Intervention de François Trucy

Réunion du 24 février 2010 à 14h30
Jeux d'argent et de hasard en ligne — Article 39, amendements 139 78

Photo de François TrucyFrançois Trucy, rapporteur :

La commission de la culture propose d’abaisser de 0, 5 % la fiscalité sur les paris hippiques et d’augmenter de 0, 5 % celle qui est prévue pour les paris sportifs. L’objectif est d’atténuer l’écart entre les prélèvements au profit des filières du sport et du cheval et d’améliorer le TRJ, le taux de retour au joueur, du pari hippique. L’attractivité accrue du pari hippique ainsi obtenue devrait permettre de limiter les effets sur la filière équine de l’ouverture à la concurrence, dont certains redoutent qu’elle n’entraîne une fuite des joueurs vers les paris sportifs.

L’adoption de cet amendement, qui entend ainsi favoriser la filière équine, créerait en fait d’importantes difficultés.

D’une part, l’amendement rompt la logique, privilégiée par le Gouvernement et approuvée par la commission, de simplification, d’harmonisation et d’équité concurrentielle entre les types de paris.

D’autre part, il conduit obligatoirement à une diminution des recettes de l’État, l’assiette des paris n’étant pas la même. Le chiffre d’affaires des paris hippiques représente 9 milliards d’euros. Une diminution du taux de prélèvement de 0, 5 % représente un manque à gagner de 450 millions d’euros. Parallèlement, le chiffre d’affaires des paris sportifs n’atteint que 3 milliards d’euros, un milliard d’euros pour le PMU et la Française des jeux et 2 milliards d’euros présumés et d’origine inconnue. Une augmentation du taux de prélèvement de 0, 5 % sur cette somme ne rapporterait que 150 millions d’euros supplémentaires.

Il est donc possible de chiffrer « à la louche » à 300 millions d’euros la perte qui résulterait d’une telle mesure pour les recettes de l’État. D’ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, vous le savez bien puisque, dans la seconde partie de cet amendement, vous prévoyez un gage visant à compenser la perte de recettes pour l’État.

Dans un souci de neutralité, on ne peut placer sur le même plan la fiscalité, qui est la même pour les paris hippiques et sportifs, et les redevances, dont l’objet est de soutenir une filière en fonction de ses besoins.

À qui profiterait une telle modification ? Certainement pas à l’État ! S’agit-il d’améliorer le TRJ ? Dans ce cas, cette mesure est en contradiction avec la philosophie générale de ce projet de loi ! Le Gouvernement a en effet souhaité plafonner le TRJ – ce qui ne satisfera évidemment pas tout le monde –, car il pense, à tort ou à raison, que son augmentation constituerait un facteur d’addiction.

Par ailleurs, pourquoi une telle baisse de la fiscalité profiterait-elle aux comptes du PMU ? Le dynamisme actuel de celui-ci lui permet déjà d’envisager d’autres chantiers, y compris celui du poker.

Par conséquent, monsieur le rapporteur pour avis, la commission des finances vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

L’amendement n° 139, déposé par le groupe CRC-SPG, et l’amendement n° 78, qu’a défendu M. Marc, ont à peu près le même objet, relever le pourcentage du prélèvement sur les mises, en matière de fiscalité applicable aux paris hippiques et sportifs, le premier prévoyant simplement un taux légèrement supérieur à celui qui est proposé dans le second.

Comme je le précise dans mon rapport, le régime fiscal relève d’un équilibre délicat, car il doit prendre en compte de nombreux paramètres. Le taux de 5, 7 % a été calibré pour préserver à la fois les recettes de l’État et la viabilité économique des opérateurs de jeux. Il est en effet indispensable de garantir un minimum d’attractivité à l’offre légale. Les opérateurs doivent pouvoir réaliser une marge et offrir, sur certains jeux, un TRJ attractif, faute de quoi les joueurs se tourneront immanquablement vers les sites illégaux, par définition non fiscalisés.

La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements n° 139 et 78.

L’amendement n° 79 tend à relever de 1, 8 % à 3 % le taux de prélèvement sur les mises en matière de fiscalité applicable aux jeux de cercle en ligne. Or, je le répète, le régime fiscal relève d’un équilibre délicat.

S’agissant du poker, il faut également tenir compte du modèle économique particulier de ce type de jeu. Relever à ce point la fiscalité compromettrait sérieusement la viabilité économique des opérateurs et les dissuaderait sans doute de solliciter l’agrément. Dès lors, les joueurs se tourneraient vers les sites illégaux sur lesquels ils jouaient précédemment, dans un secteur qui, faut-il le rappeler, enregistre une clientèle croissante.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

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