ma chère collègue, si la rectification est très légère.
Il s’agit simplement de supprimer le dernier membre de phrase « ainsi que l’indication du pays où il a été fabriqué », seule partie de l’amendement risquant d’être contraire à la législation européenne. Rien ne nous empêcherait alors, tant que cela concerne uniquement le territoire national, d’exiger la précision de l’origine du produit.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 30 rectifié ter, présenté par Mme Herviaux et les membres du groupe Socialiste, et ainsi libellé :
Après l'alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout produit commercialisé sur le territoire national doit porter, bien lisible pour le consommateur, l'indication du pays d'où vient le produit proposé à la vente s'il est vendu en l'état, ou du pays d'origine des matières premières ayant été utilisées pour sa fabrication s'il s'agit d'un produit ayant fait l'objet d'une transformation industrielle.
Quel est l’avis de la commission ?
Cet argument ne tient pas ! Si nous voulons rendre cet étiquetage, non pas obligatoire puisque c’est impossible, du moins très incitatif, dans l’intérêt à la fois des producteurs et des transformateurs, mais aussi des consommateurs, il importe qu’il soit clair et qu’il ne puisse pas être invalidé par les instances européennes. En même temps, il faut que l’Europe se plie aussi aux décisions que nous voulons prendre dans notre pays et, surtout, au sein du Parlement.
L’avis de la commission est donc défavorable.
J’en suis désolé, madame Herviaux, mais, dans l’état actuel des choses, le Gouvernement ne peut pas émettre un avis favorable sur l’amendement n° 30 rectifié ter. C’est précisément cette disposition qui a été appliquée par la Grèce et qui a justifié les poursuites engagées à son encontre par les instances européennes.
Si nous débattons longuement sur cet amendement, c’est qu’il est fondamental dans cette discussion.
Si chaque fois que le Parlement veut prendre une décision on nous oppose la perspective d’un refus des instances européennes, autant leur transférer tous les textes et les laisser gérer le droit français, le droit espagnol, le droit italien ! Veuillez m’excuser d’être quelque peu caricatural, mais, d’ores et déjà, il est question de soumettre les budgets nationaux à l’imprimatur de la Commission européenne en amont de leur adoption. Cette situation n’est pas acceptable !
Par ailleurs, nous comprenons les propos de M. le ministre concernant les contraintes européennes. Cependant, ce serait un acte fort de la part du Parlement français de voter cet amendement pour soutenir le ministre et faire plier l’Europe !
J’entends les discours du Président de la République et du Gouvernement indiquant qu’on ne se laissera rien imposer par l’Europe, qu’il faut la faire plier. Vous l’avez encore dit tout à l'heure, monsieur le ministre ! Le constat est cependant tout autre : pour l’instant, l’Europe ne plie pas vraiment !
Cet amendement, qui n’est d’ailleurs pas de notre fait, a pour objet de donner une meilleure information au consommateur.
Tous hier, tant le ministre que les intervenants de l’ensemble des groupes, se sont félicités de ce qu’un texte mettait en place pour la première fois une véritable politique de l’alimentation. Monsieur le rapporteur, vous avez salué tout à l’heure l’engagement de notre collègue Mme Catherine Dumasen ce sens.
Cette question n’est ni politique ni politicienne, mais bien transversale et partagée. Charles Revet a souhaité retirer son amendement, mais nous l’avons repris à titre symbolique, car il sera peut-être rejeté.
Si nous ne défendons pas ici la souveraineté des États et du Parlement, en garantissant l’étiquetage le plus clair et le plus complet possible pour éclairer le consommateur sur l’origine des produits, alors la loi votée sera tiède.
Le vote de cet amendement serait un acte fort, qui honorerait le Parlement. Ce débat est important pour l’agriculture française, pour la politique de l’alimentation et pour les consommateurs.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Tout d’abord, je m’interroge sur la réponse fournie par M. le ministre, aux termes de laquelle l’Union européenne veille au respect de la concurrence libre et non faussée entre les États. Or l’amendement 30 rectifié ter vise uniquement notre territoire national. Par conséquent, cette réponse ne peut me satisfaire.
Ensuite, permettez-moi de faire un bref rappel historique. La politique agricole commune s’est construite, au début des années soixante, à partir des dispositifs que la France avait mis en place dans la décennie précédente. Les prix indicatifs et les prix d’intervention institués dans le cadre de la PAC de 1962, sur le marché du blé par exemple, existaient en France dans les années cinquante. Autrement dit, c’est ce que nous avions accompli en France qui a été généralisé par la suite.
Or, à présent, alors que nous souhaitons prendre une décision qui, sur le fond, fait l’unanimité, nous devrions pour ce faire attendre l’avis de l’Europe ?
Cette décision, qui serait bénéfique à nos producteurs sans nuire à la concurrence étrangère, doit être prise aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle je vous propose, mes chers collègues, de voter cet amendement.
Ce que propose M. Guillaume est assez dangereux. On a pu voir par le passé que, chaque fois que le gouvernement français s’est mis en infraction, il a dû payer des pénalités ou rembourser des aides qui avaient été versées à tort.
Nous avons aujourd’hui un débat serein, et je remercie Charles Revet de l’avoir engagé. Ces éléments sont présents depuis le début de notre discussion.
Pour ma part, je suis un Européen convaincu et je souhaite que l’Europe avance. Comme l’a dit le Président de la République récemment, l’Europe nous appartient. Mais si nous voulons avancer, il importe de faire partager nos points de vue. Mettre en avant une idéologie spécifique n’a pas d’intérêt si elle n’est pas partagée !
Je suis contre cet amendement 30 rectifié, car il n’intéresserait que les produits français. Au nom de quoi les produits étrangers ne seraient-ils pas identifiés ?
En tout état de cause, il me paraît important de respecter la directive européenne et de s’appuyer sur les capacités de notre ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, mais aussi sur celles du Président de la République. J’entends des critiques concernant les déplacements de ce dernier afin d’évoquer les relations commerciales avec la grande distribution : cherchez dans notre histoire un Président de la République qui s’intéresse autant à l’agriculture et qui aille défendre nos produits sur le terrain !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 78 rectifié, présenté par MM. Pinton et Mayet, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le programme national pour l'alimentation intègre un plan national spécifique d'engraissement destiné à la filière bovine. Le gouvernement s'attache à la définition précise des éléments constitutifs de ce plan puis à sa mise en œuvre et à son suivi, dans le respect des spécificités des territoires.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 93, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 18
Insérer huit alinéas ainsi rédigés :
« - Le Conseil national de l'alimentation est placé auprès du ministre chargé de l'agriculture et de l'alimentation, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la consommation.
« Il est consulté sur la définition de la politique de l'alimentation et du programme national pour l'alimentation. Il donne des avis assortis de recommandations sur les questions qui s'y rapportent. Il peut, en particulier, être consulté sur les grandes orientations de la politique relative :
« 1° à l'adaptation de la consommation aux besoins nutritionnels ;
« 2° à la sécurité alimentaire des consommateurs ;
« 3° à la qualité des denrées alimentaires ;
« 4° à l'information des consommateurs de ces denrées ;
« 5° à la prévention des crises et à la communication sur les risques.
« Ses membres sont répartis en différents collèges représentant toutes les composantes de la chaîne alimentaire : associations de consommateurs et d'usagers, producteurs agricoles, secteurs de la transformation et de la distribution, restauration collective, salariés de l'agriculture et de l'agro-alimentaire et personnalités qualifiées ainsi que des associations de protection de l'environnement. Ils sont nommés pour une durée de trois ans renouvelable.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
Comme nous l’avons vu hier soir, le Conseil national de l’alimentation, ou CNA, a un rôle important à jouer dans la définition de la politique publique de l’alimentation.
Or cette instance indépendante, qui regroupe des collèges représentant les consommateurs, les industriels, les producteurs et la grande distribution, existe depuis 1985.
Depuis cette date, elle a pour mission de donner des avis et recommandations aux trois ministères compétents concernant la définition de la politique de l’alimentation, l’adaptation de la consommation aux besoins nutritionnels, la sécurité et la qualité des aliments, ainsi que l’information des consommateurs.
Cette instance a-t-elle atteint ces objectifs ? Tel n’est a priori pas le cas, puisque l’étude d’impact jointe au projet de loi fait clairement état de l’absence d’une politique publique de l’alimentation en France.
Comment conférer plus de portée à ses avis et recommandations ? Est-ce seulement une question de volonté politique ? Le Gouvernement a prévu de renforcer les missions du CNA par voie réglementaire et de l’élargir aux associations de protection de l’environnement. Est-ce suffisant ?
Par cet amendement, nous vous proposons de consacrer l’existence du CNA dans la loi et dans le code rural, après la définition de la politique de l’alimentation que vous avez souhaité y intégrer.
De la même façon que pour l’Observatoire des prix et des marges, nous pensons qu’une instance, même consultative, a plus de poids quand on la reconnaît officiellement dans la loi.
M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche a déclaré, hier soir encore, vouloir faire du CNA un parlement de l’alimentation, régulièrement consulté par le Gouvernement. Convenez que l’existence d’un tel parlement ne relève pas du domaine réglementaire. C’est pourquoi nous vous proposons d’intégrer, après l’alinéa 18, le texte présenté par cet amendement.
Le CNA est régi par les articles D. 541-1 et suivants du code de la consommation. Vous proposez de transposer dans la loi les missions prévues par ces articles et, de manière un peu moins précise, la composition du CNA.
J’ai été tenté, en tant que rapporteur, de faire de même. J’y ai renoncé, considérant que les règles applicables aux organismes consultatifs relevaient plutôt du domaine réglementaire.
Par ailleurs, la commission a précisé dans son texte que le CNA serait associé à l’élaboration du programme national de l’alimentation. Il est donc pleinement intégré à la nouvelle politique prévue à l’article 1er.
Votre amendement, mon cher collègue, est donc quasiment satisfait par l’article 1er. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
Le Gouvernement partage le point de vue exprimé par M. le rapporteur.
La commission, à l’instar du Gouvernement, a pleinement confirmé le rôle essentiel du Conseil national de l’alimentation dans l’élaboration du programme national pour l’alimentation. D’ailleurs, à l’article 1er du projet de loi, la commission a complété l’alinéa 8 dans ces termes : « Le Conseil national de l’alimentation est associé à l’élaboration de ce programme et contribue au suivi de sa mise en œuvre. » Votre amendement est donc satisfait, monsieur le sénateur.
Par ailleurs, l’organisation et la composition de ce conseil relèvent du domaine réglementaire.
Dans ces conditions, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Certes, l’alinéa 8 de l’article 1er prévoit que, après avis du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire, le Conseil national de l’alimentation est associé à l’élaboration du programme national pour l’alimentation. Cependant, tous les intervenants qui se sont exprimés au cours de la discussion générale, et ce quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, ont salué l’importance du Conseil national de l’alimentation, allant même jusqu’à demander le renforcement des pouvoirs de ce dernier.
Très honnêtement, mentionner explicitement cette instance dans la loi ne fait que montrer tout l’intérêt que nous lui portons ; je ne vois pas en quoi cette précision serait, si je puis dire, hors-la-loi.
Par cet amendement, nous voulons donner une preuve supplémentaire de l’importance que nous attachons non seulement à l’avis et à l’expertise du Conseil national de l’alimentation, mais également à la mise en place d’une politique de l’alimentation, conditionnée à l’avis d’un certain nombre d’experts.
Je profite de l’examen de cet amendement pour préciser que nous devons encourager les actions prévues pour l’éducation et l’information en matière d’équilibre et de diversité alimentaires. À ce titre, le rôle du Conseil national de l’alimentation est fondamental.
Par ailleurs, je rappelle qu’une étape importante a été franchie en février 2009, avec l’adoption par le CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, sous l’impulsion notamment de Christine Kelly, présidente de la mission « Santé et développement durable », de la charte alimentaire. Cette dernière a été signée par l’ensemble des chaînes de télévision nationale. Il s’agit, je tiens à le souligner, d’un outil unique en Europe, de nature à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision.
Je souhaitais rappeler le rôle important joué par le Conseil national de l’alimentation. Mais, quoi qu’il en soit, je me range à l’avis de la commission et du Gouvernement dans la mesure où les dispositions proposées relèvent du domaine réglementaire.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 326 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Pointereau, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Après les mots :
relatives à la production,
insérer les mots :
à l'importation,
La parole est à M. Alain Vasselle.
Cet amendement a pour objet d’apporter une précision supplémentaire à l’alinéa 19 de l’article 1er du projet de loi en visant, au-delà de la production, l’importation.
J’ai examiné l’article 1er bis auquel s’est référé M. le rapporteur, ainsi que Charles Revet tout à l'heure en défendant l’amendement n° 30 rectifié bis, pour voir si les dispositions prévues étaient de nature à me donner satisfaction. Mais je n’en suis pas persuadé, car cet article a trait à l’étiquetage de l’origine des produits agricoles et alimentaires.
Par cet amendement, je souhaite que nous nous préoccupions des produits importés de pays extérieurs à l’Europe, considérant que les pays membres de l’Union européenne ont des règles sanitaires identiques ou, à tout le moins, très proches. En effet, un grand nombre de produits alimentaires peuvent être importés d’autres pays voisins, qui ne sont pas soumis aux mêmes règles sanitaires de production.
Dans le cadre de la politique de l’alimentation, il me semble donc important de recueillir toutes les données socio-économiques et techniques permettant d’apprécier ces produits.
Je ne sais pas si mon amendement a sa place à cet alinéa. Si M. le ministre estime qu’il doit s’insérer à un autre endroit du texte ou se présenter sous une autre forme, je suis bien entendu à sa disposition pour modifier mon amendement le cas échéant.
L’essentiel, à mes yeux, est de défendre cette idée et de demander au Gouvernement de quelle manière il peut la prendre en considération.
Avec sa dextérité et son intelligence habituelles, Alain Vasselle pose un vrai problème.
Aujourd'hui, les données transmises à l’autorité administrative dans le cadre du suivi du programme national pour l’alimentation concernent davantage les caractéristiques des produits, notamment les quantités vendues, la teneur en glucides et en lipides, que les caractéristiques économiques.
Par ailleurs, le suivi du commerce extérieur des produits alimentaires est assuré par le service des douanes.
Monsieur le ministre, j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement important relatif à la qualité des produits importés.
Sourires
La question soulevée par les auteurs de l’amendement, MM. Alain Vasselle et Rémy Pointereau, est tout à fait pertinente.
Nous estimons que de nombreuses informations sont déjà disponibles du fait des obligations de déclaration qui existent pour les importateurs.
Cet amendement en tant que tel ne crée pas d’obligation nouvelle, mais on peut parfaitement considérer qu’il apporte une précision utile, en rappelant que les données relatives à l’importation sont parties intégrantes du suivi de la qualité de l’alimentation.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis de sagesse positive !
J’ai écouté M. le ministre avec beaucoup d’attention, l’argumentation qu’il a développée étant, comme à l’accoutumée, excellente.
C’est la raison pour laquelle la commission s’en remet également à la sagesse positive de la Haute Assemblée !
Sourires
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 512 rectifié, présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, Amoudry, B. Fournier, J. Blanc, Carle et Bailly, est ainsi libellé :
Alinéas 21 à 27
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 230 -3. - Les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés sont tenus de respecter des règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu'ils proposent. »
La parole est à M. Pierre Jarlier.
Cet amendement vise à maintenir une certaine souplesse pour les collectivités dans l’application et le respect des règles nutritionnelles.
Le projet de loi rend obligatoires les recommandations formulées par le groupe d’étude des marchés Restauration collective et Nutrition, le GEM-RCN, qui prescrit notamment des règles en matière de composition des repas, de fréquence des plats et des critères de taille des portions.
Les projets de décret et d’arrêté déjà en cours de préparation sont très détaillés et particulièrement contraignants, concernant notamment les portions. En annexe de l’arrêté figure une liste de produits avec des portions spécifiques par aliment, par âge et par enfant.
Or le dispositif envisagé est inadapté à la réalité quotidienne de la grande majorité des cantines scolaires, notamment en milieu rural. De plus, il revient à exclure les circuits courts de la restauration scolaire, au bénéfice des grandes sociétés spécialisées dans la préparation des repas, alors même que le projet de loi tend à promouvoir les circuits courts.
En conséquence, cet amendement vise à supprimer la référence au décret. Les collectivités appliqueront les recommandations générales dégagées par le GEM-RCN.
Cet amendement a également pour objet de supprimer les sanctions prévues à l’encontre des collectivités qui ne respecteraient pas ces règles. Les élus locaux peuvent en attester, nos collectivités sont soucieuses de l’intérêt des enfants et mettent un point d’honneur à respecter les règles sanitaires.
L'amendement n° 513 rectifié, présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, Amoudry, B. Fournier, J. Blanc et Carle, est ainsi libellé :
Alinéas 21 à 27
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 230 -3. - Les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés, servant quotidiennement plus de 2 500 repas, sont tenus de respecter des règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu'ils proposent, déterminées par décret. »
La parole est à M. Pierre Jarlier.
Il s’agit d’un amendement de repli, visant à retenir un seuil de 2 500 repas servis quotidiennement.
L'amendement n° 238, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Après le mot :
universitaire
insérer les mots :
, des crèches, des hôpitaux, des maisons de retraite,
La parole est à M. Gérard Le Cam.
La préoccupation des pouvoirs publics dans le domaine de la restauration scolaire n’est pas nouvelle.
Déjà, en 1951, une recommandation de l’ONU adressée aux « ministères de l’instruction publique des différents pays », pointait « l’importance que les cantines scolaires offrent des menus rationnellement composés, de manière à favoriser la croissance et le développement physiologique de l’enfant ».
Plus tard, en France, le Conseil national de l’alimentation a périodiquement donné des avis. L’éducation nationale a diffusé, en juin 2001, une circulaire sur ce thème, établissant des recommandations sur la nutrition des enfants scolarisés, regroupées autour de trois axes : les besoins nutritionnels, l’éducation au goût et la sécurité alimentaire.
Il existe donc une véritable prise de conscience de l’importance liée à la qualité de la restauration scolaire.
Nous sommes particulièrement satisfaits de l’insertion, dans cet alinéa, de normes plus précises concernant la qualité nutritionnelle des repas fournis par les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés.
Il s’agit d’ailleurs d’une revendication de longue date portée par la Fédération des conseils de parents d’élèves, la FCPE, par l’Association nationale des directeurs de la restauration municipale, l’ANDRM, et par l’Association française des diététiciens nutritionnistes, l’AFDN.
Cette revendication est fondamentale dans la mesure où la cantine occupe une place importante dans le quotidien des enfants et des adolescents. On estime, en effet, qu’un élève du primaire sur deux est inscrit à la cantine et que les deux tiers des collégiens et lycéens y déjeunent quotidiennement. En outre, nous savons que 40 % des apports nutritionnels se font lors du repas du midi.
Pour aller plus loin dans la détermination de ces normes, nous estimons qu’il serait utile, dans le cadre de ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, d’élargir le champ d’application des obligations imposées aux gestionnaires des services de restauration.
En effet, souvent, ces gestionnaires s’occupent non seulement du secteur des écoles et des universités, mais également de celui des crèches, des hôpitaux et des maisons de retraite. Les enjeux nutritionnels étant également très importants pour ces publics spécifiques, il nous semble souhaitable de définir des normes liées à la qualité nutritionnelle des repas servis par les gestionnaires de restauration.
Tel est le sens de cet amendement que nous soumettons à votre approbation, mes chers collègues.
L'amendement n° 226, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Ils sont autorisés à déroger aux règles du code des marchés publics dans le cadre d'approvisionnement local. Un décret en conseil d'État en fixe les modalités d'application.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
indirecte, responsables de la restauration scolaire, et ce à tous les niveaux.
Dans ce contexte, la promotion d’une politique alimentaire efficace passe par la mise à niveau de la restauration, comme la vitrine de la nouvelle définition de la sécurité alimentaire. L’achat de matières premières et l’approvisionnement, qui constituent des problématiques importantes de la restauration collective, ont un impact direct sur la qualité nutritionnelle des repas servis. Or ce projet de loi n’aborde nullement cette question.
À cet égard, le Gouvernement fait preuve de peu dedes producteurs locaux. Les collectivités locales doivent avoir les moyens de s’impliquer pleinement dans la promotion de l’agriculture de proximité, renforçant ainsi l’intégration de l’agriculture dans une logique de développement durable et d’assimilation dans le tissu social local.
Pourtant, ces collectivités ne peuvent plus réaliser leurs achats de produits frais directement sur les marchés d’intérêt national ou régional, le seuil pour l’achat de gré à gré de denrées alimentaires sans formalité étant passé de 20 000 euros à 4 000 euros.
Ainsi, favoriser les circuits courts passe inévitablement par une dérogation au code des marchés publics afin d’encourager l’utilisation de produits des terroirs et de dynamiser le tissu économique local et le développement durable.
S’agissant de la restauration scolaire, dont les collectivités territoriales ont la responsabilité, l’étude d’impact précise que « seules trois communes sur dix servent des menus conformes aux recommandations officielles ». Or ces recommandations sont aujourd’hui obligatoires. Il est dès lors impératif de permettre aux gestionnaires de services de restauration scolaire et universitaire de répondre à ces nouvelles exigences, de répondre aux difficultés d’approvisionnement de la restauration collective en matière d’alimentation biologique de qualité et de proximité.
Encore une fois, en proposant cet amendement, nous voulons donner de véritables moyens aux acteurs clés de la restauration scolaire.
Il faut sortir des discours et de l’image pour agir concrètement et mettre en marche le cercle vertueux qui associe les collectivités locales et les acteurs locaux pour que, au final, tout le monde en profite. Je pense aux enfants, bien sûr, qui bénéficieront d’une nourriture de qualité, aux collectivités locales, qui joueront pleinement leur rôle dans la politique alimentaire et bénéficieront d’un regain de légitimité auprès des parents d’élèves, et aux agriculteurs, qui se sentiront enfin concernés par les politiques publiques autant alimentaires qu’environnementales. Ils ont été trop souvent les oubliés du Gouvernement, parfois même les boucs émissaires dans différents débats, alors qu’ils devraient être en première ligne de toute politique alimentaire de qualité, de développement durable et de conservation du patrimoine.
C’est pourquoi le code des marchés publics ne peut et ne doit pas être un frein à cette ambition, ce à quoi semblait souscrire M. Le Maire lors d’un récent débat au Sénat.
L'amendement n° 239, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'État s'engage à mettre en œuvre un plan de formation des agents de la restauration collective.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Ces nouvelles dispositions organisent toute une procédure relative à l’édiction de règles concernant la qualité nutritionnelle des repas fournis par les gestionnaires des services de restauration scolaire.
Un certain nombre de personnes sont dorénavant habilitées à veiller au respect des obligations ainsi fixées et une procédure est définie en cas de violation de ces dernières.
Parmi les sanctions applicables aux gestionnaires de services de restauration est mentionnée la réalisation d’actions de formation du personnel.
Nous estimons, pour notre part, que la formation des agents à ces nouvelles normes ne peut se concevoir comme une sanction en cas de manquement à la réglementation prescrite, mais doit constituer un engagement du Gouvernement préalable à la mise en place de cette nouvelle législation. L’objectif est d’éviter la méconnaissance par les agents de ces nouvelles règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas et donc de favoriser leur respect. Il s’agit d’un gage majeur d’efficacité.
Pour cette raison, nous vous proposons, par cet amendement, d’inscrire dans la loi que l’État s’engage à mettre en œuvre un plan de formation des agents de la restauration collective.
L'amendement n° 95, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Avant la mise en œuvre de cette disposition, une étude évalue les surcoûts éventuellement générés et supportés par les collectivités territoriales.
La parole est à M. Yannick Botrel.
Le 25 juin 2001, une circulaire relative à la composition des repas servis en restauration scolaire et à la sécurité des aliments a été publiée en cohérence avec le programme national nutrition santé.
Elle intègre les recommandations du groupe d’étude des marchés Restauration collective et Nutrition, le GEM-RCN, relatives aux fréquences de service des plats et à la taille des portions alimentaires servies.
Il est proposé, dans le projet de loi, de rendre ces normes nutritionnelles obligatoires pour les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés.
Le Conseil national de l’alimentation accorde beaucoup d’importance à ce secteur de la restauration collective ; dans son dernier avis de 2004, il a constaté que l’application de la circulaire n’était toujours pas généralisée.
Il a aussi tenté d’identifier les obstacles, ce que ne fait pas du tout le Gouvernement, ni dans son étude d’impact ni dans ses propositions.
Le CNA note une méconnaissance fréquente des règles nutritionnelles de la part des différents acteurs clés, notamment des chefs d’établissement, des gestionnaires, des cuisiniers, des maires, des responsables des conseils généraux et régionaux, et, surtout, l’existence de difficultés de compréhension et de mise en œuvre, compte tenu de la complexité de la circulaire.
Enfin, le CNA souligne que le budget « matières premières » nécessaire pour respecter ces normes n’est pas à la portée de tous les gestionnaires.
Nous estimons donc qu’avant de rendre ces normes contraignantes, il est nécessaire d’évaluer les surcoûts éventuels supportés par les collectivités.
Sur ce point, l’étude d’impact accompagnant le projet de loi n’est pas satisfaisante. Elle comprend même l’observation suivante : « S’agissant des règles nutritionnelles, le surcoût éventuel sera supporté par la collectivité territoriale mais l’image pour la collectivité sera améliorée puisque celle-ci prendra soin des enfants et de leur alimentation, ce qui est très attendu par les fédérations de parents d’élèves. »
Cette évaluation n’est pas très sérieuse au regard des difficultés financières que traversent certaines collectivités territoriales.
D’ailleurs, on peut se demander si ces règles obligatoires ne seront pas susceptibles de faire l’objet de recours si elles ne sont pas respectées à la lettre. On peut prévoir le développement de lourds contentieux dirigés contre les communes.
Une telle pesanteur risque d’avoir des conséquences sur le mode de gestion retenu et sur la qualité des approvisionnements en poussant les communes à renoncer aux services organisés en interne, en déléguant la constitution des repas à des grosses sociétés de restauration qui seront plus à même de respecter ces règles nutritionnelles complexes, mais qui ne favoriseront pas les circuits courts.
L'amendement n° 96, présenté par Mmes Bonnefoy et Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ils sont encouragés à mettre en œuvre des actions de sensibilisation et d'éducation au goût. Ces campagnes peuvent être menées en partenariat avec des associations, des professionnels et des familles.
La parole est à Mme Renée Nicoux.
Cet amendement a pour objet d’encourager les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés à mettre en œuvre des campagnes de sensibilisation et d’éducation au goût.
Pour qu’une politique de l’alimentation soit efficace, il est indispensable que l’éducation y joue un rôle clé. À cette fin, il est nécessaire de mettre en place des actions permettant à nos enfants d’acquérir des connaissances culinaires et nutritionnelles de base, tout en leur redonnant le plaisir, bien souvent oublié, de la table et de la convivialité.
Si nous voulons modifier les mentalités et susciter un changement des habitudes alimentaires se modifient, il faut faire de l’école un instrument clé dans ce domaine.
L’objectif est double : d’une part, il importe que les enfants et les jeunes adultes scolarisés prennent véritablement conscience de l’importance d’avoir une alimentation diversifiée et de qualité ; d’autre part, l’école doit permettre d’exporter en dehors du cadre scolaire des habitudes alimentaires saines.
À cet égard, les enfants peuvent avoir une grande influence sur le comportement de leurs parents. Il faut donc faire en sorte qu’ils soient le terreau de cette politique publique de l’alimentation.
Afin que ces campagnes de sensibilisation soient aussi efficaces que possible, il semble opportun d’y associer des acteurs extérieurs spécialisés ; ces derniers pourront ainsi partager leurs connaissances et leurs savoir-faire. Je pense, notamment, aux associations spécialisées, aux nutritionnistes, aux cuisiniers et, bien évidemment, aux agriculteurs. Il serait bon, par exemple, d’encourager des visites pédagogiques régulières dans des fermes biologiques, comme cela se pratique déjà dans certains établissements.
Il faut aussi, dès que cela est possible, associer les familles aux campagnes de sensibilisation, afin que les actions dans ce domaine aient le plus de chances de porter leurs fruits hors du cadre scolaire.
Pour avoir une certaine expérience dans ce domaine, je peux vous confirmer que l’éducation nutritionnelle a un rôle crucial dans la mise en place d’une politique de l’alimentation, d’autant plus si cette politique se fixe pour objectif de lutter contre la dégradation des pratiques alimentaires.
Il serait souhaitable que ces actions de sensibilisation et d’éducation au goût soient rendues obligatoires. Mais, dans la conjoncture actuelle, marquée par la dégradation de l’état des finances de nos collectivités à la suite de certaines réformes et par la situation critique de bon nombre d’établissements scolaires, il ne faut pas que ces mesures soient, dans un premier temps, trop contraignantes et perçues avant tout comme une charge, car elles ne pourront être menées efficacement que si elles suscitent un consensus général.
Cependant, si nous voulons, dans un avenir proche, les rendre obligatoires, ce qui me paraît indispensable, il faudrait qu’une aide particulière des pouvoirs publics soit apportée aux acteurs qui les engagent.
L'amendement n° 97, présenté par M. Teston, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, M. Sueur, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le respect des règles sociales et environnementales ainsi que le soutien des productions de proximité doivent figurer parmi les critères de choix de leurs approvisionnements.
La parole est à M. Roland Courteau.
Le Grenelle de l’environnement a posé le principe de l’exemplarité de l’État s’agissant de la fourniture de produits issus de l’agriculture biologique aux services de restauration des administrations de l’État, ainsi qu’à ceux des établissements publics placés sous la tutelle des services de l’État, tels que les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires et les centres hospitaliers universitaires.
À cet égard, la circulaire du 2 mai 2008 relative à l’exemplarité de l’État en matière d’utilisation de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective fixe des objectifs ambitieux, soit celui de 15 % en 2010 et de 20 % en 2012.
De nombreuses collectivités territoriales ont souhaité intégrer ces mêmes objectifs dans la gestion de la restauration scolaire des établissements dont elles ont la charge.
Toutefois, le constat peut être fait d’une inadéquation de l’offre à la demande, puisque, selon les données de l’INSEE, en 2008, en France, seulement 2, 1 % de la surface agricole utile étaient consacrés à l’agriculture biologique.
Le groupe socialiste, en particulier Michel Teston, estime donc que, dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable, en parallèle à l’introduction de produits biologiques, il est nécessaire de promouvoir à la fois l’approvisionnement local et les productions respectant le mieux les règles sociales et environnementales.
Cet amendement s’inscrit parfaitement, selon nous, dans la continuité des amendements adoptés par la commission et visant à introduire dans le programme national pour l’alimentation les actions en faveur du respect des terroirs par le biais du développement des filières courtes, ainsi que des éléments d’éducation et d’information des consommateurs relatifs à la saisonnalité, aux modes de production et à leur impact sur l’environnement.
Ainsi, dans le prolongement des dispositions de l’annexe à la circulaire du 2 mai 2008, l’encouragement des services de restauration collective publics à promouvoir l’approvisionnement local et un meilleur respect des règles sociales et environnementales pourrait prendre la forme de recommandations sur les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir, dans le respect du code des marchés publics.
Tel est l’objet de cet amendement.
L'amendement n° 98, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En conséquence, les gestionnaires ainsi que les personnels des services concernés reçoivent une formation spécifique relative à la nutrition.
La parole est à M. Didier Guillaume.
L’article 1er du projet de loi vise à rendre obligatoire le respect de règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas dans la restauration scolaire et universitaire. En outre, il impose d’organiser les contrôles liés au respect de ces règles, puis la réalisation d’actions de formation du personnel en cas de méconnaissance de ces règles.
Par cet amendement, cohérent avec l’ensemble des autres amendements que nous avons présentés dans le cadre de la présente discussion, nous souhaitons souligner que, selon nous, il est d’abord nécessaire de prévoir la formation des gestionnaires de restauration scolaire et universitaire et de leur personnel.
Comme nous l’avons déjà dit, le dernier rapport du Conseil national de l’alimentation sur la restauration collective a dressé le constat suivant : méconnaissance des règles nutritionnelles parmi les différents acteurs, y compris les acteurs clés que sont les chefs d’établissement, les gestionnaires, les cuisiniers, les maires, les responsables des conseils généraux et régionaux ; difficultés de compréhension et de mise en œuvre de ces règles, en raison d’une trop grande complexité de la circulaire.
La formation du personnel est donc indispensable. Elle devrait même être une première étape, avant même que les normes ne soient rendues obligatoires.
L’étude d’impact nous informe que le Gouvernement estime qu’il n’est pas nécessaire de prévoir des équivalents temps plein supplémentaires pour réaliser ces contrôles nutritionnels, dont la durée est estimée entre quinze et vingt minutes.
Pourtant, ces agents disposeront d’un pouvoir d’enquête : ils pourront pénétrer sur les lieux, prélever des échantillons et recueillir toute information utile. Ce n’est pas rien !
En cas de constatation de la méconnaissance des règles nutritionnelles, ils pourront mettre en demeure le gestionnaire de les respecter dans un délai déterminé, ce qui devrait être bénéfique. Si ce dernier ne s’exécute pas, ils pourront ordonner des actions de formation du personnel et imposer l’affichage des résultats des contrôles diligentés par l’État.
On peut avoir des doutes sur les capacités des agents de l’État chargés des contrôles vétérinaires et sanitaires à réaliser ces contrôles nutritionnels sans une formation spécifique adaptée, sachant qu’ils seront amenés à prendre des décisions impliquant des conséquences importantes. Ce n’est pas la même chose de veiller à ce que des aliments soient sûrs et de veiller à ce qu’ils soient sains. Les compétences requises sont différentes.
En outre, ces agents devraient être plus nombreux pour assumer ces nouvelles compétences, alors que la tendance enclenchée par la RGPP est plutôt à la diminution de leurs effectifs. On note même une volonté de privatisation de certains services de contrôle et de certains services vétérinaires.
L'amendement n° 523 rectifié, présenté par MM. Collin et Fortassin, Mme Escoffier, MM. Tropeano, de Montesquiou et Baylet, Mme Laborde et MM. Plancade, Chevènement, Mézard, Milhau, Vall, Alfonsi et Marsin, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Ils privilégient dans leurs choix d'approvisionnement, les denrées issues de l'agriculture locale et de l'agriculture biologique.
La parole est à M. Daniel Marsin.
Cet amendement rejoint des préoccupations qui ont déjà été exprimées par certains de nos collègues.
Il vise à inciter les gestionnaires des services de restauration collective, en particulier scolaires et universitaires, à s’approvisionner auprès de producteurs locaux en produits respectueux de l’environnement. Cette proposition s’inscrit donc dans le droit fil des engagements du Grenelle de l’environnement en faveur des produits saisonniers et de proximité.
Lors de la discussion générale, M. le ministre s’était engagé à modifier le code des marchés publics en ce sens. Nous voulons que cet engagement se traduise de manière concrète et aussi rapidement que possible, d’où l’intérêt du présent amendement.
L'amendement n° 99, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 22, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ils reçoivent une formation spécifique sur les règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas.
La parole est à M. Paul Raoult.
Aux termes de l’article 1er du projet de loi, le contrôle du respect des règles nutritionnelles dans les cantines est réalisé en même temps que les contrôles sanitaires, donc par les mêmes agents.
Plusieurs corps administratifs sont concernés : les inspecteurs de la santé publique vétérinaire, les ingénieurs du génie rural et des eaux et des forêts ayant la qualité de fonctionnaire, les ingénieurs de l’agriculture et de l’environnement, les techniciens supérieurs et les contrôleurs sanitaires des services du ministère de l’agriculture, les fonctionnaires et les agents non titulaires de l’État compétents en matière sanitaire et figurant sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, les vétérinaires, contrôleurs sanitaires et préposés sanitaires contractuels de l’État pour les missions définies dans leur contrat et, enfin, les vétérinaires des armées, pour les organismes relevant de l’autorité ou de la tutelle du ministère de la défense.
Seront aussi chargés de veiller au respect des obligations nutritionnelles édictées, les médecins inspecteurs de la santé publique, les ingénieurs du génie sanitaire, les ingénieurs d’études sanitaires et les techniciens sanitaires, les inspecteurs et les contrôleurs des agences régionales de santé.
Il est indispensable que l’État se donne la possibilité de réaliser ces contrôles et prenne l’engagement de consacrer les moyens nécessaires à leur mise en œuvre. On pourra bien évidemment rétorquer que les dispositions de ce texte ne doivent pas mobiliser de moyens humains et financiers nouveaux… surtout dans cette période de rigueur.
L’objet de cet amendement est surtout de souligner l’orientation prioritaire des missions des professions visées précédemment en matière de contrôle sanitaire de la restauration collective.
Permettez-moi d’émettre quelques inquiétudes sur cette orientation, eu égard à la suppression d’un nombre considérable de postes dans ce secteur, notamment du fait de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Les nouvelles directions départementales de protection de la population, les DDPP, manquent cruellement d’agents. Si l’on assigne à ces derniers des missions supplémentaires, on peut s’interroger quant à leur possibilité de les remplir.
L’objectif affiché est ambitieux. Il importe que l'État s’en donne les moyens, notamment en valorisant le potentiel humain de ces services.
L'amendement n° 237, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 23, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Elle en informe dans les plus brefs délais les représentants des parents d'élèves ou des étudiants de l'établissement.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
L’amendement n° 237 est retiré.
