Intervention de Michel Mercier

Réunion du 11 octobre 2005 à 16h00
Prorogation du mandat des sénateurs des conseillers municipaux et généraux renouvelables en 2007 — Adoption d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

Photo de Michel MercierMichel Mercier :

... qui apporte, me semble-t-il, une contribution intéressante à la théorie du suffrage indirect.

Mais il me faut, à cet instant, rappeler les termes du troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution : « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret. »

Pour le Conseil constitutionnel, donc, des élus municipaux, voire départementaux, arrivant en fin de mandat n'auraient plus suffisamment de légitimité pour élire des sénateurs.

Cette position est extrêmement intéressante : les conseillers municipaux fraîchement confortés par la sanction du suffrage universel sont pleinement légitimes et peuvent élire des sénateurs, mais, plus ils se rapprochent du terme de leur mandat, plus l'on serait en droit de se demander si le peuple souverain éprouverait encore l'envie de leur déléguer son pouvoir électoral. C'est un vrai problème !

Le Gouvernement, suivant en cela le Conseil constitutionnel, a donc proposé de reporter d'un an les élections sénatoriales et a reconnu, au travers du projet de loi organique, que le suffrage indirect ne trouvait sa pleine légitimité que lorsque son expression était la plus proche possible de l'élection des grands électeurs au suffrage universel.

Le caractère indirect du suffrage reste donc toujours second par rapport au caractère universel qui, lui, est primordial. Voilà une façon très originale d'appliquer l'article 3 de la Constitution et de lui donner tout son sens juridique.

Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre délégué, je vous poserai quelques questions.

En choisissant pour 2008 la solution suggérée par le Conseil constitutionnel, vous appliquez un principe de droit, vous ne faites pas le choix d'une commodité de calendrier. Dans ce cas, vous devez approuver la proposition de M. le rapporteur : il faut toujours être proche de l'élection municipale. C'est ce que nous proposera M. Hyest lorsqu'il défendra les amendements de la commission, que nous soutiendrons pour cette raison juridique.

Mais, dès lors que l'on fait sienne cette théorie de la plus grande proximité possible par rapport à l'expression du suffrage universel, ne faut-il pas aller plus loin et s'interroger sur la composition même du corps électoral sénatorial ? Celui-ci ne doit-il pas être la photographie la plus exacte de ceux qui ont élu les conseils municipaux ? Est-ce qu'un jour le Conseil constitutionnel, vers le mois de juillet, par exemple, quand personne ne s'y attendra, ne nous rappellera pas à cette obligation de respecter le plus possible ce suffrage universel exprimé dans les élections municipales et en quelque sorte transmuté à travers la désignation de ces électeurs du second degré ?

Ce sont là des questions sur lesquelles nous devrons réfléchir, notamment lorsqu'il sera question de la composition du corps électoral sénatorial. On ne pourra plus faire, alors, abstraction de cette position du Conseil constitutionnel.

Mais enfin, à chaque jour suffit sa peine ! Aujourd'hui, vous nous proposez, monsieur le ministre délégué, de suivre les observations du Conseil constitutionnel, de faire en sorte que les conseils municipaux et généraux qui éliront les sénateurs soient le plus près possible de la source originelle du pouvoir, c'est-à-dire de leur propre élection au suffrage universel. Nous y souscrivons parce que c'est une garantie de démocratisation du Sénat. C'est aussi, pour le Sénat, la garantie qu'il trouve bien la source de son pouvoir dans le suffrage universel direct tel qu'il est exprimé lors des élections locales.

Voilà pourquoi, monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous apporterons notre soutien aux propositions du Gouvernement, largement améliorées par celles du rapporteur.

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