Avec l'article 16, on se situe entre 200 millions et 250 millions d'euros. L'État fait donc une grande partie du chemin.
Il est assez naturel de se poser des questions sur un certain nombre de non-compensations compte tenu du caractère même des dépenses ; nous devrons certainement, j'en suis d'accord, aller plus loin, mais il ne faut pas faire accroire qu'au travers de cet article l'État se dégagerait de ses responsabilités en matière de compensation des charges.
Vous indiquez dans votre rapport que la multiplication des dispositifs d'exonération et le caractère non systématique de leur compensation ne sont pas acceptables, et vous proposez en conséquence la suppression de l'article 16.
J'en conviens volontiers, la situation n'est pas totalement satisfaisante.
La loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a donné aux seules lois de financement de la sécurité sociale la capacité de prévoir - et tel est bien l'objet du débat - qu'une mesure d'exonération ne serait pas compensée.
Cette réforme, à laquelle vous avez pris, monsieur le rapporteur, une très large part, représente une avancée importante, notamment en termes de transparence, pour la sécurité sociale.
Il faut sans doute aller plus loin et ouvrir une nouvelle réflexion sur l'opportunité de confier au PLFSS le monopole de la création des dispositifs d'exonération ou, au moins, de confirmation systématique des décisions législatives prises par ailleurs.
C'est ce que vous avez proposé, monsieur le rapporteur, et le Gouvernement est prêt à y travailler : je vous l'ai dit lors de mon discours introductif et je vous le confirme.
Je suis également convaincu qu'il serait utile, dès que sont créées une exemption d'assiette ou une exonération ciblée, que soit précisément défini le financeur de cette « niche ». Trop souvent, le processus de décision déconnecte la mesure dépensière et, au bout du compte, le budget qui la porte, ce qui est déresponsabilisant.
Pour une bonne gestion des finances publiques, il faut déterminer immédiatement qui assurera la charge financière de la niche ou de l'exonération. Nous y veillerons pour tous les projets à venir.
Je pense aussi - et je rejoins en cela les propos tenus par Philippe Marini lors du débat sur les prélèvements obligatoires, voilà quelques jours - qu'il convient d'évaluer les effets économiques et sociaux de ces mécanismes. Il me paraît alors souhaitable d'adopter deux principes de bonne gestion.
Le premier consiste à fixer systématiquement une durée limitée à ces mécanismes, et ce pour deux raisons : d'une part, il serait ainsi possible de rappeler que la règle est celle de l'assujettissement de droit commun, les exemptions d'assiette ou exonérations spécifiques devant demeurer l'exception ; d'autre part, il est difficile de revenir sur ce qui a été accordé sans limite de durée. On doit pouvoir modifier les mécanismes au fur et à mesure de la montée en charge des dispositifs.
Le second principe est celui d'une évaluation des dispositifs actuels. Je ne serais pas opposé à une revue générale des exonérations, comme il en existe en d'autres domaines. Les parlementaires, notamment les sénateurs, sont également libres de se saisir de ce sujet. Cela pourrait conduire à fixer un terme à certains dispositifs, tout en se donnant un délai. Comme je le disais hier, il y a bien évidemment, derrière les dispositifs, des réalités.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avec l'article 16, il est demandé au Parlement d'accepter, après ces clarifications nécessaires, la non-compensation de quelques mesures. À cet égard, l'adoption des trois amendements identiques brouillerait la bonne application du dispositif législatif qui prévoit que les mesures d'exonération des cotisations de sécurité sociale ou de réduction de leur assiette doivent soit être compensées, soit donner lieu au vote d'une disposition ad hoc dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
L'adoption de ces amendements ne pourrait qu'inciter à la poursuite de tentatives d'exclusion de l'assujettissement aux cotisations de sécurité sociale, sans inscription des crédits de compensation nécessaires en loi de finances.