L'amendement n° 100, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 26
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'État s'engage à mettre en œuvre les moyens nécessaires afin de garantir la pratique régulière de contrôles veillant à assurer la sécurité alimentaire et la qualité nutritionnelle des repas servis en restauration collective.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
L’article 1er, dont l’objet est d’assurer à la population l’accès à une alimentation sûre, diversifiée et de qualité, développe les actions à entreprendre en direction des gestionnaires de restauration scolaire et universitaire publics et privés.
Il prévoit, notamment, que des contrôles doivent être effectués par l’ensemble des spécialistes en charge de la santé publique, entre autres les médecins inspecteurs de santé publique, les ingénieurs de génie sanitaire, les techniciens sanitaires, pour veiller au respect des règles du « bien-manger ».
L’alinéa 23 de l’article précise en particulier que, sur la base de ces contrôles, « l’autorité administrative compétente de l’État met en demeure le gestionnaire […] de respecter ces dispositions dans un délai déterminé ». Aux alinéas suivants, est dressée la liste des obligations qui s’imposent ou qui peuvent être imposées au gestionnaire « épinglé », notamment la formation, l’obligation d’affichage.
Je souscris sans réserve à l’objectif fixé et je souhaite que la puissance publique soutienne ce type de contrôles, indispensables pour garantir la qualité alimentaire et nutritionnelle des repas servis en restauration collective, en particulier en milieu scolaire.
Toutefois, j’ai quelques doutes quant à l’efficacité d’un dispositif qui ne serait pas accompagné de moyens de contrôle. C’est pourquoi je souhaite que l’État s’engage concrètement sur ce point.
Tous ces amendements font référence aux dispositions du code des marchés publics.
Je ferai d’abord une observation générale : nous souhaitons, et M. le ministre l’a rappelé fort opportunément hier soir, que les collectivités locales puissent opter pour un mode d’approvisionnement qui favorise les circuits courts. À cette fin, il faut prévoir dans le cahier des charges des dispositions adaptées, comme nous avons eu l’occasion de l’indiquer ce matin en commission. Nous y reviendrons sans doute au cours de la discussion. Le code des marchés publics relevant du pouvoir réglementaire, la balle est dans votre camp, monsieur le ministre.
M. Paul Raoult. Il vous refile la patate chaude, monsieur le ministre !
Sourires
Ce n’est pas une patate chaude, mon cher collègue, car nous sommes tous concernés. Comme l’a rappelé M. Gérard Le Cam tout à l’heure, nous sommes tous dans cette enceinte des représentants des collectivités locales, élus par les grands électeurs, à qui nous avons donc des comptes à rendre.
Par ailleurs, et j’insiste sur ce point, nous devons veiller à ce que les dispositions que nous prenons respectent les impératifs liés à la compétitivité et soient compatibles avec les règlements communautaires.
J’en viens à l’avis de la commission sur les différents amendements.
L’amendement n° 512 rectifié a pour objet de supprimer un décret déterminant les règles nutritionnelles à respecter dans la restauration collective.
Il est nécessaire d’établir un référentiel opposable dans lequel figurent les règles nutritionnelles devant être respectées dans la restauration collective. Or l’amendement proposé fixe le principe des règles nutritionnelles sans renvoyer à aucun référentiel. En supprimant le décret, il prive l’article de son caractère optionnel.
J’ajoute que les auditions auxquelles nous avons procédé ont montré, et nous devons garder cet élément présent à l’esprit, que le respect de la qualité nutritionnelle n’entraînait pas de surcoût dans la restauration collective, en particulier dans les CROUS.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 513 rectifié porte sur la limitation de l’application des règles nutritionnelles aux services de restauration collective servant plus de 2 500 repas.
Pourquoi fixer de telles limites ? Est-ce à dire que tous ne doivent pas bénéficier des mêmes règles nutritionnelles ? Et pourquoi retenir le seuil de 2 500 repas ? Pourquoi pas 2 499 ?
Mon cher collègue, cet amendement limite l’application des règles nutritionnelles aux services de restauration collective scolaire et universitaire d’une certaine importance. Une telle exception conduirait à priver de nombreux écoliers ou élèves usagers des cantines du bénéfice d’une alimentation équilibrée. N’oublions pas, d’ailleurs, que les restaurants scolaires permettent à certains enfants de manger à leur faim, ce qui n’est pas toujours le cas chez eux.
Je ne peux donc que vous inviter à la prudence. Il est possible de servir des repas équilibrés sans dégrader le coût matière des repas pour les collectivités.
La commission émet donc, là encore, un avis défavorable.
L’amendement n° 238 vise l’application des règles nutritionnelles dans les crèches, dans les hôpitaux et dans les maisons de retraite.
L’alimentation des nourrissons dans les crèches, des malades dans les hôpitaux et des personnes âgées dans les maisons de retraite répond à des impératifs particuliers justifiant l’application de règles nutritionnelles différentes de celles qui s’appliquent à la restauration scolaire ou universitaire.
Au demeurant, les crèches, que nous gérons les uns et les autres, tout comme les établissements sanitaires et sociaux, bénéficient de conseils de nutritionnistes, ce qui me paraît indispensable.
Aujourd’hui, les règles nutritionnelles doivent s’appliquer en priorité à tous les secteurs de la restauration collective, y compris aux prisons, dont il n’est pas fait mention dans cet amendement, mais que nous avons évoquées en commission.
Cet amendement ne me semble donc pas nécessaire.
L’amendement n° 226 prévoit, pour les gestionnaires de services de restauration, la possibilité de déroger au code des marchés publics. Il s’agit là de dispositions qui relèvent du domaine règlementaire. Le ministre a pris, sur ce sujet, des engagements qu’il aura sans doute l’occasion de préciser dans la suite de la discussion.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 239 a trait à la formation des agents de restauration collective. Cet amendement est satisfait par l’amendement n° 98, auquel la commission est favorable, et qui prévoit une formation à la nutrition des personnels de cantine.
Je souhaite donc retrait de l’amendement n° 239. À défaut, j’y serai défavorable.
L’amendement n° 95 concerne l’étude des surcoûts pour les collectivités résultant de l’application des règles nutritionnelles.
Nous sommes naturellement attentifs à ce que ces règles n’entraînent pas des dépenses plus importantes pour les communes que nous gérons.
Lors des auditions auxquelles nous avons procédé, plusieurs responsables, notamment de la restauration collective scolaire, nous ont assuré qu’il n’y avait pas de dérive importante du coût matière des repas, voire aucun surcoût, lorsque l’on respectait les règles nutritionnelles, ce qui confirme ce que je vous indiquais voilà un instant.
Les efforts en matière de qualité nutritionnelle imposent parfois un peu plus de main-d’œuvre, par exemple pour la préparation des repas faisant moins appel aux plats cuisinés et aux préparations industrielles.
Je ne souhaite pas que, en subordonnant l’entrée en vigueur des règles nutritionnelles à une étude des coûts, l’on retarde l’application de ces règles qui, je le redis, sont absolument nécessaires pour lutter contre l’obésité infantile. À cet égard, je rappelle qu’à la fin de cette semaine aura lieu la première Journée européenne de l’obésité.
L’application des règles nutritionnelles est également importante pour lutter contre les mauvaises habitudes alimentaires qui, malheureusement, se prennent dès le plus jeune âge.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
L’amendement n° 96 tend à encourager les actions de sensibilisation et d’éducation au goût dans les cantines scolaires.
Il me semble que l’objectif recherché relève de l’une des actions du programme national pour l’alimentation, le PNA, qui figure à l’alinéa 15 et concernant « la qualité gustative et nutritionnelle des produits agricoles et de l’offre alimentaire ». C’est dans ce cadre qu’une sensibilisation au goût pourrait être menée en milieu scolaire.
La commission émet un avis défavorable.
L’amendement n° 97 met l’accent sur la prise en compte par les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire des règles sociales et environnementales.
De deux choses l’une : soit cet amendement ne se rattache pas au code des marchés publics, auquel cas il perd toute portée contraignante. Or il faut éviter les lois bavardes !
Soit cet amendement vise à modifier le code des marchés publics. Il doit alors être rejeté, car il empiète sur le domaine réglementaire.
Dans les deux cas, la commission ne peut qu’être défavorable à cet amendement.
L’amendement n° 98, que j’ai évoqué voilà un instant, porte sur la formation des personnels des cantines à la nutrition. Par cantine, on entend certes la restauration scolaire, mais aussi la restauration collective.
Il ne s’agit pas simplement d’imposer des règles nutritionnelles, encore faut-il s’assurer qu’elles sont respectées.
Outre les contrôles et les sanctions mentionnés à l’article 1er, il est justifié de prévoir également une formation des personnels concernés dans le cadre de la formation professionnelle.
La commission émet donc un avis favorable.
J’ajoute une observation : sachant que les collectivités locales ont la possibilité et même l’obligation de financer la formation professionnelle, on ne peut pas dire qu’une formation à la nutrition engendrera pour elles un coût supplémentaire. Elles disposent déjà de crédits disponibles pour la formation, donc pour la formation à la nutrition des personnels de la restauration scolaire et collective.
L’amendement n° 523 rectifié tend à favoriser l’approvisionnement local des cantines scolaires.
Les règles d’approvisionnement et d’achat des collectivités publiques relèvent, je le rappelle, du code des marchés publics, lequel est de nature réglementaire. C’est la raison pour laquelle cet amendement ne peut donc pas recevoir un avis favorable de la commission.
Cependant, il serait souhaitable que le code des marchés publics puisse évoluer pour faciliter l’achat de produits alimentaires de proximité et, ainsi, favoriser les circuits courts, que nous souhaitons tous voir se développer.
Cet amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.
S’agissant de l’amendement n° 99, les agents de l’État chargés du contrôle de l’application des règles nutritionnelles sont censés connaître précisément les normes auxquelles les contrôlés doivent se soumettre. En pratique, le contrôle des règles nutritionnelles s’effectuera probablement avec des équipes spécialisées selon des plans de contrôle définis par l’autorité administrative compétente.
Cet amendement ne semblant pas indispensable, la commission émet un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 100, sur la mise en œuvre des moyens de contrôle de la sécurité alimentaire et de la qualité nutritionnelle, constitue une déclaration d’intention et non pas un dispositif opérationnel. Il appartient au Parlement de contrôler si les lois qu’il vote sont bien appliquées. Il a la possibilité de constituer des missions de contrôle chargées de se rendre sur le terrain.
La commission émet un avis défavorable.
Concernant l’amendement n° 512 rectifié, monsieur Jarlier, le décret nous paraît absolument indispensable, afin de rendre claires et transparentes les règles nutritionnelles à respecter.
Par ailleurs, le Gouvernement prend l’engagement que les textes d’application seront élaborés en totale et étroite concertation avec les représentants des collectivités territoriales. En supprimant le renvoi à un décret, nous nous priverions indirectement de la capacité à faire appliquer cette mesure. Nous ne pourrions que le regretter, puisque nous reconnaissons tous son intérêt.
Je vous suggère donc d’envisager le retrait de cet amendement. Sinon, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
S’agissant de votre amendement n° 513 rectifié, je vous rappelle que la majorité des communes sert entre cinquante et cent repas par jour. Comme M. le rapporteur l’a très bien mis en évidence, si cet amendement était adopté, la quasi-totalité des cantines scolaires seraient exemptées du dispositif, ce qui serait très ennuyeux, compte tenu de l’importance de l’objectif fixé et sur lequel nous sommes tous d’accord.
Il est essentiel, cela a été dit et le Gouvernement y souscrit naturellement, que les jeunes aient accès à une alimentation équilibrée à la cantine. Il s’agit, hélas, du seul repas équilibré journalier pour de nombreux enfants !
Il est donc impératif de ne rien faire qui puisse nuire à cette nécessité absolue en termes de santé publique. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Sur l’amendement n° 238, l’obligation nouvelle et importante créée par la loi apparaît indispensable à l’âge où se mettent en place les habitudes alimentaires.
Il est proposé, par cet amendement, d’étendre cette obligation aux crèches, hôpitaux et maisons de retraite. Certes, l’équilibre nutritionnel est important pour tous. Cependant, il n’existe pas de références scientifiques formalisées quant aux besoins spécifiques du large public de ces établissements, telles que celles qui se rapportent aux écoles.
Avant d’aller plus loin dans la création de nouvelles obligations et contraintes, le Gouvernement souhaite, dans un souci d’efficacité, concentrer ses moyens, notamment les moyens humains de contrôle, sur une action en faveur de la jeunesse. Néanmoins, partageant le souci de M. Le Cam, il s’en remet à la sagesse du Sénat.
Quant à l’amendement n° 226, je souligne que le code des marchés publics est issu de la réglementation européenne.
Des travaux ont été menés autour de la problématique des circuits courts et un guide à destination des collectivités locales a été élaboré afin de faciliter l’introduction de produits locaux dans la restauration collective, dans le respect du code des marchés public. Ce guide sera édité avant la fin de l’année par le ministère, après accord du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
La France proposera à l’échelon européen les modifications qu’il conviendrait d’apporter à la réglementation sur les marchés publics.
J’ajoute qu’un décret modifiant le code des marchés publics est en cours de rédaction afin de favoriser les circuits courts.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
La mesure proposée à l’amendement n° 239 revient à ce que les collectivités, y compris celles qui respectent bien les règles nutritionnelles, financent la formation des agents de la restauration. M. le rapporteur nous a précisé que c’était déjà le cas.
Le Centre national de la fonction publique territoriale propose des modules de formation adaptés aux différents métiers, notamment aux élus, aux gestionnaires de restauration, aux cuisiniers, aux personnels de service.
Par ailleurs, certaines directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt ont déjà mis en place des formations pour les personnels qui œuvrent dans les petites communes rurales. Ce type d’action est sans doute appelé à se développer.
Pour éviter que le propos que je tiens au nom du Gouvernement soit mal interprété, s’agissant des budgets des collectivités locales, je devrais émettre un avis défavorable sur cet amendement. Toutefois, comme la mesure figure déjà dans les dépenses des communes, je modifie ma position pour m’en remettre à la décision que vous estimerez devoir prendre, probablement celle de retirer l’amendement…
En ce qui concerne l’amendement n° 95, selon une évaluation très sérieuse réalisée en 2008 par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, et qui figure dans la copieuse étude d’impact, le surcoût moyen à la charge des collectivités locales qui est généré par l’obligation de respecter les règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas représente environ 7 %, ce pourcentage variant en fonction du niveau initial de la qualité des repas servis par les restaurants scolaires.
S’agissant d’une mesure en faveur de la santé des enfants et très attendue par les parents d’élèves, le Gouvernement considère qu’elle marque une avancée indispensable. C’est la raison pour laquelle il émet un avis défavorable.
La disposition proposée à l’amendement n° 96, aussi intéressante soit-elle, ne relève pas du domaine législatif. Elle sera intégrée en tant que telle au programme national pour l’alimentation, puisque l’objectif de ce dernier en termes d’éducation et d’information est inscrit à l’alinéa 13 de l’article 1er. J’ajoute que cette partie de l’article tendant à imposer des règles, elle ne nous paraît guère adaptée pour y faire figurer la notion d’encouragement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Au sujet de l’amendement n° 97, j’indique que les collectivités ont actuellement la possibilité, dans les conditions d’exécution d’un marché ou d’un accord-cadre, de faire référence aux clauses sociales ou environnementales. Plusieurs collectivités utilisent déjà ce moyen, par exemple pour introduire des produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration scolaire.
Selon le Gouvernement, la mise en avant de ces critères dans le choix du marché doit continuer à se faire sur la base du volontariat et en adéquation non seulement avec les moyens des collectivités, mais aussi avec le souhait des producteurs de s’organiser pour modifier leur mode de production ou d’élargir leurs débouchés à la restauration collective. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Il est proposé, à l’amendement n° 98, de faire financer la formation des agents par les collectivités. Compte tenu de l’argumentaire développé par la commission à l’appui de l’avis favorable qu’elle a émis, je m’avancerai sur la pointe des pieds : ne m’opposant pas catégoriquement à cette proposition, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.
Monsieur Marsin, j’en viens à l’amendement n° 523 rectifié. Le Grenelle I a déjà fixé des objectifs en matière de produits biologiques dans la restauration publique, soit un taux de 20 %. Par ailleurs, le Gouvernement présentera tout à l'heure, toujours à l’article 1er, l’amendement n° 651 tendant à inclure également les produits issus des circuits courts. Il répond ainsi à la préoccupation que vous manifestez. Telle est la raison pour laquelle je me permets de solliciter le retrait de votre amendement.
L’amendement n° 99 me paraissant déjà satisfait, monsieur Raoult, j’émets un avis défavorable.
Enfin, la proposition formulée par l’amendement n° 100 ne relève pas du domaine législatif. Les contrôles seront réalisés par les inspecteurs des directions départementales interministérielles en charge de la protection des populations et seront ajustés en fonction des besoins.
J’ajoute que ce point sera intégré à l’évaluation du programme national pour l’alimentation prévue dans le texte. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je partage l’objectif fixé par la commission et par le Gouvernement d’assurer une qualité régulière dans la restauration scolaire. Pour autant, est-il bien raisonnable d’imposer de nouvelles charges et normes aux collectivités dans le contexte budgétaire actuel ?
Les propos tenus dans les réunions auxquelles il nous est donné d’assister, comme sur l’ensemble de ces travées, soulignent tous la nécessité de mettre fin à l’inflation des normes.
Or je constate qu’il est question, aujourd'hui, d’en ajouter une couche supplémentaire !
À l’évidence, les élus sont conscients des efforts qui sont nécessaires en matière de qualité des repas servis aux enfants. Ils y travaillent quotidiennement, notamment en favorisant l’arrivée progressive des produits biologiques dans la restauration scolaire.
S’il convient de fixer un cadre à la composition des repas, cette évolution doit cependant se faire en concertation avec tous les acteurs de la restauration scolaire, en particulier avec les associations nationales d’élus, au premier rang desquelles l’Association des maires de France.
Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à créer un groupe de travail incluant l’ensemble des associations. Je souscris à cette proposition, et je vais retirer l’amendement n° 512 rectifié.
Mais il faut que la concertation ait réellement lieu. Je rappelle que le décret, actuellement en préparation et dont nous avons eu connaissance, est inapplicable dans la plupart des cantines scolaires. Il faut donc revoir les choses au fond et reprendre la rédaction du décret en concertation avec les associations d’élus.
Aussi, je souhaite que vous vous engagiez à ce que les choses se passent de cette façon, et je retire l’amendement.
L'amendement n° 512 rectifié est retiré.
La parole est à M. Gérard César, rapporteur.
Pierre Jarlier m’a effectivement indiqué voilà quelques jours que le décret était dans les « tuyaux ».
Monsieur le ministre, je vous demande à mon tour d’intervenir auprès de votre collègue M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, afin d’empêcher la publication du décret tant que le présent texte de modernisation de l’agriculture et de la pêche ne sera pas voté. Il faut absolument que ce décret soit différé pour aujourd’hui au moins, mais aussi peut-être pour demain.
Et je remercie Pierre Jarlier d’avoir retiré son amendement.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 513 rectifié.
Je ferai deux observations qui seront valables aussi bien en ce qui concerne l’amendement n° 513 rectifié que pour toute la série des autres amendements faisant l’objet de cette discussion commune.
Cette noble et haute assemblée sort d’un très long débat au cours duquel on nous a demandé de valoriser l’intelligence des territoires.
Or je constate que, sur un sujet aussi important, on ne fait absolument aucune distinction entre les zones rurales et les zones urbaines. Pourtant, la façon dont les repas sont préparés ou dont les cantines sont tenues dans des communes rurales n’a rien à voir avec ce qu’il en est dans des agglomérations comme Lyon, Marseille ou Paris.
À l’instar de ce qui se passe dans d’autres domaines, l’inflation de normes va avoir pour effet de désespérer complètement les communes, les intercommunalités ou les regroupements pédagogiques qui font des efforts surhumains pour maintenir à la fois des écoles et des cantines scolaires.
Les repas de nos enfants vont finir par être préparés dans les cuisines des hôpitaux les plus proches. En l’occurrence, le mieux est l’ennemi du bien. Il faut certes des normes, mais comment voulez-vous qu’une mère de famille ou le membre d’une association d’aide à domicile qui vient éplucher les légumes, faire la cuisine, se procurer de la viande à proximité, puisse respecter les valeurs nutritives pour la cantine scolaire ?
Le décret qui sera pris devra impérativement respecter les territoires en ce qui concerne l’approvisionnement.
Mais il faut aussi se montrer un peu raisonnable et faire la part des choses. Les territoires ont une certaine intelligence, nous dit-on, mais, en l’occurrence, il me semble qu’on les conduit à une certaine désespérance !
Monsieur le ministre, j’ai bien entendu qu’un décret, indispensable pour que les dispositions législatives puissent s’appliquer, était en préparation et que le Parlement serait associé à sa rédaction, ce que M. le corapporteur vient de confirmer.
S’agissant de l’excès de normes souligné par Nathalie Goulet, dont je partage les propos, je donnerai un exemple que vous pourrez peut-être retenir dans la perspective de l’élaboration du décret.
Nous sommes aujourd’hui dans la situation absurde où vous pouvez vous approvisionner auprès du boucher du village si vous avez quatre-vingt-dix-neuf rationnaires, mais si vous en avez cent un, vous devez vous rendre chez un boucher disposant d’un laboratoire, dont il n’a pas besoin ! Pourtant, ce qui compte avant tout, me semble-t-il, c’est de savoir si l’hygiène est respectée.
Les enfants peuvent manger le soir un bifteck acheté par leurs parents chez boucher du quartier, auprès duquel l’école ne peut se fournir pour le repas du midi ! C’est insensé !
Qui plus est, les conséquences économiques ne sont pas négligeables, car si la commune avait la possibilité de s’approvisionner chez le boucher du coin, ce dernier pourrait probablement poursuivre son activité dans la commune.
Si, dans la rédaction du décret, vous pouviez donc supprimer cette petite phrase absurde qui empêche aujourd’hui le restaurant scolaire comptant cent ou cent deux élèves de s’approvisionner chez le boucher local, vous contribueriez à régler nombre de problèmes et vous permettriez à nos communes de conserver davantage de commerces locaux.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.
La question dont nous débattons est très difficile, mes chers collègues.
J’ai moi-même vécu l’évolution qui vient d’être évoquée. Nous avions une cantine en régie municipale dont nous étions très fiers, mais nous n’avons pas osé la garder par crainte des inspections vétérinaires successives.
Une autre difficulté existe : lors du lancement de l’appel d’offres, on sait à l’avance qui va l’emporter, puisque deux ou trois prestataires se partagent le marché sans se faire trop de concurrence. Il en résulte que les prix sont parfois un peu élevés.
En milieu rural, les choses sont extrêmement difficiles. Les maires se battent pour garder leur école, où ils doivent organiser une restauration scolaire pour seulement dix, vingt ou trente gamins.
Cela étant, le problème de la sécurité alimentaire est réel. Ainsi, pas plus tard qu’hier, mon boucher de quartier a connu un sérieux problème sanitaire. Heureusement que je ne lui avais pas acheté de pâté !
Sourires
Pour participer régulièrement à la commission municipale des menus, je peux vous dire que les parents d’élèves sont très vigilants sur la qualité des produits servis à la cantine scolaire. Ils veulent généralement que leurs enfants y mangent beaucoup mieux qu’à la maison.
Nous sommes aussi confrontés aux habitudes alimentaires très stéréotypées des enfants. Ainsi, dès que l’on essaie d’élargir la palette des produits proposés, comme nous l’avons nous-mêmes fait, depuis septembre, en passant aux produits issus de l’agriculture biologique, les trois quarts des repas préparés finissent à la poubelle et les enfants rentrent chez eux en disant qu’ils n’ont pas déjeuné.
Dans ces conditions, la seule solution pour les communes rurales consiste à se regrouper au sein d’une intercommunalité qui prend en charge la fonction de fabrication des repas dans une cuisine centrale employant un personnel qualifié, qui a accepté de recevoir une formation.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
La pression que les parents d’élèves exercent sur les élus que nous sommes nous incite inévitablement à ouvrir le parapluie en matière de sécurité alimentaire.
Mais le problème du coût constitue une difficulté supplémentaire. Car si nos chers parents d’élèves aspirent à des repas de qualité, ils voudraient les avoir pour presque rien, et n’acceptent pas de les payer à leur prix de revient. Le pain du boulanger du coin est en général meilleur que le pain caoutchouteux du gros industriel du Val de Sambre, mais il est aussi deux fois plus cher !
Au total, si nous pouvons être fiers d’avoir ce débat entre nous ce soir, il est néanmoins très difficile.
Monsieur Raoult, il ne me paraît pas très réaliste, étant donné la configuration de nos territoires, de vouloir créer des cuisines centrales dans tous les secteurs ruraux.
Je souscris pleinement aux arguments de Mme Goulet et de M. Revet : il faut dissocier la situation des secteurs urbains et celle des secteurs ruraux. Tel est d’ailleurs le sens de l’amendement n° 523 rectifié bis, même s’il n’est sans doute pas encore tout à fait au point.
En effet, on ne peut pas appliquer les mêmes normes et les mêmes contraintes à une cantine scolaire où les repas sont préparés par des bénévoles, des associations, voire des familles, et à une grande société qui fournit des cantines scolaires en repas tout préparés.
Le décret devrait tenir compte de ces différences de situation. Je rectifie donc en ce sens cet amendement en prévoyant que le décret s’appliquerait à des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés servant quotidiennement un nombre de repas fixé par décret. Ainsi, un seuil minimum serait fixé dans l’attente de la préparation de ce décret, ce qui constituerait une solution de repli.
Je suis donc saisi de l'amendement n° 513 rectifié bis, présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, Amoudry, B. Fournier, J. Blanc et Carle, et ainsi libellé :
Alinéas 21 à 27
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« . - Les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés, servant quotidiennement un nombre de repas fixé par décret, sont tenus de respecter des règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu'ils proposent, déterminées par décret. »
La parole est à M. le président de la commission.
Ce débat est très intéressant. J’ai bien entendu les propos de Paul Raoult et je dois dire que j’ai vécu un peu la même situation.
Je voudrais dire à Pierre Jarlier et Charles Revet qu’il ne faut pas confondre deux choses, c'est-à-dire l’approvisionnement de proximité et la qualité nutritionnelle.
Le texte proposé pour l’article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime prévoit que « les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire publics et privés sont tenus de respecter des règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu’ils proposent déterminées par décret ». J’ai cru comprendre qu’il existait un projet de décret, ce que M. le ministre nous confirmera sans doute.
On ne peut aller à l’encontre de la qualité nutritionnelle, qu’elle s’applique à dix repas par jour ou à plus de 2 500 repas. Cela n’empêche nullement une petite cantine de s’approvisionner chez le boucher local, dès lors que les règles nutritionnelles sont respectées dans la distribution.
On ne saurait, en effet, concevoir qu’une petite cantine accueillant trente à cinquante enfants ne respecte pas les mêmes règles d’hygiène que les plus grandes structures lors de l’achat des produits.
L’expérience que j’ai dans ma commune me montre que l’on peut très bien acheter la viande ou le pain chez les commerçants locaux. Je peux d’ailleurs citer l’exemple d’un collège et d’une maison de retraite.
Je comprends certes l’esprit qui anime l’Association des maires de France, mais il ne me semble pas opportun de fixer des seuils.
Comme vient de le dire le président de la commission, ce débat est passionnant. Cela étant, on ne peut pas avoir une restauration collective pour les communes qui servent moins de 2 500 repas par an et une autre pour les plus grands établissements.
Nos enfants ont les mêmes droits, qu’ils fréquentent les écoles des petites ou des grandes communes. Il paraît logique que les règles nutritionnelles s’appliquent à tous. De plus, il arrive fréquemment aujourd’hui que les enfants mangent mieux dans les restaurants scolaires que le soir chez eux.
Ne faisons pas de différence entre les rats des champs et les rats des villes !
Sourires
Nouveaux sourires.
Je partage évidemment les arguments avancés par M. le rapporteur.
Je prends toutefois devant vous l’engagement que les décrets sur lesquels nous travaillons ne sortiront pas sans que vous soyez préalablement consultés sur leur rédaction.
J’ai par ailleurs écrit au président de l’Association des maires de France, Jacques Pélissard, et il est évident que nous ne prendrons pas ce décret avant d’avoir procédé à toutes les consultations nécessaires, avec l’Association des maires de France et avec toutes les collectivités locales concernées.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.
Non, je vais le retire, monsieur le président, tout en demandant instamment à M. le ministre que la préparation du décret tienne compte de la diversité des modes de préparation des repas, selon que l’on se trouve en milieu rural ou en milieu urbain.
Les rats des champs et les rats des villes, ce n’est pas tout à fait la même chose, monsieur le rapporteur !
Sourires
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Non, monsieur le président, je le retire au profit de l’amendement n° 98, similaire mais mieux rédigé.
J’ai entendu M. le ministre s’exprimer sur ce sujet et j’ai trouvé ses propos quelque peu surprenants. En effet, nous dire que 7 % de surcoût sur l’alimentation, c’est peu de chose, est étonnant de la part d’un membre du Gouvernement.
Hier, en commission de l’économie, un certain nombre de collègues de la majorité sénatoriale sont intervenus pour dire tout le bien qu’ils pensaient des conséquences économiques, sur l’équilibre des exploitations, d’un certain nombre de décisions normatives, réglementaires, voire législatives, qui portent atteinte à la compétitivité des exploitations agricoles. Dont acte !
Mais il me semble que l’on pourrait étendre l’analyse faite hier à la disposition figurant dans le projet de loi et que l’amendement n° 95 vise à dénoncer : je veux parler du transfert de charges que cela induit, une fois encore, pour une collectivité.
Il est vrai que le Gouvernement est coutumier du fait et ce ne sont pas les présidents de conseil général qui démentiront les charges transférées aux collectivités.
On peut effectivement se rendre populaire à bon compte. Voilà deux ans, une décision prise sur les régimes indemnitaires des sapeurs-pompiers a été payée, et à un haut niveau, par les collectivités. Je constate que dans le droit fil de ce qui a pu être fait à ce moment-là, le Gouvernement persiste et signe.
M. le rapporteur a évoqué le coût représenté par les budgets des cantines et des restaurants scolaires pour les collectivités, et jusque-là, je partage son avis.
En réalité, on voit bien la part de plus en plus importante que représente, pour le budget général des communes, la somme versée au budget particulier des cantines et des restaurants scolaires, du moins quand il y a un budget annexe.
La crise sociale que nous traversons a aujourd'hui un impact, avec des impayés qui ne cessent d’augmenter, et les gens n’en peuvent mais.
Nous assumons donc déjà ces surcoûts-là.
Par ailleurs, j’observe – et beaucoup d’autres avec moi – que le Gouvernement est prompt à nous opposer en toutes circonstances, et de plus en plus souvent, l’article 40 de la Constitution. Chaque fois que nous formulons une proposition qui générerait – parfois on s’interroge – des dépenses pour le budget de l’État, on nous oppose l’article 40.
Je souhaiterais que, dans un cas comme celui qui nous occupe en cet instant, le Gouvernement s’applique la jurisprudence qu’il prétend nous appliquer en d’autres circonstances.
Applaudissements et sourires sur les travées du groupe socialiste. – M. Gérard Le Cam applaudit également.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Monsieur Marsin, l’amendement n° 523 rectifié est-il maintenu ?
Compte tenu des explications de M. le ministre et des engagements pris, je le retire, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 32 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mme Henneron, MM. Le Grand, Gouteyron, Beaumont, Pierre, Doublet, Laurent, Trillard et Merceron, Mme Morin-Desailly et M. Bailly, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 28
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Afin de répondre dans les meilleures conditions aux besoins alimentaires des plus démunis, il est mis en place une politique de stockage de tous produits alimentaires sous les formes les plus appropriées. La gestion de ce dispositif se fera sous la responsabilité de France Agrimer.
La parole est à M. Charles Revet.
J’ai conçu cet amendement il y a un mois, lors d’une réunion préparatoire de la prochaine PAC, en entendant un responsable nous expliquer comment fonctionnent l’agriculture américaine et un certain nombre de dispositions qui la concernent.
J’ai appris alors qu’à certains moments, en cas de surproduction, des associations américaines, utilisant des crédits de l’État américain, achetaient des produits et les stockaient afin de pouvoir ensuite les utiliser pour approvisionner les plus démunis, qui, me semble-t-il, sont très nombreux aux États-Unis.
Monsieur le ministre, je me suis dit que l’on pouvait peut-être calquer cette disposition chez nous. J’entends bien que la régulation relève de la responsabilité de l’Union européenne et non pas de chaque État.
En revanche, il n’est pas interdit, me semble-t-il, que des associations puissent s’organiser afin de pouvoir acheter des produits lors d’une période de surproduction et les stocker pour les utiliser ultérieurement. D’autant que j’ai appris aussi ce jour-là que la Communauté européenne dépensait 500 millions d'euros chaque année pour aider les pays s’occupant des plus démunis.
Je prendrai un exemple simple et précis. Je suis élu d’une région qui produit beaucoup de coquilles Saint-Jacques, que tout le monde apprécie sans doute. Il arrive de temps à autre, en raison d’une surpêche, laquelle engendre une mévente, que ces produits soient retirés du marché, parfois rejetés à la mer, voire envoyés à l’équarrissage.
Je trouve cela scandaleux et il me paraîtrait tout à fait légitime que dans des périodes de surproduction les associations caritatives ou autres qui aident les plus démunis puissent acheter ces produits au moment où les cours sont moins élevés pour les réutiliser ultérieurement après les avoir conditionnés, congelés par exemple.
C’est dans cet esprit que j’ai proposé cet amendement.
D’abord, ce serait faire œuvre utile à l’égard des plus défavorisés car il s’agit non pas d’une marchandise de deuxième catégorie, mais de la même marchandise en surplus. En même temps et c’est, me semble-t-il, le sens de la démarche américaine, cela permettrait d’alléger les surproductions et, donc, d’offrir des débouchés supplémentaires dans ces périodes, et ce quel que soit le domaine de production concerné.
Le sous-amendement n° 673, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Dernier alinéa de l'amendement n° 32 rectifié bis
Après la première phrase
insérer une phrase ainsi rédigée :
Les associations œuvrant pour l'aide alimentaire aux plus démunis peuvent s'organiser pour acheter des produits alimentaires en période de surproduction quel que soit le domaine de production, et les stocker en bénéficiant des dispositions financières prévues à cet effet par l'Union Européenne.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Il s’agit d’élargir le champ d’application de l’amendement et de le préciser.
Nous avons vécu exactement le même problème toute l’année dernière avec cette question récurrente de surproduction, d’un côté, et de besoins, de l’autre, avec la crise du lait. Nous ne savions pas comment faire pour avoir une attitude positive, cohérente et sociale face à ces litres de lait qui étaient déversés dans nos rues, en nous disant que par ailleurs de nombreuses personnes avaient besoin de ce produit, en France ou à l’étranger.
Il existe des dispositions pour le stockage, qui sont des dispositions européennes, semble-t-il extrêmement contraignantes, sur lesquelles, dans le cadre des réunions que nous avons eues sur ce sujet, monsieur le ministre, vous vous étiez engagé à travailler de façon à pouvoir reconstituer les stocks d’urgence et afin que le lait fasse notamment partie des matières ou des produits pouvant servir dans ce cas.
Eu égard à l’opinion publique, au consommateur et à toutes les personnes qui, de plus en plus, utilisent les services des réseaux, comme les Restos du cœur, lesquels, dans une petite ville comme Flers, distribuent 33 000 repas, chiffre qui est absolument effrayant, il est extrêmement important de pouvoir favoriser les associations qui utiliseraient ces stocks.
Les deux dispositions présentées vont dans le même sens. Elles vont aussi dans le sens de l’article 1er du projet de loi, puisqu’il s’agit de donner la meilleure qualité de produits à tout le monde, y compris aux plus démunis. Et même si la rédaction n’est pas parfaite pour cette lecture au Sénat, nos collègues de l’Assemblée nationale pourront éventuellement la réécrire, mais notre assemblée s’honorerait en votant ces dispositions.
Notre collègue Charles Revet propose l’instauration d’un stockage national, mais, il le sait et il l’a dit lui-même, le stockage de produits alimentaires relève de la politique communautaire.
L’aide alimentaire aux plus défavorisés constitue à la fois une politique sociale et une politique d’aide aux agriculteurs. Mais elle relève également – M. le ministre l’affirmera sans doute tout à l’heure – de l’Union européenne, qui y consacre tout de même 500 millions d’euros. Notons que dans le cadre de l’aide alimentaire, les denrées sont choisies par les autorités nationales.
Il paraît donc difficile, dans le cadre juridique actuel, de définir une politique nationale autonome de stockage à des fins sociales. Rappelons surtout que lorsqu’il y a surproduction de fruits et légumes, ce sont des denrées périssables et on ne peut pas donner des fruits qui, malheureusement, seraient abîmés.
La commission demande le retrait de l’amendement n° 32 rectifié bis. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 673 est intéressant. Il va dans le même sens que l’amendement n° 32 rectifié bis, mais il est de peu de portée opérationnelle. De plus, il s’applique à un amendement sur lequel la commission a émis un avis défavorable parce qu’il est incompatible avec le droit communautaire.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ce sous-amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable, ma chère collègue.
