À la suite de l'intervention de mon collègue Claude Domeizel, je limiterai mon propos à la situation que connaît et devrait connaître le Fonds de financement des prestations sociales agricoles créé par l'article 40 de la loi de finances pour 2004.
La situation actuelle et le devenir du FFIPSA sont des sujets majeurs qui, depuis plus de quatre ans, sont source de grandes inquiétudes au sein du monde rural, chez les 27 000 délégués et 2 000 administrateurs de la MSA, mais également sur nos travées.
Conformément aux dispositions de l'article L. 731-4 du code rural, le FFIPSA dispose de diverses sources de financement, notamment les cotisations des assujettis, la part de la CSG affectée à ce régime, les financements publics que sont les impôts, taxes et amendes affectés, ainsi que les droits sur la consommation de tabac, la subvention d'équilibre du budget d'État, le versement du solde de compensation démographique, les contributions et subventions de la Caisse nationale des allocations familiales, du Fonds spécial invalidité et du Fonds de solidarité vieillesse.
Le montant de ces ressources s'élevait à 15 milliards d'euros au titre de l'exercice 2006. Dans l'article 21 du présent projet de loi, le Gouvernement indique que le FFIPSA, déjà déficitaire en 2007, le sera également en 2008, avec un solde négatif de 2, 7 milliards d'euros, soit, comme le rappelle notre rapporteur M. Vasselle, un montant encore supérieur à ceux qui ont été enregistrés en 2006 et 2007, respectivement 1, 3 milliard et 2, 3 milliards d'euros.
Ainsi, dès l'année prochaine, le déficit cumulé atteindra 8, 3 milliards d'euros et, si aucune mesure n'est prise, 15 milliards d'euros, auxquels s'ajoute le poids des taux d'intérêt.
À la fin de la législature, cette dette représentera plus de 80 % du fonds !
La situation est telle que le FFIPSA ne peut compléter le financement des prestations agricoles gérées par les caisses de la MSA qu'en demandant à la caisse centrale de la mutuelle de contracter un emprunt de plus de 3, 1 milliards d'euros afin de financer son propre découvert.
Or, comme le rappelle la Cour des comptes à juste titre, le FFIPSA ne peut pas faire face à ses engagements !
Ce déficit, ne l'oublions pas, est très directement lié au non-versement par l'État de la subvention d'équilibre versée au BAPSA et supprimée lors du passage au FFIPSA.
Je rappelle également que, dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, notre rapporteur M. Vasselle estimait que, malheureusement, cette situation constituait non pas une mauvaise passe, mais bien un problème pérenne. En séance, il avait indiqué que ces difficultés confirmaient que le FFIPSA ne pourrait pas atteindre l'équilibre sans subvention d'État. Il avait raison, mais il n'a pas été entendu à l'époque. Du reste, il ne l'est toujours pas aujourd'hui.
En effet, le Gouvernement, comme le précédent, s'abrite derrière une règle n'autorisant l'État à intervenir pour rétablir l'équilibre budgétaire que « le cas échéant ».
Or la situation a d'ores et déjà une incidence sur le quotidien des assurés sociaux.
Ainsi, à la suite de l'avis rendu, le 29 mai dernier, par le comité d'alerte de l'assurance maladie, la Mutualité sociale agricole a décidé, le 19 juin, d'adopter un plan d'économies draconien, représentant un montant prévisionnel de 1, 36 milliard d'euros. Les représentants de la Mutualité sociale agricole que nous avons récemment rencontrés nous ont fait part de leurs inquiétudes.
Face aux conséquences du désengagement répété de l'État, à terme, ce sont certains volets de la politique développée par les caisses de la MSA, notamment tout ce qui touche à la prévention, mais également les investissements effectués dans le secteur de la petite enfance, qui pourraient se voir remis en cause.
En la matière, il ne suffit pas de déclarer, lors d'une campagne électorale, que le montant de la plupart des pensions versées n'est pas « digne de la reconnaissance qu'une nation doit à ses agriculteurs et qu'une revalorisation significative est indispensable ». Encore faut-il prendre les mesures idoines. Or, cette année encore, tel n'est pas le cas.
Reste que, cette année, l'État apurera la dette de l'ancien BAPSA, soit 619 millions d'euros. Il était temps ! Mais tout en contribuant à réduire d'autant le plafond d'avance de trésorerie pour 2008, cette mesure est bien insuffisante au regard des défis que doit relever le secteur.
Le Gouvernement nous assure que le FFIPSA est un de ses sujets de préoccupation majeurs. À cet égard, il a pris l'engagement de trouver, dès 2008, des solutions qui soient pérennes et non pas « un simple bricolage », comme l'affirmait récemment le ministre du budget. Ainsi, rendez-vous est pris pour le premier semestre prochain.
Néanmoins, chacun sait que la Cour des comptes, dans son dernier rapport, propose de supprimer le régime agricole, considérant que ce dernier ne dispose ni des actifs ni des ressources propres lui permettant de faire face à ses engagements.
Certes, les ressortissants du régime agricole ne peuvent assumer seuls ces déficits. En outre, le recours à l'emprunt, considérablement alourdi par les taux d'intérêt, ne constitue pas une solution raisonnable.
C'est pourquoi j'interroge le Gouvernement : quelle est donc la logique qu'il poursuit et que compte-t-il faire pour garantir un équilibre durable des comptes du régime des exploitants agricoles ? Entend-il procéder à la suppression du FFIPSA ? Envisage-t-il de trouver des recettes nouvelles et, le cas échéant, lesquelles ? Veut-il augmenter l'effort contributif des exploitants agricoles ?
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas demeurer plus longtemps inerte face à l'ampleur des enjeux.
Soutiendrez-vous les acteurs de la protection sociale agricole, qui font preuve de responsabilité, de détermination pour le bien commun et qui oeuvrent pour une protection sociale solidaire et conforme aux principes édictés voilà soixante ans ?
Ou bien allez-vous inscrire le régime social agricole dans la logique purement individuelle selon laquelle chacun recevra en fonction de ses moyens et non plus de ses besoins ?
En tout état de cause, cet article n'offre aucune perspective d'amélioration. Votre refus coupable de verser une subvention d'équilibre ainsi que vous y autorise la loi est inacceptable, et nous le condamnons avec détermination.