Or, dans ce domaine, l'exception est nécessaire pour obtenir une application très stricte de la règle. Et vous pouvez convenir que, avec l'apurement de la dette de l'État au régime général, la compensation des allégements généraux et des exonérations sur les heures supplémentaires, j'ai avancé sur la clarification des relations entre l'État et la sécurité sociale.
C'est pourquoi, au bénéfice de ces explications, je me permets de vous présenter un amendement qui vise à rétablir le texte initial proposé par le Gouvernement.
L'Assemblée nationale a supprimé du champ de non-compensation, d'une part, les attributions gratuites d'actions et, d'autre part, le supplément d'intéressement et le supplément de réserve spéciale de participation, au motif que ces revenus, qui ne présentent pas de caractère aléatoire, doivent être traités comme des revenus d'activité, leur exonération de cotisations devant dès lors être compensée par l'État. Certes, ces revenus, supplément d'intéressement et attribution gratuite d'actions, sont distribués à l'occasion de la relation de travail ; mais la commission des finances a pour sa part estimé que ces dispositifs se rattachaient à l'épargne et non aux salaires.
Pour le Gouvernement, les attributions d'actions gratuites, prévues par l'article 83 de la loi de finances pour 2005, présentent une spécificité. Tout d'abord, le délai de portage qui caractérise les actions gratuites par rapport à une rémunération monétaire justifie un traitement particulier dans le cadre de l'application du principe de compensation.
Par ailleurs, à la suite de l'adoption de l'amendement par les députés, ces revenus sont destinés à participer au financement de la sécurité sociale au travers des contributions créées par l'article 9 E du projet de loi de financement de la sécurité sociale en sus de l'assujettissement déjà existant aux 11 % de CSG et de CRDS. Hier, nous avons voté une contribution spécifique de 10 % pour les distributions gratuites d'actions. La création d'une contribution employeur de 10 % sur ce dispositif et sur les stock-options, ainsi qu'une contribution salariale dont vous avez voté la non-rétroactivité, permet de procurer à la sécurité sociale de nouvelles recettes assises sur ces revenus.
Concernant l'exclusion de l'assiette des cotisations de sécurité sociale des sommes allouées au titre du supplément d'intéressement, du supplément de réserve spéciale de participation et de l'intéressement de projet, le code du travail prévoit que ces sommes ne doivent se substituer à aucun des éléments de rémunération antérieurs donnant lieu à cotisations, ce qui justifie qu'elles puissent être exclues du champ de la compensation des pertes de recettes subies par la sécurité sociale, d'autant que le calcul de la compensation serait extrêmement difficile à mettre en oeuvre. Il n'est d'ailleurs ni logique ni possible de distinguer le supplément d'intéressement de l'intéressement lui-même, qui n'est pas compensé. Or dans ce cas, on demanderait une compensation du supplément d'intéressement.
Dans les deux cas - l'attribution gratuite d'actions et le supplément d'intéressement - il s'agit donc d'éléments de revenus nouveaux, dont on ne connaît pas par définition l'assiette préalable et pour lesquels on estime raisonnablement que la substituabilité aux salaires est faible, même si nous sommes vigilants sur ce dernier point.
C'est pourquoi il est légitime de les faire figurer dans l'article 16, c'est-à-dire de ne pas compenser. C'est ce qu'a proposé le Gouvernement dans l'esprit de transparence qui le guide en ce domaine. Vous trouverez une nouvelle démonstration de cette transparence dans le rapport sur les dispositifs affectant l'assiette des cotisations et contributions, qui sera prochainement transmis au Parlement en application de la loi du 20 décembre 2002.
Je sais, monsieur Vasselle, combien vous êtes attaché à la clarification des relations financières entre le budget de l'État et le budget de la sécurité sociale. Je partage votre préoccupation, et c'est pourquoi, sans hypocrisie ou dissimulation, je souhaite définir le plus précisément possible ce qui doit être compensé par l'État, lequel, dans ce domaine, remplit ses obligations et assume ses responsabilités...