Le Gouvernement émet un avis défavorable, même si l’idée est généreuse parce que l’on est vraiment au cœur de la politique communautaire.
C’est toujours la même chose : si vous imposez des obligations nationales à une politique communautaire, soit vous êtes en contravention avec la règle communautaire, soit vous perdez le soutien communautaire au nom du principe de subsidiarité.
Je rappelle, pour donner des chiffres précis, que les banques alimentaires perçoivent de l’Union européenne, au titre du stockage, 30 millions d'euros par an et que les Restos du Cœur reçoivent 20 millions d'euros chaque année au titre de l’aide alimentaire.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je suis ennuyé, monsieur le ministre : autant je suis d’accord avec le fait que l’État ne peut pas organiser une politique de stockage, autant je suis un peu surpris de vous entendre dire que des associations qui s’organisent pour stocker des produits, même avec des financements européens, auraient l’interdiction de le faire. Ce n’est pas l’État.
Mon amendement était incomplet, j’en conviens, mais l’ajout prévu au travers du sous-amendement, me semble-t-il, le transforme en une autre disposition, et cela m’ennuie, par delà l’aspect un peu scandaleux de la destruction de marchandises de qualité.
Monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas de donner des produits périmés. Il y a aujourd'hui d’excellents modes de conservation. Ce n’est peut-être pas vrai dans l’ensemble des domaines, mais il y en a pour lesquels cela se fait très bien. Et à un moment où l’on manque de marchandises, je suis un peu surpris. Mais peut-être allez-vous m’apporter des précisions sur ce point, monsieur le ministre.
Mon amendement était sans doute un peu limité, mais dès lors que, avec l’ajout prévu par le sous-amendement, on y introduit la notion d’associations susceptibles d’acheter et de stocker, on en change la nature.
Monsieur le ministre, j’aimerais que vous nous précisiez s’il y a effectivement des problèmes à ce niveau car il s’agit non plus du domaine public, mais du domaine privé.
La question posée est difficile, et je ne peux pas vous cacher que j’éprouve un certain malaise à entendre demander que soient trouvées les meilleures solutions pour répondre aux besoins des plus défavorisés et, surtout, à lire dans l’exposé des motifs de l’amendement que les besoins à couvrir pour les plus démunis seront de plus en plus importants. Cela me laisse quelque peu perplexe.
J’ai participé à une mission à laquelle le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, avait demandé de travailler sur le thème de la « transformation des modes de vie, des comportements et de la consommation ». Je pense, mes chers collègues, qu’il est de mon devoir de porter à votre connaissance un extrait du rapport officiel remis par la mission, extrait qui traite de la nécessité de « mettre fin aux circuits de consommation discriminant des pauvres » :
« Les distributions alimentaires de toute nature représentent aujourd’hui en France un équivalent quotidien de 2, 5 millions de repas. On a donc institué, année après année, un véritable circuit de consommation spécifique pour les pauvres.
« Il est distinct des autres circuits (il faut justifier de sa situation pour y avoir accès).
« Il ne conduit pas au droit commun (dans certains cas, il est d’ailleurs pris en compte parmi les ressources des ménages pour calculer le montant des prestations auxquelles ils auraient droit).
« Il contribue à stigmatiser ceux qui l’utilisent quelles que soient la bonne volonté et la qualité de l’engagement des personnes qui animent ces réseaux. »
Le rapport reproduit ici un témoignage recueilli sur le terrain, et je crois qu’il est bon que parfois nous aussi en entendions : « Quand je vais aux distributions, j’emporte des sacs Carrefour pour que les gens croient que je reviens de vraies courses ». La réalité humaine, c’est cela !
Le rapport poursuit : « La mission demande aux pouvoirs publics de prendre l’engagement de mettre en œuvre, avec l’ensemble de nos concitoyens et, en premier lieu, les acteurs et les bénéficiaires de ces circuits de distribution, les politiques alternatives à ces circuits de distribution dans un délai raisonnable. Ces politiques permettront de limiter le recours à ces modes de consommation aux seuls dépannages ponctuels liés à des situations d’urgence particulières, individuelles ou collectives. »
Monsieur le ministre, ma question est très claire : le Gouvernement est-il prêt à prendre devant la Haute Assemblée l’engagement de mettre en œuvre les politiques devenues indispensables pour limiter le recours à ces modes de consommation alimentaire, qui discriminent certains de nos concitoyens, aux seuls dépannages ponctuels ?
Il me faut d’abord « digérer » l’intervention de notre ami M. Muller…
Tout le monde a bien conscience qu’au moment de leur création les Restos du cœur et les autres associations œuvrant dans le même domaine pensaient n’être que provisoires.
Mme Nathalie Goulet. Personne n’a envie de les voir durer, et il n’est dans l’intention d’aucun des acteurs de ce mode de distribution d’exercer une action discriminante. Chacun fait exactement ce qu’il faut, et je peux attester que, par exemple, les responsables des Restos du cœur que je croise régulièrement font tout le nécessaire pour que leur local ait l’apparence la plus normale possible
M. Jacques Muller opine.
La mission évoquée par M. Muller est probablement très intéressante, mais il me semble qu’elle est restée bien éloignée des réalités du terrain. Sans cela, comment aurait-elle pu demander que le Gouvernement engage une action « dans un délai raisonnable » ? Sait-elle ce que c’est que d’être face à des personnes qui ne savent pas de quoi elles-mêmes et leurs enfants déjeuneront ou dîneront ? Je crois que les Restos du cœur, que Charles Revet, sont plus proches de la réalité que le rapport cité !
Cela étant, je comprends bien le problème que posent les associations qui, comme les entreprises, bénéficient de subsides européens. Mais je suis partagée, car, d’un autre côté, permettre aux associations d’acheter et de stocker, c’est aussi, d’une certaine façon, contribuer à maintenir les cours…
… de produits qui sont de première qualité.
Je ne connais pas le rapport qu’a cité M. Muller et, compte tenu des extraits qu’il vient d’en lire, je n’ai pas l’intention de le connaître. Mais je suis sûre d’une chose : je ne supporte pas que soient déversées des caisses et des caisses de nourriture quand, dans le même temps, des gens, afin de pouvoir se nourrir, vont récupérer des produits dans les poubelles du Carrefour dont vous vantez les mérites.
Je ne sais pas comment régler le problème, je ne sais pas comment rendre le stockage possible, mais je suis absolument certaine que l’on peut faire quelque chose, et je suis convaincue que la commission de l’économie, après ce débat ou peut-être même durant ce débat, trouvera une solution.
J’ignore quel sort Charles Revet entend réserver à son amendement et, l’accessoire suivant le principal, je suivrai évidemment son avis. Mais quoi qu’il advienne, monsieur le ministre, nous nous heurtons là à un vrai problème. Alors que certaines personnes ont besoin de nourriture et n’y ont pas accès, on assiste à des crises de surproduction, et l’été va encore nous en apporter son lot !
Il nous faut trouver, par exemple par un biais associatif – mais tout en laissant aux territoires la possibilité de s’organiser –, le moyen, sans passer par l’Europe, d’arrêter ce gâchis permanent qui s’étale sur nos écrans de télévision, en particulier lors de ces manifestations où sont déversés des choux-fleurs bretons, des fruits, des légumes, du lait… La situation est insupportable, et nous devons la régler. On sait le nombre de personnes qui ont besoin de cette nourriture, et il n’y aurait aucune solution pour la distribuer ? Parfois, c’est vrai, son transport coûterait plus cher que sa destruction !
Le problème relève de l’éthique et de la morale : malgré les rapports qui dénoncent le fait que les bénéficiaires doivent prouver leur indigence, il y a urgence. Il faut que la commission se penche sur cette question, ou bien que soit constitué un petit groupe informel dans lequel nous travaillerions sur les moyens alternatifs que vous pourriez nous suggérer. Car dans tous nos départements, mes chers collègues, il y a à la fois des régions de production et des personnes qui, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines, sont dans le besoin. Je suis bien certaine que les associations, les aides à domicile en milieu rural, tout ce que le territoire comporte de forces actives, parviendraient à mettre en contact ceux qui, parce qu’ils ne peuvent pas la vendre, risquent de jeter la nourriture qu’ils produisent avec ceux qui au contraire recherchent de la nourriture pour nourrir ceux qui en ont besoin. Quel que soit le côté discriminatoire que vous y voyez, mon cher collègue, je pense que l’urgence est de régler d’abord ces problèmes-là.
Je me rangerai donc derrière Charles Revet, mais, j’y insiste, nous sommes au cœur d’un vrai problème, auquel nous devons trouver une solution intelligente.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Marie-Thérèse Bruguière applaudit également.
Je partage très largement les propos de Mme Goulet, et je serais tentée de dire à M. Muller, avec qui je suis très souvent d’accord, que parfois le mieux est l’ennemi du bien : dans la situation d’urgence où nous sommes, nous ne pouvons pas attendre.
Je voudrais, mes chers collègues, vous faire part de la double expérience qui est la mienne.
J’ai participé pendant quatre ans aux travaux du Parlement européen, et j’ai constaté, année après année, combien la dotation pour l’aide alimentaire était fragile. Chaque année elle est remise en question, et chaque année il faut se battre pour qu’elle soit maintenue. Alors, ne considérons pas que les choses sont acquises une fois pour toutes : c’est beaucoup plus compliqué que cela.
Par ailleurs, j’ai été maire pendant sept ans. J’ai donné aux Restos du cœur de ma petite commune – cela faisait partie de mes priorités – un local leur permettant d’accueillir dignement les personnes qui relèvent de leur aide, qui est notamment alimentaire, mais pas seulement. Et si je comprends bien les réticences que peut susciter l’idée d’institutionnaliser ce régime, je pense que l’on ne peut pas, dans l’état actuel des choses, rester sans rien faire face à des personnes complètement démunies et sans aucun moyen de survie, face à des familles en grande difficulté, notamment des familles monoparentales. Dans ma commune, en sept ans, le nombre de familles, et donc de personnes, ayant bénéficié des aides a doublé.
Malheureusement, la crise est là ; malheureusement, il y a trop d’exclusion. Il faut les combattre, il faut mettre en place des politiques, et le Gouvernement doit s’y attacher encore plus dans cette période de crise. L’urgence est grande, et je partage tout à fait l’opinion de M. Revet : les organisations non gouvernementales, les ONG, comme on les appelle, ont la possibilité d’utiliser comme elles l’entendent l’aide alimentaire que leur apporte l’Europe.
Par ailleurs, ce moyen de stockage ne me paraît pas négligeable pour la régulation des prix.
MM. Claude Bérit-Débat et Didier Guillaume, ainsi que Mmes Nathalie Goulet et Marie-Thérèse Bruguière applaudissent.
Mes chers collègues, au risque de vous surprendre, je dois vous dire que je suis d’accord avec vous.
Moi aussi, dans ma commune, je travaille avec les Restos du cœur, moi aussi je connais ces personnes, et je suis d’accord avec vous lorsque vous évoquez les gaspillages.
Je voulais simplement me faire ici l’écho de ce qui est tout sauf un groupuscule, puisque la mission a été présidée par le président de l’association ATD Quart Monde France – c’est loin d’être une association marginale et elle fait « remonter » la parole des plus pauvres, de ceux qui ne s’expriment jamais. Ils considèrent qu’institutionnaliser ce type de disposition ne va pas sans difficultés.
Aujourd’hui, il nous faut avant tout répondre aux besoins urgents, nous sommes tous d’accord sur ce point, et cela passe par le maintien de ce dispositif. Pour autant, il importe que, dans le même temps, nous nous fixions un cap, car ce n’est pas une bonne chose qu’une société comme la nôtre s’accommode, finalement, de la mise en place institutionnalisée des modes de consommation et de distribution en question.
C’était là tout le sens de mon propos.
Qu’il faille remédier à cette situation, j’en suis tout à fait convaincu. Que le ministère puisse ouvrir une discussion avec des parlementaires, voire envisager une mission parlementaire sur ce sujet, pourquoi pas ? Je suis ouvert à toute proposition.
Cependant, lorsque nous avons abordé l’examen du titre Ier du projet de loi, j’ai souligné qu’il s’agissait ici de jeter les bases de cette politique publique de l’alimentation que nous mettons en place, d’en fixer certains principes, de prévoir un certain nombre d’obligations, comme les règles nutritionnelles. Nous modifions également les règles des marchés publics afin que ces obligations soient véritablement contraignantes et que les circuits courts puissent être favorisés. Nous avons donc déjà posé certains jalons.
En revanche, sur l’amendement n° 32 rectifié bis et le sous-amendement n° 673, je voudrais vraiment me faire le relais de la demande de retrait formulée par M. le rapporteur.
Soit cet amendement et ce sous-amendement sont redondants par rapport à la situation actuelle – puisque, acheter des produits alimentaires en période de surproduction quel que soit le domaine de production, les associations le font déjà, de la même manière qu’elles font déjà du stockage –, et la loi, qui ne fera qu’entériner l’existant plutôt que de proposer des choses nouvelles, restera probablement en deçà des attentes qu’expriment, notamment, les associations sur le terrain. Soit on va encore un peu plus loin et on cite les dispositions financières prévues par l’Union européenne, et alors, j’insiste vraiment sur ce point, nous prenons un risque important vis-à-vis du principe de subsidiarité. À partir du moment où l’État français, par voie législative, établit que les associations doivent ou peuvent stocker, l’Union européenne sera fondée à arguer que nous ne respectons plus le principe de subsidiarité, puisque nous prenons en charge cette politique à sa place, pour retirer les subventions qu’elle accordait pour l’achat ou le stockage de denrées alimentaires par les associations. Je ne veux pas faire courir ce risque juridique-là aux associations !
Une nouvelle fois, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de travailler sur tous les domaines qui ont été ouverts, je suis prêt à examiner l’idée de créer une mission parlementaire, qui peut être intéressante, mais je crois plus raisonnable de retirer l’amendement plutôt que de nous exposer à une contravention au principe de subsidiarité.
Monsieur le ministre, je suis assez malheureux, car vous savez combien je vous apprécie et vous soutiens.
Mais il est des moments dans la vie où il faut savoir avancer et prendre des décisions.
Alors, si ce qui vous gêne, c’est la référence aux dispositions financières, il faut supprimer les mots « en bénéficiant des dispositions financières prévues à cet effet par l’Union européenne ».
Qu’il y ait alors redondance, je vous le concède, monsieur le ministre. Serait-ce pour autant la seule dans ce texte ?
Il ne me paraît pas anormal que le Parlement manifeste sa préoccupation, faisant savoir qu’il trouve tout à fait inacceptable qu’on ne prenne pas en compte les demandes et les besoins extrêmement importants des familles en difficulté alors que, dans le même temps, il existe des surplus inutilisés.
Afin qu’il n’y ait pas de référence européenne, je suggère donc à Mme Goulet de supprimer, dans le sous-amendement n° 673, le membre de phrase que j’ai cité à l’instant.
D’ailleurs, cette disposition pourra être modifiée ultérieurement. La discussion de ce projet de loi commence ici. Il sera examiné par l’Assemblée nationale. Une commission mixte paritaire aura lieu.
Je maintiens par conséquent mon amendement assorti du sous-amendement qui serait ainsi modifié.
Le problème demeurera. Madame Goulet, acceptez-vous néanmoins de rectifier votre sous-amendement dans le sens suggéré par M. Revet ?
Accessorium sequitur principale, je modifie mon sous-amendement en supprimant les dispositions relatives aux aides européennes, monsieur le président.
Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 673 rectifié, présenté par M. Dubois et les membres du groupe Union centriste, et qui est ainsi libellé :
Dernier alinéa de l'amendement n° 32 rectifié bis
Après la première phrase
insérer une phrase ainsi rédigée :
Les associations œuvrant pour l'aide alimentaire aux plus démunis peuvent s'organiser pour acheter des produits alimentaires en période de surproduction quel que soit le domaine de production, et les stocker.
Je ne puis vous la donner, mon cher collègue, car vous vous êtes déjà exprimé à deux reprises.
Non, on ne peut pas sous-amender un sous-amendement !
Je mets aux voix le sous-amendement n° 673 rectifié.
Le sous-amendement est adopté. – Mme Renée Nicoux applaudit.
L'amendement est adopté. – Mme Catherine Procaccia applaudit.
L'amendement n° 28 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mme Henneron et MM. Le Grand, Gouteyron, Vasselle, Beaumont, Pierre, Doublet, Laurent, Trillard, Bécot, Merceron et Bailly, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV. - L'article L. 641-19 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Un produit peut porter l'appellation « fermier » dès lors qu'il est vendu en l'état ou que sa transformation en produit fini respectera les méthodes traditionnelles de transformation. Cette transformation peut se faire soit sur l'exploitation elle-même, soit en un lieu où les producteurs se sont regroupés pour assurer l'élaboration du produit fini. Les modalités d'application seront définies par décret. »
La parole est à M. Charles Revet.
Nous allons très bientôt examiner l’amendement n° 651 du Gouvernement. Adopté ce matin en commission, il fait référence aux « produits faisant l’objet de circuits courts de distribution, impliquant un exploitant agricole ou une organisation regroupant des exploitants agricoles ».
Au terme d’une situation quelque peu paradoxale, aujourd’hui, si un produit est vendu à la ferme en l’état ou transformé, il peut porter l’appellation « produit fermier ». En revanche, il perd ce label si les agriculteurs ont choisi, pour une meilleure qualité de vie, de s’organiser en groupement – faculté au demeurant prévue dans le texte – afin de le transformer ensemble, non plus dans l’exploitation mais en un lieu au cœur du village.
C’est absurde ! En effet, l’acheteur d’un produit de ce type se préoccupe non du fait que celui-ci sorte de la ferme ou vienne d’à côté, mais de la méthode de transformation. Ce qui compte pour le consommateur, c’est de retrouver les qualités gustatives du produit, préservées grâce au procédé traditionnel de transformation.
Je suggère donc de maintenir l’appellation « produit fermier » dès lors qu’a été utilisée la méthode traditionnelle, quelle que soit l’origine du produit, dans l’exploitation ou dans le cadre d’un regroupement extérieur à l’exploitation.
Il paraît, en effet, excessivement sévère de ne pouvoir appeler « fermier » des produits issus de la ferme mais transformés ou travaillés, pour des raisons techniques, en dehors de l’exploitation.
Nous craignons toutefois d’affaiblir l’appellation fermière et de compromettre la définition du produit en permettant une trop large diffusion.
Sur cette question importante, nous souhaiterions entendre l’avis de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
L’article L. 642 du code rural définit déjà le qualificatif « fermier ».
Dans le droit fil de l’amendement, j’insiste auprès de M. Revet : le législateur doit veiller à ne pas être trop bavard ! Il est très bien de commenter, d’ajouter des choses bonnes et généreuses, mais ce que je souhaite, c’est que la loi soit opérationnelle et efficace. On peut se faire plaisir en ajoutant, ici ou là, des éléments intéressants et utiles, qui renvoient à des vrais débats de société. Mais une loi est faite pour être efficace, pour fixer des règles et nous permettre de créer ce qui n’existe pas aujourd’hui ou de modifier ce qui mérite de l’être. Je le répète : l’adjectif « fermier » est déjà défini par l’article L. 642 du code rural. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de le faire figurer dans cette loi.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Monsieur le ministre, ma préoccupation est-elle satisfaite ? Une réponse positive, qui figurerait dans le compte rendu des débats publié au Journal officiel, dissiperait tout problème d’interprétation. Je répète ma question : si quatre, cinq ou dix agriculteurs se regroupent et mettent en place, en dehors du siège de l’exploitation, dans le cœur du village, une installation qui utilise les méthodes traditionnelles de transformation, me confirmez-vous le maintien de l’appellation « produit fermier » ?
Monsieur Revet, tout cela est déjà défini par le code rural. Je pense vraiment que votre préoccupation est respectée par les textes de loi en vigueur.
Si vous galvaudez le terme « fermier »…
… en ne faisant pas respecter un certain nombre de prescriptions définies dans le code rural quant à la signification du label « fermier », n’importe quel producteur de lait, d’œufs, de volailles va utiliser le label « fermier » pour une production industrielle.
Pour les volailles de chair, il existe un certain nombre de prescriptions, dont je vous épargne le détail, qui permettent d’établir que vous produisez de la volaille « fermière ». Attention à ne pas tirer les producteurs vers le bas en leur laissant entendre que tout peut être « fermier », pourvu qu’ils mettent simplement le label « fermier » !
Parce que le code rural me paraît répondre vraiment à votre préoccupation, parce que tout cela est clairement défini, il ne me semble pas nécessaire de le définir de nouveau dans la loi.
L’amendement n° 28 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 29 rectifié bis, présenté par MM. Revet et Etienne, Mme Henneron et MM. Le Grand, Gouteyron, Vasselle, Beaumont, Pierre, Doublet, Laurent, Trillard, Bécot, Merceron et Bailly, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ...- La vente sur le territoire national de produits alimentaires ayant utilisé pour la production, la conservation ou la transformation des substances ou des pratiques prohibées en France est interdite. Le non respect de ces dispositions peut être sanctionné d'une amende de mille euros. »
La parole est à M. Charles Revet.
Cet amendement, qui va dans le sens de préoccupations clairement manifestées, se justifie par son texte même.
Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut des produits de qualité. La France a édicté un certain nombre d’interdictions d’utilisation de produits soit pour la production, soit pour la transformation. Il serait anormal qu’un produit interdit par les normes françaises puisse être utilisé ailleurs et vendu, une fois fini, à l’intérieur de notre pays.
C’est vrai que nous donnons trop souvent l’impression d’imposer des contraintes qui pèsent sur notre compétitivité alors que nos partenaires ne les subissent pas.
Si l’idée est bonne, le texte présenté par Charles Revet ne peut être retenu. Le contrôle de l’accès aux marchés s’effectue sur la base d’une analyse des résidus. Si les taux limites, qui sont fixés assez bas, ne sont pas atteints, il n’y a aucune raison pour refuser l’entrée des marchandises sur le territoire national.
Cependant, et M. le ministre le confirmera certainement, il serait souhaitable que, dans les négociations internationales, une attention plus grande soit portée aux conditions de production.
Nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Toutes les décisions de refus d’importation de produits pour des raisons liées à des règles sanitaires, environnementales ou à des règles de bien-être animal sont strictement définies par le droit communautaire. Il n’est donc pas possible de fixer de nouvelles règles à l’échelle nationale. Ces règles communautaires sont elles-mêmes très strictes.
La vraie question – et je comprends parfaitement votre préoccupation, monsieur Revet – consiste à savoir si les contrôles opérés sur des produits importés en provenance de pays étrangers à l’Union européenne sont suffisants et assez rigoureux.
C’est un débat qui a lieu au sein de la Commission et du Conseil des ministres. Il rejoint la question de la préférence communautaire, à laquelle je suis, pour ma part, très favorable, je ne le cache pas.
On ne va pas demander à nos producteurs agricoles de respecter un certain nombre de règles sanitaires ou environnementales très strictes, dont le coût est très élevé et qui renchérissent le prix de leurs produits, et puis, dans le même temps, importer, sans les soumettre à un contrôle rigoureux, des produits d’Amérique du Sud ou d’Asie qui ne respectent pas les mêmes règles sanitaires.
Sur ce débat, je vous rejoins parfaitement. Ce problème, nous le réglerons non dans la loi française mais à l’échelle communautaire.
J’entends bien ce que vient de dire M. le ministre et je rejoins tout à fait les préoccupations qu’il a exprimées.
La question est de savoir quels sont les moyens que l’Union et la France mobilisent pour lutter contre la fraude ou s’opposer à des producteurs qui ne tiennent pas compte des normes européennes.
Il n’y a pas si longtemps, monsieur le ministre, on a fait chuter les cours du blé en France en laissant importer des blés produits en Ukraine dans des conditions sanitaires sans commune mesure avec celles qui sont en vigueur dans notre pays. C’’était de notoriété publique et pourtant, il ne s’est rien passé !
Il y a certainement des accords bilatéraux ou des accords passés entre l’Union et des pays extérieurs autorisant l’importation de produits qui viennent concurrencer les nôtres, dont les coûts de production n’ont rien à voir avec ceux de ces pays.
Afficher, dans le discours, la volonté de lutter à l’échelon national contre ce type de pratiques, c’est bien. Encore faudrait-il que le niveau européen suive ! J’espère que vous allez rassembler autour de vous une majorité équivalant à celle que vous avez évoquée lors des questions d’actualité au sujet des négociations avec les pays du Mercosur, afin que nous fassions comme ces pays au niveau européen pour tout produit importé !
Nous partageons tout à fait votre philosophie. Nous soutenons votre action. Il reste à savoir si nous sommes capables de mobiliser des moyens pour le faire.
Permettez-moi un parallèle rapide avec l’assurance maladie. Éric Woerth, qui s’est fixé comme ligne de lutter contre la fraude sur le territoire national, a obtenu des résultats tout à fait intéressants. Sachons en faire autant en ce qui concerne la production agricole !
Monsieur le ministre, je suis parti d’un exemple précis. Il se trouve qu’en 1987 j’étais rapporteur d’une loi sur les anabolisants. À ce moment-là et après avoir entendu tous les scientifiques, j’ai souhaité maintenir le texte en place.
La décision a été prise, par décret, d’interdire en France l’utilisation des anabolisants naturels d’origine française. Or la même année, en 1987, les Américains autorisaient l’utilisation des anabolisants naturels français sur le territoire des États-Unis. Aujourd’hui, la viande américaine contenant ces anabolisants peut entrer librement en Europe, alors que les Français n’ont pas le droit d’utiliser ces produits !
Nous devons donc faire preuve de prudence.
Vous dites que des dispositions nouvelles ont été prises. Certes ! Mais on nous demande de laver toujours plus blanc alors que les règles et dispositions européennes permettent de laisser entrer impunément dans l’Union des produits contenant des matières premières interdites en France, cela pose un vrai problème...
Cela étant dit, j’accepte de retirer cet amendement.
Je tenais à attirer votre attention sur ce point, monsieur le ministre : il faut édicter des règles qui soient communes à l’ensemble des pays européens et veiller à ce que de telles dispositions ne pénalisent pas les producteurs français.
L’amendement n° 29 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. le ministre.
Je remercie Charles Revet de sa décision de retrait.
Je tiens à préciser quelques points, afin d’éviter que l’on ne désigne un peu vite des boucs émissaires, par exemple l’Union européenne.
Le bœuf aux hormones n’est pas autorisé à l’importation en France. Lorsque les États-Unis ont voulu imposer l’importation de cette viande sur le territoire européen, nous avons saisi l’OMC : un panel de l’OMC, dû à la suite de la demande des Américains, s’est réuni et les vingt-sept États membres de l’Union se sont opposés à cette importation.
À Washington, voilà quelques mois, j’ai eu un échange très vif avec Tom Vilsack, mon homologue américain, qui voulait nous imposer l’importation du poulet chloré, et souhaitait qu’un panel de l’OMC se saisisse de cette question. Il arguait du fait que cette viande remplit tous les critères sanitaires pour être importée en Europe. La Commission européenne et les États membres ont rétorqué que ce n’était pas le cas, ce qui a créé un nouveau contentieux avec les Américains. Et je pourrais vous citer nombre d’exemples du même type...
Ces deux exemples montrent que l’Union européenne est moins laxiste qu’on ne le laisse entendre et veille à la sécurité sanitaire des consommateurs. Lorsqu’un différend nous oppose aux États-Unis dans ce domaine, nous l’assumons, et les panels de l’OMC ont pour fonction de nous aider à régler ces conflits.
L’amendement n° 651, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Au e) de l'article 48 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, les mots : « et de distribution » sont remplacés par les mots : «, des produits faisant l'objet de circuits courts de distribution, impliquant un exploitant agricole ou une organisation regroupant des exploitants agricoles ».
La parole est à M. le ministre.
Il s’agit de développer les circuits courts de distribution, chers à chacun d’entre vous dans cet hémicycle.
Cet amendement vise à permettre aux producteurs et aux groupements de producteurs d’accéder de manière préférentielle à la commande publique, et à renforcer l’intégration des circuits courts dans les modes de distribution.
Les amendements s’appuient sur des mesures déjà prévues dans le Grenelle de l’environnement. Ils tendent également à préciser certaines notions et à élargir leur application aux producteurs individuels.
Le Gouvernement propose de valoriser ces démarches par deux mesures, l’une réglementaire et l’autre législative. La première est une modification de l’article 48 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, qui fait l’objet du présent amendement. La seconde, que nous avons évoquée à plusieurs reprises, est une modification, par décret, de l’article 53 du code des marchés publics. Permettez-moi de vous citer les termes exacts de cette dernière modification, afin de vous montrer la crédibilité de l’engagement du Gouvernement en faveur des circuits courts : « Lors de la passation d’un marché, un droit de préférence est attribué, à égalité de prix ou à équivalence d’offres, à l’offre présentée par une société coopérative ouvrière de production, par un producteur agricole ou un groupement de producteurs agricoles, par un artisan, une société coopérative d’artisans ou par une société coopérative d’artistes ou par des entreprises adaptées ».
Pour la première fois dans le code des marchés publics, nous définissons très clairement une préférence pour le producteur agricole ou le groupement de producteurs agricoles, donc pour des circuits courts.
Vous me rétorquerez – nous avons déjà eu cette discussion lors des travaux au sein de la commission – qu’il aurait fallu aussi prévoir, en plus de la mention de producteur et groupement de producteurs, une indication sur le champ géographique, comme c’est le cas aux États-Unis. Dans ce pays, en effet, les structures de restauration collective ont l’obligation de s’approvisionner dans un champ géographique de moins de 50 kilomètres autour du lieu de leur implantation. Mais toutes les expertises juridiques que nous avons conduites montrent qu’une telle indication serait en contradiction totale avec le droit européen.
Aussi, je vous propose cette modification du code des marchés publics qui permet de mettre en place des circuits courts pour les producteurs et les groupements de producteurs. Je vous propose également, comme je l’ai déjà indiqué à plusieurs reprises, de poursuivre les demandes de modification du droit européen de la concurrence auprès de l’Union, pour, le moment venu, préciser encore les choses, lorsque nous aurons obtenu les modifications nécessaires.
Nous souhaitons tous privilégier les circuits courts ; c’est d’ailleurs une exigence du Grenelle I de l’environnement. L’avis de la commission est donc favorable.
Vous le constatez, nous pouvons être en symbiose, monsieur le ministre !
Sourires.
Cet amendement est une grande avancée de la part du Gouvernement. Plusieurs groupes avaient d’ailleurs fait des propositions en ce sens lors du Grenelle de l’environnement, mais elles avaient alors été rejetées.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que l’on ne peut pas aller plus loin et prévoir la possibilité de s’approvisionner dans une aire géographique restreinte. Je me demande bien pourquoi ! Il serait utile de faire une expertise sur ce point.
L’intention du Gouvernement est excellente, et je ne trouve rien à y redire. Je ne pense pas, cependant, que cet amendement réglera le problème des circuits courts et de l’approvisionnement dans un territoire. Mais je ne demande qu’à être convaincu !
Cela a été dit à plusieurs reprises : l’agriculture biologique est l’une des grandes absentes de ce projet de loi.
Je rappelle que le Grenelle de l’environnement a fixé un objectif de 6 % de la surface agricole utilisée en agriculture biologique en 2012, et de 20 % en 2020.
Le propre de l’agriculture biologique est de permettre l’approvisionnement sur un territoire géographique et par un circuit court. Or il existe aujourd’hui une véritable inadéquation de l’offre à la demande : l’agriculture biologique ne produit pas assez à l’échelon du département, même si les conversions en bio progressent.
L’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique a rendu public, hier, un rapport plutôt positif. Après deux années plutôt moyennes, le nombre d’exploitations agricoles qui se convertissent à l’agriculture biologique est en augmentation, et ce pour plusieurs raisons : tout d’abord, c’est dans l’air du temps ; ensuite, il existe une vraie demande ; enfin, et j’ai déjà eu l’occasion de le dire ici même, les agriculteurs ont compris qu’ils valorisaient mieux leurs produits ainsi.
Hélas ! on a beau dire qu’un droit de préférence est attribué à égalité de prix, force est de constater à l’occasion des appels d’offres, en matière de bio comme pour les autres produits, que les grandes entreprises pratiquent toujours des prix inférieurs à ceux des sociétés coopératives de production, les SCOP, des marchés de producteurs et des organisations placées sous l’égide des chambres d’agriculture. Nous devons donc faire évoluer le code des marchés publics. Nous proposerons plusieurs amendements en ce sens, visant à prendre en compte, entre autres éléments, le coût carbone ou le nombre de kilomètres parcourus.
Même si nous nous sommes à peine concertés, nous voterons tous cet amendement, parce qu’il constitue une avancée à la fois pour le Grenelle de l’environnement et pour le code des marchés publics. Au moment où nous souhaitons favoriser les circuits courts, il convient de saluer toutes les initiatives positives, et le présent amendement en est une.
Il faudrait toutefois aller plus loin, monsieur le ministre, concernant la modification de l’article 53 du code des marchés publics que vous avez citée tout à l’heure.
Je suis convaincu, pour ma part, que cet amendement peut permettre d’adresser un signal à l’ensemble des professions agricoles. L’idéal serait de le sous-amender – mais on ne sous-amende pas un amendement du Gouvernement –, en y ajoutant les mots « agriculture biologique », ou de prévoir d’autres contraintes liées, par exemple, au nombre de kilomètres parcourus.
Aujourd’hui, dans les départements, tout dépend de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Or le contrôle de légalité n’est pas le même d’une préfecture à l’autre, et d’un département à l’autre. Nous avons constaté que, dans certains départements, il était plus facile de s’approvisionner au travers de circuits courts, parce que la DGCCRF et le contrôle de légalité sont plus souples, mais que ce n’était pas le cas dans d’autres départements.
Je salue, encore une fois, l’objectif du Gouvernement ; mais il faut aller plus loin, pour donner du sens à ce texte.
Nous devons adresser un signe aux agriculteurs. Nous devons leur dire que nous entendons leur détresse et que nous allons leur permettre de soumissionner à des appels d’offres, ce qu’ils ne peuvent pas faire aujourd’hui.
Je reprends à mon compte les propos tenus par notre ami et collègue Charles Revet, qui souhaitait que le boucher du coin puisse approvisionner les petites cantines scolaires. Il faut envoyer des signes forts ! Il ne s’agit pas seulement d’ajouter des phrases au projet de loi...
En insérant dans le texte modifiant le code des marchés publics une mention disposant que la proximité est une priorité, nous ferions un grand pas en avant. Une telle disposition serait de nature à satisfaire à la fois les SCOP, les producteurs indépendants et les groupements de producteurs.
Nous allons également voter cet amendement.
Monsieur le ministre, vous souhaitez modifier l’article 53 du code des marchés publics en ajoutant au 1° du IV les mots « par un producteur agricole ». Cette modification est positive, car elle permet de négocier directement avec un producteur qui ne ferait pas partie d’un groupement de producteurs agricoles.
Nous nous interrogeons cependant sur les notions d’égalité de prix et d’équivalence d’offres, qui risquent de poser quelques difficultés par rapport au code des marchés publics, et de faire « retoquer » certains marchés.
Je ne crois pas que nous ayons intérêt, en l’état actuel de l’agriculture biologique, à déterminer un champ géographique. Il arrive souvent, en effet, que l’on soit obligé d’aller au-delà de 50 kilomètres, par exemple pour trouver certains produits, je pense notamment à la viande. Les légumes, en revanche, s’achètent plus facilement dans un rayon moindre.
Il nous reste à croiser les doigts en attendant les « saints sacrements » nécessaires. Les élus des collectivités souhaitent avoir les mains plus libres. Aujourd’hui, nous sommes un peu dans le flou – nous prévoyons des repas bio de temps à autre, par exemple –, et nous ne travaillons pas vraiment dans la légalité.
Des problèmes d’hygiène peuvent également se poser dans le domaine conventionnel, dans le domaine biologique ou dans le domaine des labels ; nous en connaissons tous des exemples. Peut-être faudra-t-il prévoir un agrément des fournisseurs, notamment dans le secteur de la viande, particulièrement sensible, et dont les approvisionnements doivent être encadrés.
Monsieur le ministre, je souhaite que vous m’apportiez une précision sémantique. Les entreprises adaptées, que vous avez évoquées, concernent-elles les ESAT, les établissements et service d’aide par le travail – les ex-CAT, centres d’aide par le travail –, nombreux en milieu rural ?
Monsieur le sénateur, si les ESAT que vous visez sont à caractère agricole et respectent les règles déterminées, ils seront évidemment concernés par la qualification « entreprises adaptées ».
Je souhaite maintenant répondre aux remarques qui ont été formulées.
Je salue tout d’abord l’avancée que nous marquons, fruit de notre effort commun. Je rappelle, comme M. Guillaume précédemment, qu’il s’agit de projets qui avaient été repoussés depuis plusieurs années. C’est une avancée importante.
Comme M. Le Cam l’a dit, l’ajout de la mention « un producteur agricole », qui semble anodine, constitue une avancée majeure. En effet, dans notre pays, c’est la première fois qu’un texte législatif offre à un exploitant agricole indépendant la possibilité de participer à des appels d’offres.
Le bio, quant à lui, est mentionné dans le Grenelle de l’environnement et des objectifs chiffrés sont fixés. Il dispose par conséquent de tous les soutiens nécessaires. Actuellement, on compte dix installations en bio par jour.
De fortes subventions sont accordées à ce secteur, qui bénéficie d’efforts importantsOr, en ma qualité de ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, en relation avec toutes les organisations syndicales, je ne vous cache pas que ces dernières, quelles qu’elles soient, ont parfois des réticences à l’égard de ces subventions, estimant que nous subventionnons un marché qui a des débouchés, alors que nous n’apportons pas d’aides équivalentes à d’autres marchés dont les débouchés sont moindres. Certes, cette argumentation peut être critiquée.
Monsieur Guillaume, je suis très convaincu par les circuits courts, qui traduisent une modification des comportements et de la commercialisation tout à fait nécessaire, répondant aux attentes sociales. Ce procédé est de surcroît beaucoup plus logique et raisonnable.
Mais, dans l’état actuel du droit européen, toute mention d’une indication géographique quelle qu’elle soit – proximité, voisinage, ou autre – sera immédiatement sanctionnée par la Commission européenne. C’est pourquoi nous n’avons pas fait figurer une telle mention.
Je tiens à le répéter devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, nous continuerons à nous battre pour une modification du droit européen de la concurrence. Le Président de la République lui-même est très déterminé pour que nous obtenions des avancées sur ce sujet. Effectivement, rien ne justifie de ne pas adapter un droit de la concurrence qui date de plusieurs décennies à des réalités radicalement différentes, et les circuits courts en font partie.
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote sur l'article 1er.
Je serai brève, car nous avons encore de longues réjouissances en perspective…
Cet article a marqué, et nous l’avons encore constaté à l’instant, un certain nombre d’avancées. Nous regrettons cependant que toutes les avancées que nous souhaitions n’aient pas été prises en compte. Aussi, nous nous abstiendrons lors du vote sur cet article, car, de notre point de vue, nous aurions pu aller beaucoup plus loin.
L’article 1er marque une grande avancée puisque, pour la première fois, est introduite dans notre législation la notion de « politique publique de l’alimentation ». Il était temps ! En témoignent les dérives de notre modèle alimentaire, qui subit l’invasion du modèle américain.
Cette notion figure dans la première partie de la loi de modernisation de l’agriculture : c’est une excellente chose. Ainsi, nous affichons publiquement que, grâce à l’agriculture, nous nourrissons d’abord les hommes.
D’excellentes dispositions ont été adoptées, notamment la dernière que nous venons de voter ; c’est également le cas dans le domaine de l’éducation ou de la formation. La jeunesse est la cible numéro 1 des politiques menées en ces matières, pour garantir une solide politique de l’alimentation.
Cela étant, je déplore profondément le refus d’articuler politique alimentaire et politique agricole nationale. Lorsque je dis « déplore », je vais au-delà du simple regret, car le concept de souveraineté alimentaire méritait un vrai débat, qui n’a pas eu lieu. Malgré certains échanges, aucune confrontation d’argumentation digne de ce nom n’est intervenue.
J’irai même un peu plus loin. Pour éviter que l’expression « souveraineté alimentaire » n’apparaisse dans la loi, on a eu recours au vote par scrutin public, qui consiste à faire voter les absents, procédure qui, selon moi, ne fait guère honneur à la démocratie. Ce procédé, parfaitement légal, inscrit dans le règlement du Sénat, n’en est pas pour autant légitime. Pour moi, légitimité ne vaut pas légalité. En réalité, cette volonté de verrouiller le vote traduit une certaine inquiétude.
Un problème de fond se pose : on ne peut pas juxtaposer politique alimentaire et politique agricole. Elles doivent être articulées et orienter nos choix en matière d’agriculture.
Je ne reviendrai pas sur l’argumentation que j’ai développée hier sur le caractère stratégique, je dis bien « stratégique », d’une politique agricole permettant d’améliorer l’autonomie de la France par rapport à ses concurrents étrangers. Notre indépendance politique exige une vraie indépendance en matière de production de nourriture.
Cette souveraineté alimentaire indispensable aurait permis de tracer un cap. Un pays ne conquiert pas son autonomie alimentaire facilement ni rapidement. Pour ce faire, les systèmes de production agricole doivent évoluer en profondeur. Cela prend du temps. C’est pourquoi j’ai estimé indispensable de tracer le cap d’une vraie modernisation agricole, qui ne se paie pas de mots.
Le refus d’articuler politique agricole et politique alimentaire constitue, selon moi, une erreur. Le refus d’inscrire la souveraineté alimentaire dans le projet de loi, comme pierre angulaire d’une politique publique de l’alimentation, est une faute.
Mes chers collègues, quitte à surprendre certains d’entre vous, je vais paraphraser le général de Gaulle : la souveraineté alimentaire relève d’une « ardente obligation », qui a été bloquée par un vote par scrutin public. Ce sujet méritait mieux !
Lors du vote du premier article du présent projet de loi, j’aurais aimé pouvoir m’abstenir, voire donner un signal positif. Étant donné ce qui s’est passé, je refuse de prendre part au vote.
Comme je l’ai déjà indiqué lors de mon intervention générale, l’article 1er est le plus consensuel du projet de loi. Il traite d’un sujet qui préoccupe nombre d’entre nous et traduit des intentions que nous partageons.
Désormais, il nous appartiendra d’étudier, au fil du temps, l’application effective des dispositions que cet article comporte. J’émets à ce sujet un certain nombre de regrets, en raison de dispositions qui n’ont pas été adoptées et qui viennent d’être évoquées.
Cela étant dit, les membres du groupe CRC-SPG s’abstiendront lors du vote sur cet article 1er.
L'article 1 er est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante,
M. le président du Conseil constitutionnel a informé M. le président du Sénat, le 20 mai 2010, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution la Cour de cassation et le Conseil d’État ont adressé au Conseil constitutionnel deux décisions de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité. (2010-9 QPC, 2010-10 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 20 mai 2010, le texte d’une décision du Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil supérieur de la magistrature.
Acte est donné de cette communication.
(Texte de la commission)
Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 1er.
L'amendement n° 101, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Six mois après l'entrée en vigueur des obligations fixées en application de l'article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime, l'État remet au Parlement un rapport sur la mise en adéquation des moyens de contrôles publics avec les objectifs poursuivis en matière de contrôle de la qualité nutritionnelle des repas proposés dans la restauration scolaire et universitaire.
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Mme Odette Herviaux. Je le sais, cet amendement n’est pas retenu par M. le rapporteur, qui est allergique aux rapports sous toutes leurs formes. Un comble pour un rapporteur !
Sourires.
Les auteurs de cet amendement ont constaté que les services publics de contrôle sanitaire présents dans les départements sont déjà sous-dotés par rapport à l’ampleur des tâches qui leur incombent.
Ils ont donc des doutes sur leur capacité à assumer les nouveaux contrôles relatifs au respect des règles de qualité nutritionnelle.
Nous avons déjà demandé que ces contrôleurs reçoivent une formation spécifique aux nouveaux contrôles qu’ils devront exercer.
Nous demandons maintenant que, six mois après l’entrée en vigueur des obligations fixées en application de l’article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime, l’État remette au Parlement un rapport sur la mise en adéquation des moyens de contrôles publics avec les objectifs visés en matière de contrôle de la qualité nutritionnelle des repas proposés dans la restauration scolaire et universitaire.
Dans une période où la RGPP, la révision générale des politiques publiques, sévit de plus en plus, ce rapport serait le bienvenu.
M. Gérard César, rapporteur de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Odette Herviaux connaît ma ferveur pressante pour les rapports
Sourires.
Par ailleurs, il appartient davantage au Parlement qu’au Gouvernement de contrôler l’application des lois. Tel est notre rôle, inscrit dans la Constitution.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 102, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article L. 3262-1 du code du travail, les mots : « acheté chez un détaillant en fruits et légumes » sont remplacés par les mots : « des produits alimentaires frais achetés chez un détaillant en fruits et légumes, qu'ils soient ou non directement consommables ».
La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Le 1er mars, est entrée en vigueur la charte signée entre la Commission nationale des titres-restaurant, la CNTR, et la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, la FCD, qui précise les règles d’utilisation des titres-restaurant.
Désormais seules les « préparations immédiatement consommables […] permettant une alimentation variée » pourront être achetées avec ces titres spéciaux de paiement.
Les auteurs de cet amendement estiment que cet encadrement est trop restrictif.
D’abord, il va avoir des conséquences négatives sur le budget des ménages qui utilisaient ces tickets pour faire leurs courses. Certes, ce n’est pas l’objet initial de ces tickets mais cette pratique s’est développée et l’interdire aura forcément des conséquences.
Ensuite, cet encadrement ne va pas permettre de promouvoir la consommation de fruits et légumes ou, de manière générale, l’achat de produits sains puisque, vous le savez, les produits directement consommables sont souvent des snacks d’une qualité discutable.
Enfin, même si les détaillants en fruits et légumes peuvent désormais demander un agrément pour accepter ces tickets, la commission de 2 % à 3 % qui doit être reversée sur le chiffre d’affaires généré et le délai de créditement ne seront pas incitatifs.
Nous souhaitons, au travers de notre amendement, préciser que ces titres-restaurant peuvent être utilisés pour l’achat de produits alimentaires frais, qu’ils soient ou non directement consommables.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré en commission être prêt à accepter cet amendement s’il précisait que ces produits doivent être frais. Nous avons apporté cette précision et nous espérons bien qu’il sera adopté.
Sourires.
L’extension de l’utilisation des tickets restaurant chez les détaillants en fruits et légumes avait été décidée dans le cadre de la loi HPST, « Hôpital, patients, santé et territoires », adoptée l’année dernière.
Le bilan n’en a pas encore été fait. Le nouvel élargissement des conditions d’utilisation des tickets restaurant ne peut recueillir un avis favorable pour au moins deux raisons.
D’une part, la possibilité d’acheter par ce biais tout produit alimentaire chez un détaillant en fruits et légumes frais constitue une distorsion de concurrence vis-à-vis d’autres détaillants, et ne va en rien favoriser les fruits et légumes puisque le texte vise tout produit alimentaire.
D’autre part, on ne voit pas très bien en quoi consisteraient les fruits et légumes qui ne seraient pas directement consommables. S’agit-il de favoriser ainsi les produits congelés ou les fruits et légumes en conserve ?
En conséquence, l’avis est défavorable.
Nous souhaiterions nous en tenir au code du travail, qui précise « acheté chez un détaillant en fruits et légumes ».
La formulation proposée dans cet amendement ne me semble pas apporter de précision.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 103, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le septième alinéa de l'article L. 511-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Après les mots : « dans leur champ de compétence, », sont insérés les mots : « au titre de leur mission de service public, » ;
2° Sont ajoutés les mots : « et notamment pour mettre en place un approvisionnement local de leurs restaurants collectifs ».
La parole est à M. Paul Raoult.
L’article L. 511-3 du code rural précise que les chambres d’agriculture peuvent être consultées par les collectivités territoriales au cours de l’élaboration de leurs projets de développement économique.
Or, les collectivités territoriales souhaitent de plus en plus favoriser l’approvisionnement local des restaurants collectifs qu’elles gèrent. Cette politique d’achat de qualité et de traçabilité est d’ailleurs aussi l’occasion de mettre en avant une politique de développement économique local et durable.
Toutefois, les problèmes de réponse aux exigences des appels d’offres publics, les problèmes de méconnaissance des caractéristiques locales de la production ou les problèmes d’approvisionnement des restaurants en quantités stables sont un frein au développement de ces circuits courts.
Les auteurs de cet amendement estiment qu’il est nécessaire de préciser dans la loi, dans ce titre sur l’alimentation, que les chambres d’agriculture ont un rôle important à jouer pour développer l’approvisionnement local des restaurants collectifs et permettre une meilleure adéquation de l’offre à la demande.
Les chambres d’agriculture peuvent être un intermédiaire idéal entre les exploitants agricoles individuels et le monde de la restauration collective, notamment quand ces services de restauration relèvent de la compétence des collectivités territoriales.
Elles peuvent, par exemple, aider les collectivités territoriales à recenser l’offre disponible auprès des producteurs locaux, à structurer des plateformes d’approvisionnement des cantines ou à élaborer des clauses techniques particulières pour les cahiers des charges des marchés de denrées alimentaires.
Ces missions de conseil des chambres d’agriculture aux collectivités territoriales sont des missions de service public.
Dans certains départements, de telles initiatives et de tels partenariats commencent à se développer ; ils doivent désormais être généralisés.
Pour les agriculteurs, la restauration collective représente une formidable source de débouchés, qu’il nous faut aussi exploiter.
Il faut le rappeler, les chambres d’agriculture ont une mission générale de représentation du monde agricole. Il s’agit d’établissements publics. C’est à ce titre que les collectivités locales peuvent les consulter.
Il n’y a pas lieu de l’inscrire dans la loi pour que les collectivités locales, si elles le souhaitent, puissent consulter les chambres d’agriculture. Il ne me paraît pas nécessaire d’alourdir les missions des chambres d’agriculture.
En conséquence, j’émets, avec regret, un avis défavorable sur l’amendement de mon ami Paul Raoult.
… et ce d’autant plus aujourd’hui, à l’heure où l’agriculture connaît des difficultés importantes et où l’on veut essayer, par le biais des circuits courts, d’obtenir une adéquation parfaite avec la demande organisée par les départements et les régions, à travers les lycées et les collèges.
Les départements et les régions souhaitent donner un coup de main à l’agriculture locale et les agriculteurs sont demandeurs, afin que le système puisse s’organiser.
La meilleure médiation se situe au niveau des chambres d’agriculture.
D’ailleurs, vous le savez bien, les chambres d’agriculture ne sont pas particulièrement pour la gauche ! §
Sourires.
Ma position, en tant que sénateur socialiste, est désintéressée ! Je défends simplement l’intérêt général. Il s’agit de faire en sorte que l’on puisse avancer dans le chemin qui nous est présenté aujourd’hui, c’est-à-dire les circuits courts et l’adéquation de l’offre à la demande.
Mes chers collègues, je ne vois absolument pas ce qui empêche les pays, les intercommunalités ou qui que ce soit de faire appel aux chambres d’agriculture !
Ainsi, le Pays d’Alençon est présidé par le président de la chambre d’agriculture de l’Orne.
Pourquoi inscrire une telle précision dans la loi ? De toute façon, on connaît très bien l’adresse et le numéro de téléphone du président de la chambre de l’agriculture. On peut lui proposer n’importe quel projet, et, j’en suis absolument certaine, avec ses fonctionnaires, …
M. Gérard César, rapporteur. Il n’y a pas de fonctionnaires dans les chambres d’agriculture, c’est un statut spécial !
Sourires.
… ses quasi-fonctionnaires, disons ses collaborateurs, il aidera les collectivités qui le demandent, sur les sujets tout à fait pertinents soulevés par cet amendement. Pour autant, je ne crois pas qu’il soit utile d’en rajouter.
Au contraire, nous, nous pensons qu’il est utile d’en rajouter !
Comme l’a très bien dit M. le rapporteur, il n’est pas nécessaire d’inscrire une telle possibilité dans la loi, puisque certaines collectivités le font.
Là où existent des organisations un peu intelligentes, cela peut fonctionner, …
… peut-être dans l’Orne et ailleurs.
Mais le propre d’une loi est de s’appliquer sur l’ensemble du territoire national. Monsieur le rapporteur, vous considérez que les chambres d’agriculture ayant déjà assez de missions, il ne faut pas en rajouter. Or il n’est pas question d’ajouter des missions ! Il s’agit de se servir de ce navire amiral qu’est la chambre d’agriculture, cette structure qui permet de fédérer l’ensemble des professions, des interprofessions et des filières.
Ainsi, grâce à l’action conjuguée des chambres d’agriculture et des acteurs locaux, nous irons plus loin.
Toutefois, peut-être ne partagez-vous pas cet objectif ? En effet, à ce stade de l’examen du texte, nous avons plutôt le sentiment que vous ne voulez pas dépasser le statu quo et vous donner les moyens nécessaires, en l’occurrence, pour, notamment, permettre un approvisionnement local des restaurants collectifs gérés par les collectivités territoriales.
Nous avons déjà débattu des circuits courts tout à l'heure, notamment lors de l’examen de l’amendement n° 651, et nous y reviendrons encore dans quelques instants. Toutefois, nous avons tous le sentiment que, en la matière, le déclic n’a pas encore eu lieu, parce que nous ne parvenons pas à le déclencher !
Comme l’a très bien expliqué Paul Raoult, nous pensions que ce déclic pouvait venir des chambres d’agriculture : celles-ci, qui ont l’oreille des producteurs, qui organisent et coordonnent leur travail sur le terrain, pourraient être l’un des maillons de la grande chaîne de ceux qui se serrent les coudes et vont de l’avant.
Voilà pourquoi cet amendement vise non pas à confier aux chambres d’agriculture une mission supplémentaire, mais seulement à souligner qu’elles peuvent jouer un rôle important. Ces dispositions nous semblent tout à fait cohérentes avec la volonté du Gouvernement et de la commission de favoriser les circuits courts.
L'amendement n'est pas adopté.
M. Paul Raoult. Nous dirons aux chambres d’agriculture que vous n’avez pas voulu leur confier cette mission !
Sourires.
L'amendement n° 104, présenté par Mmes Bonnefoy et Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mme Blondin, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le pouvoir adjudicateur peut décider que les marchés alimentaires destinés à l'approvisionnement des cantines scolaires seront passés sans publicité ni mise en concurrence préalables si les circonstances le justifient, ou si son montant estimé est inférieur à 20 000 euros HT.
La parole est à Mme Renée Nicoux.
À travers le décret du 19 décembre 2008, le seuil des marchés pouvant être passés sans publicité ni mise en concurrence préalable a été fixé à 20 000 euros.
Cette mesure a permis aux collectivités de favoriser l’approvisionnement des cantines scolaires en circuits courts de denrées alimentaires, en passant des contrats avec des producteurs locaux n’ayant pas la capacité de répondre aux exigences des marchés publics.
Cette décision a aussi constitué une bouffée d’oxygène pour les collectivités, qui ont bénéficié de procédures simplifiées.
Cependant, dans un arrêt en date du 10 février 2010, le Conseil d’État a rétabli ce seuil à 4 000 euros ; cette règle est entrée en vigueur le 1er mai dernier.
Dans sa décision, le Conseil d’État s’est fondé sur le respect des principes de mise en concurrence et sur la nécessité de rendre transparents les marchés afin d’éviter toute forme de distorsion ou de conflit d’intérêt. Nous pouvons nous en féliciter ! Toutefois, cet arrêt handicape fortement le développement des circuits courts et l’accès de nos enfants à une nourriture saine et équilibrée.
Comme ce fut le cas dans certaines régions, de nombreux partenariats ont été passés entre collectivités et producteurs locaux au cours des deux dernières années. Avec cette décision, bien des projets devront être abandonnés. Il nous paraît donc nécessaire de mettre en place des procédures simplifiées pour la passation de marchés alimentaires pour les cantines scolaires.
Ainsi, nous encouragerons les collectivités à développer des partenariats avec les producteurs locaux, nous stimulerons l’activité agricole locale, en particulier l’agriculture biologique, et, au final, nous permettrons à la restauration scolaire de s’approvisionner en produits frais, de qualité et de saison.
Je sais que, devant la commission, M. le ministre a indiqué qu’un décret était en cours de préparation et que, pour cette raison, il ne soutiendrait pas cet amendement. Toutefois, en 2009, le Gouvernement avait déjà promis de prendre des mesures favorisant le développement des circuits courts.
Or, depuis plus d’un an, rien n’a été fait... Nous ne pouvons plus attendre, sinon les efforts consentis par les collectivités et les producteurs locaux durant ces dernières années risquent d’être réduits à néant.
C’est pour cette raison qu’il est indispensable, dès aujourd’hui, d’adopter des mesures claires et précises, afin de mettre en place une véritable politique de l’alimentation dans la restauration scolaire, avec des produits de qualité issus de l’agriculture biologique.
Je souscris à l’analyse de M. le rapporteur.
Je voudrais seulement préciser, madame Nicoux, que le Gouvernement ne vous offre pas des promesses, mais des actes ! Je vous ai lu la modification réglementaire que nous proposons pour les circuits courts. Il s'agit d’un texte très concret. De ce point de vue, vos souhaits sont satisfaits, me semble-t-il.
J’entends bien l’argument relatif à la nature réglementaire de cet amendement. Néanmoins, si elles étaient adoptées, ces dispositions constitueraient une avancée importante, …
… dans de nombreux domaines. Tout d'abord, l’objectif principal de cette mesure est bien évidemment d’offrir à nos enfants des repas équilibrés, je le répète.
Améliorer la qualité nutritionnelle des repas en milieu scolaire est un point essentiel de la lutte contre la dégradation des pratiques alimentaires et le phénomène de l’obésité.
En outre, le système que nous proposons permettrait d’encourager le développement des circuits courts en offrant aux services chargés de la restauration scolaire la possibilité de s’approvisionner auprès des producteurs de leur choix en produits de qualité.
D’une manière générale, cet amendement vise à encourager le développement d’une activité agricole locale : si nous voulons rendre un sens politique à notre agriculture, en replaçant l’alimentation au cœur du projet agricole français, il est indispensable de permettre aux collectivités territoriales d’en être les principaux acteurs.
Dans cette perspective, il faut leur accorder les moyens juridiques nécessaires.
En favorisant l’approvisionnement des restaurants scolaires en produits locaux de qualité, nous permettrons à de nombreux producteurs de développer leur activité et encouragerons ainsi les nouvelles générations d’agriculteurs à se lancer dans cette aventure.
À plusieurs reprises, le Gouvernement a annoncé qu’il faisait du développement de l’agriculture biologique et des circuits courts, donc de la préservation de l’activité agricole locale, l’une de ses priorités, ce dont nous ne doutons pas d'ailleurs.
Toutefois, cette priorité doit conduire, en premier lieu, à permettre aux collectivités de s’approvisionner localement et, par là même, de soutenir l’agriculture française, qui traverse actuellement une crise sans précédent.
À travers cet amendement, nous voulons soutenir le dynamisme de nos territoires en maintenant une activité économique et en évitant la désertification de certaines régions, ainsi que, bien évidemment, le chômage.
Si, aujourd’hui, nous ne mettons pas en place un dispositif encourageant les producteurs locaux à poursuivre leur activité et à participer aux marchés alimentaires destinés à l’approvisionnement des cantines, nous les condamnons à disparaître. Mes chers collègues, c’est tout un système qui est en péril !
Bien entendu, rétablir le seuil de 20 000 euros n’apportera qu’une réponse partielle à la crise que connaissent nos agriculteurs. Toutefois, si nous ne faisons rien, la situation s’aggravera !
Aujourd’hui, les producteurs locaux sont incapables de répondre à un appel d’offre, puisqu’ils ne peuvent rivaliser ni avec les grands distributeurs ni avec les concurrents étrangers. L’abaissement du seuil des marchés, accompagné de cahiers des charges permettant aux donneurs d’ordre de choisir des producteurs « mieux-disant » plutôt que « moins-disant », constituerait une bonne solution.
Il semble donc indispensable de prévoir l’assouplissement des règles relatives aux marchés alimentaires destinés à l’approvisionnement des cantines scolaires.
C’est ainsi que nous permettrons aux producteurs locaux de disposer de débouchés, tout en fournissant à nos enfants des produits de qualité.
Ces mesures sont indispensables à la mise en place d’une véritable politique de l’alimentation, favorisant le maintien et le développement d’une agriculture locale de qualité.
C’est pour cette raison, mes chers collègues, que je vous invite à voter le présent amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 105, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Bourzai, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les marchés de denrées alimentaires périssables, en deçà du seuil de 130 000 euros HT pour l'État, et de 200 000 euros HT pour les collectivités territoriales, peuvent être passés dans les conditions les plus avantageuses, sur les marchés, ou sur les lieux de production sans publicité préalable et sans mise en concurrence.
La parole est à Mme Renée Nicoux.
Dans le même ordre d’idées que précédemment, cet amendement tendant à insérer un article additionnel vise à permettre aux pouvoirs publics – État et collectivités territoriales – de s’approvisionner sur les marchés d’intérêt national et régional, dans le cadre d’une procédure simplifiée du code des marchés publics. Les uns et les autres, nous pensons ici à la restauration collective en général, et scolaire en particulier, qui est évoquée longuement à l’article 1er du projet de loi.
En effet, jusqu’en 2004, le code des marchés publics permettait à l’État et aux collectivités locales de s’approvisionner sans publicité préalable et sans mise en concurrence sur ces marchés.
En ce qui concerne les denrées agricoles, il serait intéressant de revenir à des seuils plus élevés que ceux qui sont prévus aujourd’hui par le code des marchés publics, afin de permettre aux collectivités, notamment, de conclure en dessous de ces seuils des marchés dans les conditions les plus avantageuses et sur les lieux même de production, sans appliquer les règles de publicité contraignantes visant d’autres types de produits.
Ainsi, mes chers collègues, s’agissant de denrées alimentaires périssables, il vous est proposé ici de réintroduire cette possibilité, afin de permettre aux collectivités territoriales, en particulier celles qui gèrent en régie leur service de restauration, de s’approvisionner directement en produits frais et de saison, à des prix respectant les cours des matières premières.
Si elle était adoptée, cette disposition profiterait à l’ensemble de la filière de la restauration collective : au producteur, qui écoulerait plus facilement et à un juste prix ses productions périssables ; à l’acheteur public, qui, pour un prix raisonnable, disposerait de produits frais, de saison et de production locale ; enfin au consommateur, en l’occurrence nos enfants, pour ce qui concerne la restauration collective.
L’adoption de cet amendement constituerait donc une avancée, qui bénéficierait à tous, pour soutenir les agriculteurs, contenir les dépenses des collectivités locales, souvent décriées, et proposer les fruits et légumes variés préconisés par le ministère de la santé.
Cet amendement vise donc à fixer un seuil de 130 000 euros hors taxes pour l’État et de 200 000 euros hors taxes pour les collectivités locales ; en dessous de ces montants, il serait possible de passer des marchés d’achat de denrées alimentaires périssables sans publicité préalable ni mise en concurrence.
Nous souscrivons tous aux objectifs que visent ces excellents amendements, me semble-t-il. Toutefois, on nous a expliqué que ces dispositions étaient de nature réglementaire... Je trouve dommage que nous ne puissions avancer !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 106, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le pouvoir adjudicateur prend en compte les exigences environnementales lors de l'achat public dans le respect des principes généraux de la commande publique et ce, à chaque étape du processus d'achat : définition des spécifications techniques, examen des candidatures et des offres présentées, attribution du marché et conditions d'exécution du marché.
La parole est à M. Didier Guillaume.
Monsieur le rapporteur, très amicalement, je regrette que vous ayez rejeté en bloc, de façon quelque peu désinvolte et sans argumenter, l’ensemble de nos amendements, au motif qu’ils appartiennent au domaine du règlement et n’ont donc pas leur place dans ce projet de loi.
Je le rappelle, juste avant la suspension de la séance, nous avons voté à l'unanimité l’amendement n° 651 du Gouvernement, parce que ses dispositions allaient dans le bon sens et qu’elles étaient de nature réglementaire ! Son objet précisait d'ailleurs que le Gouvernement proposerait deux mesures, l’une réglementaire, l’autre législative, qui modifie la loi dite « Grenelle I ».
Il ne peut y avoir deux poids deux mesures ! Tout à l’heure, nous avons « co-défendu », si je puis dire, sans difficulté l’amendement du Gouvernement, parce que nous estimions que cette disposition allait dans le bon sens. Quand, dans ce projet de loi, certaines mesures nous semblent constituer une avancée, nous sommes capables de nous rassembler et de les voter à l’unanimité !
Toutefois, comme l’ont souligné tout à l'heure l’ensemble des orateurs de notre groupe, nous estimons qu’il est possible d’aller encore plus loin à l'unanimité.
Depuis trois jours, tout le monde ici affirme être favorable aux circuits courts, à une meilleure alimentation dans la restauration scolaire, au meilleur approvisionnement possible.
Or nous le savons bien, aujourd’hui, il n’est pas possible d’agir en ce sens ! Nous le constatons tous. Nous ne répéterions pas à l’envi qu’il faut favoriser les circuits courts s’il n’y avait pas là un problème. Le Gouvernement n’aurait pas pris la peine de nous faire voter à l’unanimité l’amendement n° 651 si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes !
Nous souhaitons aller plus loin encore, je le répète, et améliorer – pardonnez cette immodestie ! – l’amendement du Gouvernement, par exemple en ajoutant un certain nombre d’éléments dans la modification du code des marchés publics.
Toutefois, monsieur le ministre, nous ne nous contentons pas de paroles : nous formulons des propositions, qui se situent dans la droite ligne du projet du Gouvernement, et vous les rejetez !
Nous avons donc présenté une série de dispositions – les amendements n° 106, 108 et109 –, qui présentent un certain nombre de déclinaisons.
L’amendement n° 106 vise à préciser que le pouvoir adjudicateur prend en compte les exigences environnementales.
Est-ce possible ou non à l’échelon national ?
S’il n’est pas possible de modifier le code des marchés publics, d’intervenir sur les seuils, de prendre en compte les conditions environnementales, nous continuerons à faire tourner une machine à vide. Nous serons alors contraints de constater, monsieur le ministre, que vos discours n’étaient pas sincères – excusez-moi de le dire ainsi – et que vous n’avez pas réellement la volonté de permettre que les cantines scolaires s’approvisionnent sur le territoire. Car là est la pierre angulaire pour favoriser les circuits courts de distribution.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 108, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les conditions d'exécution d'un marché public peuvent prendre en compte l'impact environnemental des produits ou des services lié à leur transport.
La parole est à M. Didier Guillaume.
Quelles modifications apporter au code des marchés publics et aux procédures d’appels d’offres des collectivités locales pour faciliter l’approvisionnement par les circuits courts ? Nous ne cessons d’en parler les uns et les autres.
Lorsqu’un appel d’offre est lancé, les grandes sociétés nationales, voire internationales, l’emportent sur les petites entreprises départementales ou locales. Du point de vue qualitatif ou nutritionnel, nous n’avons rien à reprocher à ces grandes sociétés : elles ont tout à fait le droit de soumissionner au même titre que les autres.
Toutefois, si nous voulons défendre l’agriculture de nos territoires – les exploitants agricoles, les producteurs, les sociétés coopératives ouvrières de production, les SCOP –, il nous faut impérativement prévoir une clef supplémentaire permettant une approche différente des marchés publics. Nous sommes tous d’accord pour reconnaître que les dispositions actuelles ne suffisent pas.
Je pose donc la question, sans être sûr d’avoir une réponse : comment mettre un verrou supplémentaire pour que la volonté, les bonnes intentions qui sont affichées par le Gouvernement, par la commission de l'économie et par tous les sénateurs puissent se traduire dans les faits ?
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
À force d’entendre les mêmes arguments, il me revient qu’un maire de mon département a été condamné pour violation du code des marchés publics, après avoir favorisé très légèrement un artisan local ; il a finalement été dispensé de peine. Certes, il ne s’agit pas là d’agriculture, mais cet élu était animé par la même motivation : faire travailler les entreprises locales.
Si une solution est possible, il faudra bien la trouver. En tout cas, nous avons besoin d’explications plus détaillées, car le doute commence à s’installer.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 109, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les conditions d'exécution d'un marché public comportent une clause environnementale prenant en compte les émissions de gaz à effet de serre générées lors de l'exécution dudit marché, notamment par le transport des personnes et des marchandises nécessaires à sa réalisation.
La parole est à M. Didier Guillaume.
Malheureusement, je constate que je n’ai pas obtenu de réponse à ma question.
Madame Goulet, nous ne moulinons pas à vide : nous avons formulé plusieurs propositions.
Notre objectif est de changer le code des marchés publics. Nous avions considéré qu’il n’était pas possible de le faire dans le cadre du présent débat. Le Gouvernement a présenté un amendement que nous avons voté à l’unanimité et a, à cette occasion, précisé qu’il allait modifier le code des marchés publics. Nous sommes ravis de cette avancée, mais il faut aller plus loin.
Il va de soi qu’il ne s’agit pas pour nous de permettre à un maire, à un président de conseil général ou à un président de conseil régional de décider d’acheter une C5 chez un concessionnaire de sa commune. Ce n’est pas ce que nous souhaitons. Mais, dans le cadre du titre Ier de ce projet de loi, qui vise à définir et à mettre en œuvre une politique publique de l’alimentation, nous entendons insister sur la spécificité de l’agriculture française et promouvoir les circuits courts de distribution non seulement pour favoriser la qualité des produits dans les cantines des établissements scolaires, mais également pour permettre le développement économique des agriculteurs, des SCOP, des entreprises.
Pourquoi ne serait-il pas possible d’aller un peu plus loin que l’amendement n° 651 du Gouvernement, dont l’objet précise qu’il faut prendre deux mesures, l’une législative et l’autre réglementaire ? La première, c’est la modification de l’article 48 du « Grenelle I », ce n’est pas rien car il concerne les intentions. Nous sommes favorables à cette modification.
La seconde mesure, c’est la modification de l'article 53 du code des marchés publics. Pourquoi ne serait-il pas possible de préciser – nous ne souhaitons pas un succès d’auteur – que doivent être pris en compte le montant des marchés publics ou le bilan carbone ? Il n’est plus question d’inclure le nombre de kilomètres parcourus, car nous avons bien compris que les contraintes communautaires l’empêchaient.
Il ne s’agit pas de prévoir une disposition permettant au représentant d’une collectivité de s’approvisionner dans sa rue, dans sa commune ou dans son département. Il s’agit de rendre possible une préférence susceptible de faire en sorte que les agriculteurs et les coopératives d’un territoire, lorsqu’ils sont organisés, puissent remporter des marchés publics de la restauration scolaire.
Je terminerai par un département qui m’est cher. La Drôme, dont je préside le conseil général, compte trente-six collèges : 20 % des produits qui y sont proposés sont issus de l’agriculture biologique ; nous sommes dans le cadre du Grenelle de l’environnement. Toutes les cantines de ces établissements sont gérées en régie. Lorsque nous lançons des appels d’offres, nous sommes totalement coincés à cause du contrôle de légalité, de la DGCCRF et nous ne pouvons pas agir.
Pour certains départements, c’est plus simple, alors que, pour d’autres, c’est plus compliqué. Peut-être ne sommes-nous pas assez dégourdis, mais je constate que nous n’y parvenons pas. Il ne s’agit pas de faire du favoritisme, mais pourquoi ne pas prévoir dans la loi que, pour ce qui concerne l’approvisionnement des cantines scolaires, les grandes sociétés et les plus petites entreprises sont mises sur un pied d’égalité ?
C'est pour cette raison que Paul Raoult a proposé la participation des chambres d’agriculture, sans qu’il soit question d’être placé sous leur égide. Cela nous permettrait d’avancer, car l’adoption de l'amendement n° 651, s’il constitue un progrès, ne suffira pas.
Monsieur le président, je considère que j’ai défendu tous les amendements qui concernaient ce sujet.
Je ne veux pas que des ambiguïtés demeurent quant à la volonté du Gouvernement et que de mauvaises intentions lui soient prêtées.
Le code des marchés publics a été modifié par l'amendement n° 651, adopté à l’unanimité et je vous en remercie, mesdames, messieurs les sénateurs.
Cette modification fixe un cadre général qui permet aux collectivités locales de s’approvisionner chez un producteur ou un groupe de producteurs, ce qui favorise les circuits courts de distribution.
Encore une fois, je le répète, ce n’est pas la fin de l’histoire ! Nous sommes tout à fait conscients que d’autres modifications du code des marchés publics pourraient être nécessaires afin d’aller plus loin dans la réflexion et de répondre aux questions pertinentes que vous soulevez amendement après amendement.
Pour autant, nous ne pouvons le faire dans le cadre de ce projet de loi, car cela relève du domaine réglementaire.
Par ailleurs, il faut se méfier des bonnes intentions et mener en amont un travail technique approfondi.
Je prends un exemple. Votre amendement n° 109 prévoit que « les conditions d'exécution d'un marché public comportent une clause environnementale prenant en compte les émissions de gaz à effet de serre… ». Si cet amendement était adopté en l’état, il pourrait, même si cela heurte un peu le bon sens, se retourner totalement contre les circuits courts de distribution.
En effet, une tonne de pommes importée du Chili par bateau présente un bien meilleur bilan carbone qu’une cagette de pommes qui aura parcouru cinquante kilomètres en camionnette, car celle-ci rejette davantage de CO2 dans l’atmosphère. Le bilan carbone par pomme sera meilleur avec les pommes venant du Chili.
C’est pourquoi un groupe de travail a été créé au ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Il examinera tous ces points, pour préciser les modalités de mise en place des circuits courts et pour répondre, par des modifications successives du code des marchés publics, à toutes les questions que vous avez soulevées, qui, je le répète, sont pertinentes, mais sont techniquement très complexes.
J’en suis conscient, au travers de ces amendements, nous proposons des clefs permettant d’ouvrir plusieurs portes. Toutefois, dans les cantines scolaires de la Drôme, je préfère que soient proposées des pommes de ce département, plutôt que des pommes venant du Chili, même si ces dernières sont moins chères. Tel est notre objectif !
Certes, un bateau rejette moins de CO2 qu’une camionnette. Il n’en reste pas moins que, une fois au port, les pommes devront être transportées en camion.
Il faut trouver des clefs afin que nous puissions nous approvisionner en produits français dans la restauration collective en France. Tant pis si cela coûte un peu plus cher. Certes, des contraintes communautaires existent, je les connais. Il ne s’agit pas pour nous de faire n’importe quoi et d’être des boutefeux.
Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir présenté l'amendement n° 651, car il ouvre une porte. Il me semble toutefois que, si nous n’allons pas plus loin, nous aurons du mal à favoriser les circuits courts dans les appels d’offres, car nous serons contraints de retenir les produits étrangers, qui seront moins chers que les produits français.
Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur cette question.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 109.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 110, présenté par M. Guillaume, Mme Herviaux, M. Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le respect des principes généraux de la commande publique, le pouvoir adjudicateur peut prendre en compte l'impact environnemental de l'exécution du marché lors de l'achat public.
Cet amendement a déjà été défendu.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 110.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 240, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 531-2-1 du code de l'environnement sont supprimées.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Cet amendement vise à empêcher que le respect de l’agriculture traditionnelle, déterminé par le code de l’environnement, ne perde tout son sens par une définition inadéquate des OGM. Il s’agit donc de supprimer la référence à la définition européenne, qui a assoupli les critères des produits issus de l’agriculture biologique en autorisant jusqu’à 0, 9 gramme d’OGM par kilogramme, sans imposer que ce soit indiqué. Où est le respect des principes, si on corrompt la définition ? En procédant ainsi, ce sont les agriculteurs et les Français que l’on trompe ! La santé publique et la biodiversité sont trop importantes pour que leur sort soit laissé aux mains de technocrates européens. Le Gouvernement doit prendre la mesure de ses ambitions et garder le contrôle de la définition des OGM, sans admettre les assouplissements communautaires.
Dans le cas contraire, comment satisfaire cette ambition, qui reprend l’esprit de l’amendement déposé par le député André Chassaigne, afin que les cultures d’OGM soient écartées de territoires entiers, telles les régions couvertes par le label AOC, les zones de montagne ou littorales protégées et les filières de qualité estampillées « agriculture biologique » ou « label rouge » ?
Dans le cas contraire, comment éviter les risques pour la biodiversité, les dangers de la pollution génétique et assurer le respect du principe de précaution ?
Dans le cas contraire, comment protéger les petits producteurs, comme le Gouvernement affirme vouloir le faire ?
Autoriser la culture d’OGM en plein champ, c’est condamner une agriculture vivrière de qualité, c’est mettre à mort les petits producteurs et empêcher toute transition vers une agriculture paysanne de qualité.
La France doit garder le contrôle des définitions de ce qui pourrait affecter la sécurité alimentaire et la biodiversité non seulement aujourd’hui, mais aussi demain. Pensons dès à présent nos choix de société intelligemment, par respect pour nos enfants.
J’illustrerai ma position par un exemple. J’ai rencontré un agriculteur de ma commune qui cherchait à se convertir à l’agriculture biologique. Il vient d’apprendre que sa parcelle, qui est très étroite et située entre deux parcelles conventionnelles, ne pourra devenir biologique, car les pulvérisations des champs voisins l’empêchent. Il s’agit là d’une atteinte terrible à la liberté de chacun sur ses propres terres. Il en est de même pour les OGM.
Dans ce projet de loi, il n’y a pas lieu de remettre en cause les critères permettant de définir le « sans OGM » qui ont été déterminés dans la loi de 2008, conformément à la réglementation communautaire.
Par conséquent, l’avis est défavorable.
Pour être très clair avec vous, je crois que l’on ouvre ici un débat qui dépasse, et de loin, le cadre du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche…
La question est extraordinairement complexe, entre le seuil de sensibilité, défini à l’échelle nationale avec avis du Haut conseil des biotechnologies, et le seuil de commercialisation qui, défini à l’échelle européenne, diffère du précédent.
Il s’agit de questions très difficiles et très techniques qu’il vaut mieux ne pas aborder à l’occasion de la présente discussion.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 432, présenté par M. Bourquin, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Conseil national de l'alimentation est consulté sur la possibilité de délivrer un label qualité aux établissements de restauration privilégiant l'approvisionnement local et la transformation sur place des matières premières agricoles.
La parole est à M. Roland Courteau.
Les restaurants ont malheureusement de plus en plus tendance, par souci de rentabilité économique immédiate, à préférer la décongélation des aliments à leur transformation sur place.
Vous seriez sans doute surpris de découvrir à quel point cette pratique gagne du terrain, comme le rappelait notre collègue Martial Bourquin, y compris dans des maisons dites « haut de gamme ».
Il nous paraît donc indispensable d’effectuer une vraie distinction entre les professionnels de la restauration dont le métier consiste pour l’essentiel à décongeler et à réchauffer les plats, et celles et ceux qui ont à cœur de s’approvisionner localement, et de transformer véritablement les plats dans leurs cuisines.
Or, aujourd’hui, des restaurateurs présentent leurs plats aux consommateurs sous des appellations trompeuses, telles que « comme à la maison », ou encore « cuisine du terroir », appellations qui ne sont pas réglementées par les pouvoirs publics. Le consommateur a pourtant le droit de savoir exactement ce qu’il a dans son assiette, tout comme ce qui se passe dans les cuisines. Il s’agit d’un élément essentiel de la traçabilité alimentaire.
Nous proposons donc, par cet amendement, que le Conseil national de l’alimentation puisse récompenser les bonnes pratiques, je veux parler des pratiques d’excellence alliant l’intérêt des consommateurs et des producteurs tout en garantissant une parfaite neutralité.
Nous proposons que le CNA puisse délivrer un label qualité aux restaurateurs ayant fait le choix de transformer sur place des produits.
Je crois sincèrement que, par ce type d’initiatives concrètes, le Conseil national de l’alimentation fera par ailleurs la démonstration qu’il n’est pas une instance consultative de plus, animée par des experts, mais qu’il peut être directement utile, aux consommateurs comme aux producteurs locaux.
M. Gérard César, rapporteur. Je vois que M. Courteau est un fin gastronome
Sourires
: je vais lui décerner ce soir trois ou quatre étoiles pour la qualité de ses produits !
Nouveaux sourires.
Rires sur les travées du groupe socialiste.
… car le Conseil national de l’alimentation peut être consulté sur toutes les questions relatives à l’alimentation, y compris la création d’un label qualité.
Sans vouloir faire de publicité, nous savons tous que des guides célèbres, Michelin, Gault & Millau, et d’autres organismes, décernent des labels qualité ou des étoiles. D’ailleurs, vous en conviendrez, c’est souvent au consommateur qu’il revient d’apprécier la qualité. Si les restaurants ne sont pas bons, les consommateurs n’y vont plus !
L’avis de la commission est donc défavorable.
Après les OGM, monsieur le président, nous ouvrons ici un autre débat, cette fois sur la qualité des restaurants, le Gault & Millau et les étoiles. Cela peut nous emmener très loin…
Je suis donc moi aussi défavorable à cet amendement, pour les raisons qu’a indiquées M. le rapporteur.
En revanche, je m’engage à saisir le Conseil national de l’alimentation du problème tout à fait réel que vous avez soulevé, monsieur Courteau.
Qu’il s’agisse des OGM ou des restaurants, ce débat est extrêmement intéressant, mais assez décousu.
C’est que, monsieur le ministre, en consacrant à l’alimentation le titre Ier de ce texte sur l’agriculture, en établissant donc ce lien essentiel entre alimentation et agriculture, vous avez ouvert la boîte de Pandore, de sorte que chacun a légitimement envie de s’exprimer ce soir sur tous les sujets liés à la sécurité alimentaire, cantines, approvisionnement, OGM, alimentation animale pour ne citer que ceux-là. Ce faisant, nous livrons au débat des éléments, certes, extrêmement intéressants, mais qui nous éloignent de plus en plus du lien entre agriculture et alimentation, pour nous rapprocher progressivement de la sécurité alimentaire.
Le fait d’avoir introduit le thème de l’alimentation – vous auriez d’ailleurs très bien pu ouvrir un pan de plus en évoquant aussi la santé – donne lieu à ce débat quelque peu curieux où vous êtes contraint – c’est du moins votre parti pris – de refuser des amendements qui ont toute leur légitimité et tout leur bien-fondé au motif qu’ils sont, en quelque sorte, trop extérieurs au texte. C’est tout de même dommage !
Après tout, monsieur le ministre, il serait nécessaire d’avoir un débat portant uniquement sur les questions de sécurité alimentaire, où l’on pourrait soumettre de nouveau l’ensemble de ces amendements.
Compte tenu de l’engagement qu’a pris M. le ministre de saisir le Conseil national de l’alimentation, nous allons retirer cet amendement.
À titre personnel, cependant, je regrette que mon amendement m’ait fait perdre mes trois étoiles !
Sourires
L'amendement n° 432 est retiré.
L'amendement n° 526 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Tropeano et Plancade, Mme Laborde et MM. de Montesquiou, Mézard, Milhau, Vall, Baylet, Alfonsi et Marsin, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 278 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1° est complété par les mots : « à l'exception des sodas et boissons rafraichissantes sucrées »
2° Après le c) du 2°, il est inséré quatre alinéas ainsi rédigés :
c bis) « Des crèmes glacées et sorbets ;
c ter) « Des biscuits emballés ;
c quater) « Des chips, frites et produits similaires emballés ;
c quinquies) « Des fruits à coque salés ou grillés hors de leur coquille ;
La parole est à M. Daniel Marsin.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai conjointement l’amendement n° 525 rectifié.
Je suis en effet saisi de l'amendement n° 525 rectifié, présenté par MM. Collin, Tropeano, Plancade et de Montesquiou, Mme Laborde et MM. Baylet, Mézard, Milhau, Vall, Alfonsi et Marsin.
Cet amendement est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le b) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts, il est insérer un b bis ainsi rédigé :
b bis) Des produits « de grignotage » ou de « snacking »dont la liste est fixée par décret après avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Toutes les études s’accordent sur la qualité nutritionnelle des fruits et légumes. Il convient donc de faciliter l’accès à ces produits, d’autant que cette filière agricole connaît depuis plusieurs années des difficultés économiques sérieuses, comme nous l’avons largement évoqué ce soir.
L’extension de l’utilisation du titre-restaurant auprès des détaillants en fruits et légumes, adoptée dans le cadre de la discussion de la loi dite « HPST », constitue à n’en pas douter un pas intéressant. Cependant, il faut adopter une mesure plus large. Une action sur les prix aurait à l’évidence un effet important sur l’accès à ces produits.
Il est proposé, par ces amendements, d’utiliser la fiscalité indirecte existante, plus précisément la TVA, pour peser sur les prix.
À ce jour, les produits alimentaires sont assujettis dans leur quasi-totalité au même taux réduit de TVA, à 5, 5 %. Il en résulte notamment que les fruits et légumes sont soumis au même régime fiscal que les pâtes à tartiner ou les produits de grignotage et de « snacking ».
Certes, la réglementation communautaire n’autorise pas la réduction de la TVA sur les fruits et légumes. Dans l’attente d’une action du Gouvernement en ce sens, les amendements prévoient d’appliquer le taux de TVA à 19, 6 % aux produits de grignotage dont la teneur en gras, en sucre et en sel est élevée.
Dans l’amendement n° 525 rectifié, on renvoie à un décret le soin d’établir la liste des produits concernés après avis de l’AFSSA. Dans l’amendement n° 526 rectifié, les produits sont cités.
Les sommes ainsi dégagées pourraient être utilisées pour mener des actions en faveur des publics prioritaires ou de la consommation de fruits et légumes.
Je voudrais terminer en rappelant que la modulation de la fiscalité des aliments en fonction de leur qualité nutritionnelle a été préconisée par un rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales en 2008.
Par ces amendements tendant à appliquer le taux normal de TVA – 19, 6 % au lieu de 5, 5 % actuellement – aux crèmes glacées, aux biscuits et, entre autres, aux chips, M. Marsin et ses collègues cherchent à pénaliser la consommation de produits de grignotage, qui aggrave le fléau de l’obésité.
Bien évidemment, l’intention est excellente, mais, et j’en suis désolé pour nos collègues, les auditions auxquelles nous avons procédé sur tout ce qui concerne l’agroalimentaire ne me permettent pas de trancher sur ce point.
Je vous demande donc, cher collègue, de retirer ces amendements ; sinon, l’avis de la commission sera défavorable.
Tout en saluant à mon tour l’intention du sénateur Marsin, je souhaiterais simplement rappeler que d’autres pays, notamment le Canada et les États-Unis, se sont lancés dans l’expérimentation et ont créé une surtaxe sur les sodas. Il suffit de se rendre aux États-Unis pour s’apercevoir que les politiques de ce genre ne sont malheureusement pas très efficaces…
Par ailleurs, la mesure serait socialement inéquitable, puisqu’elle reviendrait à surtaxer les produits dont les catégories les plus défavorisées sont les plus consommatrices.
Je préfère donc une politique incitative, sur les fruits et légumes ou sur les circuits courts, à une politique répressive, qui se ferait au détriment des catégories sociales défavorisées.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Monsieur Marsin, les amendements n° 526 rectifié et 525 rectifié sont-ils retirés ?
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 594, présenté par MM. Muller et Godefroy, Mme Didier, M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La publicité pour les produits alimentaires est interdite dans les programmes de télévision destinés aux enfants de moins de treize ans.
La parole est à M. Jacques Muller.
Lors de la discussion de l’article 1er, nous nous sommes accordés pour constater une dérive extrêmement préoccupante des modèles et pratiques alimentaires, entraînant des conséquences en termes de santé publique.
Notre collègue François Fortassin avait rappelé, avec la faconde qu’on lui connaît, que le goût s’éduque et se construit dès le plus jeune âge. Aujourd’hui, je dois dire que la partie est loin d’être gagnée, comme en témoigne la manière dont le modèle alimentaire étatsunien s’étend sur la planète, avec la vitesse que l’on sait, en passant notamment par la jeunesse.
Aujourd’hui, en effet, les enfants sont une cible particulièrement exposée à la publicité alimentaire, et ce pour trois raisons.
Premièrement, il n’y a pas, chez les enfants, de différence entre l’information et la publicité : ce qui est vu est vrai. Donc, les modèles alimentaires diffusés par les personnages mis en scène se propagent de manière très directe.
Deuxièmement, les enfants sont extrêmement malléables. Ils ne sont pas capables de recul. Je rappellerai ici que tous les êtres humains – y compris nous-mêmes – subissent le phénomène dit du « désir mimétique » que l’anthropologue René Girard a parfaitement décrit et qui nous conduit à nous identifier inconsciemment à des personnes. Chez les enfants, il joue à plein, et les publicitaires ont bien étudié René Girard !
En conséquence, les enfants s’identifient aux héros de la publicité, aux héros des films ou des dessins animés, et les messages, y compris subliminaux, atteignent leur cible. Dans ces conditions, quel peut être le poids de ces messages officiels diffusés à la télévision où l’on conseille de ne pas manger trop sucré, de ne pas manger trop salé, …
… alors que les héros des films ou des bandes dessinées véhiculent des modèles alimentaires exactement contraires ?
Troisièmement, les enfants sont des prescripteurs, et cela, les publicitaires l’ont très bien compris aussi. Autrement dit, pour vendre, il faut cibler les enfants, car atteindre les enfants, c’est aussi atteindre les familles.
Cet amendement important vise à interdire la publicité alimentaire dans les émissions de télévision spécifiquement réservées aux enfants.
L’éducation sur ce sujet doit intervenir à la base. Nous sommes confrontés à un problème majeur. La disposition proposée me semble très pratique, très concrète. Il serait bon de l’inscrire dans la loi.
M. Muller a raison de la souligner, la publicité a un impact non négligeable sur les adultes, et plus encore sur les enfants.
Les secteurs pour lesquels la publicité à la télévision est interdite sont peu nombreux : les armes à feu, les médicaments prescrits uniquement sur ordonnance, le tabac et les boissons alcoolisées, notamment. Toutes ces interdictions, à quelques exceptions près, s’expliquent par des raisons de santé publique.
Quant aux mineurs, la publicité télévisée doit « ne pas leur porter préjudice ».
L’amendement pose la question de la bonne stratégie à adopter vis-à-vis de la publicité télévisée : faut-il interdire ou encadrer ? C’est une question que nous pouvons tous nous poser.
L’encadrement de la publicité pour les produits alimentaires par les messages du programme national nutrition santé - « Pratiquez une activité physique régulière », « Évitez de manger trop gras, trop salé, trop sucré » -, paraît avoir des vertus pédagogiques. Or ces messages ne pourraient être diffusés si l’on interdisait totalement la publicité pour les produits alimentaires à destination des moins de treize ans.
La commission émet donc un avis défavorable.
Monsieur Muller, pour prolonger l’argumentation du rapporteur, je remarque, vous qui citiez les travaux sur le désir triangulaire et mimétique, que votre amendement semble presque s’inspirer de la thèse développée par Michel Foucault dans son ouvrage Surveiller et punir. Mais surveiller et punir, ce n’est pas toujours la meilleure solution, notamment en matière d’alimentation.
Les travaux engagés au sein du CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui visent à encadrer, dans les messages publicitaires, les incitations à la consommation de produits trop gras ou trop sucrés, restent, selon nous la meilleure voie. Ils pourraient être renforcés. Nous préférons en tout cas nous en tenir à ce type de dispositif plutôt que d’inscrire une interdiction absolue dans la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Nous avons eu l’année dernière et l’année précédente, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, une très longue discussion, qui a été complétée par la question posée par Gérard Dériot sur l’obésité.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin nous avait alors démontré que ces messages avaient porté, que les résultats étaient plutôt satisfaisants, même si des progrès restaient encore à faire compte tenu du taux d’obésité chez les enfants, un taux cependant lié plus au mode de vie, c’est-à-dire au manque d’exercice, qu’au problème de la télévision stricto sensu.
L’obésité reste donc un problème à part entière, qui, compte tenu des difficultés majeures qu’il induit, on le voit ici relativement à l’alimentation, reviendra nécessairement en discussion au sein de notre assemblée. Il n’est donc pas inutile d’en faire simplement mention ici, sans pour autant inscrire de disposition sur ce sujet dans la loi.
Le sujet me paraît tout de même extraordinairement grave, et les réponses qui m’ont été faites ne m’ont pas convaincu.
Je constate d’abord que certains pays d’Europe ont prescrit une telle interdiction, et des pays tout à fait raisonnables, comme l’Espagne ou la Suède ; les Québécois l’ont également imposée. Ils estiment donc que, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, les enfants sont des cibles incapables de se défendre.
Je me référerai à l’étude d’impact accompagnant le projet de loi, que tout le monde est censé avoir lue : « Dans les pays les plus avancés, les budgets consacrés par les États aux programmes de prévention et d'éducation nutritionnelle sont souvent faibles comparés à ceux que l'industrie agroalimentaire consacre à sa publicité. Aux États-Unis, 4 milliards de dollars sont dépensés chaque année pour la publicité en faveur de la restauration rapide, des sodas, des snacks, des sucreries et des céréales du petit-déjeuner, contre 333 millions de dollars pour l'éducation nutritionnelle. Dans ce pays, on estime que les enfants de 11 et 12 ans sont exposés à 11 000 messages publicitaires alimentaires par an. » On ajoute : « En France, ils passent 13 heures par semaine devant la télévision et 70 % des publicités sont ciblés sur les produits gras et sucrés. »
Face à la force de frappe des firmes aujourd’hui, la rhétorique « surveiller et punir » ne me convainc pas, monsieur le ministre. Il convient tout simplement de protéger nos enfants contre ce type d’agression.
Je maintiens donc mon amendement.
J’avoue être également gêné par une interdiction totale laissant supposer qu’aucun produit alimentaire ne mériterait de publicité. Or les compotes de fruits ou les yaourts auraient, par exemple, toute leur place dans des programmes publicitaires télévisés.
Si notre collègue avait indiqué que « la publicité pour les produits alimentaires est encadrée dans les programmes de télévision destinés aux enfants de moins de treize ans », nous aurions eu une plus grande marge d’action, et le vote de cet amendement aurait été sans doute plus envisageable. Une telle rédaction aurait d’ailleurs répondu aux objections tant du rapporteur que du ministre, lesquels auraient dû de ce fait trouver une autre argumentation pour s’opposer à l’amendement.
Le terme « interdite » nous semble en effet un peu catégorique.
L'amendement n'est pas adopté.
La section 2 du chapitre V du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complétée par une sous-section 4 ainsi rédigée :
« Sous-section 4 :
« Les autres signes d’identification de l’origine
« Art. L. 115-24-1. – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication du pays d’origine peut être rendue obligatoire pour les produits agricoles, alimentaires et les produits de la mer, à l’état brut ou transformé.
« La liste des produits concernés et les modalités d’application de l’indication de l’origine mentionnée au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 527 rectifié, présenté par M. Fortassin, Mme Escoffier, MM. Collin et Tropeano, Mme Laborde et MM. Chevènement, Plancade, Mézard, Milhau, Baylet, Vall, Alfonsi et Marsin, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après le premier alinéa de l'article L 113-3 du code de la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les produits agricoles, alimentaires et les produits de la mer, le marquage, l'étiquetage ou l'affichage doit porter l'indication du pays d'origine, la date d'abattage ou de récolte ainsi que le prix payé au producteur lorsque le produit est proposé à la vente à l'état brut et l'indication du pays d'origine des matières premières mises en œuvre à plus de 50 % dans le produit fini et du pays de fabrication lorsque le produit est transformé. »
La parole est à M. Daniel Marsin.
Bien entendu, chacun se félicite de l’orientation prise à l’article 1er en faveur d’une politique de l’alimentation, nouveau fondement de la légitimité d’une intervention publique dans le domaine de l’agriculture.
Cette politique vise à assurer à chacun l’accès à une alimentation sûre, diversifiée et de bonne qualité nutritionnelle. Cet objectif passe évidemment par la connaissance des produits consommés. Aussi, la commission a ajouté un article 1er bis, qui fournit une base juridique pour imposer l’étiquetage obligatoire de l’origine des produits alimentaires bruts ou transformés.
Il semble cependant que cette obligation s’applique aux seuls produits agricoles alimentaires et produits de la mer bénéficiant d’un signe de qualité ou d’origine autre que l’appellation d’origine contrôlée, l’AOC. La liste des produits concernés doit être fixée par décret en Conseil d’État.
L'amendement prévoit donc de donner une portée plus large à cette obligation. Ainsi, pour tous les produits alimentaires, l'étiquetage devrait mentionner le pays d'origine, la date d'abattage ou de récolte ainsi que le prix payé au producteur du produit vendu à l'état brut et le pays d'origine des matières premières et de fabrication du produit vendu transformé.
Vous pourrez sans doute rétorquer que c’est prévu à l’article 7. Toutefois, on peut objecter que les interprofessions peuvent, et « peuvent » simplement, imposer à leurs membres l’étiquetage de l’indication du produit d’origine. Il ne s’agit donc là que d’une faculté. Notre amendement a une portée plus contraignante.
L'amendement n° 242, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
du pays d'origine
insérer les mots :
et la présence d'organismes génétiquement modifiés
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Je suis en effet saisi de l'amendement n° 241, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, qui est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Remplacer les mots :
peut être
par le mot :
est
II. - En conséquence, alinéa 5
Supprimer les mots :
La liste des produits concernés et
Veuillez poursuivre, monsieur Le Cam.
J’ai cru comprendre que ces amendements n’étaient pas les bienvenus dans ce texte. Pour autant, la question est importante, et nous avons eu l’occasion d’en débattre dans cet hémicycle à d’autres occasions.
Nous devons rester vigilants : ce que l’on a chassé par la porte peut rentrer par la fenêtre ; je pense ici à la pomme de terre Amflora.
Nous sommes donc constamment menacés par l’introduction sur le marché d’OGM, ou plus précisément de PGM.
Ce débat reste actuel. Je n’insisterai pas davantage, sinon pour en appeler à la vigilance de tous.
L'amendement n° 37, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
peut être rendue
par les mots :
doit être rendue
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?
L’article 1er bis a été introduit par la commission afin de permettre un étiquetage de l’origine des produits alimentaires à l’état brut ou transformés. Le dispositif retenu est souple, et, parlant sous le contrôle de M. le ministre, j’ai la prétention de le trouver intelligent, parce qu’il est applicable.
Votre amendement, monsieur Marsin, prévoit en outre un étiquetage, à côté du prix de vente du produit, du prix payé au producteur. Je comprends l’intention, mais cela n’est, hélas, pas applicable.
Je m’appuierai sur un seul exemple : pour la viande, les morceaux du quart arrière et du quart avant ne peuvent être valorisés de la même manière.
Il me semble par conséquent très difficile de mettre en place un tel système.
Je vous invite donc à retirer l’amendement n° 527 rectifié. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L’avis de la commission est également défavorable sur les amendements n° °242 et 241.
Sur ces questions d’étiquetage, pour tout vous dire, je ne suis pas certain d’être bien en accord avec les règles de la concurrence européenne ; vous avez compris qu’elles ne me convainquent que rarement…
Les règles de concurrence européennes interdisent strictement à un État d’imposer une obligation d’étiquetage. À l’article 1er bis, dans sa grande sagesse, la commission est allée aussi loin qu’elle le pouvait en précisant que l’indication d’origine « peut être » rendue obligatoire. Si elle avait retenu les termes « doit être » rendue obligatoire, elle aurait enfreint le droit de la concurrence européen, qui considère que l’obligation d’étiquetage par un État revient à établir une entrave aux libertés concurrentielles.
Par ailleurs, l’article 7, alinéa 35, donne aux interprofessions la possibilité d’imposer à leurs membres l’étiquetage de l’indication du pays d’origine. Alors que l’État ne peut imposer un étiquetage, il peut en revanche ouvrir la possibilité à une interprofession d’imposer elle-même l’étiquetage. Ce que l’État n’a pas le droit de faire, l’interprofession, elle, le peut !
Avec ces dispositions, nous allons aussi loin qu’il est possible d’aller dans le cadre du droit de la concurrence européen.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements n° 527 rectifié, 242 et 241.
Compte tenu des arguments de M. le rapporteur et des explications de M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 1er bis est adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 114 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Bourzai et Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement s’attache à promouvoir auprès de l’Union européenne la reconnaissance de la dénomination montagne comme indication géographique protégée. À cet effet, il propose toute action ou initiative pouvant concourir à cet objectif et y associe, le cas échéant, les organisations professionnelles représentatives des producteurs agricoles de montagne et celles veillant au respect de la réglementation en matière de signes de qualité.
La parole est à M. Thierry Repentin.
Effectivement, cher Paul Raoult !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’agriculture de montagne, de type familial, de petite et de moyenne taille, est soumise à une pression concurrentielle de plus en plus difficile à supporter.
Les activités économiques en zone de montagne sont, de manière générale, rendues très fragiles en raison des handicaps permanents liés au relief, à l’isolement, au climat.
Mais, aujourd’hui, la menace d’abandon de l’activité agricole dans certains massifs devient plus que sérieuse. Et je n’ai pas encore évoqué, en cet instant, la présence du prédateur ; j’y reviendrai plus tard !
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.
L’activité agricole – et je parle sous le contrôle des représentants de plusieurs massifs de France – est vraiment indispensable au maintien de la biodiversité, à l’entretien des espaces ruraux et des paysages, au maintien des traditions locales, de la culture, du patrimoine collectif propre à chacun de ces territoires, voire à la préservation du tourisme en toute saison, qui dépend de l’activité agricole saisonnière.
Par conséquent, monsieur le ministre, nous estimons que l’agriculture de montagne a besoin d’une reconnaissance spécifique.
En 2002, le Conseil de l’Europe a proposé la création d’un label de qualité pour les produits alimentaires issus de l’agriculture de montagne. Finalement, en 2004, ce sont les acteurs socioéconomiques européens de la montagne qui ont décidé de signer ensemble une charte européenne des produits agroalimentaires de montagne de qualité. C’est un dossier que connaît bien notre amie Bernadette Bourzai.
En France comme en Italie, un certain nombre d’initiatives ont permis l’utilisation du terme « montagne » pour qualifier les produits agricoles et alimentaires. Il est à noter que les consommateurs sont, à juste titre d’ailleurs, sensibles à la mention de l’origine.
À nos yeux, il faut désormais aller plus loin au niveau européen et promouvoir enfin une reconnaissance de la dénomination « montagne » comme indication géographique protégée, puisque les produits de montagne tirent véritablement leur spécificité de cette origine.
Tel est l’objet de notre amendement, et nous espérons, monsieur le ministre, que l’État français portera cette revendication lors des négociations européennes.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 206 rectifié bis est présenté par MM. J. Blanc, Jarlier, Bernard-Reymond, B. Fournier, Juilhard, Alduy, Hérisson et Gouteyron.
L’amendement n° 330 rectifié est présenté par Mme David, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L’amendement n° 529 rectifié est présenté par M. Fortassin, Mme Escoffier, MM. Collin, Tropeano, Vall, Milhau, Mézard, Chevènement et de Montesquiou, Mme Laborde et MM. Plancade, Baylet, Alfonsi et Marsin.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement s’attache à promouvoir auprès de l’Union européenne la reconnaissance de la dénomination montagne comme un signe officiel d’origine et de qualité de niveau européen. À cet effet, il propose toute action ou initiative pouvant concourir à cet objectif et y associe, le cas échéant, les organisations professionnelles représentatives des producteurs agricoles de montagne et celles veillant au respect de la réglementation en matière de signes de qualité.
L’amendement n° 206 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l’amendement n° 330 rectifié.
Cet amendement devait être défendu par ma collègue Annie David, mais il me tient aussi à cœur, étant Auvergnate et originaire d’une zone de montagne.
Cela vient d’être dit, il s’agit de mettre en œuvre la reconnaissance d’une dénomination « montagne » spécifique, mais au niveau de l’Union européenne, avant, peut-être, de l’obtenir un jour au niveau mondial : il y a des montagnes sur tous les continents et les enjeux liés à la spécificité de ces territoires ignorent tout clivage. À cet égard, permettez-moi de vous rappelez l’existence de l’Association européenne des élus de montagne et de l’Association des populations des montagnes du monde.
Cette reconnaissance à l’échelle européenne passe notamment par la promotion des produits fabriqués en montagne. Aussi, le label « Indication géographique protégée », garant de la qualité du produit, est un outil parfaitement adapté pour promouvoir ces produits au niveau européen. Il importe de plaider la cause d’une IGP « montagne » auprès de l’Union européenne, car celle-ci permettrait de protéger la véritable origine de ces produits dans toute l’Europe.
L’objet de cet amendement est d’ailleurs en parfaite cohérence avec l’article 179 de la loi relative au développement des territoires ruraux, qui précise : « Le Gouvernement s’attache à promouvoir auprès de l’Union européenne et des instances internationales compétentes la reconnaissance du développement durable de la montagne comme un enjeu majeur. À cet effet, il peut proposer toute action ou initiative pouvant concourir à cet objectif et y associe, le cas échéant, les organisations représentatives des populations de montagne. »
On ne peut qu’approuver le principe général énoncé dans cet article, et l’amendement tend à préciser et à compléter, en partie, l’engagement de la République.
Lors du débat en commission, le rapporteur a proposé, pour répondre à cette exigence, une résolution européenne. Notre proposition n’est en rien contradictoire ; au contraire, elle donnera plus de poids à la résolution, qui, vous le savez, n’a pas de valeur contraignante, mais marque simplement l’expression d’une volonté.
Aussi, le fait d’inscrire dans la loi l’engagement du Gouvernement à promouvoir auprès de l’Union européenne la reconnaissance de la dénomination « montagne » comme un signe officiel d’origine et de qualité de niveau européen serait un premier pas.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
La parole est à M. Daniel Marsin, pour présenter l’amendement n° 529 rectifié.
Si François Fortassin, élu de montagne, avait été parmi nous ce soir, il aurait défendu cet amendement avec toute l’inspiration qu’on lui connaît ! En son absence, je me contenterai de me ranger aux explications qui viennent d’être données par notre collègue du groupe CRC-SPG, puisque son amendement est identique au nôtre.
Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement 114 rectifié, ainsi que sur les amendements identiques n° 330 rectifié et 529 rectifié, qui traitent tous du même sujet.
Cela me rappelle les débats que nous avons eus dans le cadre de la discussion de la loi d’orientation agricole et de la loi relative au développement des territoires ruraux, adoptée en 2005 et dont le président Emorine était l’un des rapporteurs. Nous avions alors discuté pendant très longtemps de l’appellation « montagne » et du concours qu’elle pouvait apporter au niveau national.
Mme Schurch l’a rappelé fort opportunément, une telle dénomination n’est pas reconnue au niveau communautaire ; seuls les AOC, IGP et STG sont, elles, reconnues.
Le problème des mentions valorisantes tient à leur nombre, trop grand, ce qui les rend peu lisibles pour le consommateur. Il n’est donc pas certain que l’ajout d’un nouveau label puisse résoudre le problème.
Aujourd’hui, il est impossible pour le consommateur de s’y retrouver. C’est la raison pour laquelle le président Emorine a proposé que soit un jour remis sur la table le dossier des IGP, AOP, AOC, STG, and so on, comme disent les Espagnols.
Sourires.
L’engagement demandé au Gouvernement concernant la dénomination « montagne » trouverait toute sa place dans une proposition de résolution européenne, mais pas vraiment dans la loi, car cela constituerait alors une injonction.
Quel que soit l’attachement que l’on peut avoir par ailleurs pour la montagne, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les trois amendements, et ce pour trois raisons.
Premièrement, les IGP répondent à un certain nombre de critères précis, ciblent des espaces géographiques beaucoup plus délimités que le terme « montagne » et des produits bien déterminés, tels que le sel de Guérande, les fraises du Périgord, le foie gras du Sud-Ouest ou le jambon de Bayonne. L’appellation « montagne », si elle était adoptée, serait, elle, beaucoup plus générale.
Deuxièmement, la montagne est une mention valorisante au titre du code rural, et nous sommes prêts à proposer à l’Union européenne de l’étendre au niveau communautaire. Cela ne pose pas de difficultés.
Troisièmement, l’enfer étant toujours pavé de bonnes intentions, mieux vaut, à mon sens, y réfléchir à deux fois avant de porter un tel dossier.
J’ai peur en effet qu’une mention aussi globalisante ne soit finalement pas tellement valorisante pour le produit concerné. La force des AOC ou des IGP, c’est qu’elles correspondent à des produits très précis et clairement identifiés par les consommateurs.
L’amendement n’est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 330 rectifié et 529 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Après la section 2 du chapitre III du titre III du livre II du code rural, il est inséré une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Dispositions relatives à la formation
« Art. L. 233-4. – Le fonctionnement des établissements de production, de transformation, de préparation, de vente et de distribution de produits alimentaires peut être subordonné à la présence d’une personne pouvant justifier d’une formation spécifique en matière d’hygiène alimentaire adaptée à l’activité de l’établissement concerné.
« Sans préjudice des dispositions prévues à l’article L. 233-1, les personnes pouvant justifier d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans au sein d’une entreprise du secteur alimentaire comme gestionnaire ou exploitant sont réputées avoir satisfait à l’obligation de formation mentionnée au premier alinéa.
« Un décret précise la liste des établissements concernés par l’obligation mentionnée au premier alinéa et précise les conditions auxquelles doivent répondre les organismes délivrant cette formation.
« Le contenu et la durée de la formation mentionnée au premier alinéa sont définis par arrêté du ministre chargé de l’alimentation. »
L’amendement n° 38, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 400, présenté par M. Lecerf et Mme Descamps, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ou d’une formation adaptée au sein des établissements d’enseignement agricole
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 111, présenté par M. Fauconnier, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
après validation des acquis de l’expérience
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Avec l’article 1er ter, nous abordons la question de la formation des personnes qui seront chargées d’appliquer les règles d’hygiène alimentaire dans les établissements concernés.
Nous proposons que l’obligation de formation ne s’applique pas aux personnes pouvant justifier d’une certaine expérience, sous réserve qu’elles aient procédé auparavant à la validation des acquis de leur expérience.
L’article 1er ter permet de subordonner le fonctionnement des établissements de production, de transformation, de préparation, de vente et de distribution de produits alimentaires à la présence d’une personne formée en matière d’hygiène alimentaire.
Monsieur le ministre, vous avez souhaité que le Gouvernement puisse être habilité à prendre une ordonnance sur cette obligation de formation. Nous aurions bien sûr préféré que la commission choisisse de préciser directement dans la loi de quoi il s’agissait.
Monsieur le rapporteur, comme vous l’avez souligné, une telle obligation peut constituer une réponse au problème récurrent du niveau sanitaire insatisfaisant constaté dans nombre d’établissements du secteur alimentaire.
Toutefois, l’article 1er ter précise également que les personnes pouvant justifier d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans au sein d’une entreprise du secteur alimentaire comme gestionnaire ou exploitant « sont réputées avoir satisfait à l’obligation de formation ».
Dans la mesure où il s’agit d’un domaine très vaste et extrêmement complexe, une telle précision ne nous semble pas totalement pertinente, car rien ne nous garantit que la seule expérience permette aux personnes d’acquérir les connaissances nécessaires en matière d’hygiène alimentaire.
Nous souhaitons donc préciser que ces personnes doivent d’abord réaliser une validation des acquis de l’expérience, ou VAE, afin de vérifier qu’elles peuvent réellement prétendre à l’obtention d’un certificat de qualification professionnelle.
La VAE, je le rappelle, est une mesure permettant justement à toute personne, quels que soient son âge, son niveau d’études ou son statut, de faire valider les acquis de son expérience professionnelle, non pas forcément pour aller systématiquement en formation, mais pour obtenir l’équivalent d’un diplôme, d’un titre ou d’un certificat de qualification professionnelle. Elle constitue, à nos yeux, la voie légale à emprunter.
L’article 1er ter prévoit que les personnes justifiant d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans sont dispensées de la formation obligatoire à l’hygiène, afin de ne pas alourdir les contraintes dans le secteur alimentaire.
Imposer une procédure de validation des acquis de l’expérience me paraît une contrainte trop lourde. Dans ces conditions, la formation finirait par s’imposer à tout le monde, ce qui n’est pas notre objectif commun.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 111.
Le Gouvernement émet pour les mêmes raisons un avis défavorable.
L’intention des auteurs de l’amendement est louable, mais la formation ici prévue a pour objet la maîtrise des conditions minimales d’hygiène dans un secteur d’activité. Par rapport à la nature de cette formation, qui est censée durer très peu de temps, une vingtaine d’heures environ, la procédure de validation des acquis de l’expérience me semble donc quelque peu disproportionnée.
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 1 er ter est adopté.
Le titre Ier du livre VIII du code rural est ainsi modifié :
1° L'article L. 811-1 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ils contribuent à l’éducation au développement durable et à la mise en œuvre de ses principes. » ;
b) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Ils contribuent aux activités de développement, d'expérimentation et d'innovation agricoles et agroalimentaires. » ;
2° L'article L. 811-8 est ainsi modifié :
a) Les quatre premiers alinéas sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« I. – Tout établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole assure une formation générale, technologique et professionnelle initiale et peut dispenser une formation continue, dans les métiers énoncés à l'article L 811-1.
« À ce titre, il regroupe plusieurs centres :
« 1° Un ou plusieurs lycées d'enseignement général et technologique agricole, lycées professionnels agricoles ou lycées d'enseignement général, technologique et professionnel agricole ;
« 2° Un ou plusieurs centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ou centres de formation d'apprentis qui dispensent les formations mentionnées au présent chapitre ;
« 3° Un ou plusieurs ateliers technologiques ou exploitations agricoles à vocation pédagogique qui assurent l'adaptation et la formation aux réalités pratiques, techniques et économiques, et qui contribuent à la démonstration, à l'expérimentation et à la diffusion des techniques nouvelles.
« Il a pour siège soit un lycée d'enseignement général et technologique agricole, soit un lycée professionnel agricole, soit un lycée d'enseignement général, technologique et professionnel agricole et dispose d’un centre relevant de chacune des catégories mentionnées aux 2° et 3° » ;
b) Le sixième alinéa est supprimé ;
c) Au début du dixième alinéa est insérée la mention : « II.- » ;
d) Après le dixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique, la partie pédagogique du projet d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations, d'une durée maximale de cinq ans, portant sur l'enseignement et son organisation, et l'organisation pédagogique de la classe ou de l'établissement. Ces expérimentations sont préparées par le conseil de l'éducation et de la formation prévu à l'article L. 811-9-1. Elles font l'objet d'une évaluation annuelle. » ;
3° Après l'article L. 811-9, il est inséré un article L. 811-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 811-9-1. – Dans chaque établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole, il est institué un conseil de l'éducation et de la formation présidé par le chef d'établissement. Il a pour mission de favoriser la concertation notamment entre les professeurs et les formateurs, en particulier sur l'élaboration de la partie pédagogique du projet d'établissement et sur l'individualisation des parcours de formation des élèves, étudiants, apprentis et stagiaires. Il prépare les expérimentations pédagogiques prévues à l'article L. 811-8. Sa composition est fixée par décret. » ;
4° L'article L. 813-1 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du deuxième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ils contribuent à l’éducation au développement durable et à la mise en œuvre de ses principes » ;
b) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Ils contribuent aux activités de développement, d'expérimentation et d'innovation agricoles et agroalimentaires ; »
5° Après le cinquième alinéa de l’article L. 813-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique, la partie pédagogique du projet d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations, d'une durée maximale de cinq ans, portant sur l'enseignement et son organisation, et l'organisation pédagogique de la classe ou de l'établissement. Ces expérimentations font l'objet d'une évaluation annuelle. » ;
6° L’intitulé du chapitre premier est ainsi rédigé : « Dispositions relatives à l’enseignement et à la formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ;
7° À la première phrase des premier et dernier alinéas de l’article L. 811-1, à la première phrase des premier et deuxième alinéas de l’article L. 811-2, les mots : « l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « l'enseignement et la formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
8° À la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 811-2, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
9° À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 811-2, les mots : « formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ;
10° À la première phrase du dixième alinéa de l'article L. 811-8, les mots : « formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
11° À la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 813-1, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
12° Au dernier alinéa de l’article L. 813-1 et à la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 813-2, les mots : « formation professionnelle agricoles privés » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle privés aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
13° Au quatrième alinéa de l’article L. 813-2, les mots : « formation professionnelle agricoles privés » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle privés aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
14° À la dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 814-2, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires ».
Mme Françoise Férat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cela ne vous surprendra pas que je parle à nouveau de l’enseignement agricole.
Sourires
Je tenais tout d’abord à remercier le président de la commission, les rapporteurs, ainsi que l’ensemble de ses membres pour l’adoption de mon amendement, pour avoir entendu mes arguments et compris l’importance de l’enseignement agricole et de ses évolutions. Je pense pourvoir affirmer que, même s’il reste encore beaucoup à faire, cet article est une avancée significative.
Notre système éducatif, nos territoires ruraux et notre agriculture ont entre leurs mains un enseignement doté d’un fort potentiel et d’une identité originale, et qui a confirmé au fil des années son succès. Il constitue, à mon sens, une richesse qu’il nous faut valoriser et préserver.
Les assises de l’enseignement agricole public ayant tracé de nouvelles perspectives, les propositions qui ont été retenues conduisent à adapter le cadre législatif aux évolutions rencontrées, sans oublier les enjeux auxquels doit faire face le système éducatif. Je souhaite les évoquer ici.
Premièrement, en ce qui concerne l’éducation au développement durable, la loi relative à la mise en œuvre du Grenelle prévoit qu’elle soit portée par les établissements scolaires, en particulier par les lycées agricoles. Leur savoir-faire, lié au vivant et aux territoires, leur permet d’être particulièrement performants en matière de développement durable.
C’est pourquoi il est proposé de l’inscrire au cœur même des objectifs de l’enseignement et de la formation professionnelle agricoles, publics et privés.
Deuxièmement, pour ce qui est de l’innovation agricole et agroalimentaire, il est proposé de moderniser l’intitulé de la mission, en tenant compte des politiques publiques contemporaines, et de confirmer son rôle dans les processus d’innovations agricoles et agroalimentaires.
Troisièmement, s’agissant des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole, qui sont implantés sur tout le territoire, il est proposé, non de revenir sur le principe de complétude de l’offre des voies de formations prévues par la loi d’orientation de 1999, mais d’en imposer le respect au niveau pertinent qu’est l’établissement, au lieu du seul lycée.
Quatrièmement, les expérimentations pédagogiques dans le projet d’établissement n’interviendront qu’en cohérence avec les axes du schéma prévisionnel national des formations, et feront l’objet tout à la fois d’une autorisation préalable de l’autorité académique et d’une évaluation annuelle.
Cinquièmement, les réformes de la voie professionnelle et du lycée, ainsi que l’autonomie pédagogique grandissante qu’elles impliquent, nécessitent un pilotage renforcé au sein de l’établissement, condition que ne satisfont pas pleinement les dispositions existantes. Il est donc proposé de créer un conseil de l’éducation et de la formation au sein de chaque établissement public.
Sixièmement, force est de constater que l’enseignement agricole souffre aujourd’hui d’un déficit d’image. C’est pourquoi il importe, et ce point me tient particulièrement à cœur, de faire connaître par sa dénomination la diversité des métiers auquel il prépare, des métiers qui sont ancrés non plus simplement dans les réalités agricoles, mais plus largement dans les territoires et la ruralité.
Les difficultés qu’éprouvent les jeunes à s’orienter vers l’enseignement agricole tiennent à leur méconnaissance de ce système d’enseignement et de formation. Sur ce sujet, il nous faut faire preuve d’ingéniosité et d’ouverture, et mettre en place des actions de communication.
Les établissements d’enseignement agricole constituent de réels lycées des métiers. Malheureusement, ils restent mal connus de nos concitoyens et la diversité des formations et des métiers préparés est masquée par sa dénomination actuelle. Cela rend difficile la perception pour les jeunes, les familles, mais aussi les adultes qui recherchent des formations.
Au-delà de ces opérations ponctuelles, il nous fallait également envisager de changer l’appellation elle-même. Monsieur le ministre, vous m’avez confié la délicate mission de travailler sur une nouvelle dénomination et sur l’image de l’enseignement agricole dans son ensemble.
C’est un exercice enthousiasmant mais complexe, car chaque mot a son importance, et, justement, comme j’ai pu le constater, chacun voulait apporter « son mot », sa pierre à l’édifice.
Après de nombreuses auditions en présence des représentants d’enseignants, des représentants syndicaux, d’élèves, de parents d’élèves et des ministères concernés – je peux d’ailleurs vous affirmer que tous mes interlocuteurs se sont particulièrement investis – la dénomination retenue serait celle-ci : « l’enseignement et la formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires ».
Pour conclure, je crois nécessaire de rappeler encore et toujours quelques chiffres, car ils parlent d’eux-mêmes. Globalement, nous constatons plus de 90 % de réussite aux examens, plus de 92 % d’intégration professionnelle. Quelle autre filière peut se prévaloir de tels résultats ?
Les valeurs véhiculées par l’enseignement agricole, fort d’une pédagogie qui formera d’excellents professionnels, feront également des citoyens, des hommes et des femmes responsables et épanouis dans leur vie, sans oublier que l’ancrage territorial de ses établissements participe à l’animation et au développement de nos espaces ruraux.
Faut-il rappeler que l’enseignement agricole accompagne, depuis son origine, les mutations du monde agricole et des territoires ?
Faut-il rappeler que les établissements forment des élèves, des étudiants, des apprentis et des stagiaires de la formation continue dans des secteurs variés, non seulement l’agriculture, mais aussi l’alimentation, l’environnement, les services, le paysage, qui font tous les métiers d’aujourd’hui et, à n’en pas douter, ceux de demain ?
Je pense que l’article 1er quater contribue au bon développement de cette filière d’exception, qui prend toute sa place dans le paysage éducatif. C’est pourquoi, mes chers collègues, je compte sur vous pour le soutenir et le voter.
Je suis persuadée que l’enseignement agricole est plus que jamais une chance pour l’avenir de nos jeunes et de nos territoires.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite, tout d’abord, dénoncer la méthode par laquelle l’enseignement agricole a été introduit dans ce projet de loi. Absent dans la version initiale, l’enseignement agricole n’est finalement introduit que par un article additionnel voté en commission.
Il transcrit d’ailleurs cinq des soixante mesures annoncées par le ministère de l’agriculture dans le pacte de décembre 2009, adopté à l’issue des assises de l’enseignement agricole public.
Alors que nous sommes en plein débat sur l’application du Grenelle de l’environnement et dans une dynamique de développement durable indispensable qu’il faut susciter et amplifier dans notre pays, comment imaginer qu’il ne soit pas fait mention de la formation dans un projet de loi dit de modernisation ?
Le Gouvernement n’a de cesse de proclamer que l’enseignement agricole public est une voie d’excellence et de réussite. En effet, les taux de succès aux examens et d’insertion professionnelle des élèves attestent que tel est bien le cas.
L’enseignement agricole participe efficacement à l’insertion et à la lutte contre l’échec scolaire, grâce à des spécificités pédagogiques en lien avec les territoires. Mais, malgré de belles paroles, le Gouvernement maltraite – et je pèse mes mots, monsieur le ministre – l’enseignement agricole par une insécurité budgétaire insupportable.
Depuis plusieurs années, du fait des suppressions de postes et d’une sous-évaluation du plafond des emplois tant administratifs qu’enseignants, nous sommes contraints à de véritables bricolages budgétaires : ponction, notamment de moyens sur l’éducation nationale, déblocage de postes dans l’urgence, comme les soixante postes en septembre dernier.
Et pourtant, grande devrait être notre ambition pour un enseignement agricole innovant, performant, diversifié. Or les mesures avancées dans cet article additionnel vont contribuer à bouleverser en profondeur les structures éducatives existantes.
Outre l’inscription dans le marbre de l’autonomie des établissements d’enseignement agricole, notamment dans le domaine pédagogique, et contre laquelle nous avons déposé des amendements, le bouleversement sous-jacent est celui de la fusion à venir de nombreux établissements existants.
L’article, tel qu’il est formulé, en rendant obligatoire la présence des formations générales, technologiques et professionnelles initiales dans tout établissement d’enseignement agricole, rend de fait inévitable le regroupement de différents établissements, notamment des plus petits et des plus isolés en milieu rural.
Tous les lycées agricoles ne proposent pas de filière générale scientifique : que vont-ils devenir, si ce n’est une annexe, après fusion avec un établissement plus grand, lequel proposera, lui, des filières générales ?
L’innovation pédagogique sert de prétexte à l’application de la RGPP, sans tenir compte des réalités de terrain, de l’importance des lycées professionnels agricoles, du moins si l’on veut obtenir un maillage éducatif fin du territoire national.
Quel est l’intérêt de regrouper des établissements, de mélanger des publics – élèves, étudiants, adultes, apprentis – si ce n’est pour désengager les finances de l’État, en captant les budgets des régions destinés à la formation professionnelle, supprimer des postes, fermer des classes à faibles effectifs et fusionner des filières et des formations ?
Nos amendements ont, en partie, pour objet de permettre aux petites structures de l’enseignement agricole d’être préservées et de continuer à remplir leurs missions de proximité.
Enfin, je souhaite dire un mot de la situation de mise en concurrence des enseignements agricoles public et privé, notamment dans le cadre budgétaire, mais aussi en ce qui concerne la mission d’éducation et de service public, désormais complètement offerte au secteur privé.
Le rapport public-privé dans l’enseignement agricole ne cesse d’évoluer au détriment du public, qui est en recul constant depuis 2002. Ce rapport est, pour résumer, à l’exact opposé de celui qui est constaté dans l’éducation nationale. Dans certaines régions, comme la Picardie et les Pays-de-la-Loire, la part de l’enseignement public est même passée sous la barre des 20 %.
Aujourd’hui, le ministère de l’agriculture répond à la demande sociale de formation en répartissant les formations indistinctement entre public et privé.
Or, mes chers collègues, l’État a une responsabilité : pérenniser et diversifier l’offre publique d’éducation, afin de garantir l’accès à un enseignement public gratuit sur l’ensemble du territoire national.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, j’interviens à la demande de Jean-Luc Fichet, dont je partage les propos, puisque j’ai eu la chance d’être pendant douze ans présidente du conseil d’administration de l’École forestière de Meymac, en Corrèze, et représentante de la région Limousin au conseil d’administration de l’EPLEA de Neuvic.
Voilà deux établissements qui, comme ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin vient de le dire, ont fusionné, ce qui ne manque pas de provoquer de nombreuses difficultés.
Si nous ne pouvons que nous réjouir des avancées introduites à l’article 1er quater, nous constatons cependant que cet article ne résout en rien le problème fondamental de l’enseignement agricole, celui de son financement.
Si j’avais déposé un amendement à ce sujet, cela aurait été en pure perte, car il aurait été rejeté sous couvert de l’article 40. Je ne peux donc qu’alerter le Gouvernement pour que, enfin, il agisse et donne à l’enseignement agricole les moyens qui lui sont indispensables.
Les lycées agricoles, sous-dotés en personnels, sont pourtant un formidable outil. Ils permettent, ce qui est rare actuellement, d’offrir un débouché réel aux élèves. Leur performance est reconnue. Il s’ensuit une forte attractivité de ces établissements. Leurs effectifs ont d’ailleurs connu une forte croissance à partir de 1993, avec une accélération de 25 % en quatre ans, pour se stabiliser depuis 2000 à un niveau élevé. Par ailleurs, leur image s’est nettement améliorée.
De plus, les lycées agricoles permettent aux familles modestes de trouver un cadre accueillant et de proximité et à leurs enfants de suivre une formation efficace, d’obtenir un diplôme reconnu et d’accéder à un emploi intéressant.
Pourtant, rien dans la réforme du lycée n’évoque la spécificité de cet enseignement et son originalité pédagogique, qui vient d’être reconnue par nos collègues. On peut également citer en exemple les maisons familiales rurales, qui offrent, selon les régions, des perspectives intéressantes à plus d’un titre.
Les établissements publics et privés accueillent les jeunes comme les adultes pour des formations en alternance et offrent des débouchés aussi variés que les formations sont enrichissantes, allant de l’environnement à la formation aux diverses productions, de l’aménagement de l’espace aux services à la personne.
Cet apprentissage est une réelle chance, notamment pour ceux qui sont en rupture de scolarité, puisqu’il offre un avenir prometteur au sein du monde professionnel, au sein du monde du travail pour tous.
Plus généralement, les lycées agricoles participent au développement des territoires ruraux, en luttant contre la désertification accrue de nos campagnes. À ce titre, un récent rapport du ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche pointe le rôle majeur que joue l’enseignement agricole dans un contexte de renouveau des campagnes françaises.
De mon point de vue, le Gouvernement n’a pas assez pris conscience de l’intérêt que présente cet enseignement.
Depuis des années, des postes d’enseignant et de personnels administratifs sont supprimés : 126 postes l’ont été en 2004, 94 en 2005, 210 en 2006 et 106 en 2008. Au niveau national, il manque actuellement 560 postes d’enseignant ! En somme, le nombre d’élèves progresse, mais les crédits affectés à cet enseignement ne suivent pas, et nous ne pouvons que le regretter.
Par ailleurs, un millier de contractuels travaillent dans ces lycées, mais ils ne sont rémunérés que dix mois sur douze et souffrent de la précarité d’une année scolaire à l’autre.
… et, « bénéficiant » de surcroît de la révision générale des politiques publiques, il subit de plein fouet une politique de rigueur budgétaire. L’enseignement agricole est le parent pauvre de l’éducation, alors qu’il présente, comme l’a souligné Mme Férat, un taux d’insertion professionnelle exceptionnel !
D’ailleurs, notre collègue défend, chaque année, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, un amendement visant à prendre sur les crédits du ministère de l’éducation nationale les ressources nécessaires pour combler le déficit de la filière de l’enseignement agricole.
La logique comptable qui est ici à l’œuvre va donc à l’encontre de l’intérêt des élèves.
Pourtant, l’enseignement agricole ne forme que 20 % des agriculteurs ; son intitulé n’était d’ailleurs pas représentatif de la palette des potentiels qu’il recouvre. En dépit de l’excellent travail de Françoise Férat, avoir modifié la dénomination de l’enseignement et de la formation agricoles pour adopter la formule « enseignement et formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ne relève que du toilettage et ne changera rien aux problèmes de fond, prégnants depuis de nombreuses années.
Je me réjouis cependant que l’on ait pris le tournant du développement durable et que l’on offre la possibilité de mener des expérimentations sur des innovations agricoles et agroalimentaires, ainsi que des expérimentations pédagogiques. Mais ces belles paroles devront être suivies des moyens adéquats !
En effet, nous débattons actuellement d’un projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche qui préfigure l’agriculture et le monde rural de la future PAC, celle d’après-2013. Les enjeux sont énormes et les besoins de formation immenses. Il faut donc que l’enseignement agricole soit en mesure d’y faire face.
Pour conclure, je reprendrai une formule employée par Edgar Pisani devant les élèves de l’EPLEA de Tulle-Naves, établissement qui porte désormais son nom : « Il faut apprendre à cultiver plus en protégeant la nature et faire en sorte que la nourriture produite soit à la disposition de tous les hommes ».
Parole d’expert que celle de l’un des pères fondateurs de la PAC qui est lucide sur les évolutions nécessaires ! En effet, il s’agit de passer d’une conception principalement quantitative à une conception qualitative. Vaste programme…
Comme je souscris pleinement aux propos de mes collègues Brigitte Gonthier-Maurin et Bernadette Bourzai, je me bornerai à formuler quelques remarques.
À l’instar de Françoise Férat, je me félicite qu’un article relatif à l’enseignement agricole ait été inséré dans ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Il aurait été dommage de faire l’impasse, dans un tel texte, sur ce qui est à l’origine même de la formation de nos agriculteurs !
En revanche, je ne partage pas tout à fait le sentiment de Françoise Férat lorsqu’elle affirme que la formation agricole souffre d’un déficit d’image. Peut-être est-ce différent selon les régions, mais, en Bretagne, je puis vous en assurer, la qualité de la formation agricole dispensée au fil des années est telle que nos agriculteurs se sont globalement identifiés à leurs établissements de formation d’origine, éprouvant même le sentiment d’être viscéralement attachés à cet enseignement.
Après les collègues qui se sont exprimées sur cet article, je m’inquiète de la diminution des crédits affectés à l’enseignement agricole, que l’on constate tous les ans. Cela nous contraint, en effet, à puiser dans le budget du ministère de l’éducation nationale les ressources nécessaires pour combler le déficit.
Néanmoins, subsistent des problèmes importants, que nous devrons attaquer de front. Même si nous modifions sa dénomination, même si cet enseignement doit s’adapter aux évolutions en cours, le cœur de métier reste tout de même l’agriculture. Si seulement 20 % des jeunes qui choisissent cette voie se destinent aux métiers de l’agriculture, alors nous devons vraiment nous interroger sur l’avenir des exploitations à but pédagogique.
Cet aspect du problème doit réellement être pris en compte, car, si nous voulons que ces exploitations évoluent, nous devrons financer de nouvelles mises aux normes. Or, comme nous leur demandons de présenter des comptes équilibrés, ces exploitations doivent être rentables. Mais comment les exploitations à but pédagogique pourraient-elles être rentables, si, outre la gestion quotidienne, elles doivent se préoccuper de pédagogie et de formation ?
Si l’on ouvre trop les métiers à la nature, aux territoires, ce qui n’est pas, en soi, inconcevable, où sera la barrière entre l’enseignement agricole et l’éducation ? Il faudra bien un jour répondre à cette question.
L'amendement n° 243, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer le mot :
assure
par les mots :
peut assurer
et les mots :
peut dispenser
par le mot :
dispenser
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
L’article 1er quater prévoit de modifier l’article L. 811-8 du code rural pour tirer les conséquences de la loi d’orientation agricole de 1999, avec notamment la création, dans un délai de cinq ans, de « lycées d’enseignement général, technologique et professionnel agricole », en lieu et place des lycées d’enseignement général et technologique agricoles et des lycées professionnels agricoles.
Notons, toutefois, que ladite loi, qui devait entrer en application dans les cinq ans, n’est toujours pas appliquée à la totalité des établissements agricoles.
Ce rappel étant fait, notre amendement porte sur une autre modification prévue dans cet article, qui introduit, de manière assez insidieuse, l’obligation pour tout établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole, donc pour tout EPLEFPA, de dispenser une formation générale, technologique et professionnelle initiale.
Aujourd’hui, nombre de lycées agricoles ne dispensent pas la totalité de ces formations initiales. Créer une telle obligation pour tous ces établissements aura pour effet de créer des regroupements factices.
Par cette disposition, vous voulez, monsieur le ministre, favoriser les fusions entre les lycées, les centres de formation d’apprentis, les CFA, et les centres de formation professionnelle, les CFP, avec pour conséquence, dans une logique de réduction des dépenses publiques, la diminution du nombre de postes, notamment d’enseignant, au détriment des contenus pédagogiques et de la spécificité des publics accueillis.
Faciliter les fusions, si nécessaire, dans une logique présupposée d’économie de moyens, tel est, me semble-t-il, le véritable objectif.
C’est pourquoi nous souhaitons, par cet amendement, supprimer l’obligation faite à ces établissements de dispenser ces trois formations, en leur permettant de continuer à remplir leurs missions de proximité, dans un esprit de coopération.
Notre collègue propose de rendre facultatif le fait pour un établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole de dispenser les trois types de formation, générale, technologique et professionnelle.
Il ne s’agit pas de le rendre facultatif ; il s’agit de supprimer l’obligation ! Il y a une petite nuance…
L’article 1er quater introduit par la commission réaffirme l’obligation pour tout EPLEFPA de dispenser une offre de formation initiale complète. Cette obligation figurait déjà dans la loi d’orientation agricole de 1999, mais elle ne concernait que les lycées.
Cet article maintient donc une exigence de formation élevée, tout en adaptant celle-ci à l’organisation de ces établissements.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
L’objectif est bien évidemment de conserver les trois formations, mais il nous semble trop lourd et trop rigide de l’exiger d’un seul lycée. Nous estimons qu’il est plus souple de le faire au niveau d’un établissement public, mais je sais bien que vous ne serez pas d’accord avec ce choix.
Par exemple, dans mon département, l’Eure, je ne pense pas que le fait de regrouper ces trois formations dans deux lycées agricoles distants de quelques kilomètres, l’un à Chambray et l’autre au Neubourg, pose de réels problèmes. Cette mesure ne peut qu’apporter plus de souplesse, offrant certainement aussi la possibilité à ces établissements d’être plus spécialisés, et donc plus performants encore.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 402, présenté par M. Lecerf et Mme Descamps, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
et reçoit à cette fin de l'État les postes d'enseignants nécessaires pour faire face aux besoins générés par les programmes officiels
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 595, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
permettant notamment de développer l'autonomie des exploitations agricoles
La parole est à M. Jacques Muller.
Cet amendement vise à compléter le rôle dévolu aux lycées agricoles concernant la démonstration, l’expérimentation et la diffusion de techniques nouvelles.
Il apporte une précision qui me paraît intéressante dans la mesure où il vise à promouvoir l’autonomie des exploitations agricoles.
Je rappelle ici que toute technique nouvelle n’implique pas une diminution de la consommation d’intrants ou, si l’on préfère, toute technique nouvelle ne permet pas d’accroître l’autonomie des exploitations. On l’a vu, l’utilisation de semences hybrides permet des rendements plus élevés, mais, de fait, elle suppose une consommation accrue d’intrants. J’en veux pour preuve, concernant les élevages laitiers, le passage de l’herbe au modèle intensif fondé sur l’association du maïs et du soja, qui induit, une fois encore, une augmentation des intrants.
Dans le cadre des techniques nouvelles censées être diffusées par les lycées et les exploitations agricoles, il me semble utile d’indiquer un cap - il ne s’agit en aucun cas d’une obligation -, notamment dans le sens de l’autonomie des exploitations agricoles.
Monsieur le président, la précision apportée par cet amendement ne paraît pas utile.
L’article 1er quater indique déjà que les ateliers technologiques ou les exploitations agricoles à vocation pédagogique contribuent – c’est un point très important ! – à la diffusion des techniques nouvelles, ce qui inclut bien entendu le développement de l’autonomie des exploitations agricoles.
Cet amendement étant superflu, la commission y est défavorable.
Le Gouvernement y est également défavorable, et pour les mêmes raisons.
Je veux simplement souligner que, dans notre bon département de l’Orne, nous travaillons déjà depuis très longtemps sur ces questions.
Voilà environ deux ans, lors de l’examen des crédits affectés aux ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale, nous avions déjà proposé de transformer l’appellation « lycée agricole » pour y introduire la notion de « développement durable ». La Basse-Normandie mène d’ailleurs, en la matière, une politique d’envergure, précise et efficace.
Tous les responsables des lycées agricoles – en tout cas, ceux de Basse-Normandie ! – sont parfaitement conscients des objectifs.
Chez nous, cet amendement est largement satisfait !
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vos observations ne m’ont pas convaincu. Une technique nouvelle ne permet pas, en soi, de réduire les intrants ou de développer l’autonomie de l’exploitation.
J’ai travaillé pendant vingt-cinq ans dans un lycée agricole, qui était déjà, eu égard à ce qui se pratiquait alentour, à l’avant-garde en termes d’économies d’intrants et de rotation des cultures, ce qui nous mettait parfois en porte-à-faux.
J’ai moi-même piloté une expérimentation pédagogique sur plusieurs années. Avec les élèves, nous pratiquions une auto-évaluation de la durabilité de l’exploitation agricole et dressions un autodiagnostic ouvert à la profession et, entre autres, à l’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique.
La démarche était intéressante, mais, lorsque nous communiquions nos résultats et mettions en exergue nos ratios, nous avions parfois quelque peine à convaincre la profession, dans une région qui pratique la monoculture de maïs labellisée « raisonnée », avec une consommation d’intrants que vous pouvez imaginer. En effet, lorsque l’on fait de la monoculture, il faut traiter, sinon, avec la chrysomèle – elle est là ! -, c’est la catastrophe.
Lorsque les élèves présentaient les critères de rotation notamment, on les regardait un peu comme des Martiens !
Pour toutes ces raisons, il me semblerait judicieux d’inscrire dans la loi que, au nom du développement durable, les techniques nouvelles doivent permettre une plus grande autonomie des exploitations et, par conséquent, une réduction de la consommation d’intrants.
Nous sommes là de nouveau au cœur des problématiques de souveraineté alimentaire, de réduction de la consommation d’intrants et d’énergies fossiles ; aussi, je n’insiste pas.
L’adjonction de l’adverbe « notamment » permettrait de fixer un cap bien utile pour les lycées qui s’engagent dans cette voie, sans que ce soit une obligation.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 244, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Supprimer les mots :
et dispose d'un centre relevant de chacune des catégories mentionnées aux 2° et 3°
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Par cet amendement, qui procède de la même logique que celui que nous avons précédemment défendu, nous souhaitons supprimer l’obligation nouvelle pour les EPLEFPA de dispenser tous les types de formation initiale et continue.
À cet égard, monsieur le rapporteur, je précise qu’il s’agit pour nous non pas de transformer en une simple faculté, mais bien de supprimer purement et simplement l’obligation nouvelle pour ces établissements de disposer d’un centre de formation pour adultes ou d’un centre de formation professionnelle, ainsi que d’ateliers technologiques ou exploitations agricoles à vocation pédagogique.
La raison est la même : cette obligation ne correspond pas à la réalité de la composition des établissements, notamment en milieu rural, et aurait pour effet de provoquer des fusions, dont les avantages en termes d’économies budgétaires ont été détaillés, mais qui ne se retrouvent pas en ce qui concerne la qualité et la proximité de l’enseignement public agricole.
Cet amendement procède de la même logique que l’amendement n° 243, que Mme Gonthier-Maurin a défendu il y a quelques instants.
La commission émet donc un avis défavorable.
Pour des raisons identiques à celles qu’il a exposées tout à l’heure, le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.
Il nous semble préférable de répartir les activités dans le cadre de l’établissement public plutôt que les regrouper sur un seul et même lycée.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 245, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 17, 18, 26 et 27.
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Cet amendement vise à supprimer les alinéas permettant l’expérimentation pédagogique dans les établissements agricoles, publics et privés.
Nous ne sommes pas fondamentalement opposés à l’idée d’expérimentation pédagogique ; elle peut en effet ouvrir la voie à de nouvelles pratiques innovantes et fructueuses. Néanmoins, cette expérimentation, dans un domaine aussi important que celui de l’éducation, ne doit pas se faire sans initiative et cadre nationaux, sans suivi ni contrôle, et devrait déboucher sur une évaluation sincère avant toute généralisation. C’est pourtant l’inverse qui nous est proposé avec cet article.
Il est introduit pour chaque établissement, sous réserve de validation de l’autorité académique, la possibilité d’effectuer des expérimentations de cinq ans au maximum sur l’enseignement et l’organisation pédagogique.
Cette possibilité est un nouveau pas vers l’autonomisation des établissements, qui auront désormais carte blanche en matière d’expérimentation, sans que l’État les encadre.
Nous sommes opposés à cette autonomisation croissante des établissements Elle a pour effet de créer une grande disparité entre les différents établissements du territoire, allant ainsi à l’encontre du principe même d’égalité face à l’éducation et créant à terme une véritable concurrence entre les établissements et sur la valeur des diplômes.
Ce mode de gestion est fondamentalement opposé à la vision que nous avons de l’enseignement, fondée sur un accès égal de tous et sur tout le territoire.
L'amendement n° 246, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 18
I. - Première phrase, après les mots :
Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique
insérer les mots :
et après avis du comité technique paritaire régional
II. - Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
effectuée par l'inspection de l'enseignement agricole. Chaque année, le Gouvernement remet au parlement un rapport présentant le bilan des différentes expérimentations entreprises sur tout le territoire.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Il s’agit d’un amendement de repli.
Nous sommes opposés, comme je viens de l’expliquer, à ce dispositif d’expérimentation. S’il doit néanmoins entrer en application, nous souhaitons au moins qu’il s’effectue dans un cadre précis et déterminé.
Ainsi, nous pensons indispensable que le comité technique paritaire régional donne son avis sur le projet d’expérimentation de l’établissement public, outre le fait que celui-ci doit être validé par l’autorité académique.
En effet, ce comité a pour rôle de se prononcer sur l’organisation générale des services, en particulier sur leur organisation interne, sur la répartition des services, sur les méthodes et techniques utilisées au travail, ainsi que sur les questions touchant aux effectifs et à la situation des personnels contractuels dans la fonction publique.
Il est ainsi logique qu’il soit associé à cette démarche d’expérimentation, afin d’en prendre connaissance et de s’exprimer sur ce sujet, pour lequel il est compétent.
Nous souhaitons ensuite qu’un suivi de ces expérimentations soit effectué sur le plan national, afin qu’elles fassent l’objet d’un véritable contrôle, mais aussi d’une véritable analyse.
On pourrait ainsi éviter la reproduction d’expérimentations infructueuses et systématiser, sur le plan national, les expériences positives.
Nous souhaitons donc que l’évaluation annuelle telle qu’elle est proposée à cet alinéa soit effectuée par l’inspection de l’enseignement agricole.
En plus de cette évaluation, le Gouvernement doit présenter chaque année, devant le Parlement, un rapport listant, présentant et évaluant les différentes expérimentations menées sur l’ensemble du territoire.
Il est en effet important que les représentants de la Nation, dans leur mission de contrôle de l’action du Gouvernement, puissent disposer d’études leur permettant de connaître la réalité de l’enseignement agricole et d’alimenter leur réflexion en la matière.
L'amendement n° 249, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 27 :
I. - Première phrase, après les mots :
Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique
insérer les mots :
et après avis du conseil régional d'enseignement agricole privé
II. - Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :
effectuée par l'inspection de l'enseignement agricole. Chaque année, le Gouvernement remet au parlement un rapport présentant le bilan des différentes expérimentations entreprises sur tout le territoire.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce sont des cadences infernales, monsieur le président !
Sourires
Là encore, il s’agit d’un amendement de repli.
Même si nous demeurons opposés au dispositif d’expérimentation ici prévu, nous proposons néanmoins des conditions minimales d’encadrement si ce dernier voit tout de même le jour.
Cet amendement vise à transposer les mesures de contrôle des expérimentations à l’enseignement privé. Ainsi, en lieu et place du comité technique paritaire régional, l’autorité compétente pour l’enseignement privé est le conseil régional d’enseignement agricole privé.
Notre amendement reprend exactement les mêmes dispositions que pour l’enseignement agricole public : les expérimentations font l’objet d’un suivi sur le plan national, l’inspection de l’enseignement agricole effectuant une évaluation annuelle ; le Gouvernement présente un rapport annuel au Parlement listant, présentant et évaluant les différentes expérimentations menées par l’enseignement agricole privé sur l’ensemble du territoire.
L’amendement n° 245 vise à supprimer la possibilité d’expérimentation pour l’enseignement et la formation professionnelle agricoles, qu’ils soient publics ou privés.
Ma chère collègue, cette possibilité constitue un atout important pour développer l’innovation dans l’enseignement et la formation professionnelle agricoles, et il convient de la conserver. C’est pourquoi je ne souscris pas à votre proposition, qui conduirait à un nivellement par le bas.
Par ailleurs, le recours à l’expérimentation est encadré par l’article 1er quater.
Aussi, la commission émet un avis défavorable, sauf si vous décidiez- on ne sait jamais - de retirer l’amendement.
S’agissant de l’amendement n° 246, l’article 1er quater encadre le recours aux expérimentations : l’autorisation de l’autorité académique est nécessaire, l’expérimentation est limitée à cinq ans, une évaluation annuelle est réalisée.
Cet encadrement est suffisant et le présent amendement ne paraît donc pas opportun ; c’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
L’amendement n° 249 est équivalent au précédent, mais il porte sur l’enseignement agricole privé. La commission émet là encore un avis défavorable.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces trois amendements.
Notre philosophie politique est différente, madame Gonthier-Maurin : nous estimons que l’expérimentation est utile, d’autant qu’elle est encadrée et qu’elle est validée par l’autorité académique avant d’être mise en œuvre. Par conséquent, les étudiants ne courent aucun risque.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 247, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 19 et 20
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Nous sommes opposés à la création du conseil de l’éducation et de la formation dans les EPLEFPA.
Tout d’abord, l’utilité d’un conseil spécifique propre à l’élaboration de la partie pédagogique du projet d’établissement n’est pas avérée. En effet, ces missions sont déjà assurées par les conseils propres à chaque centre membre d’un EPLEFPA. La coordination entre ceux-ci se fait via le conseil d’administration, qui valide le projet d’établissement. La cohérence pédagogique entre les différents projets est ainsi déjà mise en œuvre.
De plus, chaque conseil d’administration peut, s’il le souhaite, créer des groupes de réflexion pédagogique dédiés à cette question.
Les instruments de coordination existent donc bel et bien. Cette nouvelle structure ne fera qu’ajouter à la complexité administrative et alourdir le fonctionnement des établissements.
En outre, l’article est totalement muet sur la composition de ce conseil, dont on sait seulement qu’il sera présidé par le chef d’établissement.
Pourquoi, de plus, vouloir imposer une structure qui connaît aujourd’hui un échec complet dans l’éducation nationale ? En effet, cinq ans après son lancement, la moitié seulement des lycées ont effectivement mis en place ce conseil pédagogique.
En fait d’harmonisation de projets pédagogiques, il ne s’agit, là encore, que de l’application de la RGPP, dans le but de réduire le nombre des fonctionnaires en mélangeant les publics accueillis.
La volonté de créer un projet pédagogique commun à tous les lycées et centres composant l’EPLEFPA marque en fait la volonté de regrouper des enseignements similaires, sans tenir compte de la spécificité des voies de formation et des différences de publics entre les formations initiale et continue.
On peut imaginer que certains cours seront fusionnés pour réduire le nombre de professeurs titulaires de l’établissement, dans le seul but de réaliser des économies, au lieu de réfléchir à un véritable projet pédagogique.
Cette fusion aura également pour effet de transférer les charges financières qui incombent à l’État vers des financements locaux. En effet, les financements de la région pour la formation professionnelle pourront être captés au profit de ces établissements, permettant ainsi à l’État de se défausser financièrement.
L'amendement n° 248, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 20, première phrase
après les mots :
conseil de l'éducation et de la formation
insérer les mots :
élu parmi le personnel de l'établissement et
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Il s’agit d’un amendement de repli.
Si ce conseil pédagogique devait être mis en place, nous souhaitons alors qu’il soit créé dans le respect des garanties démocratiques.
Notre amendement prévoit de lever le voile sur sa composition, pour l’heure très opaque.
Nous proposons en effet que ses membres, dont rien n’est dit dans le projet de loi, soient élus parmi le personnel de l’établissement, qui est le plus à même de proposer des expérimentations et des orientations pédagogiques.
S’agissant de l’amendement n° 247, la création des conseils de l’éducation et de la formation doit permettre le partage d’expériences au sein des établissements. Il s’agit de l’une des conclusions des assises de l’enseignement agricole public, qui se sont tenues entre septembre et décembre 2009, donc très récemment.
Par ailleurs des structures équivalentes existent aujourd’hui dans l’éducation nationale.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
De même, la précision apportée par l’amendement n° 248, amendement de repli, ne paraît pas utile. Le conseil comprendra bien entendu des représentants du personnel, et je précise, du personnel local.
La commission émet donc également un avis défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
Il est défavorable au premier, car le fait que les professeurs des lycées et les formateurs participent au conseil de l’éducation et de la formation sera un atout pédagogique pour les établissements d’enseignement agricole.
Il est défavorable au second, car la composition de ce conseil, définie par décret, tiendra compte de la représentativité des enseignants de l’établissement et fera l’objet d’une discussion avec les organisations représentatives du personnel.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 1 er quater est adopté.
L'amendement n° 482, présenté par MM. S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Lise et Tuheiava, Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement étudie la mise en place, dans les douze mois qui suivent la publication de la présente loi, d'un plan de développement des réseaux de formation adaptés aux enjeux actuels de l'agriculture et de la pêche dans les départements d'outre-mer.
Ce plan comprend un dispositif de formation continue et de mis à niveau permanent des professionnels permettant de renforcer la professionnalisation de ces secteurs.
Il permet également d'amplifier les réseaux d'appui technique et de transferts technologiques.
Il met en place des dispositifs spécifiques de développement et de soutien à la recherche outre-mer.
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Permettez-moi de présenter cet amendement au nom de mes collègues ultramarins.
Comme l’a souligné le conseil interministériel de l’outre-mer, les régions ultramarines disposent, en matière de formation initiale agricole, d’un réseau assez développé.
Cependant, pour le secteur de la pêche, la formation de base n’est pas adaptée aux enjeux actuels. Ainsi, la majorité des navigants ne possède que le capacitaire.
Le conseil interministériel souligne également que la faiblesse des structures intermédiaires entre recherche et développement ne permet pas d’assurer une formation continue, pourtant nécessaire à la mise à niveau permanente des professionnels des secteurs de la pêche et de l’agriculture.
Or il est vital pour la santé des économies ultramarines de mettre en œuvre des dispositifs permettant d’améliorer la professionnalisation et le savoir-faire des acteurs de ces deux domaines d’activités, dont le poids social est indéniable.
Ainsi, la population active agricole représente 7, 2 % de la population totale en Martinique, 5, 8 % en Guadeloupe, contre seulement 3, 4 % dans l’Hexagone, et le nombre de marins pêcheurs actifs est en moyenne deux fois plus important outre-mer. De plus, ces secteurs continuent à attirer des jeunes.
J’ajoute, monsieur le ministre, que l’outre-mer, c’est une flore vingt-six fois plus importante qu’en métropole et 97 % de la surface maritime française. Le potentiel est donc immense.
C’est pour toutes ces raisons que nous vous demandons avec nos collègues ultramarins la mise en place d’un plan de développement des réseaux de formation, assorti d’un dispositif de formation continue, de réseaux d’appui technique performants, de transferts de technologie, ainsi que d’un soutien à la recherche, afin de donner à l’agriculture et à la pêche outre-mer les moyens de leur développement.
Le conseil interministériel de l’outre-mer de novembre 2009 a annoncé certaines mesures qui recoupent cet amendement, notamment en matière de recherche et d’innovation.
Par ailleurs, si la mission commune d’information sur les départements d’outre-mer, présidée par M. Serge Larcher et dont le rapporteur était M. Éric Doligé, avait mis en avant des lacunes en matière de formation dans ce secteur, elle avait également souligné la nécessité pour les acteurs locaux, les chambres d’agriculture en particulier, de prendre des initiatives en la matière.
En conséquence, le présent amendement ne paraît pas opportun et la commission y est défavorable.
Le Gouvernement a la volonté de mieux structurer les réseaux en outre-mer. Or l’ensemble de ces évolutions ne relèvent pas du champ législatif et renvoient aux conclusions des états généraux du sanitaire. Je ne puis donc qu’être défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
I. – Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances les dispositions législatives nécessaires afin de :
1° Redéfinir, en clarifiant la situation juridique des intervenants, les conditions dans lesquelles sont réalisées les missions entrant, à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, dans le champ du mandat sanitaire prévu à l’article L. 221-11 du code rural ainsi que celles dans lesquelles est réalisée la certification vétérinaire prévue à l’article L. 221-13 du même code en distinguant selon que ces missions sont effectuées au bénéfice de l’éleveur ou pour le compte de l'État modifier les conditions dans lesquelles certaines tâches particulières liées aux contrôles peuvent être déléguées à des tiers ; compléter les missions ainsi confiées à des vétérinaires libéraux ;
2° Modifier les dispositions des articles L. 243-1 et L. 243-2 du code rural relatives aux conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par des personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire et, si nécessaire, la liste de ces actes ;
3° Mettre en conformité avec le droit communautaire les dispositions du code rural relatives à la protection des végétaux en ce qui concerne notamment les conditions de leur mise sur le marché et d’utilisation des produits phytopharmaceutiques ;
4° Modifier l'article L. 234-2 du code rural et adapter les références et renvois faits dans le code rural et le code de la santé publique à la réglementation communautaire dans le domaine du médicament vétérinaire à l'évolution de cette réglementation ;
5° Définir et catégoriser les dangers sanitaires, déterminer les conditions dans lesquelles des organismes à vocation sanitaire peuvent s'organiser, au sein de structures pouvant s'inspirer du statut d'association syndicale de détenteurs de végétaux ou d'animaux, pour concourir aux actions de surveillance, de prévention et de lutte, étendre le champ d'application de l'article L. 201-1 du code rural à la lutte contre les maladies animales et les organismes nuisibles de végétaux, définir une organisation de l’épidémiosurveillance animale et végétale, déterminer les modalités de financement des actions menées contre ces dangers, procéder aux modifications du code rural nécessaires à son adaptation à ce dispositif et prendre toutes les mesures de simplification qui pourraient en découler ;
6° Procéder aux modifications de numérotation et à la rectification des intitulés au sein du Livre II du code rural rendus nécessaires en application du présent article.
II. – Les ordonnances mentionnées au I sont prises dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi. Pour chaque ordonnance, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de sa publication.
L’article 2 est doublement représentatif de l’esprit de ce texte.
En premier lieu, de nombreuses mesures essentielles pour la sécurité sanitaire de notre pays vont être prises par ordonnances. Les décisions seront donc soumises au contrôle étroit de l’exécutif et du ministre, ce qui revient à relativiser la portée du travail législatif, et c’est, à nos yeux, inacceptable.
En second lieu, cet article manifeste l’orientation libérale de la politique du Gouvernement, s’agissant en particulier de sa politique sanitaire.
Pour ce qui est du mandat sanitaire et de la réalisation de certains actes vétérinaires, de nombreux agriculteurs, voire des fédérations départementales de défense sanitaire du cheptel, réclament la possibilité, pour les éleveurs, de vacciner eux-mêmes leur bétail.
Cette opération peu complexe, autant dire de routine pour les éleveurs, ne requiert en effet ni la compétence ni la technicité du vétérinaire. Réalisée par l’agriculteur lui-même, elle présente de surcroît l’avantage de limiter le stress du bétail, donc les accidents dont peuvent être victimes les intervenants ou les animaux.
Je souhaite également évoquer, car c’est un sujet important, la situation des laboratoires publics départementaux.
En l’espace de deux années, plus de vingt d’entre eux ont cessé leur activité et sur tout le territoire. Certes, ils sont d’importance très inégale, puisque le nombre des agents, qui est d’une vingtaine dans certains départements, dépasse deux cents dans les Côtes-d’Armor et en Loire-Atlantique.
Alors que l’État attend d’eux qu’ils maintiennent en veille les équipements et des personnels capables de répondre à des situations de crise sanitaire majeure – on se souvient de l’épidémie de fièvre aphteuse, voilà quelques années, ou encore du risque de propagation de la grippe aviaire, en 2006 –, ce même État ne prend pas en compte le coût financier que cela induit. Pire, après avoir ouvert le marché d’analyse de l’eau à la concurrence, il retire aujourd’hui aux laboratoires publics la gestion des plans de surveillance et de contrôle des denrées alimentaires.
Or il faut savoir que les laboratoires publics sont reconnus non seulement pour leurs compétences – celui des Côtes-d’Armor, que je connais le mieux, a recueilli dix-neuf accréditations –, mais également pour leur indépendance, ce qui n’est pas le cas de tous les laboratoires d’analyses privés. Ces derniers, sans leur faire de procès d’intention, sont parfois adossés à des laboratoires pharmaceutiques vétérinaires…
Les laboratoires publics départementaux offrent donc toutes les garanties à leur clientèle, particulièrement aux éleveurs qui, en cas de litige, peuvent avoir recours à leur expertise et profiter de leur neutralité.
Dans ces conditions, il est incompréhensible que ce projet de loi ne reconnaisse pas le rôle des laboratoires publics départementaux et qu’il n’intègre pas ces structures dans les différents dispositifs d’épidémiosurveillance, en tant qu’élément essentiel du service public sanitaire.
Il est important pour les citoyens et les consommateurs de disposer d’organismes fiables et indépendants, qui contribuent à leur sécurité alimentaire, qui n’ont pas pour objectif la maximalisation du profit.
Les laboratoires publics ne sont pas aujourd’hui dans une situation favorable, et l’État ne paraît pas disposé à conforter ce secteur public d’excellence. C’est pourquoi il faut réaffirmer l’importance du rôle qu’ils jouent dans la collecte d’informations épidémiologiques et dire qu’avec le risque de voir se propager des crises sanitaires majeures, ils ont plus que jamais un rôle à tenir et des missions à remplir.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 112 est présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 250 est présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yannick Botrel, pour présenter l’amendement n° 112.
Cet amendement vise à supprimer l’article 2, qui permet au Gouvernement de légiférer par ordonnances dans plusieurs domaines relevant normalement de la loi.
C’est une véritable remise en cause du rôle dévolu au Parlement ; c’est une négation de ses pouvoirs. Malgré les précisions apportées en commission, nous ne pouvons accepter de signer un chèque en blanc.
L’article 2 est d’autant plus important qu’il concerne les questions sanitaires, c'est-à-dire notre santé, sujet épineux.
Or le champ des ordonnances n’est pas clair. Des pans entiers de la gestion sanitaire restent vagues, ne permettant pas vraiment de savoir où le Gouvernement souhaite nous conduire. Et, lorsque ses desseins se font clairs, nos craintes n’en sont que ravivées.
Adopter l’article 2 signifierait que les états généraux du sanitaire, ouverts depuis le 19 janvier 2010, n’ont servi à rien, pire, que leurs conclusions ne sont même pas attendues et que les modifications positives qui pourraient être proposées seront balayées d’un revers de la main.
Pourtant, les états généraux du sanitaire réunissaient des professionnels agricoles, des experts du monde vétérinaire et des scientifiques dont l’expertise ne serait pas inutile dans la discussion de ce projet de loi.
La majorité va sans doute arguer que des expressions telles que « certains actes », « si nécessaire » et « déléguées à des tiers », figurant dans les deux premiers alinéas de l’article 2, sont d’une précision inattaquable. Soit ! Néanmoins, des craintes existent qu’un pas de plus ne soit franchi sur le chemin de la privatisation des contrôles sanitaires.
À l’heure où les besoins en contrôles sanitaires augmentent, puisque les crises d’origine animale se multiplient, nous constatons une réduction drastique des moyens publics d’intervention dans nos territoires. Nous craignons donc que l’État, via cette habilitation, ne cherche encore à faire des économies qui seraient, à terme, néfastes pour notre sécurité sanitaire.
Mes chers collègues, notre groupe considère que les problématiques évoquées dans cet article sont trop sensibles pour que nous puissions faire l’impasse d’un examen approfondi en séance publique. C’est pourquoi nous vous demandons d’adopter notre amendement de suppression de l’article 2.
Nous souhaitons, nous aussi, la suppression de l’article 2, qui habilite le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances – conformément à l’article 38 de la Constitution – dans les domaines de la sécurité sanitaire des aliments, de la santé des animaux, de la protection des végétaux ou encore des indications géographiques.
Le Gouvernement pourra ainsi, dans un champ d’habilitation particulièrement large, sans aucun garde-fou, tirer les conséquences des états généraux du sanitaire, organisés au début de 2010, dont le champ est lui aussi particulièrement étendu et les enjeux importants.
Ces ordonnances lui permettront également de légiférer sur la délégation de certaines tâches liées au contrôle phytosanitaire.
Il s’agit donc clairement de reconnaître par la loi l’externalisation de missions par essence publiques, ce que nous ne pouvons accepter.
Plus grave encore, ces ordonnances permettront une mise en conformité générale du droit national avec le droit communautaire sans qu’aucune information précise ne soit donnée aux parlementaires.
Pourtant, cette mise en conformité est à spectre très large puisqu’elle concerne, après passage en commission, les conditions de mise sur le marché et d’utilisation durable des produits phytopharmaceutiques.
Vous le savez, nous sommes très circonspects quant au recours, par ce gouvernement, à l’article 38 de la Constitution et aux possibilités qu’il offre. Il s’agit pour nous, même si les ordonnances doivent être ratifiées par le Parlement, d’une confusion des responsabilités respectives du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 2.
Ces deux amendements identiques visent à supprimer l’article 2, qui renvoie à des ordonnances le soin de tirer les conséquences des états généraux du sanitaire.
Tout d’abord, la commission a déjà réduit le nombre des ordonnances prévues par l’article 2.
Ensuite, les quatre groupes de travail des états généraux viennent tout juste de rendre leur rapport, ce qui ne permet pas d’en tirer les conséquences dans le présent projet de loi.
Enfin, et ce serait dommage, en adoptant ces amendements, nous nous priverions de la possibilité de modifier les articles du code rural concernant le mandat sanitaire ou encore les actes pouvant être effectués par les éleveurs sur leurs animaux, alors qu’un accord a été trouvé dans le cadre des états généraux.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à ces amendements de suppression de l’article 2.
Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.
En proposant la suppression pure et simple de l’article, M. Botrel et M. Le Cam n’y vont pas avec le dos de la cuillère, si vous me permettez l’expression.
Sourires
Quatre groupes de travail, trente-huit réunions, deux cents participants, c’est dire si ces états généraux du sanitaire correspondaient à une vraie attente sur le terrain, aussi bien chez les vétérinaires que chez les agriculteurs, sans oublier le monde du végétal, également concerné.
Vous savez que j’ai décidé d’organiser des états généraux du sanitaire après avoir constaté les multiples réactions, parfois courroucées, que suscitait de la part des agriculteurs et des éleveurs ma décision de rendre obligatoire la vaccination contre la fièvre catarrhale ovine. Les professionnels estimaient qu’on leur imposait une nouvelle charge, et une charge insupportable si on ne leur donnait pas la possibilité de participer à la vaccination des bêtes.
Je considère qu’un travail de fond a été réalisé et que nous sommes parvenus à un accord entre les différents acteurs. Ne détruisons pas tout le travail accompli. Les ordonnances permettront de prendre ces décisions sur la base du consensus. Le Gouvernement ne se dote pas de pouvoirs exceptionnels, il va simplement tirer les conséquences du travail qui a été fait par les acteurs concernés.
Nous venons d’entendre les explications de M. le ministre sur le sujet. À titre personnel, je n’ai pas complètement connaissance des conclusions des travaux qui ont été conduits dans le cadre des états généraux du sanitaire. Aussi n’est-ce pas ce qui est en cause ici. Non, ce qui suscite notre amendement de suppression, c’est davantage la méthode des ordonnances dont on ne sait, par nature, quelle sera la portée. Nous ne savons pas non plus quels seront les moyens qui seront mis en œuvre dans le cadre des politiques qu’il faudra bien développer dans ce domaine.
Sur ce point-là, bien évidemment, nous exprimons notre scepticisme et, au-delà, notre désaccord.
Sur l’autre point que vous avez soulevé dans votre réponse, monsieur le ministre, concernant le mandat sanitaire et la possibilité pour les éleveurs de procéder par eux-mêmes à la vaccination de leur cheptel, il va de soi que nous n’avons pas d’objection à formuler.
D’ailleurs, dans mon intervention initiale, chacun l’aura compris, ce n’est pas le point que j’ai mis en avant, bien au contraire. Je considère en effet que des actes de ce genre s’apparentent à des interventions de routine. Après tout, quelle différence y a-t-il entre une vaccination et une injection de sérum ? Aucune.
Donc, sur ces questions-là, nous ne sommes pas en opposition avec un accord éventuel trouvé entre les différents partenaires.
Indépendamment de cet aspect des choses, c’est bien sur un autre point que nous nous opposons : je parle de cette façon de tout ramener à des ordonnances, et donc de laisser singulièrement au pouvoir exécutif et au ministre la possibilité d’interpréter ensuite les textes votés par notre assemblée.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 251, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Cet amendement porte toujours sur le recours aux ordonnances.
Aujourd’hui, la plupart des maladies émergentes susceptibles de menacer demain la santé humaine ont une origine animale. Il serait donc irresponsable de baisser la garde, alors que la santé humaine est en jeu.
Ces questions sont trop essentielles pour être abandonnées au bon vouloir du Gouvernement. Le Parlement doit être le gardien vigilant contre toute tentative de brader l’organisation de l’épidémiosurveillance animale et végétale, elle qui nécessite une neutralité et une objectivité sans faille.
Comment accepter le recours aux ordonnances lorsque l’on sait que, depuis 2002, les moyens humains consacrés à l’alimentation et à la sécurité sanitaire ont considérablement décru, que « l’évolution prévisionnelle des effectifs fait apparaître une diminution vertigineuse des effectifs consacrés à la protection du consommateur » et que « la diminution des effectifs se fait de manière aveugle, sans aucune priorité reconnue pour le service public en charge de la maîtrise des risques sanitaires » ?
À titre d’exemple, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, qui vise à réduire de moitié le personnel d’État, il n’y aura que deux remplacements d’agents des directions départementales des services vétérinaires sur trois cent trente-trois départs en retraite pour la période 2009-2011 ! Comment ne pas voir dans ces chiffres et dans la volonté du Gouvernement de légiférer par ordonnance, afin de confier à des tiers les missions de service public de contrôle phytopharmaceutique, de collecte et de traitement des informations, une privatisation progressive de la sécurité alimentaire et des enjeux sanitaires à venir ?
De même, la réalisation d’actes vétérinaires par des tiers est une question législative complexe, qui pourrait induire demain le même réflexe entre infirmières et médecins.
Le tracé de la frontière entre les actes réservés aux vétérinaires et ceux qui peuvent faire l’objet d’une dérogation au bénéfice d’un acteur non vétérinaire, par exemple un éleveur, est une question qui doit être débattue devant le Parlement.
Ce débat est d’autant plus nécessaire qu’une modification de l’article L. 243-2 du code rural n’a pas pu faire l’objet d’un consensus lors des états généraux du sanitaire.
Nous ne voulons pas d’une privatisation déguisée des contrôles sanitaires, et c’est pour cette raison que nous demandons la suppression des alinéas 2 et 3 de l’article 2.
L'amendement n° 528 rectifié, présenté par MM. Collin, Baylet et Fortassin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. de Montesquiou, Mézard, Plancade, Milhau, Vall, Alfonsi et Marsin, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Modifier les dispositions des articles L. 243-1 et L. 243-2 du code rural et de la pêche maritime relatives à l'art vétérinaire pour accorder aux éleveurs un exercice de plein droit de certains actes vétérinaires sur les animaux de leur propre cheptel et définir les conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par d'autres personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire et, si nécessaire la liste de ces actes.
La parole est à M. Daniel Marsin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la prise de conscience par les éleveurs de leur rôle et de leurs responsabilités dans la sécurité des aliments, ainsi que le niveau élevé de formation de la plupart d’entre eux, les rendent aptes aujourd’hui à pratiquer en toute sécurité un certain nombre d’actes jusqu’à présent réservés aux vétérinaires.
Compte tenu du manque de vétérinaires ruraux, déjà sensible dans un certain nombre de régions françaises, les éleveurs n’ont d’ailleurs parfois d’autre choix que de pratiquer eux-mêmes certaines interventions. Cette évolution, que les vétérinaires eux-mêmes reconnaissent, doit trouver sa traduction dans le code rural, par une définition positive des droits des éleveurs et non par une simple dérogation à l’exercice illégal de l’art vétérinaire.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à préciser le champ de l’habilitation donnée au Gouvernement pour modifier par ordonnance les articles relatifs à l’art vétérinaire.
Sur l’amendement présenté par Gérard Le Cam, il est nécessaire de permettre la mise en œuvre des décisions prises dans le cadre des états généraux du sanitaire. Le ministre a rappelé fort opportunément que les conclusions de ces états généraux sont bien trop récentes pour que nous ayons eu le temps matériel de les étudier et de les inscrire dans la loi.
Le Parlement n’aime pas trop les ordonnances, mais, dans ce cas-là, il était nécessaire d’y recourir, parce que ni le Gouvernement ni la commission n’ont disposé du temps nécessaire pour préparer un texte consécutif aux accords qui ont pu intervenir entre les parties prenantes.
La certification vétérinaire, le mandat sanitaire et la possibilité pour les éleveurs de réaliser eux-mêmes certains actes de soins constituent en effet un aspect essentiel des états généraux du sanitaire. Je rappelle que cette question se caractérise par sa grande technicité.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement de M. Marsin, qui modifierait l’habilitation concernant la délégation de certains actes vétérinaires, a pour objet de préciser que l’ordonnance prévue au deuxième alinéa de cet article devrait modifier le code rural.
Cette rédaction va bien au-delà du consensus établi dans le cadre des états généraux du sanitaire, qu’il faut bien sûr examiner avec beaucoup d’attention. Par conséquent, j’estime préférable d’en rester au texte de la commission, et je demande à M. Marsin le retrait de son amendement. Autrement, l’avis sera défavorable.
L’avis du Gouvernement est défavorable, pour les mêmes raisons que celles qui ont été indiquées précédemment.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 252, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par cet amendement, nous proposons de supprimer l’alinéa 4 de l’article 2 du projet de loi. En effet, il est prévu qu’une ordonnance devra intervenir afin d’adapter les dispositions du code rural relatives à la protection des végétaux, en ce qui concerne la mise sur le marché et les produits phytopharmaceutiques.
Nous pensons que le Parlement ne peut se dessaisir de toutes les mises en conformité de la législation nationale avec le droit communautaire. Cette partie de notre droit ne doit pas échapper aux élus nationaux.
Je voudrais enfin dire quelques mots sur la protection végétale.
Peu après l’annonce de la fusion des directions départementales de l’agriculture et de la forêt et des directions départementales de l’équipement, il a été mis fin à la mission ancienne dévolue à l’administration de conception des bulletins d’avertissement agricole, mission qui relevait des services régionaux de la protection des végétaux.
Le ministère de l’agriculture justifie sa décision en déclarant que l’avertissement agricole est davantage l’affaire de la profession agricole que du ministère, et que l’État n’a pas vocation à dire aux agriculteurs ce qu’ils doivent faire, mais doit garantir que cela a été fait.
Nous considérons au contraire qu’il est nécessaire que l’État conserve des missions préventives. Les services régionaux de protection des végétaux, ou SRPV, assuraient des missions de contrôle, d’expertise et d’appui technique, en matière phytosanitaire. Ces SRPV conduisaient sur le terrain et en laboratoire toutes investigations techniques et études épidémiologiques, modélisations, mises au point de méthode de lutte, suivis des résistances, qui permettaient d’élaborer et de diffuser les bulletins d’avertissement agricole, à la base de la protection raisonnée des cultures.
Ce sont, dans chaque région, plus d’une vingtaine d’ingénieurs, de techniciens et d’agents administratifs qui, par leur compétence et leur travail, assuraient un service public de qualité aux agriculteurs.
En confiant ces missions à la profession agricole, nous allons notamment perdre l’indépendance vis-à-vis des industriels de l’agrochimie. En effet, les agriculteurs ont pu constater sur le terrain la différence qu’il y avait entre le conseil de traitement phytothérapique délivré par la coopérative et celui du bulletin d’avertissement du SRPV.
Le premier, lié à l’activité commerciale de la coopérative, a tendance à systématiser les traitements par précaution, afin aussi, bien sûr, de vendre des produits. Le second, indépendant, donne des conseils de traitement quand le risque est avéré.
Nous tenions à vous alerter, monsieur le ministre, car la politique affichée ne saurait être réellement mise en œuvre sans le rétablissement de tels outils.
Je vous rappelle que la mise en conformité du droit national avec le droit communautaire est une exigence constitutionnelle.
Compte tenu de la technicité du sujet, le recours aux ordonnances est justifié. C’est donc dans l’alinéa 4 de l’article 2 que nous proposons justement que cette ordonnance puisse prévoir un dispositif précis.
Ce n’est pas le cas avec le présent amendement. La commission a donc émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 254, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam, qui s’attaque à présent à l’alinéa 5 !
M. Gérard Le Cam. Nous nous attaquons à cet article en pièces détachées, mais cela ne semble guère plus efficace !
Sourires
La réglementation des médicaments vétérinaires, dont il est question ici, présente différents enjeux en termes de santé publique, mais elle soulève également la question de l’application de la concurrence libre et non faussée au marché des médicaments vétérinaires.
C’est sur cette question que nous aimerions attirer l’attention de M. le ministre. En effet, les prix de vente des produits vétérinaires en France sont abusivement élevés. Si les mêmes produits provenant des mêmes laboratoires sont 60 % moins chers en Espagne, par exemple, nous sommes en droit de nous demander si les vétérinaires ne profitent pas de leur position dominante pour pratiquer des marges abusives.
Dès lors, on peut s’interroger : est-il bien opportun qu’un vétérinaire soit à la fois prescripteur et vendeur de médicaments ?
Il est temps de prendre des mesures pour trouver des solutions à ce problème, et ces mesures ne doivent pas consister à engager la responsabilité des éleveurs qui font le choix de réduire leurs coûts de production.
Le Parlement ne doit pas être dessaisi de cette question. Tel est le sens de notre amendement.
Monsieur le Ministre, pouvez-vous nous apporter des éléments de réponse, alors que les prix de vente des produits agricoles s’alignent par le bas sur les cours mondiaux, contrairement aux prix de ces médicaments ?
Sourires
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 253, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam.
L’ordonnance prévue par le présent alinéa devait initialement permettre au Gouvernement de modifier les conditions dans lesquelles certaines tâches particulières liées au contrôle phytosanitaire pouvaient être déléguées à des tiers, de définir des exigences en termes de qualité et de compétence des délégataires et de préciser les modalités des contrôles de second niveau qui seront exercés par les services de l’État.
Déjà, sur le principe, nous contestons ce recours aux ordonnances. En outre, nous redoutons particulièrement les conséquences d’une telle disposition.
En effet, au regard des enjeux en termes de sécurité sanitaire, la surveillance biologique des territoires, et donc les contrôles phytosanitaires, relèvent fondamentalement de l’intervention publique et ne peuvent à nos yeux faire l’objet d’une quelconque délégation à des tiers. Nous considérons en effet que cette externalisation de missions publiques ouvre la voie à leur privatisation.
De plus, tel qu’il était rédigé initialement, le texte du Gouvernement ne précisait nullement les caractéristiques du délégataire devant permettre de juger de sa capacité à agir au nom de l’intérêt général, même si nous savons que, dans les faits, un nombre limité d’organismes est visé.
Par ailleurs, confier à un tiers des missions publiques en laissant parallèlement à l’État le soin de contrôler la bonne exécution de ces missions ne nous apparaît pas pertinent. Nous estimons que cette complexification des procédures n’est gage ni d’efficacité ni de progrès pour les contrôles sanitaires.
Nous prenons acte de la réécriture par la commission de cette disposition qui encadre cette possibilité de délégation, en évoquant simplement la capacité des organismes à vocation sanitaire à s’organiser pour concourir aux actions de surveillance, de prévention et de lutte.
Même si l’objectif est simplement de légaliser une pratique déjà existante, nous continuons de penser qu’il s’agit de missions régaliennes, puisqu’elles touchent à la sécurité sanitaire, ne pouvant faire l’objet d’aucune délégation, sous quelque forme que ce soit.
Pour cette raison, nous vous proposons de supprimer cette disposition, mes chers collègues.
L'amendement n° 113, présenté par M. Botrel, Mme Herviaux, M. Guillaume, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
organisation de l'épidémiosurveillance animale et végétale
insérer les mots :
de manière à prévoir l'intervention des laboratoire publics dans le dispositif
et après les mots :
modalités de financement des actions menées contre ces dangers
insérer les mots :
et notamment la juste allocation financière permettant aux laboratoires publics de mener leur mission en toute indépendance
La parole est à M. Yannick Botrel.
À l’heure où les épizooties se multiplient, les analyses sanitaires doivent être menées en toute indépendance, sans interférences avec des intérêts particuliers ou financiers.
À cet égard, des laboratoires privés, liés à de grands groupes pouvant avoir un intérêt dans le résultat des analyses, ne sauraient être considérés comme indépendants.
Les contrôles effectués par des tiers peuvent présenter des risques quant à la fiabilité des conclusions des analyses, particulièrement lorsqu’il s’agit de contrôles épidémiologiques. Un laboratoire doit être d’une indépendance reconnue à tous égards. Si des garde-fous ne sont pas mis en place, rien ne garantit la fiabilité des analyses. Des intérêts particuliers peuvent prévaloir et fausser la sincérité du résultat. C’est un risque grave.
La situation des laboratoires publics n’est pourtant pas favorable. Une juste allocation financière leur permettant de mener à bien leurs missions de service public serait nécessaire. Ce secteur public d’excellence doit être encouragé par l’État. Sans cela, son avenir semble compromis dans certains domaines, malgré les compétences des personnels.
La force des laboratoires publics est leur indépendance et, à ce titre, prévoir leur intervention dans le dispositif de contrôle sanitaire, ainsi que dans l’épidémiosurveillance animale et végétale, apparaît comme une évidence.
Les laboratoires publics ont également l’avantage de la disponibilité : en cas de crise sanitaire, leurs personnels qualifiés sont mobilisables à tout moment. De leur côté, les laboratoires privés n’ont pas ces contraintes, qui augmentent les coûts de fonctionnement.
Il serait souhaitable de revenir à un équilibre plus satisfaisant, au profit des laboratoires publics. Cet amendement vise à garantir l’indépendance des analyses et du contrôle sanitaire, en les confiant aux laboratoires publics.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 253.
En effet, l’ordonnance relative à l’organisation de l’épidémiosurveillance et de la prévention contre les maladies animales et végétales nous semble fondamentale pour que nous puissions continuer à disposer d’un réseau efficace et performant.
La commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 113, parce que l’on ne peut pas donner la préférence aux laboratoires publics. La situation est très variable selon les départements.
L’avis est également défavorable sur ces deux amendements.
Je souligne à nouveau que les états généraux du sanitaire ont réalisé un travail sérieux et rigoureux, qui oblige le Gouvernement. Ce dernier ne compte pas imposer ses vues aux scientifiques, aux éleveurs, aux vétérinaires et aux responsables qui ont conduit cette réflexion. Il reprendra au contraire les conclusions de celle-ci dans l’ordonnance.
Des sujets importants, comme celui des écarts de prix qui peuvent exister entre différentes possibilités de vaccination, notamment entre la France et l’Espagne, seront également traités dans ce cadre.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote sur l’amendement n° 113.
Il est vrai, monsieur le rapporteur, que la situation des laboratoires publics est incontestablement très différente d’une région à l’autre et d’un département à l’autre.
Il se trouve que je suis élu d’une région où les laboratoires publics ont joué, jusqu’à présent, un rôle de premier plan dans le soutien à l’élevage et à l’industrie agroalimentaire. Ils constituent indéniablement des pôles de référence.
Auparavant, ces laboratoires publics se voyaient confier un certain nombre d’analyses par les services de l’État, avec lesquels existaient des relations de confiance, mais une partie de ces commandes publiques leur échappe désormais. Par exemple, les analyses d’eau font l’objet d’une mise en concurrence, et les laboratoires publics ne les réalisent plus, sauf à s’aligner sur les prix de laboratoires privés pratiquant en grandes séries.
Mais, parallèlement, on leur demande aussi parfois de maintenir en état des équipements de veille sanitaire, des laboratoires sophistiqués de type P3, par exemple, et d’être capables de répondre, le cas échéant, à des situations de crise, comme ce fut le cas en 2001 avec l’épidémie d’encéphalopathie spongiforme bovine : eux seuls étaient alors en mesure d’intervenir durant les fêtes de fin d’année.
Tout concourt donc à fragiliser la situation financière des laboratoires publics. Une vingtaine d’entre eux ont disparu en l’espace d’une année : le mouvement est enclenché, et j’aimerais donc que le Gouvernement nous dise quelle est sa conception des missions de service public dans le domaine des expertises sanitaires. Il est trop facile de prôner le recours au secteur privé tout en demandant aux laboratoires publics de maintenir leurs équipements en état de fonctionnement pour parer à toute éventualité.
À défaut de continuer comme par le passé, il convient de reconnaître le rôle des laboratoires publics autrement que par des paroles d’estime, en leur attribuant des crédits suffisants.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 49 rectifié quater, présenté par M. Pointereau, Mme Sittler, M. Beaumont, Mme Lamure et MM. A. Dupont, Cornu, Houel, Billard, Pinton et Mayet, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 112-2 du code de la consommation, il est inséré un article L. 112-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-2-1. - Tout produit qui contient un produit bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée peut être présenté, y compris dans la liste des ingrédients, avec la mention du nom de l'appellation concernée sous réserve du respect des conditions suivantes :
« - le produit ne contient aucun autre produit de même nature que le produit d'appellation d'origine contrôlée,
« - la mention ne risque pas de détourner ou d'affaiblir la notoriété de l'appellation concernée,
« - l'utilisation de la mention et ses modalités éventuelles ont été autorisées par l'organisme de défense et de gestion chargé de la protection de l'appellation concernée.
« Dans le cas où l'utilisation de la mention n'est pas autorisée, le produit d'appellation d'origine contrôlée contenu dans le produit ne peut être présenté que sous sa dénomination générique ou sous une désignation descriptive excluant le nom de l'appellation d'origine contrôlée.
« Un décret fixe les conditions d'application de ces dispositions, et notamment les modalités de sollicitation et de délivrance de l'autorisation mentionnée à l'alinéa précédent. »
II. - Après le 6° de l'article L. 115-16 du même code, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« 7° de mentionner, dans un produit, la présence d'un produit désigné sous le nom d'une appellation d'origine contrôlée dans des conditions non conformes aux dispositions de l'article L. 112-2-1. »
La parole est à M. Rémy Pointereau.
L’objet de cet amendement est d’encadrer certaines pratiques qui se développent sans aucun contrôle, consistant à incorporer dans la composition d’un produit, fût-ce en très faible quantité, un ingrédient AOC – vin, fromage, champagne, cognac, etc.
En effet, la réglementation en vigueur ne comporte aucune restriction quant à la mention, dans l'étiquetage, d’un tel ingrédient. Or, bien souvent, la présence d’un ingrédient AOC n’est qu’un argument commercial, car ses qualités spécifiques ne sont plus perceptibles dans le produit auquel il a été incorporé.
Ces pratiques sont illégitimes en ce qu'elles permettent à des fabricants de profiter indûment de la notoriété attachée à une appellation d'origine contrôlée. Elles peuvent aussi se révéler préjudiciables, par une dilution du caractère attractif de l'appellation qui entraîne une banalisation insidieuse, ruinant les efforts et les investissements des producteurs.
Afin de protéger la notoriété des appellations, d'éviter qu'elles ne soient détournées ou affaiblies, le présent amendement tend à encadrer la mention d'un ingrédient AOC entrant dans la composition d'un produit, car il s’agit d’une forme de publicité mensongère.
Les amendements n° 442 et 452 sont identiques.
L'amendement n° 442 est présenté par M. Patriat, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 452 est présenté par Mme Férat, M. Détraigne, Mmes N. Goulet, Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 112-2 du code de la consommation, il est inséré un article L. 112-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-2-1. - Tout produit qui contient un produit bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée peut être présenté, y compris dans la liste des ingrédients, avec la mention du nom de l'appellation concernée sous réserve du respect des conditions suivantes :
« - le produit ne contient aucun autre produit de même nature que le produit d'appellation d'origine contrôlée,
« - la mention ne risque pas de détourner ou d'affaiblir la notoriété de l'appellation concernée,
« - l'utilisation de la mention et ses modalités éventuelles ont été autorisées par l'organisme chargé de la protection de l'appellation concernée.
« Dans le cas où l'utilisation de la mention n'est pas autorisée, le produit d'appellation d'origine contrôlée contenu dans le produit ne peut être présenté que sous sa dénomination générique, ou sous une désignation descriptive excluant le nom de l'appellation d'origine contrôlée.
« Un décret fixe les conditions d'application de ces dispositions, et notamment les modalités de sollicitation et de délivrance de l'autorisation mentionnée à l'alinéa précédent. »
II. - Après le 6° de l'article L. 115-16 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° De mentionner, dans un produit, la présence d'un produit désigné sous le nom d'une appellation d'origine contrôlée dans des conditions non conformes aux dispositions de l'article L. 112-2-1. »
La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 442.
Cet amendement, auquel François Patriat et Patricia Schillinger sont particulièrement attachés, a lui aussi pour objet d’encadrer la mention d’un ingrédient AOC entrant dans la composition d’un produit.
Les pratiques consistant à incorporer dans la composition d'un produit un ingrédient AOC – vin, fromage, champagne, huile d’olive… – se développent sans aucun contrôle. En effet, la réglementation en vigueur ne comporte aucune restriction quant à la mention, dans l’étiquetage, d'un tel ingrédient, dont les qualités spécifiques ne sont pourtant en général plus perceptibles dans le produit auquel il a été incorporé.
Ces pratiques sont illégitimes en ce qu'elles permettent à des fabricants de s'approprier indûment la notoriété attachée à une appellation d'origine contrôlée.
Afin de remédier à cette situation et de protéger la notoriété des appellations d’origine contrôlée, le présent amendement tend à encadrer la mention d'un ingrédient AOC entrant dans la composition d'un produit.
Mes collègues ont déjà brillamment défendu cet amendement !
Monsieur le ministre, un dispositif similaire a déjà été adopté par l’Espagne et l’Italie pour protéger leurs appellations contrôlées. Pourquoi la France, pays où les AOC sont les plus nombreuses, les plus connues, les plus prestigieuses, ferait-elle moins bien que ses voisins pour les défendre ?
Alors qu’un producteur est soumis au respect de règles nombreuses et rigoureuses avant d’être autorisé à mentionner l’AOC sur son étiquetage, tout fabricant qui ajoute quelques gouttes, quelques grammes, quelques miettes d’un ingrédient AOC, la plupart du temps indétectable à l’analyse et à la dégustation, dans la composition de son produit peut mentionner sans aucune restriction le nom de cette appellation sur l’étiquette.
Cette situation paradoxale et tout à fait inacceptable nécessite sans doute l’intervention du législateur, d’où le dépôt de cet amendement. J’ai appris hier qu’un fabricant de shampooing faisait figurer le mot « champagne » dans le nom de son produit !
Sourires
Nouveaux sourires
Les produits élaborés qui ne peuvent se prévaloir d’une appellation d’origine protégée ou d’une indication géographique protégée peuvent cependant contenir des produits bénéficiant d’un tel label, qui est souvent mis en avant pour des raisons commerciales. Or, l’utilisation massive des produits AOP en tant qu’ingrédients peut nuire à leur réputation.
Ces trois amendements ne sont vraisemblablement pas compatibles avec les règles communautaires, mais l’ancien ministre des affaires européennes qu’est M. Le Maire nous donnera tout à l’heure son point de vue sur ce sujet…
En revanche, l’article L. 214-1 du code de la consommation prévoit qu’un décret en Conseil d’État devra intervenir pour réglementer la présentation des denrées alimentaires comprenant un produit sous AOC.
Mes chers collègues, le problème que vous soulevez devrait donc pouvoir être résolu par voie réglementaire. La commission vous demande de bien vouloir retirer vos amendements. À défaut, elle émettra un avis défavorable, en attendant d’entendre celui du Gouvernement.
M. Bruno Le Maire, ministre. Je croyais que le shampooing au champagne n’existait qu’au festival de Cannes ou à Saint-Tropez !
Sourires
Je partage totalement les préoccupations manifestées par les auteurs des amendements n° 49 rectifié quater, 442 et 452. Il est hors de question que l’on puisse tromper le consommateur en invoquant de manière fallacieuse des appellations AOP, AOC ou IGP.
Cela étant, comme je l’ai déjà dit tout à l’heure, nous sommes soumis, en matière d’étiquetage, au droit communautaire. Nous ne pouvons donc pas agir par la voie législative.
J’indique aux auteurs des amendements que j’enverrai dès mardi prochain à la Commission européenne, pour notification, le projet de décret que mes services ont préparé avec ceux de M. Novelli. Si, comme c’est probable, nous obtenons une réponse favorable, nous pourrons, par voie réglementaire, mettre en place un dispositif qui répond très exactement à leur préoccupation.
Je vous donne lecture de ce projet de décret tel qu’il est rédigé aujourd’hui :
« Le nom du produit bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP peut figurer dans l’étiquetage, la publicité ou la présentation d’un produit élaboré si aucun autre ingrédient comparable n’a été mis en œuvre. On entend par ingrédient comparable tout produit alimentaire substituable totalement ou partiellement à l’ingrédient bénéficiant d’une origine protégée qui a été mis en œuvre. Lorsqu’ont été mis en œuvre dans un produit élaboré des ingrédients comparables à un produit bénéficiant d’une AOP ou d’une IGP, le nom de celui-ci ne peut figurer que dans la liste des ingrédients. »
Cette rédaction permet de bien distinguer les choses, de protéger le consommateur et de mettre en place le même type de réglementation qu’en Italie ou en Espagne.
Sur la base de cet engagement du Gouvernement, je demande à mon tour le retrait des trois amendements.
Monsieur Pointereau, l’amendement n° 49 rectifié quater est-il maintenu ?
Je pensais que l’unanimité qui se manifeste dans l’hémicycle sur ce sujet nous vaudrait des avis favorables. Toutefois, dans la mesure où ce projet de décret semble répondre à nos préoccupations, je retire mon amendement.
L'amendement n° 49 rectifié quater est retiré.
Monsieur Courteau, l'amendement n° 442 est-il maintenu ?
L'amendement n° 452 est retiré.
L'amendement n° 596, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l'article 2 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les associations de protection de la nature et de l'environnement agréées au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement ont vocation à être représentées au sein des commissions ainsi que dans les comités professionnels ou organismes de toute nature investis d'une mission de service public, ou assurant la gestion de fonds publics ou assimilés, où siègent des représentants des exploitants agricoles.
« La présente disposition n'est pas applicable aux organisations interprofessionnelles. »
II. - Au II du même article, l'année : « 2000 » est remplacée par l'année : « 2011 ».
La parole est à M. Jacques Muller.
J’appelle donc en discussion les amendements n° 600 et 599.
L'amendement n° 600, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 141-6 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots : « et la présence d'un collège d'associations de protection de l'environnement agréées au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement ».
L'amendement n° 599, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 511-7 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 511-7-1. - Sont associés aux chambres départementales d'agriculture, des représentants de l'État, des collectivités territoriales, des propriétaires fonciers et des associations de protection de la nature et de l'environnement. »
Veuillez poursuivre, monsieur Muller.
L’amendement n° 596 a pour objet d'intégrer systématiquement les associations de protection de la nature et de l'environnement agréées dans les instances de concertation sur les questions agricoles.
En effet, de plus en plus, l'avenir de l'agriculture passera par une implication plus forte de l'ensemble de la société dans l'élaboration de la politique agricole et alimentaire. Seul un renforcement des liens entre le monde agricole et le reste de la société permettra de garantir la légitimité des soutiens publics à l'agriculture et la préservation de l'activité agricole face à d'autres enjeux : je pense notamment à la menace de l'urbanisation.
Aux termes de l’'article 7 de la Charte de l'environnement, « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».
Par ailleurs, l'article 49 de la loi dite « Grenelle I » énonce le principe général de modification de la gouvernance des instances ayant compétence sur des questions environnementales, en prévoyant qu'elles « associeront, dans le cadre d'une gouvernance concertée, les parties prenantes au Grenelle de l'environnement et auront une approche multidisciplinaire ».
Ce principe peut se décliner dans plusieurs domaines concernant l’agriculture. C'est pourquoi cet amendement vise à réformer la gouvernance en matière d'agriculture, pour une meilleure intégration de la société civile dans le débat agricole.
L’amendement n °600 concerne quant à lui les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER, tandis que l’amendement n° 599 a trait aux chambres départementales d’agriculture.
L’amendement n° 596 vise à mettre sur le même plan associations de protection de la nature et de l’environnement et représentants des exploitants agricoles pour siéger dans les organismes touchant à l’agriculture.
Cette proposition me paraît excessive, mon cher collègue, d’autant que les agriculteurs ne siègent pas systématiquement dans tous les organismes intervenant en matière d’environnement. La commission émet un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 600, s’agissant de la composition des conseils d’administration des SAFER, la loi dispose seulement qu’un tiers des membres de ceux-ci au moins doivent être des représentants des collectivités. Je ne vois pas pourquoi il faudrait prévoir dans la loi la présence en leur sein de représentants des associations de protection de l’environnement, et non, par exemple, celle de représentants des professions agricoles. Il me paraît préférable de laisser chaque SAFER organiser elle-même sa gouvernance, dans le cadre fixé par la loi et le règlement. La commission émet un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 599, l’article R. 511-7 du code rural prévoit déjà que les chambres d’agriculture peuvent désigner huit membres associés, qui participent aux sessions avec voix consultative. Il est donc d’ores et déjà possible à des personnalités qualifiées ayant une activité en relation avec la profession agricole de siéger au sein des chambres d’agriculture. La commission émet un avis défavorable.
Mêmes avis défavorables et mêmes arguments, monsieur le président.
Ces amendements posent, me semble-t-il, de vraies questions, que l’on ne peut écarter aussi facilement.
Je rappelle que des représentants de l’État, du monde syndical, tant ouvrier que patronal, du monde agricole et des associations de protection de l’environnement étaient associés dans la gouvernance du Grenelle de l’environnement et que cela a donné d’excellents résultats.
Il me semblerait donc souhaitable que cette forme de gouvernance soit élargie. Par exemple, les SAFER ont aujourd’hui la possibilité d’intervenir pour préserver des zones humides en achetant des terrains. Cela signifie que le rôle des SAFER n’est plus seulement d’acheter et de revendre des terres agricoles : elles sont désormais des acteurs de la protection de l’environnement. Ne serait-il pas normal, dans ces conditions, que les mouvements associatifs puissent participer, dans un esprit constructif, à leur gouvernance ?
Il est peut-être temps d’en finir avec l’image des intégristes écolos, des « khmers écolos », qui s’opposeraient à tout développement. Nous sommes aujourd’hui passés à l’âge adulte, grâce à l’expérience du Grenelle I et du Grenelle II.
Dans cette perspective, les amendements présentés par nos collègues sont, me semble-t-il, tout à fait intéressants, et méritent d’être l’objet d’une réflexion approfondie de la part du Gouvernement
Je pense moi aussi que ces amendements méritent réflexion.
Cependant, au sein des chambres d’agriculture siègent des représentants élus, qui sont aussi des représentants de la société civile, laquelle ne se compose pas seulement des associations de défense de l’environnement. Étant moi-même élue, je suis trop respectueuse du suffrage pour ne pas être quelque peu réservée sur ces amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L’amendement n° 601, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 214-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 214-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 214 -1 -1. - Il est créé un comité national du bien-être animal. Il est composé, de représentants de l’État, des collectivités territoriales, des syndicats de salariés des professions concernées, du patronat des professions concernées, des associations de protection de la nature et de l’environnement, des associations de protection des animaux, des associations de consommateurs et de personnalités qualifiées en raison de leur expertise dans le domaine du bien-être animal.
« Il a pour mission de faire des propositions visant à améliorer la protection et le bien-être des animaux. Il fournit un rapport annuel au Gouvernement sur l’état du bien-être animal assorti de propositions pour l’améliorer. Le Gouvernement tient compte de ces avis dans l’élaboration des politiques concernées. »
La parole est à M. Jacques Muller.
Cet amendement vise à la création d’un comité national chargé de veiller à la prise en compte du bien-être animal dans les politiques publiques.
Il serait constitué d’experts et fournirait des avis au Gouvernement, à l’instar du Farm Animal Welfare Council, instance indépendante de conseil installée par le gouvernement britannique en 1979.
Sur des questions relatives au bien-être animal, telles que la douleur, ce conseil pourrait avoir pour mission de réfléchir, de former, de sensibiliser aux bonnes pratiques, d’élaborer des solutions quant à la prise en charge des coûts induits, de faire évoluer la réglementation pour rendre obligatoires certaines pratiques et en interdire d’autres. En bref, sa mission serait d’améliorer les conditions d’élevage, ainsi que de veiller à la qualité et à l’indépendance du conseil fourni aux éleveurs en matière de choix de système, de bâtiments d’élevage et de pratiques. Son action permettrait aussi d’orienter les collectivités dans leurs choix en matière de soutien aux élevages et aux filières régionales.
La création d’un organisme consultatif relève du règlement, et non de dispositions législatives. L’avis est donc défavorable. Créer un comité national du bien-être animal, ce serait d’ailleurs peut-être aller un peu loin !
Monsieur Muller, il existe déjà un comité consultatif de la santé et de la protection animales, placé auprès du ministre de l’agriculture, qui peut être consulté sur l’ensemble des questions ayant trait au bien-être animal. Sa composition est ouverte à tous les représentants des organisations professionnelles et des associations de protection animale. Nous avons organisé voilà quelques mois des rencontres « animal et société » pour examiner l’ensemble des questions qui touchent au bien-être animal. Nous avons mis en place une commission qui se réunit régulièrement depuis lors.
Je vous propose donc, monsieur le sénateur, de retirer votre amendement, car le dispositif existant répond à votre préoccupation. Je ne vous cache pas non plus que les associations de défense du bien-être animal sont particulièrement actives…
M. le ministre a compris qu’il s’agissait d’un amendement d’appel et m’a apporté les réponses que j’attendais. Je retire donc cet amendement.
L’amendement n° 601 est retiré.
L’amendement n° 597, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 611-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire participe à la définition, à la coordination, à la mise en œuvre et à l’évaluation de la politique d’orientation des productions et d’organisation des marchés.
« Il est composé à part égale de cinq collèges représentant :
« - l’État ;
« - les collectivités territoriales ;
« - les syndicats de salariés ;
« - le patronat ;
« - les associations de protection de l’environnement et de consommateurs. »
La parole est à M. Jacques Muller.
Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 598, qui relève de la même philosophie.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 598, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, qui est ainsi libellé :
Après l’article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3 du code forestier est ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois est composé à part égale de cinq collèges représentant l’État, les collectivités territoriales, les syndicats de salariés, le patronat et les associations de protection de l’environnement. »
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Ces deux amendements ont pour objet de modifier respectivement la composition du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire et celle du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois, selon le principe des cinq collèges du Grenelle de l’environnement. Ce mode d’organisation a bien fonctionné dans ce cadre, et il convient donc de l’étendre.
M. Muller propose de modifier la composition du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire, le CSO, en l’organisant selon cinq collèges, conformément aux orientations du Grenelle de l’environnement.
Malheureusement, l’adoption de l’amendement n° 597 entraînerait la suppression des dispositions de l’article L. 611-1 du code rural et de la pêche maritime prévoyant les attributions du CSO. Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 598
Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.
Je précise une fois encore que le CSO réunit déjà l’ensemble des parties prenantes que M. Muller souhaite voir représentées.
Les amendements n° 597 et 598 sont retirés.
TITRE II
RENFORCER LA COMPÉTITIVITÉ DE L’AGRICULTURE FRANÇAISE
L’amendement n° 132, présenté par Mmes Nicoux et Herviaux, MM. Guillaume, Botrel, Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l’intitulé de ce titre :
Assurer un revenu équitable à la population agricole française
La parole est à Mme Renée Nicoux.
Le titre II du projet de loi met l’accent sur la recherche et le renforcement de la compétitivité de l’agriculture française.
Le présent amendement vise à rédiger l’intitulé de ce titre de manière à souligner que l’un des objectifs prioritaires de la politique française en matière d’agriculture est d’assurer un revenu équitable à la population active agricole.
En effet, au regard du projet de loi, il semble évident que le Gouvernement n’aborde la question de l’avenir de l’agriculture que du point de vue de la fonction économique de celle-ci. Ce sont davantage les notions de marché et de concurrence qui sont au cœur du texte que celles de valorisation de la qualité, de reconnaissance du travail réalisé par les agriculteurs pour l’entretien de nos paysages et de nos espaces ruraux ou au bénéfice de la vitalité de nos territoires.
Pourtant, chacun s’accorde à reconnaître que ce texte doit permettre aux agriculteurs de tirer de leur travail un revenu décent. Il est donc indispensable d’y inscrire cet objectif.
La crise agricole que nous traversons actuellement impose de repenser notre approche politique de l’agriculture. Nous pourrions, dans cette perspective, nous inspirer de deux exemples.
Tout d’abord, le commerce équitable permet, grâce à un comportement vertueux des distributeurs, d’assurer un juste revenu aux agriculteurs du Sud. Pourquoi ne pas appliquer cette démarche au profit de nos agriculteurs, afin de leur permettre de tirer un revenu décent de leur activité ?
L’objectif visé, au travers des contrats, est bien de sécuriser le revenu des agriculteurs. Aussi ne peut-on, à notre avis, vouloir renforcer sans fin une compétitivité fondée uniquement sur les prix et ne tenant pas compte du rôle joué par le monde agricole en matière tant d’aménagement rural que de maintien du tissu social ou de préservation de notre environnement. Ce que font les consommateurs en choisissant d’acheter plus cher un produit pour soutenir l’activité des agriculteurs du Sud, ne peuvent-ils le faire au bénéfice des producteurs français ?
Le second exemple que je voudrais évoquer est celui du tourisme équitable, qui consiste à assurer aux communautés locales une part équitable des revenus issus de l’activité touristique et de concilier celle-ci avec leur développement durable.
Dans le même esprit, il faut se diriger vers une agriculture équitable !
J’entends par là que les prix doivent au moins couvrir les coûts de production, rémunération du travail comprise, que le revenu doit être à la hauteur des efforts réalisés par les agriculteurs en termes de qualité et de respect de l’environnement. Nous ne pouvons plus tolérer que des exploitants vendent à perte ! Il faut donc rééquilibrer les relations entre producteurs, transformateurs et distributeurs, qui doivent être désormais placés sur un pied d’égalité.
Il convient aussi d’instituer une répartition équilibrée de la valeur ajoutée dans la chaîne de commercialisation alimentaire. Nous devons mettre en place un cadre permettant de contrôler l’évolution des prix alimentaires tout au long du processus de production et de vente afin de pouvoir, le cas échéant, sanctionner toute forme de distorsion.
C’est dans cet esprit qu’il faut développer aujourd’hui l’agriculture française, pour qu’elle soit « mieux disante », et non pas forcément « moins disante ». C’est pourquoi renforcer la compétitivité ne nous semble pas approprié, car ce serait en rester à des considérations purement productivistes ne tenant pas compte des hommes. Les aliments ne sont pas des biens de consommation comme les autres. De ce fait, les exploitations qui les produisent doivent être considérées différemment des autres entreprises.
Nous partageons l’objectif que la politique agricole assure un revenu décent aux agriculteurs. À défaut, les exploitants cesseront leur activité.
Toutefois, l’objet de cette loi est non pas de proclamer ce principe, mais de mettre en place les moyens de l’appliquer. Or, comme je l’indiquais durant la discussion générale, il est illusoire de négliger la notion de compétitivité. La commission a donc émis un avis défavorable sur le présent amendement, qui vise précisément à supprimer ce mot de l’intitulé du titre II.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Nous souscrivons bien entendu à l’objectif d’assurer aux exploitants un revenu juste, qui permette de couvrir les coûts de production ; c’est même l’objet premier de ce texte. Toutefois, pour l’atteindre, il faut répondre à un certain nombre de questions essentielles qui se posent aujourd’hui à l’agriculture française, notamment celle de la compétitivité.
Il suffit de discuter avec des exploitants agricoles pour constater que l’une de leurs craintes majeures est la perte de compétitivité, surtout à l’égard de pays de l’Union européenne, en particulier l’Allemagne. La principale préoccupation des producteurs de fruits et légumes est de savoir comment parvenir à un coût de production à peu près comparable à celui des Allemands, comment réduire l’écart de compétitivité lié au prix des produits phytosanitaires ou à la structure salariale. Il est donc légitime qu’un titre complet du projet de loi soit consacré au renforcement de la compétitivité.
Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, j’ajoute que compétitivité ne veut pas dire productivisme. J’insiste vraiment sur ce point, qui a donné lieu à des discussions tout à fait intéressantes en commission : une exploitation de taille moyenne ou petite peut être compétitive. Renforcer la compétitivité suppose de tendre vers le développement durable, notamment par une réduction de la consommation d’énergie, ce qui n’est pas synonyme de productivisme.
La difficulté du débat provient de ce qu’une bonne part du revenu de certains agriculteurs est constituée de subventions : comment, dès lors, évaluer la compétitivité ?
« La Commission européenne a montré que 50 % des aides directes allaient à 7 % des récipiendaires. En France, les concours publics les plus élevés concernent les exploitations de grandes cultures où ils dépassent souvent 20 000 euros par actif (contre 11 600 euros en moyenne) alors qu’ils sont inférieurs à 5 000 euros dans les départements viticoles ou producteurs de fruits et légumes. Enfin, il ne peut pas être passé sous silence qu’en Europe 15 000 agriculteurs reçoivent des contribuables des aides de plus de 100 000 euros par an. »
Cette citation est tirée d’un rapport de l’institut Montaigne, qui ne passe pas pour être de gauche ! Comment calculer la compétitivité de l’agriculture quand les aides sont réparties d’une façon aussi inégalitaire et occupent une place décisive dans le revenu des agriculteurs ?
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 133, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 311-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 311 -1 A. - I. - La politique agricole prend en compte les fonctions économique, environnementale et sociale de l’agriculture et participe à l’aménagement du territoire, en vue d’un développement durable. Dans le respect des principes et règles de la politique agricole commune et notamment du principe de préférence communautaire, elle a pour objectifs :
« - l’installation en agriculture, notamment des jeunes, la pérennité des exploitations agricoles, leur transmission, et le développement de l’emploi dans l’agriculture, dont le caractère familial doit être préservé, dans l’ensemble des régions françaises en fonction de leurs spécificités ;
« - l’amélioration des conditions de production, du revenu et du niveau de vie des agriculteurs ainsi que le renforcement de la protection sociale des agriculteurs tendant à la parité avec le régime général ;
« - la revalorisation progressive et la garantie de retraites minimum aux agriculteurs en fonction de la durée de leur activité ;
« - la production de biens agricoles, alimentaires et non alimentaires de qualité et diversifiés, répondant aux besoins des marchés nationaux, communautaires et internationaux, satisfaisant aux conditions de sécurité sanitaire ainsi qu’aux besoins des industries et des activités agroalimentaires et aux exigences des consommateurs et contribuant à la sécurité alimentaire mondiale ;
« - le développement de l’aide alimentaire et la lutte contre la faim dans le monde, dans le respect des agricultures et des économies des pays en développement ;
« - le maintien de la capacité exportatrice agricole et agroalimentaire de la France vers l’Europe et les marchés solvables en s’appuyant sur des entreprises dynamiques ;
« - le renforcement de l’organisation économique des marchés, des producteurs et des filières dans le souci d’une répartition équitable de la valorisation des produits alimentaires entre les agriculteurs, les transformateurs et les entreprises de commercialisation ;
« - la valorisation des terroirs par des systèmes de production adaptés à leurs potentialités et des modes de commercialisation courts ;
« - le maintien de conditions favorables à l’exercice de l’activité agricole dans les zones de montagne conformément aux dispositions de l’article L. 113-1 ;
« - la préservation des ressources naturelles et de la biodiversité, et l’entretien des paysages ;
« - l’entretien des cours d’eau et la prévention des inondations et de l’érosion des sols ;
« - la poursuite d’actions d’intérêt général au profit de tous les usagers de l’espace rural ;
« - la promotion et le renforcement d’une politique de la qualité et de l’identification de produits agricoles ;
« - le renforcement de la recherche agronomique et vétérinaire dans le respect des animaux et de leur santé ;
« - le développement équilibré des zones rurales.
« La politique agricole prend en compte les situations spécifiques à chaque région, notamment aux zones de montagne, aux zones humides précisément délimitées dont les particularités nécessitent la mise en place d’une politique agricole spécifique, aux zones défavorisées et aux départements d’outre-mer, pour déterminer l’importance des moyens à mettre en œuvre pour parvenir à ces objectifs. La politique forestière participe de la politique agricole dont elle fait partie intégrante.
« La politique agricole est mise en œuvre en concertation avec les organisations professionnelles représentatives et avec les collectivités territoriales en tant que de besoin. »
La parole est à M. Roland Courteau.
Avant d’aborder le contenu du titre II, il est primordial, selon nous, de définir les objectifs de la politique agricole française.
Nous avons beaucoup discuté, lors de l’examen du titre Ier, de la définition de la politique de l’alimentation. Mais cette politique ne fait pas tout ! Nous en convenons, l’orientation de la politique agricole vers l’alimentation permet de lui donner une nouvelle légitimité. Cependant, elle ne doit pas se résumer à une seule politique alimentaire. Sinon, nous risquons de perdre de vue l’importance du maintien d’un maillage agricole de nos territoires, de la relocalisation des productions et du renouvellement des générations d’agriculteurs, gages du développement local et de la vitalité des zones rurales et des zones en difficulté, dans lesquelles l’activité agricole est bien souvent la dernière source d’emplois.
Nous risquons également d’oublier l’importance des modes de production durable, de la traçabilité et de la qualité des produits agricoles, de la préservation des ressources naturelles, de la biodiversité et de l’entretien des paysages chers aux consommateurs.
Nous risquons enfin de reléguer au second plan les conditions de production, le revenu et le niveau de vie des agriculteurs, qui sont, il faut le souligner une nouvelle fois, le premier maillon de la chaîne, sans lequel il ne peut y avoir de politique de l’alimentation ambitieuse.
Nous proposons donc de réaffirmer que la politique agricole doit prendre en compte les fonctions économique, environnementale et sociale de l’agriculture.
Sans doute nous objectera-t-on que les dernières lois d’orientation agricole, notamment celle de 1999, ont déjà défini les objectifs de la politique agricole. Mais, entre-temps, il y a eu la loi d’orientation d’agricole de janvier 2006, dont l’objectif affiché était de faire des exploitations agricoles des entreprises comme les autres. Cette dernière loi a d’ailleurs tellement porté ses fruits que toutes les filières agricoles sont aujourd’hui en crise et que nous devons légiférer de nouveau afin de répondre à la situation…
Nous tenons à réaffirmer ici que les exploitations agricoles ne sont pas des entreprises comme les autres et que les denrées alimentaires ne sont pas des marchandises comme les autres.
En fait, nous demandons aux agriculteurs beaucoup plus qu’un simple acte de production ; nous leur demandons d’assurer notre sécurité alimentaire, de nous fournir des produits sûrs et sains, d’aménager l’espace, de préserver les prairies, de débroussailler les sous-bois pour prévenir les incendies de forêt, etc. La politique agricole devrait donc aussi permettre d’assurer aux agriculteurs une rémunération pour tous ces services rendus à la société.
Cet amendement reprend des dispositions toujours en vigueur de l’article 1er de la loi d’orientation agricole de 1999. Je ne vois pas l’intérêt de les inscrire une deuxième fois dans la loi. La commission émet un avis défavorable.
Sur la recommandation du rapporteur et du président de la commission, je me suis penché sur la loi d’orientation agricole de 1999. Même si ma famille politique n’est pas à l’origine de ce texte, ses orientations me conviennent très bien…
Sourires
Je ne vois pas, moi non plus, la nécessité d’inscrire de nouveau les dispositions en question dans la loi. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 31 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mme Henneron et MM. Vasselle, Beaumont, Pierre, Doublet, Laurent, Bécot et Bailly, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2011, le financement de la couverture sociale des professionnels, chefs d'entreprises et des salariés travaillant dans les secteurs de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture sera assuré par la perception d'une taxe prélevée sur le chiffre d'affaires des structures de vente de produits alimentaires vendus sur le territoire national. Le taux de cette taxe sera fixé chaque année par le Parlement lors du vote du budget de la Sécurité sociale.
La parole est à M. Jackie Pierre.
La situation financière particulièrement préoccupante des professionnels de la pêche et de la plupart des exploitations agricoles, quel que soit le domaine de production, nécessite que soit organisée une réduction drastique des charges qui pèsent sur chacune des exploitations et entreprises.
Par-delà la baisse très importante des revenus, la diminution régulière du nombre des exploitants agricoles et des pêcheurs rend insupportable, pour ceux-ci, le financement des pensions de retraite de leurs aînés, ce qui justifie l'intervention de la solidarité nationale.
Par le présent amendement, il est proposé que la couverture de l'ensemble des charges sociales et prestations soit assurée grâce à la création d’une nouvelle taxe sur l'ensemble des produits alimentaires vendus sur le territoire national.
En reportant les charges sur la consommation, nous pourrions obtenir des gains de compétitivité.
Je souligne toutefois que les cotisations sociales ne représentent que 20 % des recettes de la protection sociale agricole, le reste étant constitué de transferts en provenance d’autres régimes et de fiscalité affectée.
La commission ne saurait se prononcer favorablement sur cet amendement, en raison de l’importance de ses implications. Tout en reconnaissant qu’il soulève une question de fond que l’on ne peut éluder, elle demande son retrait.
L’avis du Gouvernement est très défavorable. En effet, je ne crois pas opportun de créer une nouvelle taxe sur la consommation.
Monsieur le ministre, convenez que la situation financière de la Mutualité sociale agricole est dramatique ! Sa dette s’élève actuellement à quelque 8 milliards d’euros et elle ne cesse d’augmenter. La MSA se borne à acquitter les intérêts, sans jamais commencer à rembourser le capital. Cela ne peut pas durer éternellement !
Aucun gouvernement, de droite comme de gauche, n’a jamais eu le courage politique de prendre à bras-le-corps ce problème, qui traîne depuis des années. Finalement, les caisses de la MSA essaient de gérer les choses au jour le jour. Les prestations qu’elles servent sont nettement moins favorables que celles du régime général, ce qui induit des inégalités de traitement insupportables. La responsabilité de cette situation n’incombe pas aux actuels actifs agricoles.
Fils d’agriculteurs, j’ai fait carrière dans l’enseignement. Il aurait été logique que je cotise à la caisse de retraite des agriculteurs plutôt qu’à celle des enseignants, puisque ce sont mes parents qui ont financé mes études. Or ils ont touché une retraite de misère ! Ainsi, la solidarité intergénérationnelle n’a pas joué entre mes parents et moi comme elle l’aurait dû, au seul motif que j’avais pris une autre orientation professionnelle.
Il faut mettre fin aux disparités de traitement entre les ressortissants des différentes caisses, le rapport entre actifs et inactifs pouvant beaucoup varier d’une profession à une autre pour des raisons historiques.
Puisque nous allons bientôt aborder la question des retraites dans un cadre plus général, je retire pour l’heure cet amendement d’appel.
L'amendement n° 31 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 255, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une conférence annuelle sur les prix rassemblant producteurs, fournisseurs et distributeurs est organisée annuellement pour chaque production agricole par l'interprofession compétente. L'ensemble des syndicats agricoles sont conviés à y participer. Cette conférence donne lieu à une négociation interprofessionnelle sur les prix destinée, notamment, à fixer un niveau de prix indicatif rémunérateur.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
Le 27 octobre 2009, à Poligny, dans le Jura, Nicolas Sarkozy expliquait très justement que « la crise révèle […] des défaillances nationales réelles dans la répartition de la valeur au sein de nos filières agricoles. Entre le mois de septembre 2008 et le mois de septembre 2009, l’indice des prix à la production des produits agricoles a baissé de 20 %. Sur la même période, les prix à la consommation des produits alimentaires ont baissé de 1 %. Cet écart est sans précédent. Cet écart est inacceptable ! Il révèle une répartition inéquitable de la valeur ajoutée au sein des filières. Cet écart met notre production alimentaire en danger. »
Comment ne pas partager ce constat ? Le problème de fond qui se pose à l’ensemble des agriculteurs et des pêcheurs est clairement identifié : l’absence de garantie d’un prix de vente rémunérateur pour leur production. Celui que connaissent les consommateurs l’est également : leur pouvoir d’achat est sérieusement érodé par le coût de l’alimentation.
Si tout le monde est d’accord sur le fait que les premier et dernier maillons de la chaîne de l’alimentation ne s’y retrouvent pas, alors que les marges des intermédiaires explosent, comment expliquer que la loi n’aborde pas cette question ? Faut-il se contenter des engagements pris par la grande distribution il y a quelques jours ? Le présent texte se limite à mettre en place une contractualisation qui existe déjà en partie.
Par cet amendement, nous proposons que soit arrêté à l’échelon interprofessionnel, dans le cadre d’une conférence annuelle sur les prix rassemblant producteurs, fournisseurs et distributeurs, un niveau de prix indicatif rémunérateur.
De plus, nous demandons que l’ensemble des syndicats agricoles puissent participer à cette conférence. Ainsi, les syndicats minoritaires, qui ne siègent pas dans les interprofessions mais sont néanmoins représentatifs d’une partie de la profession agricole – on l’a vu notamment dans le secteur laitier, où le mouvement de contestation a mis au jour les insuffisances du syndicat majoritaire, dans lequel de nombreux producteurs ne se reconnaissent plus –, pourraient au moins participer à cette négociation annuelle.
L’argument selon lequel les prix seraient alors tirés vers le bas n’est pas recevable. En effet, ils le sont déjà en l’absence de régulation. Un tel dispositif constituerait, au contraire, un filet de sécurité pour la profession.
Ce dispositif figurait déjà dans la proposition de loi déposée par notre collègue député André Chassaigne qui a été discutée à l’Assemblée nationale en décembre dernier.
Débattre des prix incombe plutôt aux interprofessions, qui ont la possibilité d’élaborer des indices de tendance des marchés. Ensuite, la fixation des prix relève des relations contractuelles entre producteurs et acheteurs, que le projet de loi organise.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Il s’agit d’un sujet majeur, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir tout au long de nos débats.
Comment inscrire dans les contrats, qui sont l’un des éléments clés de ce texte, des indications sur la situation du marché ? L’idée d’une entente sur les prix est tout à fait contraire à la législation communautaire, et mettre en œuvre la mesure préconisée par M. Le Cam nous vaudrait immédiatement des sanctions.
Le maximum que l’on puisse faire, c’est fixer des indices de tendance des marchés. Le Président de la République et moi-même en avons encore discuté avec M. Dacian Cioloş voilà quelques heures. Une telle possibilité est prévue à l’alinéa 33 de l’article 7 du projet de loi. Nous aurons l’occasion d’en reparler.
Je crois vraiment que le texte de la commission représente le bon équilibre entre ce qui est possible dans le cadre du droit communautaire et ce qui est souhaitable pour avoir des références de prix en vue de la fixation du niveau des contrats.
L'amendement n'est pas adopté.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 25 mai 2010 :
À quatorze heures trente :
1. Suite du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (procédure accélérée) (n° 200, 2009-2010).
Rapport de M. Gérard César et M. Charles Revet, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (n° 436, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 437, 2009-2010).
De dix-sept heures à dix-sept heures quarante-cinq :
2. Questions cribles thématiques : « Pouvoir et médias ».
À dix-huit heures, le soir et la nuit :
3. Suite du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (procédure accélérée) (n° 200, 2009-2010).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le vendredi 21 mai 2010, à une heure trente.